Alexandre Hébert

Alexandre Hébert, né le à Alvimare (Seine-Maritime)[1] et mort le à Rezé[2] (Loire-Atlantique), est un militant syndicaliste, secrétaire de l'union départementale CGT-Force ouvrière de la Loire-Atlantique depuis sa création en 1948 jusqu'en 1992.

Pour les articles homonymes, voir Hébert.

Alexandre Hébert
Biographie
Naissance
Décès
(à 88 ans)
Rezé
Nationalité
Activités
Homme politique, syndicaliste
Autres informations
Parti politique

Cette position à la tête de l'UD FO lui donnait une certaine importance dans la vie sociale et politique locale, mais aussi au sein de la confédération Force ouvrière et dans les milieux d'extrême gauche du mouvement ouvrier.

Hébert était lié à l'anarcho-syndicalisme et au courant lambertiste du trotskisme.

Biographie

Avant la guerre (1939)

À 17 ans, Alexandre Hébert obtient un brevet d'études industrielles (BEI) d'électricien[3].

Très jeune, il s'intéresse aux questions politiques à travers la lecture du journal de la SFIO, Le Populaire[4]. Son père est, en effet, un ancien membre du Parti communiste ensuite revenu à la SFIO.

En 1936, influencé par la propagande du PCF, Alexandre Hébert adhère à l'Association des amis de l'URSS[5], dirigée par le communiste Fernand Grenier. Il envisage même d'adhérer aux Jeunesses communistes, mais son père le lui déconseille fortement[3]. Il entre aux Jeunesses socialistes, où il rencontre Robert Hersant, frère de son ami Patrick, et le parrain de son adhésion. Il devient rapidement secrétaire de la section de Sotteville-lès-Rouen et entre un peu plus tard au bureau fédéral[6]. Il milite avec les pivertistes de la tendance Gauche révolutionnaire[2]. Après l'exclusion de Marceau Pivert, il démissionne des Jeunesses socialistes et participe à la création de l'éphémère Parti socialiste ouvrier et paysan (PSOP) comme délégué lors de son congrès constitutif[6].

Dans cette période du Front populaire et de la guerre civile en Espagne, sa rencontre avec Louis Dubost est déterminante ; il est coopté au sein d'un groupe anarchiste d'Elbeuf. Ce groupe continue de se réunir pendant la guerre, mais Alexandre Hébert cesse sa participation en raison de son envoi en Allemagne[7].

La Seconde Guerre mondiale

Entré aux chemins de fer à Sotteville-lès-Rouen[2], il est réquisitionné par l'autorité occupante[8] et affecté au dépôt de Munich ; il y rencontre des ouvriers anti-nazis, allemands ou issus d'autres nations vaincues ; avec ces derniers il fomente deux grèves, victorieuses[9]. Au cours d'une permission obtenue à la suite de la dernière grève, il décide de rester en France, et retrouve du travail à Vernouillet (Seine-et-Oise) ; une amnistie régularise sa situation[10].

À la Libération, il prend contact à Paris avec Louis Louvet et Simone Larcher, sa compagne, qui publient un bulletin intitulé Ce qu'il faut dire (C.Q.F.D.) ; il participe au congrès de fondation de la Fédération anarchiste (FA)[7]. Il acquiert la certitude que la bataille sociale se joue dans le syndicalisme et non dans les partis politiques[11] ; il adhère à la CGT, s'affronte très vite avec un appareil dominé par les communistes, l'emporte cependant et devient responsable de sa section ; muté à Nantes, il devient rapidement secrétaire de sa section[12].

La CGT-FO

Alexandre Hébert est un des initiateurs des Comités d'action syndicaliste des chemins de fer, qui quittent la CGT, en 1947, après les grèves impulsées par le Parti communiste[13]. Il devient secrétaire de l'union départementale CGT-Force ouvrière à sa création en 1948[2]. Par ailleurs, il adhère au groupe anarchiste Francisco-Ferrer, mais la composition et l'activité de ce groupe l'amènent à en fonder un autre, le groupe Fernand-Pelloutier, dont, dit-il lui-même, le nom est tout un programme, du moins le sien[14].

Dès le 2e congrès confédéral de la CGT-Force ouvrière, en , il alerte ses camarades syndicalistes sur les dangers de la constitution d'un appareil politique européen, à propos duquel il lui semblait que nombre d'entre eux se fourvoyaient ou se fourvoieraient à terme[15].

Dans les années 1950, il rencontre Pierre Boussel, dit Pierre Lambert[2],[16], avec lequel il se lie d'amitié ; est alors constitué le Comité de liaison et d'action pour la démocratie ouvrière (CLADO), regroupement de militants anarchistes, syndicalistes-révolutionnaires, trotskystes, socialistes…, dans l'esprit des organisations de la Première Internationale[14].

Sa préoccupation de voir les anarchistes participer à l'action syndicaliste se manifeste dès la reconstitution de la Fédération anarchiste[17]. Son inquiétude de voir la FEN autonome se transformer en syndicat intégré à l'appareil d'État se manifeste dès cette époque[18].

Les grèves de 1953 et de 1955

Pendant les grèves d', contre le recul de l'âge de départ en retraites des fonctionnaires, il défend l'existence des comités de grève, véritable organisation démocratique des grévistes, contre la CGT et la CFTC qui entendent placer l'organisation de la grève sous la coupe de l'intersyndicale. La grève est un succès ; mais c'est la dernière fois que des comités de grève gèrent le mouvement ; après, ce sont les « bureaucraties syndicales » qui reprendront leur droit[19]. Son rôle dans cette grève lui vaut des tentatives de déstabilisation interne (candidature de Paul Malnoë, secrétaire de l'union locale de Saint-Nazaire), et l'hostilité de la CGT et de la CFTC, notamment de Gilbert Declercq. Il joue également un rôle important dans les grèves de 1955 en Loire-Atlantique, bien que les comités de grève élus ont disparu[20].

Alexandre Hébert et la question algérienne

Durant les années 1950, il rencontre régulièrement Ahmed Mesli dit Messali Hadj, militant nationaliste, fondateur du Mouvement national algérien, alors en résidence surveillée à Niort (Deux-Sèvres), accompagné, par exemple, d'Yves Dechezelles et de Pierre Lambert. Avec Robert Bothereau, à l'époque secrétaire général de la CGT-FO, et André Bergeron, futur secrétaire confédéral, il engage la CGT-Force Ouvrière dans le soutien à l'indépendance de l'Algérie (congrès d'Amiens en 1956), et le soutien aux militants syndicalistes algériens, alors que d'autres courants du mouvement ouvrier[21] soutiennent le FLN[22]. Il rendra visite à son vieil ami Messali jusqu'à son décès en 1974, dans une clinique de la MGEN[23], dans l'Oise[24].

Cinquième République

Vers 1957-1958, Hébert publie un article intitulé « Du mythe fasciste de l'unité »[25] dans La Commune, journal du CLADO.

Alexandre Hébert et le régime gaulliste

Dès 1958, Alexandre Hébert considère que les institutions de la cinquième république représentent un danger pour l'existence des organisations ouvrières libres. Il y voit l'instauration d'un régime prônant l'intégration politique, sociale et économique de la classe ouvrière. Intégration politique par la mise en place d'institutions de type corporatiste néo-fasciste (sénat économique) ; intégration sociale par l'intégration des organisations syndicales ouvrières aux objectifs économiques de l'État ; intégration économique par la mise en place de l'intéressement aux fruits de l'entreprise et la reconnaissance de la section syndicale d'entreprise, à terme unique[26]. Il ne cessa durant la première décennie de la Ve République de défendre au sein de la CGT-FO l'indépendance de l'organisation syndicale par rapport aux partis politiques, en dénonçant la participation aux commissions de toutes sortes où les syndicats devaient s'intégrer.

En Mai 68, il ne voit dans les événements du Quartier latin ni la recherche d'une contestation de l'ordre social, ni la volonté de mettre en cause l'ordre politique gaulliste[27]. En ce qui concerne les grèves ouvrières, il estime que la mainmise du Parti communiste français sur les comités intersyndicaux freine toute perspective d'obtenir satisfaction sur certaines revendications. Il est accusé par les trotskystes Yvon Rocton et Robert Gaboriau de ne pas voir la portée révolutionnaire des événements en cours de reflux ; ceux-ci, responsables de l'union locale FO de Nantes tentent de le priver de son mandat de représentant de l'union départementale lors du dernier meeting nantais[28]. Par ailleurs, Paul Malnoé, secrétaire de l'union locale de Saint-Nazaire, envisage une nouvelle fois de l'évincer de son poste de secrétaire général de l'union départementale[28].

En 1969, lors du référendum sur la régionalisation, Alexandre Hébert milite, au sein de la CGT-Force ouvrière, pour le double « non » : « non » au texte constitutionnel, « non » à la participation aux instances si elles étaient tout de même créées. Au Xe congrès confédéral, qui commence le [29], Hébert, Bothereau, ancien secrétaire général, tout comme Bergeron combattent le projet gaulliste, qui, selon eux, ferait évoluer les institutions de la Ve République non seulement vers le corporatisme, mais aussi vers le régionalisme. Le congrès se range à leurs vues et appelle les militants à voter « non ». C'est effectivement celui-ci qui l'emporte le , avec 53,17 %, entraînant la démission de De Gaulle[30].

L'Union des anarcho-syndicalistes (UAS)

En 1962, Alexandre Hébert, Serge Mahé et Joachim Salamero sont à l’initiative d’une Union des anarcho-syndicalistes à laquelle participent plusieurs militants de la Fédération anarchiste ; Salamero est le responsable de son Bulletin interne[31].

En 1966, l'UAS signe une déclaration commune avec la commission syndicale de la Fédération anarchiste[32],[33]. Ce rapprochement ne survivra pas à , et aux idées introduites par la CFDT autour du slogan de l'autogestion[34].

Les grèves de Mai 68

En [35], l'Association générale des étudiants de Nantes (AGEN UNEF) renouvelle son bureau, qui est conjointement emporté par de jeunes libertaires proche des situationnistes et des militants anarcho-syndicalistes» proches de l'union des anarcho-syndicalistes, qu'anime Alexandre Hébert[35]. Leader régional de Force ouvrière, Hébert milite associé au courant trotskiste lambertiste, incarné en 1967 par l'Organisation comnuniste internationaliste[35]. L'élection des anarcho-syndicalistes » au bureau de l'AGEN-UNEF mais aussi de la MNEF est permise par celle des lambertistes, comme à Strasbourg, où l'OCI avait déjà épauleé discrètement les situationnistes[35]. Parmi les nouveaux élus, on remarque surtout Cossic, Breteau, Boussard et Yvon Chotard (étudiant), qui devient président de l'AGEN-UNEF à Nantes et connait bien les situationaistes strasbourgeois, qu'il a rencontrés à Paris, lors de l'assemblée générale de l'UNEF du [35]. Le nouveau bureau nantais de l'UNEF élu ensuite en mai marche sur les brisées de Strasbourg: parmi ses premières mesures, la fermeture du Bureau d'aide psychologique universitaire (BAPU), que préconisaient les situationistes strasbourgeois.

Juvénal Quillet, un étudiant libertaire est à son tour élu en à la tête du bureau des résidents des cités universitaires de Nantes et se joint également à ce mouvement de Mai 68[36]. Les occupations des résidences de décembre se multiplient à Nantes et se soldent par l’interpellation de Juvénal Quillet par la police le [36] et, deux jours plus tard, par l’intervention des forces de l’ordre lors d’une assemblée générale des résidents[36]. Dès le retour des vacances du nouvel an, le climat de contestation est entretenu par Chotard et les membres de l'UNEF Nantes[36]. Le mouvement des occupations se poursuit, alors que les résidences sont à nouveau prises d’assaut le , et que le lendemain c’est au tour du restaurant universitaire de Nantes d’être occupé[36].

Alexandre Hébert (FO) accepta le contact avec des jeunes comme Yvon Chotard, président de l'association générale des étudiants de Nantes (Agen-Unef), et sans lui l'occupation de Sud-Aviation, dans le prolongement direct des affrontements du à Paris et ensuite à Nantes, n'aurait pas eu lieu[37]. Les étudiants nantais, parmi lesquels Juvénal Quillet, vinrent à Saint-Nazaire expliquer aux lycéens les enjeux du mouvement[38].

La fusion entre l’UAS et l’ASRAS

En 1970, sous la pression de jeunes recrues issues de Mai 1968, a lieu une fusion entre l’UAS et l’Alliance syndicaliste révolutionnaire et anarcho-syndicaliste (ASRAS), constituée par des libertaires adhérents à différents syndicats réformistes[39]. Mais le groupe Fernand-Pelloutier de Nantes quitte l'ASRAS en 1972, Joaquim Salamero en 1973, Marc Prévôtel en 1974[40]. À la même époque, il intervient encore une fois dans un débat[41] sur « le syndicalisme dans la société », pour alerter sur le danger corporatiste que font planer sur la société les options micro- et macro-sociologiques[42] issues de l'encyclique Rerum novarum, quelle que soit la forme qu'elles revêtent[15].

Fidèle en amitié et quelles que soient les différences d'affinité, Hébert témoigne au procès intenté par l'État, au nom des anti-avortement, contre Aristide Lapeyre, en 1973, devant la cour d'assises de Bordeaux, en compagnie de Federica Montseny, militante de la CNT-FAI et ex-ministre de la santé de la République espagnole pendant la guerre civile, G. Fumé secrétaire du SNI de Gironde, Joaquim Salamero secrétaire de l'École rationaliste Francisco-Ferrer[15].

En 1975, l’UAS d’Alexandre Hébert renaît de ses cendres. On retrouve parmi ses membres actifs Serge Mahé, Joaquim Salamero, Marc Prévôtel, etc.[43].

En 1977, Hébert participe avec les militants « luttes de classe » de la CGT-Force Ouvrière à la rédaction d'un projet de résolution générale « Pour un syndicalisme lutte de classe » qui recueille 6,9 % des voix[44].

Au congrès de la Libre-pensée en 1978, il se bat pour maintenir les fondements philosophiques de cette organisation, contre les partisans d'une conception plus relâchée de la laïcité[15],[42].

Alexandre Hébert et François Mitterrand

Peu avant l'élection présidentielle de mai 1981, dans un éditorial de L'Ouest syndicaliste, il qualifie François Mitterrand de « pétainiste ». Il n'ignore en effet rien de son passé et le perçoit avant tout comme un ambitieux. Il vote cependant pour lui au second tour (il le regrettera publiquement plus tard) dans l'espoir qu'il remette en cause les institutions de la Cinquième République. N'a-t-il pas eu l'engagement de certains anciens SFIO, tel Pierre Mauroy, de prendre des lois en faveur de la classe ouvrière[45] ?

Dès [46], il est avec Serge Mahé, et d'autres militants laïques, à l'initiative de « L'appel aux laïques » et du Comité national pour la signature de l'appel aux laïques[47]. Une adresse est envoyée aux candidats à la présidence de la République ; elle reçoit une réponse édifiante[48] du candidat François Mitterrand[49],[50], qui n'a été publiée que par L'Anarcho-syndicaliste (les trotskystes appelant à voter pour François Mitterrand dès le premier tour).

Le se tient, à l'appel du Comité national pour la signature de l'appel aux laïques, un meeting porte de Pantin rassemble environ 10 000 personnes, reçoit un accueil chaleureux de la CGT-Force Ouvrière et de la Libre Pensée ; c'est le prélude à l'adhésion à la CGT-Force Ouvrière d'instituteurs et de professeurs – Bernard Bolzer est alors secrétaire départemental du Syndicat national des instituteurs en Loire-Atlantique[51] ; c'est aussi le prélude à la constitution, en 1983, de la Fédération des cercles de défense laïque présidée par Jean-Pierre Barrois afin de démythifier le Comité national d'action laïque, jugé insuffisamment combatif.

Après les premiers mois de pouvoir socialiste, marqués par les nationalisations, la retraite à 60 ans, etc., une inflexion politique a lieu avec le « tournant de la rigueur ». Les années 1982-1983 sont marquées par l'adoption des lois Auroux qui, selon le point de vue d'Alexandre Hébert, remettent en cause la loi de 1950 sur les conventions collectives et la liberté de négociation. Il s'ensuit une bataille entre les partisans d'un syndicalisme fort, dont Hébert, et les tenants d'un syndicalisme intégré, notamment Edmond Maire, qui va tenter par un procès en diffamation[42] de le faire plier pour se ranger dans l'ordre « cléricalo-corporatiste ».

Les années 1990

En 1992, son fils Patrick, membre du courant trotskyste-lambertiste (OCI, PCI, PT, POI), prend sa suite comme secrétaire général de l'union départementale[2].

L’Union européenne

En 1992 également, il appelle, comme de nombreux militants ouvriers, à voter « non » au référendum sur le traité de Maastricht, considérant que l'Union européenne modifie fondamentalement l'ordre social au bénéfice d'une seule classe, la bourgeoisie[52], et ce malgré des désaccords, au sein de la CGT-FO, avec les partisans d'une institution supra-nationale.

Par la suite, en 2002, l'Union des anarcho-syndicalistes signe une déclaration à propos des révisions constitutionnelles faisant suite aux différents traités européens[53]. En 2005, Hébert se retrouve aux côtés des militants ouvriers de différents courants pour la victoire du « non » au référendum sur le traité constitutionnel européen.

Organisations ouvrières

En 1991, Hébert participe à la Conférence mondiale organisée essentiellement par l'Internationale trotskyste-lambertiste ; une déclaration des anarcho-syndicalistes espagnols, russes et français présents est publiée[54].

En 1996, l'Union des anarcho-syndicalistes adhère à l'Entente internationale des travailleurs[55].

En 2009, dans une réponse à un lecteur de l'Anarcho-syndicaliste, Hébert indique que le fonctionnement de l'Entente internationale des travailleurs est sous le contrôle des militants du Courant communiste internationaliste, dont, dit-il, « la tolérance n'est pas la principale qualité » ; il considère cependant que « ce "rassemblement" présente de l'intérêt[56]. »

Hommages

À l'annonce de son décès, en 2010, de nombreux témoignages, par exemple de Serge Mahé[57], de Christophe Bitaud[57], de Marc Prévôtel[57], de Joaquim Salamero[58], de Marc Blondel[59] ou de Christian Eyschen[59], montrent l'attachement que lui portent de nombreux militants[60].

Rôle dans l'histoire de l'anarcho-syndicalisme

Alexandre Hébert a joué un rôle important dans l'adhésion des militants anarchistes à la Confédération générale du travail - Force ouvrière (CGT-FO). Il devient secrétaire de l'union départementale (UD) de la Loire-Atlantique dès sa création, tout comme Raymond Patoux secrétaire de l'UD CGT, puis CGT-FO du Maine-et-Loire[61]. Il en sera de même de son action pour l'adhésion à la CGT-FO de militants de la FEN autonome en 1982, 1983 et 1984.

Son activité de militant syndicaliste s'est située en permanence dans le cadre fixé par Fernand Pelloutier dans la Lettre aux anarchistes[62] en 1899. Il a toujours combattu les adeptes d'un syndicalisme inféodé aux partis politiques, mais aussi les tenants du syndicalisme chrétien, du syndicalisme autonome et des organisations spécifiquement anarchosyndicalistes (CNT, CNT-AIT) ; cela lui a attiré pas mal d'inimitiés. Combattant pour l'émancipation des travailleurs en toutes circonstances, il n'a pas hésité à se séparer de certains compagnons anarchistes qui ont un autre chemin, notamment celui de l'adhésion à ce qu'il considérait comme des avatars du syndicalisme chrétien (CFDT, SUD, etc.).

Au contraire, en tant que militant anarchiste, il a été de ceux qui ont reconstruit le mouvement libertaire après la Seconde Guerre mondiale, à travers la Fédération anarchiste : en 1954, au sein de la Fédération anarchiste, il fait partie des opposants à Georges Fontenis, qui y avait introduit des éléments bolchevisants[réf. nécessaire] ; en 1961, il contribue avec ses compagnons du groupe Fernand-Pelloutier à la publication de L'Anarcho-syndicaliste, prélude à la constitution de l'Union des anarcho-syndicalistes (UAS). À tout moment, il s'est efforcé de réunir les militants ouvriers soucieux de préserver l'indépendance des syndicats ; ami de Pierre Lambert, il a certainement beaucoup contribué à l'abandon par les membres de l'OCI-PCI de la thèse d'origine marxiste de la nécessité de subordonner les syndicats au parti révolutionnaire.

Libre-penseur[2] et rationaliste, Hébert a été à l'initiative de l'« Appel aux laïques » au début du premier septennat de François Mitterrand, alors que la politique scolaire s'orientait vers un compromis avec les tenants de l'enseignement privé.

  • Publications de l'Union des anarcho-syndicalistes : voir Bibliographie

Controverses

À propos des élections municipales à Nantes

En 1965, après 18 années où la mairie de Nantes a été tenue par Henry Orrion, la tête de la liste de droite est André Morice, ex-radical exclu en 1956 en raison de son attachement à l'Algérie française, alors leader du Centre républicain, allié à André Jozan du CNI. Alexandre s'implique dans une opération que lui commande son hostilité au gaullisme et au stalinisme : associer ses amis de la SFIO, notamment André Routier-Preuvost, secrétaire de la fédération de la Loire-Atlantique et Alain Chénard à ces hommes de droite. Cette opération est facilitée par le fait que la SFIO est alors dirigée par Guy Mollet, dont la politique algérienne a été proche de celle des partisans de l'Algérie française. André Morice est facilement élu maire de Nantes. Les responsables du Parti communiste engagent alors une campagne contre Alexandre Hébert[63].

En 1977, après deux mandats d'André Morice, la situation est différente : le PS dirigé par François Mitterrand est allié au PCF ; les élus municipaux de Nantes ont été exclus du PS en 1975 pour avoir refusé de passer dans l'opposition, à l'exception d'Alain Chénard. André Routier-Preuvost a adhéré au Parti social-démocrate et fait partie de la liste d'André Morice, mais contre toute attente, c'est la liste d'Union de la gauche dirigée par Alain Chénard qui l'emporte, par seulement 549 voix.

En 1983, la liste Chénard sortante est opposée à une liste de droite dirigée par le RPR Michel Chauty. Les premières dissensions entre socialistes sont apparues, des syndicalistes en veulent au PS de la politique de rigueur imposée en 1982-83. Les adversaires de gauche d'Alain Chénard : André Routier-Preuvost, Christian Chauvel de la Fédération des socialistes démocrates, des membres du Parti communiste internationaliste, des « nouveaux socialistes » (adhérents post-SFIO) déçus et des syndicalistes proches de l'Union des anarcho-syndicalistes constituent la liste « Nantes d'abord », qui obtenant environ 4,5 % des voix, empêche la réélection d'Alain Chénard. La polémique contre Alexandre Hébert reprend.

Avant les élections de 1989, Jean-Marc Ayrault s'assure la neutralité d'Hébert[64], de façon paradoxale puisqu'il est issu de l'Action catholique[65], alors qu'Alain Chénard venait du syndicalisme FO. Il est d'ailleurs élu au premier tour, malgré la présence d'une liste verte qui réalise 5 % des voix. La présence d'une liste anti-Ayrault de gauche aurait seulement reporté son élection au second tour.

À propos de Joël Bonnemaison et du Front national

Joël Bonnemaison, auteur d'une biographie d'Alexandre Hébert, a été longtemps attaché à son service à l'UD FO en tant que secrétaire particulier. Par la suite, il mène à Nantes une carrière dans les milieux de l'information, notamment à FR3, et de la politique. En 1988, il est présent lors d'une entrevue entre Jean-Marc Ayrault, candidat à la mairie, et André Jozan[66]. Il est alors catalogué comme « anarchiste de droite ».

En 1999, les relations entre Hébert et Bonnemaison reviennent au premier plan, en liaison avec le Front national. En septembre, le journal du FN, Français d'abord, publie un entretien avec Alexandre Hébert. Devant les protestations et interrogations, Hébert répond[67] : « Je n'ai rien de commun avec l'extrême droite, mais je n'ai jamais été dupe de ce que la diabolisation du Front national avait pour principale utilité de permettre à la gauche de se faire élire. » Ses amis lui reprochent non pas tant le contenu de l'article issu de l'entretien que l'utilité de l'accorder à ce type de journal[57].

En octobre[68], un article du Monde[69] signale que Joël Bonnemaison, bras droit de Hébert à la tête de l'UD FO, a été un ami de Jean-Marie Le Pen et a été responsable départemental du Front national dans les années 1970, membre du comité central de ce parti en 1976. Lors de son premier mariage, ses témoins étaient d'ailleurs Hébert et Le Pen[2].

Alexandre Hébert et le lambertisme

La qualification de « lambertiste » est parfois attribuée à des militants ouvriers qui ont côtoyé, dans leurs syndicats ou ailleurs, des membres du groupe trotskyste de Pierre Lambert, quelles que soient leur opinions réelles. Elle a été notamment utilisée dans des écrits émanant de la CNT-AIT[70] En 1986, Jean-Christophe Cambadélis, ancien membre de l'OCI passé au PS, accuse Alexandre Hébert d'être, depuis les années 1950, un membre du bureau politique de l'OCI.
En 2004, dans une interview accordée à Karim Landais, Hébert s’explique longuement sur ses relations avec Pierre Lambert, et comment il a été associé aux instances des organisations lambertistes, état de fait connu de beaucoup de militants anarchistes, trotskistes et autres[71].

Contrairement à son fils Patrick, qui est ouvertement membre de la direction de l'organisation lambertiste, Alexandre affirme être seulement un ami personnel de Pierre Boussel. Cependant, des rumeurs ont couru sur une plus forte implication : ainsi un article[72] de L'Express du rapporte un certain nombre de faits[73], et donne le pseudo d'Alexandre Hébert chez les trotskistes[74], « Ernest ».

On notera que les informations transmises à ce sujet par des militants et des anciens militants ne sont guère vérifiables, le cours des passions ne n'interrompant pas. Les informations journalistiques ne s'appuyant que sur de tels témoignages, elles peuvent difficilement être assimilées à des vérités historiques. Sur ce sujet, on se référera à la réflexion de Karim Landais, chercheur en histoire[75].

Voir aussi

Journaux dirigés par Alexandre Hébert

  • L'Anarcho-syndicaliste, organe de l'Union des anarcho-syndicalistes (UAS)
  • L'Ouest syndicaliste : informations syndicales de l'UD CGT-FO 44 (membre fondateur : Alexandre Hébert).

Bibliographie

  • 1996 : Joël Bonnemaison, Alexandre Hébert, 50 ans de lutte syndicale, Éditions du Rocher. Présentation sur le site Anti-mythes[76]
  • 2003 : L'Anarcho-syndicaliste, « Des anarchistes dans la lutte des classes de 1960 à aujourd'hui ». Présentation sur le site Anti-mythes[77]
  • 2003 : L’imposture de la pseudo "Union des Anarcho-Syndicalistes", à propos du PT, de Blondel, de Lambert et de l'Anarcho-syndicalisme,article d'Arianne, des Amis de l'AIT en Suisse [78]
  • 2005 : Serge Mahé, La Contre-Révolution permanente, éditions du Petit Véhicule, Nantes. Présentation sur le site Anti-mythes[79]
  • 2006 : Karim Landais, « Passions militantes et rigueur historienne[80] »
  • 2009 : Gérard da Silva, Histoire de la CGT-FO et de son union départementale de Paris 1895-2009, L'Harmattan, coll. Mouvement social et laïcité
  • 2010 : Bernard Hazo, Alexandre Hébert, l'homme qui a dit non, Publiest. Présentation sur le site Anti-mythes [81]
  • 2011 : Alexandre Hébert, un homme de conviction, un anarchiste individualiste, préface de Christophe Bitaud, textes choisis par Jacqueline Saliou et Bertrand Kanban. Présentation sur le site Anti-mythes[82]
  • 2011 : Manifeste pour un syndicalisme libre et indépendant[83], projet rédigé par Alexandre Hébert deux ans avant son décès, publié par ses amis de l'Union des anarcho-syndicalistes

Notices

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Joël Bonnemaison, Alexandre Hébert, 50 ans de luttes syndicales, Éditions du Rocher, Monaco, p. 33.
  2. Michel Noblecourt, « Alexandre Hébert : anarcho-syndicaliste », dans Le Monde daté du 27 janvier 2010, p. 24.
  3. Joël Bonnemaison, ibid., p. 36.
  4. Joël Bonnemaison, ibid., p. 34.
  5. La future Association France-URSS.
  6. L'Anarcho-syndicaliste « Des anarchistes dans la lutte des classes de 1960 à aujourd'hui » p. 5.
  7. L'Anarcho-syndicaliste « Des anarchistes dans la lutte des classes de 1960 à aujourd'hui » p. 6.
  8. A quel titre ? STO ? Il faut préciser ce point.
  9. Joël Bonnemaison, ibid. p. 47.
  10. Joël Bonnemaison, ibid., p. 48.
  11. Joël Bonnemaison, ibid., p. 49.
  12. Joël Bonnemaison, ibid., p. 50.
  13. Guillaume Trousset, Libertaires et syndicalistes-révolutionnaires dans la CGT-FO (1946-1957)
  14. L'Anarcho-syndicaliste, « Des anarchistes dans la lutte des classes de 1960 à aujourd'hui », p. 7.
  15. (fr)[PDF]« Notre ami Alexandre Hébert(1921-2010) », sur anti.mythes.voila.net (consulté le )
  16. Joël Bonnemaison, p. 75.
  17. [PDF]« Les Anarchistes dans le monde syndical - Le monde libertaire, octobre 1954 », sur anti.mythes.voila.net (consulté le )
  18. [PDF]« Syndycalisme autonome ? Mais nécessité de l'unité d'action, Le Monde libertaire, décembre 1954 », sur anti.mythes.voila.net (consulté le )
  19. Joël Bonnemaison, p. 58.
  20. Joël Bonnemaison, p. 60.
  21. [PDF]« Georges Fontenis (1920-2010): une figure internationale du communisme libertaire… Alternative libertaire n °198, septembre 2010 », sur anti.mythes.voila.net (consulté le )
  22. FLN qui, de son côté, organise l'assassinat des militants syndicalistes de l'Union syndicale des travailleurs algériens (USTA)[réf. nécessaire] (ce passage correspond à une polémique entre anarchistes et autres syndicalistes. Il est certain que le FLN a assassiné des Algériens proches de Messali Hadj. Mais cela concerne la guerre d'Algérie et non pas la biographie d'AH).
  23. Mutuelle générale de l'éducation nationale.
  24. Joël Bonnemaison, p. 67.
  25. Voir sur le site Anti-mythes.
  26. Alexandre Hébert, un homme de conviction, un anarchiste individualiste, ch.5, p. 92 à 113
  27. Joël Bonnemaison, p. 91.
  28. Joël Bonnemaison, p. 96.
  29. Gérard da Silva, Histoire de la CGT-FO, L'Harmattan, 2009, p. 232-235.
  30. Joël Bonnemaison, p. 101.
  31. [PDF]« Les anarchistes dans la lutte des classes de 1960 à aujourd'hui », sur anti.mythes.voila.net (consulté le )
  32. L'Anarcho-syndicaliste, « Des anarchistes dans la lutte des classes de 1960 à aujourd'hui », p. 21.
  33. Serge Mahé La Contre-Révolution permanente, éditions du Petit Véhicule, 2005, p. 179.
  34. Serge Mahé La Contre-Révolution permanente, éditions du Petit Véhicule, 2005, p. 10.
  35. "Vie et mort de Guy Debord" par Christophe BOURSEILLER
  36. " Scènes situationnistes de Mai 68 : Enquête sur une influence présumée", par Laurence Bernier-Renaud Sous la direction de Jean-Pierre Couture
  37. Yvon Chotard : « On voulait abolir l'ordre ancien », dans Ouest-France du 5 mai 2008
  38. Gaby Cohn-Bendit : « On discutait jour et nuit ! » dans Ouest France le 26/09/2013
  39. [PDF]« L’UAS disparaît…vive l’anarcho-syndicalisme », sur anti.mythes.voila.net (consulté le )
  40. L'Anarcho-syndicaliste no 145.
  41. Date et lieu ?
  42. À expliciter.
  43. L'Anarcho-syndicaliste, « Des anarchistes dans la lutte des classes de 1960 à aujourd'hui ».
  44. L'Anarcho-syndicaliste, « Des anarchistes dans la lutte des classes de 1960 à aujourd'hui », p. 48.
  45. Joël Bonnemaison, p. 113.
  46. Serge Mahé La Contre-Révolution permanente, p. 57.
  47. Serge Mahé La Contre-Révolution permanente, p. 59.
  48. À expliciter : qu'est-ce que Mitterrand a répondu au juste ?
  49. Serge Mahé La Contre-Révolution permanente, p. 71.
  50. Lettre anarchiste no 4 sur pagesperso-orange.fr et sur le site Anti-mythes [PDF].
  51. Quel est le rôle de Bolzer dans cette affaire ?
  52. Joël Bonnemaison, p. 129.
  53. [PDF] L'Anarcho-syndicaliste, « Des anarchistes dans la lutte des classes de 1960 à aujourd'hui », p. 199.
  54. [PDF] L'Anarcho-syndicaliste, « Des anarchistes dans la lutte des classes de 1960 à aujourd'hui », p. 107.
  55. [PDF] sur L'Anarcho-syndicaliste, « Des anarchistes dans la lutte des classes de 1960 à aujourd'hui », p. 154.
  56. [PDF]« L’Anarcho-Syndicaliste 199 - Des anarchistes dans la lutte des classes de 1960 à aujourd’hui (extraits) - « L’UAS adhère à l'EIT » », sur anti.mythes.voila.net (consulté le )
  57. [PDF]« Une grande figure disparaît », sur anti.mythes.voila.net (consulté le )
  58. [PDF]« La Raison n°549 mars 2010 - Notre ami Alexandre Hébert (1921-2010) », sur anti.mythes.voila.net (consulté le )
  59. [PDF]« In memoriam Alexandre Hébert », sur anti.mythes.voila.net (consulté le )
  60. [PDF]« Le Monde Libertaire n°1581 : jeudi 4 février 2010 - Alexandre Hébert… », sur anti.mythes.voila.net (consulté le )
  61. Cf. études de Guillaume Trousset, « Libertaires et syndicalistes révolutionnaires dans la Confédération générale du travail - Force ouvrière (1946-1957) », et Manuella Noyer, « L'union départementale CGT-FO de Maine-et-Loire de 1948 à 1956 ».
  62. [PDF]« Lettre aux anarchistes - 12 décembre 1899 - Préface au compte rendu par Fernand Pelloutier du Congrès général du Parti socialiste français. », sur anti.mythes.voila.net (consulté le )
  63. Voir sur le site Anti-mythes.
  64. Alain Besson, Jean-Marc Ayrault….
  65. Précisément, le Mouvement rural de la Jeunesse chrétienne, dont il fait partie de 1965 à 1970. Jean-Marc Ayrault y est du reste devenu marxiste (Voir page JMA), et est par ailleurs devenu agnostique. Mais Hébert aimait encore moins les « chrétiens de gauche » que ceux de droite.
  66. Alain Besson, Jean-Marc Ayrault. Une ambition nantaise…, éditions Coiffard, Nantes, 2004.
  67. « Je n'ai jamais diabolisé le FN », interview dans Ouest-France, 12 octobre 1999
  68. Date à préciser.
  69. Signé de Christiane Chombeau.
  70. « A propos du PT, de Blondel,de Lambert et de l'Anarcho-syndicalisme. »
  71. Cf. l'interview d'Alexandre Hébert dans Passions militantes et rigueur historienne de Karim Landais.
  72. Signé par Nicolas de la Casinière, par ailleurs correspondant nantais de Libération.
  73. « Force ouvrière : la maison Hébert et fils », sur L'Express.fr (consulté le ).
  74. Cette controverse peut paraître « non encyclopédique » ; pourtant, elle a concerné une personnalité aussi inattendue que Lionel Jospin, et quelques autres… Il est vraisemblable que le trotskisme en général et le lambertisme en particulier ont eu, dans l'histoire politique de la gauche française, une importance sans doute supérieure aux apparences immédiates.
  75. Sur le site anti.mythes.
  76. Site Anti-mythes, rubrique « Alexandre Hébert (Individus) ».
  77. Site Anti-mythes, rubrique « Union des anarcho-syndicalistes (Organisations) ».
  78. Site Anti-mythes, rubrique « Serge Mahé (Individus) ».
  79. Texte en ligne.
  80. Site Anti-mythes.
  81. Site Anti-mythes, 230 pages de documents (format A4).
  82. Voir blog Syndicalisme libre et indépendant.
  83. En ligne sur le site Pelloutier.net.
  84. En ligne sur le site Pelloutier.net.
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