Albert Mériel
Albert Mériel est un homme politique français. Il est maire de Caen du au . C'est le premier maire de la ville élu au suffrage universel masculin après la loi du . Après dix ans passés à la tête de la ville, il ne se représente pas, impliqué dans un scandale politico-financier.
Pour les articles homonymes, voir Mériel (homonymie).
Albert Mériel | |
Fonctions | |
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Maire de Caen | |
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Réélection | |
Prédécesseur | Paul Toutain |
Successeur | Georges Lebret |
Biographie | |
Nom de naissance | Albert Auguste Mériel |
Date de naissance | |
Lieu de naissance | Caen |
Date de décès | |
Lieu de décès | Bernay (Eure) |
Profession | avocat |
Biographie
Albert Auguste Mériel est né le à Caen[1]. Il fait des études de droit à l'université de Caen. Il prête son serment d'avocat à la cour d'appel de Caen le [2]. Il enseigne ensuite comme professeur de législation au lycée de Caen en 1867. Il entre au conseil municipal de Caen le [2]. Il est nommé adjoint de Paul Toutain le [2]. Il prend la suite de son mentor, qui ne se représentait pas, le [3] et continue la politique de « républicanisation » de la cité[4].
Il est fait chevalier de la légion d'honneur le [5].
Il débaptise la place royale pour en faire la place de la République. Il fait déplacer la statue de Louis XIV qui s'y trouvait pour la mettre devant le lycée Malherbe[6].
Il est le premier président de la société nautique de Caen[7]. Il est surnommé par ses administrés le « Bonaparte au petit pied »[8] à cause de son caractère autoritaire[9]. Il est réélu maire le par 25 voix par le conseil municipal[10] après avoir été élu 26e sur 30[11].
Lors du renouvellement de mai 1888, il arrive en deuxième position en nombre de voix sur la liste républicaine qui est entièrement réélue[12]. Il est réélu maire par 27 voix sur 29 lors de la séance du conseil municipal du [13].
Miné par l'affaire des eaux de Moulines, il ne se représente pas aux élections municipales de 1892. Il disparaît ensuite de la ville. Veuf en 1879 de Marguerite Victorine Levalois, il épouse en secondes noces Marie Louise Dubosq à Houlgate le [14]. Lorsque celle-ci meurt à Paris en 1926, il est toujours en vie[15].
Le scandale des eaux de Moulines
Le nouveau système d'adduction d'eau
En tant que maire de Caen, il organise le système d'adduction d'eau de la ville en faisant venir les eaux de Moulines[17]. Il désire « doter la ville d'un service abondant et à prix réduit » car l'approvisionnement se faisait jusqu'alors par un l'intermédiaire d'un concessionnaire privé dont la concession arrive à échéance le [4]. L'ingénieur municipal Jules Verrine propose au conseil municipal le un rapport pour l'acheminement des eaux : un système de briques creuses placées à faible profondeur ; la captation des eaux se faisant par drainage[4]. Il est adopté par la ville mais les premiers travaux ne débutent qu'en décembre 1888 avec la construction du réservoir du moulin au roy. À l'autre bout du réseau à Moulines, les travaux prennent aussi du retard à cause des indemnités à verser aux propriétaires des terrains traversés par les canalisations[4]. Ses retards commencent à inquiéter la population tant et si bien que Mériel est obligé de communiquer à ce sujet en mai 1889 : « les travaux se poursuivent avec activité et 600 mètres de canaux sont déjà exécutés »[4]. En 1890 et 1891, le maire de Thury-Harcourt et les usiniers de la Laize intentent séparément des procès contre la ville à cause du système de captage des eaux qui les lèsent. À Caen, certains habitants contestent aussi les canalisations et les raccordements ; ainsi, les habitants de la rue Branville lancent une pétition en mai 1890 pour obtenir un raccordement[4].
Le « Panama caennais »
L'accumulation des retards et l'insatisfaction des Caennais poussent Albert Mériel à ne pas se représenter aux élections municipales de 1892, l'affaire est au cœur des élections. Son successeur, Georges Lebret, déclare juste après son élection qu'il va « éclaircir l'affaire »[4]. L'ingénieur Jules Verrine, à l'origine du projet, décède le [18]. Selon la rumeur publique, « il aurait envoyé une confession au nouveau maire avant de mourir »[4]. La presse caennaise se déchaîne et lance une véritable cabale contre l'ancien maire, le Bonhomme normand parle « d'irrégularités d'écriture portant sur des grosses sommes »[19]. Le maire Georges Lebret est obligé de commander un rapport sur la situation. Il doit être présenté devant le conseil municipal le mais sa présentation est finalement différée au dernier moment[4]. Elle a lieu le et le conseil municipal décide d'en confier les conclusions à sa commission des finances. Cette dernière présente ses conclusions lors du conseil municipal du : 68 000 francs ont été détournés depuis 1889, date du premier détournement. Avec les intérêts, cette somme monte à 73 000 francs. En juin 1892, la mairie a récupéré « anonymement » 43 600 francs. En conséquence, le conseil municipal blâme « les irrégularités commises par la précédente administration » et le maire demande en plus au ministre des finances d'envoyer un inspecteur des finances afin d'examiner les comptes de la ville pour la période 1882-1892[4]. Le scandale éclate au grand jour et la justice se saisit de l'affaire. Albert Mériel est arrêté le et écroué[20]. Le rapport de l'inspecteur des finances sur « les faits qui constitueraient des traités fictifs » est présenté au conseil municipal le [4]; il met en lumière que les « livres de délibération étaient altérés par surcharge et grattage »[21]. Deux jours plus tard, le journal La Croix du Calvados demande la démission de tous les conseillers municipaux en poste sur la période incriminée et qui sont encore membre du conseil[22], sa une est reproduite et placardée sur les murs de la ville[4]. Vingt des trente conseillers municipaux démissionnent[4].
Le conseil municipal adopte le un projet de régularisation de la situation financière des sommes reversées par Mériel[4]. Ce dernier est convoqué devant les assises du Calvados le pour faux en écriture. Il s'y présente « vieilli de 15 ans »[4]. Il est acquitté à la surprise générale par les jurés alors que l'avocat général réclamait une condamnation[23]. On apprend durant le procès qu'il a commis, et reconnu, plusieurs détournements entre septembre 1889 et le , soit deux jours avant les élections municipales. Ces détournements portaient sur des sommes allant de 1 500 francs à 10 000 francs[24]. Il explique son geste par la nécessité de « faire des arrangements »[4].
Malgré son acquittement, le barreau de Caen le raye de ses listes. Il est ensuite rayé de l'ordre de la légion d'honneur le [25].
Notes et références
- Archives du Calvados, acte de naissance n°197 dressé le 05/03/1840, vue 53/92
- « Résumé des services de monsieur Mériel, chevalier de la légion d'honneur », sur http://www.culture.gouv.fr/, base Léonore
- « Conseil municipal de Caen, séance du 29 avril 1882 », Journal de Caen,
- Philippe Lenglart, Le nouveau siècle à Caen, Éditions Charles Corlet, (ISBN 2-85480-204-7)
- « Fiche d'Albert Mériel sur Léonore », sur http://www.culture.gouv.fr/, base Léonore
- Frédéric Henriot, Alain Nafilyan, Éric Diouris, Yves Lecherbonnier, Emmanuel Luis, Monuments Historiques du XIXe siècle en Basse-Normandie, Saint-Étienne, IAC éditions d'art, 2012, tome 1, p. 107
- Philippe Dupré, « Une enfant de la République : la Société Nautique de Caen », Annales de Normandie, vol. 45, no 5,
- « Élections municipales », Le bonhomme normand,
- Gabriel Désert, Histoire de Caen, Toulouse, Privat,
- « Les municipalités », Le bonhomme normand,
- « Élections », Le bonhomme normand,
- « Chronique régionale : Élections municipales du 6 mai », L'avenir du Calvados,
- « Chronique locale : Conseil municipal de Caen », L'avenir du Calvados,
- Archives départementales du Calvados Acte de mariage no 6 dressé le 28/05/1892, vues 704-706 / 797
- Archives de Paris Acte de décès no 1793 de Marie Louise Dubosq dressé au 16e arrondissement le 08/10/1926, vue 11 / 31
- Relevé généalogique sur Geneanet
- « Moulines et ses eaux potables », sur http://www.moulines14.fr, Moulines
- « Obsèques de M. Verrine, ingénieur de la ville depuis 24 ans », Journal de Caen,
- « Encore Moulines », Le bonhomme normand,
- « Arrestation d'un ancien maire », La Croix, (lire en ligne)
- « Affaire Mériel », Le bonhomme normand,
- « Justice : Toujours le cas Mériel », La Croix, (lire en ligne)
- « La force », La Croix, (lire en ligne)
- « Albert Mériel », Le bonhomme normand,
- « Lettre du président de la République rayant M. Mériel des matricules de la légion d'honneur », base Léonore