Allemands de Roumanie

Les Allemands de Roumanie[1] (en allemand : Rumäniendeutsche) sont une minorité linguistique de Roumanie. Ils étaient 36 042 au recensement de 2011[2] et sont aujourd'hui assez uniformément répartis sur le territoire roumain, mais ont été bien plus nombreux au cours de l'histoire et concentrés dans certaines régions de Transylvanie. Le président roumain élu en 2014 et réélu en 2019, Klaus Iohannis, est issu de cette communauté.

Régions d'implantation des minorités germanophones en Transylvanie jusqu'en 1945.
Disposant de leur propre réseau scolaire confessionnel, les minorités germanophones de Roumanie, en Transylvanie et Bessarabie, avaient le meilleur taux d'alphabétisation de Roumanie en 1930 (vert).
Allemands de Roumanie
(ro) Germanii din România
(de) Rumäniendeutsche

Populations importantes par région
Timiș 8 504 (1,3 % de la population du județ) (2011)
Satu Mare 5 006 (1,5 % de la population du județ) (2011)
Sibiu 4 244 (1,1 % de la population du județ) (2011)
Population totale 36 042 (0,17 % de la population totale de la Roumanie) (2011)
Autres
Langues Allemand (dont les dialectes saxon de Transylvanie, souabe), roumain
Religions Luthéranisme, catholicisme
Ethnies liées Allemands
Répartition des Allemands de Roumanie en 2002
Panneau indicateur bilingue à l'entrée de Sibiu.
Inscription trilingue à Satu Mare.

Groupes

Les Allemands sont arrivés sur l'actuel territoire de la Roumanie en plusieurs vagues, du XIIe siècle jusqu'au XIXe siècle. Par conséquent, ils ne forment pas une communauté homogène, mais plusieurs groupes diversifiés, aux deux-tiers catholiques et au tiers protestants depuis l'édit de tolérance transylvain de 1565 :

Historique

Tous les Allemands de Roumanie ont été, dans l'histoire, de libres-artisans, maçons, mineurs, cultivateurs ou marchands, bénéficiant de franchises, patentes et privilèges ; il n'y a pas eu de servage parmi eux. Le groupe le plus ancien est celui des Saxons de Transylvanie, qui géographiquement a débordé sur les principautés danubiennes voisines de Moldavie et Valachie. Les « Saxons » (qui comprenaient en fait aussi des germanophones venus de Thuringe, de Franconie, de la vallée du Rhin, d'Alsace) sont venus dès le XIIIe siècle en tant que bûcherons, maçons, orpailleurs et mineurs au service des rois de Hongrie et de leurs vassaux les voïvodes transylvains, moldaves et valaques. Lors de la Réforme, les deux tiers des Saxons ont adopté le luthéranisme (alors que leurs voisins Sicules magyarophones adoptaient, pour moitié d'entre eux, le calvinisme).

Tous les autres groupes d'Allemands sont plus récents et, à l'exception des Landlers, sont catholiques : ils ont été colonisés ici au XVIIIe siècle et au XIXe siècle par les Habsbourg dans le cadre de l'Empire d'Autriche. Les Allemands bessarabiens et dobrogéens, pour leur part, sont arrivés entre 1820 et 1891, initialement installés par les Tzars russes au nord de la mer Noire. Les Allemands du Vieux Royaume, pour la plupart commerçants, tailleurs, coiffeurs, confiseurs ou ingénieurs, sont venus à diverses époques en Roumanie, avant qu'elle n'intègre la Bessarabie, la Bucovine et la Transylvanie.

Lors de l'unification de la Roumanie, tous ces groupes ont reçu la nationalité roumaine, ont pu sauvegarder leurs biens, presse et écoles, et envoyer des représentants au Parlement. Mais le pacte Hitler-Staline de 1939 se traduit en 1940 par l'occupation soviétique de la Bessarabie et de la Bucovine du Nord : les Allemands de ces régions ainsi que les Allemands de Dobrogée sont alors expulsés et rapatriés de force vers le Troisième Reich, pour y être recolonisés dans le Reichsgau Wartheland arraché à la Pologne, d'où ils seront à nouveau expulsés par l'Armée rouge en 1944-45 : la plupart n'y survivent pas.

Les Allemands de Roumanie ont eu des attitudes divergentes pendant la Seconde Guerre mondiale. Une minorité menée par Andreas Schmidt[3] constitua une filiale locale du parti nazi, demanda et obtînt d'être considérés comme ressortissants du Reich et d'être enrôlés dans la Wehrmacht et non dans l'armée roumaine ; une autre minorité, surtout parmi les mineurs du Haut-Jiu et les bûcherons de Transylvanie et de Bucovine, de tradition socialiste, s'y refusa et rejoignit l'opposition au régime fasciste, mais la plupart se tînt dans une prudente expectative[4],[5]. La fuite des premiers vers l'Allemagne commença à partir du lorsque la Roumanie déclara la guerre à l'Allemagne. Les décrets émis en par le gouvernement allié de Constantin Sănătescu considéraient les ressortissants du Reich comme des ennemis, civils ou militaires, à interner ou traiter en prisonniers de guerre, leur cas devant être éclairci ultérieurement, mais l'Armée rouge exigea que tous les Allemands de Roumanie sous uniforme allemand lui soient livrés, ce qui fut fait : la plupart (dont Andreas Schmidt) finirent leurs jours au Goulag[6]. Simultanément, les forces soviétiques commencèrent les expulsions de leurs familles, mais le gouvernement roumain protesta que ces expulsions handicapaient l'économie, sans pour autant s'y opposer[7]. De toute manière, après le coup d'état communiste du , le nouveau gouvernement roumain approuva toutes les exigences soviétiques et 213 000 Allemands de Roumanie furent expulsés sous divers prétextes, le plus fréquent étant celui de « collusion avec le fascisme »[8].

Après la guerre, au début du régime communiste de Roumanie, il restait dans le pays 384 708 Allemands sur les 786 000 d'avant-guerre, disposant d'écoles, journaux et théâtres dans leur langue[9], contrôlés bien sûr par le Parti communiste roumain mais autorisés à tisser des liens culturels avec l'Allemagne de l'Est. Néanmoins, c'est vers l'Allemagne de l'Ouest que la plupart d'entre eux demandèrent à émigrer durant cette période, quitte à payer des taxes au gouvernement roumain au prorata des études effectuées. Le mouvement d'émigration connut un pic après la chute de la dictature communiste en 1989 de sorte qu'au recensement de 2002, il restait 60 000 Allemands sur les 179 000 d'avant 1990.

Démographie

Évolution de la population allemande de Roumanie

  • 1930 : 745 421, soit 4,1 % de la population de la Roumanie[10], (23,7 % de la population du Banat[11], 8,9 % de la population de la Bucovine[12], 7,9 % de la population de la Transylvanie[11], 3 % de la population de la Bessarabie et 2,8 % de la population de la Dobroudja).
  • 1948 : 343 913, soit 2,2 % de la population de la Roumanie;
  • 1956 : 384 708, soit 2,2 % de la population;
  • 1977 : 359 109 ;
  • 1992 : 111 301 ;
  • 2002 : 60 008;
  • 2011 : 36 042[2].

Émigration

Chiffres officiels des Allemands ayant émigré en Allemagne de l'Ouest pendant les dernières années du régime communiste :

  • 12 809 en 1985,
  • 11 034 en 1986,
  • 11 639 en 1987,
  • 10 738 en 1988,
  • 14 598 en 1989.

On estime qu'à la fin de 1989, il y avait quelque 250 000 - 260 000 Allemands en Roumanie.

Ces départs n'allaient pas tous vers l'Allemagne mais aussi vers l'Autriche, les États-Unis, le Canada, l'Australie et la Nouvelle-Zélande.

Juste après la chute du régime communiste à la fin 1989, l'émigration a connu une forte croissance pour décroître par la suite :

  • 60 072 en 1990,
  • 15 567 en 1991,
  • 8 852 en 1992,
  • 5 945 en 1993,
  • 4 065 en 1994,
  • 2 906 en 1995,
  • 2 315 en 1996,
  • 1 273 en 1997.

En 2002, il y avait 59 764 Allemands en Roumanie, soit 0,3 % de la population du pays.

Personnalités

Saxons de Transylvanie

Allemands de Bucovine

Souabes du Banat

Notes et références

  1. Cet article est en bonne partie la traduction de l'article correspondant en roumain.
  2. Rezultatele finale ale Recensământului din 2011: (ro) « Tab8. Populația stabilă după etnie – județe, municipii, orașe, comune », sur Institutul Național de Statistică din România, (consulté le ).
  3. Andreas Schmidt, né le à Manarade (Transylvanie, Autriche-Hongrie), mort en 1948, à Vorkouta (Goulag, URSS) leader nazi (Volksgruppenführer) et membre de la Waffen-SS.
  4. Grigore Gafencu, Préliminaires de la guerre à l’est : de l’accord de Moscou (21 août 1939) aux hostilités de Russie (22 juin 1941), Egloff, Fribourg/Suisse, 1944
  5. Nicolette Frank, La Roumanie dans l’engrenage, Elsevier-Sequoia, Paris 1977
  6. Duţu A., Dobre F., Loghin L., Armata română în al doilea război mondial, 1941-1945 (L'Armée roumaine dans la seconde guerre mondiale), Dicţionar enciclopedic, éd. Enciclopedică, Bucarest 1999.
  7. Theodor Schieder (ed.) : Documents on the Expulsion of the Germans from Eastern & Central Europe, Bonn : Federal Ministry for Expellees, Refugees, & War Victims, vol.2/3 : The Expulsion of the German Population from Hungary and Rumania (1961).
  8. Florin Constantiniu, Une histoire sincère du peuple roumain, éd. Univers Enciclopedic, Bucarest 2008.
  9. Constantin Daicoviciu, Alex. Graur (dir.), Republica populară Romînă, éd. Meridiane, Bucarest 1960, 870 pp., p. 94.
  10. Recensământul general al populației României din 29 Decemvrie 1930, vol. II, pag. XXIV.
  11. Idem, pag. XXVII.
  12. Idem, pag. XXVI.

Voir aussi

Bibliographie

  • (de)Johann Böhm: Die Gleichschaltung der deutschen Volksgruppe in Rumänien und das Dritte Reich 1941-1944, Frankfurt am Main 2003, (ISBN 3-631-50647-3).

Lien externe

Articles connexes

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