Albert Kirchner

Albert Kirchner, connu aussi sous le pseudonyme de Léar, né à Hambourg le [1] et mort à Paris 14e le [2], est un photographe, cinéaste et inventeur français.

Pour les articles homonymes, voir Kirchner et Lear.

Ne pas confondre avec Albert Emil Kirchner (1813-1885), un peintre allemand.

Albert Kirchner
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Albert Jean Fritz Kirchner
Pseudonyme
Léar
Nationalité
Activités
Œuvres principales

Personnage mystérieux, il est connu autant pour son répertoire grivois (il est l'auteur du plus ancien film érotique qui nous soit parvenu) que pour son engagement dans la propagande religieuse (il est l'auteur du premier film sur la Passion du Christ).

Biographie

Albert Jean Fritz Kirchner est originaire de Hambourg, en Allemagne. En 1883, il commence son activité de photographe à Paris, en fondant la société en nom collectif « Kirchner dit Léar et Cie », au capital de 17 000 francs, au no 50 de la rue Saint-Lazare[3].

Le pornographe

En 1892, il est inculpé d'outrages aux bonnes mœurs: « à l'aide d'un nombreux personnel, il racolait des filles mineures qu'il plaçait, dans des poses non équivoques, devant son objectif. Puis il faisait vendre par des courtiers très sûrs ces articles de Paris, qui étaient très demandés ». Il est condamné à 15 mois de prison, 500 francs d'amende, et 5 ans d'interdiction de territoire[4].

En 1894, il est domicilié au no 35 de la rue Grange-aux-Belles. En 1896, il est engagé comme opérateur chez Eugène Pirou[5],[6], un photographe renommé, auteur d’albums de Visions d’art contenant des clichés de jolies Parisiennes plus ou moins déshabillées.

Enthousiasmé par l'invention du procédé Lumière en 1895, Albert Kirchner adapte en 1896 une pièce de théâtre très en vogue à l'Olympia, Le Coucher de la mariée, et en tire le plus ancien film érotique qui nous soit parvenu[7],[8], avec l’actrice Louise Willy. Ce film est exploité par Pirou au Café de la paix, avec un appareil Joly-Normandin, et connaît un grand succès.

En 1897, Albert Kirchner dépose, avec Paul Anthelme, un brevet[9] pour un « appareil chronophotographique perfectionné ». L'appareil est lancé sous le nom « Biographe français », et est fabriqué dans les ateliers de M. Héry (un ancien ouvrier d'Henri Joly), en format 35 et 60 mm[10],[11]. Albert Kirchner installe l'appareil dans les sous-sols de l’Olympia, au musée Oller, et effectue des projections qui servent d’intermède au spectacle. Le Biographe français fonctionne également au Café Frontin, 6, boulevard Poissonnière.

Le catholique

Au printemps 1897, Albert Kirchner tourne avec Georges Michel Coissac une Passion du Christ[6] pour la Maison de la Bonne Presse. Tourné à Paris, en douze tableaux vivants, d'une durée de 5 minutes, il est le premier film de l'histoire du cinéma fondé sur la vie du Christ[8]. Malgré ou grâce à la polémique qui accompagne sa sortie (« faut-il représenter le Christ ? »), le film est montré en France et à l'étranger, et il influence profondément les réalisateurs ultérieurs : en , le révérend Thomas F. Dixon Jr. (par ailleurs romancier et auteur de The Clansman, dont D. W. Griffith tire son film Naissance d'une nation[12]) s'en sert dans ses prêches. Aujourd'hui, le film est toujours porté disparu.

En 1897 encore, Albert Kirchner réalise une douzaine de scènes comiques dans le goût des premiers films Lumière : Bataille d’oreillers, L’arroseur arrosé, etc.

En et , il dépose deux nouveaux brevets pour des appareils également baptisés « Biographe français ».

Entre les deux dates, Albert Kirchner accompagne le Père Bailly dans un pèlerinage en Terre sainte, d’où il ramène quelques vues de Palestine et d’Égypte. En 1901, on le trouve encore cité dans une affaire de trafic d'images pornographiques[12].

Peu de temps après, Albert Kirchner cède tous ses négatifs à la Gaumont et l’ensemble de ses brevets à la Maison de la Bonne Presse. Il meurt en 1902 à l'hôpital psychiatrique Sainte-Anne, où il était interné[5].

Filmographie

Brevets

  • FR 262.913 du  Appareil chronophotographique perfectionné (en coll. avec Paul Anthelme), reproduit sur cinematographes.free.fr/
  • FR 270.671 du  Biographe perfectionné dit Biographe français.
  • FR 274.531 du  Appareil chronophotographique dit Biographe français Léar

Notes et références

  1. Archives de Paris, acte de mariage n°145 au 10e arrondissement du 01/02/1894, vue 19 / 31.
  2. Archives de Paris, acte de décès n°2372 dressé le 12/05/1902, vue 8 / 31.
  3. « Journal des sociétés civiles et commerciales », sur Gallica, (consulté le ).
  4. « Carnet judiciaire / Photographies obscènes / Gil Blas », sur Gallica, (consulté le ).
  5. Blot-Wellens 2015, p. 91.
  6. Isabelle Saint-Martin, « L’effet de présence : entre image fixe et image animée, les représentations de la Passion (fin XIXe-début XXe siècle) », Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, Numéro spécial, 2012.
  7. (en) Phil De Semlyen, « Film Studies 101: The A-Z Of The Birth Of Cinema », sur Empire, .
  8. (en) Clifford Thurlow et Max Thurlow, Making Short Films : The Complete Guide from Script to Screen, A&C Black, , 3e éd. (ISBN 9780857854322, lire en ligne), p. 395
  9. « Brevet Biographe français Léar », sur cinematographes.free.fr (consulté le ).
  10. « 1º Porno Kirchner », (consulté le ).
  11. « Biographe français de Léar », sur cinematographes.free.fr (consulté le ).
  12. « Who's Who of Victorian Cinema », sur victorian-cinema.net (consulté le )

Annexes

Bibliographie

  • Annuaire de la cinématographie,1917
  • G. Michel Coissac, Histoire du cinématographe, 1925
  • Jacques Deslandes, Le Boulevard du cinéma à l'époque de Georges Méliès (Paris: Éditions du Cerf, 1963)
  • Laurent Mannoni, Le Grand Art de la lumière et de l'ombre (1994)
  • Camille Blot-Wellens, « Eugène Pirou, portraitiste de la Belle Époque », Revue de la BNF, no 50, , p. 86-95 (lire en ligne).

Article connexe

Liens externes

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