Bataille de Badr

La bataille de Badr, du nom d’une vallée située entre La Mecque et Médine, est la première bataille victorieuse des Arabes musulmans. C'est la bataille de Mahomet contre le clan quraychite qui l'avait contraint à l'exil vers Médine et menacé de mort les musulmans[2]. Elle a eu lieu le 13 mars 624.

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Bataille de Badr
La bataille de Badr, enluminure du Siyar-i Nabi, vers 1595. Musée impérial de Topkapi d'Istanbul.
Informations générales
Date / 17 Ramadan 2 AH
Lieu Badr (en), Arabie
Issue Victoire musulmane
Belligérants
Arabes musulmans de MédineQuraychites de La Mecque
Commandants
Mahomet
Hamza
Abou Bakr
Omar
Ali
Mousab ibn Oumayr
Sa'd ibn Mu'adh
Quais Ibn Abi Saasa'a
Abu Jahl
Utbah ibn Rabi'ah
Umayyah ibn Khalaf (en)
Forces en présence
313 fantassins
72 cavaliers (montés sur 70 chameaux et 2 chevaux)
900 fantassins
270 cavaliers (montés sur 170 chameaux et 100 chevaux)
Pertes
14 morts (6 Mouhadjiroune et 8 Ansâr)70 morts[1]
70 prisonniers[1]

Guerres entre musulmans et Quraychites

Coordonnées 23° 44′ 00″ nord, 38° 46′ 00″ est
Géolocalisation sur la carte : [[Modèle:Géolocalisation/Arabie des Saud]]
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Origine de la bataille

Àu printemps 624, comme chaque année, une caravane quraychite quitta La Mecque pour rejoindre la Syrie[3]. Associée à celle à destination de l'Irak, cette caravane représentait une grande partie des revenus mecquois[3].

L’expédition fut ordonnée par Mahomet après qu’il eut reçu des informations selon lesquelles Kurz ibn Jabir al-Fihri avait volé quelques troupeaux en pâture appartenant aux musulmans. En conséquence, Mahomet aurait alors pris la tête d'un groupe de 70 compagnons, qui poursuivirent Kurz ibn Jabir al-Fihri jusqu'à Safouan, dans la banlieue de Badr. Mais celui-ci parvint à leur échapper[4],[5],[6].

Histoire

Mouvement des troupes quraychite et musulmane.

Il s'agit de l'attaque d'une grande caravane commerciale mecquoise, voyageant de Syrie vers La Mecque, dans le but de s'emparer des marchandises. Cette caravane était dirigée par Abû Sufyân, un Quraychite, qui, à cette époque, était un ennemi de Mahomet. Il avait rassemblé une force de 300[7] hommes pour protéger la caravane. Abû Sufyân réussit à éviter l'affrontement pendant plusieurs jours. Pendant ce temps, Abu Jahl rassemblait à La Mecque une force de 600 à 800 hommes pour défendre la caravane et éliminer Mahomet qui faisait obstacle au commerce mecquois.

Les deux forces se trouvèrent face à face le à un emplacement depuis nommé Badr (en), situé entre Médine et La Mecque. La bataille de Badr tourna à l'avantage du petit groupe des Arabes musulmans alors que leurs adversaires étaient beaucoup plus nombreux. Elle aurait fait 70 morts du côté mecquois (dont Abu Jahl) et seulement 14 de l'autre, qui aurait en outre capturé 70 prisonniers[1]. Ce succès fit beaucoup pour la réputation de Muhammad comme chef de guerre, grâce au butin qu'il rapporta.

L'histoire de cette bataille, évoquée dans le Coran[8], se retrouve postérieurement ainsi chez Tabari :

« Pendant qu'ils parlaient ainsi, jibril vint avec mille anges, se présenta au prophète et lui dit : « Sois content ; Dieu m'a envoyé à ton secours avec mille anges. » Puis il lui récita ce verset du Coran :

« Le jour où vous demandiez l'assistance de votre Seigneur, il vous exauça. Je vous assisterai, dit-il, de mille anges se suivant les uns les autres »[9]. Le Prophète dit : « Ô mon frère Gabriel, mille anges ! »

Gabriel dit : « Trois mille, Ô Mohammed. »

– « Trois mille ! » répéta le Prophète.

– « Oui, cinq mille », répliqua Gabriel.

Aussitôt le prophète sortit en courant de la cabane pour porter aux musulmans cette bonne nouvelle. Il cria à haute voix : « Dieu a envoyé trois mille anges à votre secours. »

Ils répétèrent dans leur joie : « Trois mille ! »

– « Oui, cinq mille », répliqua le prophète.

Ensuite Gabriel récita au prophète le verset suivant :

« Dieu vous a secourus à Badr, car vous étiez faibles… Alors tu disais aux fidèles : « Ne vous suffit-il pas que votre Seigneur vous assiste de trois mille anges ? » »[10] Le prophète récita le verset aux fidèles. Il vit comment les anges, tenant dans leurs mains des bâtons, se mettaient en ligne avec les musulmans. Dieu leur avait ordonné de se tenir dans les rangs des musulmans ; car moi, leur dit-il, j'ai jeté la crainte dans les cœurs des infidèles, et vous, frappez-les sur la tête, sur le cou et sur tout le corps. Il est dit dans le Coran :

« Ton Seigneur dit aux anges : Je suis avec vous »[11]
Représentation de cavaliers arabes[12].

Lorsque les anges se disposèrent à charger l'armée impie, le Prophète ramassa une poignée de poussière et la jeta contre les infidèles, en disant : « Que vos faces soient confondues ! » Dieu commanda au vent de porter cette poussière aux yeux des infidèles, qui en furent aveuglés. Chargés par les anges, qui étaient en avant des fidèles, ils se mirent à fuir. Les anges les poursuivirent, les frappèrent de leurs bâtons et les firent tomber. Chaque coup qu'un ange portait à un infidèle lui brisait tous les os de son corps, depuis la tête jusqu'aux pieds, et lui rompait les veines et les nerfs ; l'homme tombait et remuait convulsivement, sans qu'aucune blessure fût visible sur son corps, et sans que son sang coulât. Quand les fidèles arrivaient, ils attaquaient les hommes ainsi frappés, leur faisaient des blessures et faisaient couler leur sang. Les compagnons du Prophète ont raconté : Il y eut des hommes dont la tête fut séparée du corps et la nuque brisée avant que notre épée les eût atteints. Il y en avait d'autres qui, lorsque nous les attaquâmes, étaient étendus par terre, agonisant, mais sans blessure. Leurs corps étaient brisés, mais la vie ne les avait pas encore quittés. Nous reconnûmes que cela n'était pas de notre fait, mais l'œuvre de Dieu. Il est dit, en effet, dans le Coran :

« Ce n'est pas vous qui les avez tués, mais Dieu ; ce n'est pas toi qui as jeté la poussière, mais Dieu »[13] »

 Tabari, Op. cit., vol. II, « Mohammed, le sceau des prophètes », p. 137-176.

Après la bataille

Morts

Lorsque la bataille s’acheva, les corps des Quraychites furent enterrés dans une fosse commune[14].

Prisonniers

Le sort des prisonniers polythéistes fit l'objet de divergences entre les sahaba. Abou Bakr suggéra de les épargner, Omar de les tuer et Abdullah ibn Rawaha de les brûler vifs. Mahomet loua ces trois propositions, voyant dans celle d'Abou Bakr les qualités d'Ibrahim et de ʿĪsā, dans celle d'Omar les qualités de Moussa, et dans celle d'Abdullah ibn Rawaha, les qualités de Nûh. À chaque fois, il cita des passages du Coran pour justifier ces dires[15]. Finalement il décida de favoriser la position d'Abou Bakr (car les prisonniers furent traités humainement[16],[17], et libérés après le paiement d'une rançon ou, pour certains d'entre-eux, à condition d'apprendre à dix personnes comment lire et écrire[18],[19]), mais il regretta son choix[1]. En effet, après cela, les versets suivants furent descendus :

« Un prophète ne devrait pas faire de prisonniers avant d'avoir prévalu [mis les mécréants hors de combat] sur la terre. Vous voulez les biens d'ici-bas, tandis qu'Allah veut l'au-delà. Allah est Puissant et Sage.

N'eût-été une prescription préalable d'Allah, un énorme châtiment vous aurait touché pour ce que vous avez pris. [de la rançon] »

 Le Coran, « Le Butin », VIII, 66-67, (ar) الأنفال

Exécutions

Deux des prisonniers capturés à Badr, à savoir Nadr ibn al-Harith (en) et Oqba ibn Abi Mouait (en), auraient été exécutés sur ordre de Mahomet. Cependant, selon de nombreux témoignages jugés fiables, tels qu’un certain nombre de récits dans le Sahih de l'imam al-Boukhari et le recueil biographique (Tabaqat Al-Kubra) d’Ibn Sa’d, Oqba n’a pas été exécuté, mais a été tué lors des combats sur le champ de bataille à Badr et faisait partie des chefs quraychites dont les cadavres ont été enterrés dans la fosse commune[20],[21],[22].

Enfin, l'exécution de Nadr ibn al-Harith semble également pouvoir être sujette à caution : Dans le Tabaqat fuhul ash-Shu'ara d'Ibn Sallâm al-Jumahî, il est dit que Nadr est décédé de mort naturelle (maladie) refusant de se nourrir après avoir été fait prisonnier. D'autres récits (dans la sîra d'Ibn Ishaq, rapportée via la version d'Ibn Hichâm, les Sunan d'al-Bayhaqî) mentionnent l'exécution de Nadr par Ali, mais sans chaîne de transmission. Des textes (dans les Sunan d'al-Bayhaqî, dans le Kitab al-Amwal de Hamid ibn Mukhlid ibn Zanjawayh au numéro 418, dans le Kitab al-Marasil d'Abou Dawoud, dans l'Ansab al-Ashraf d'Al-Balâdhurî) faisant état de l’exécution de Nadr, disposent de chaîne de transmission mais toutes sont mursal, c'est-à-dire qu'aucune d'entre elles ne remontent jusqu'à Mahomet ou à ses compagnons (elles s'arrêtent à Ash-Shafî'î, qui vécut plus d'un siècle et demi après Muhammad, ou à Sa'id bin Jubair, qui était un tābi). Enfin, certains d'entre eux différent quant à l'identité du bourreau de Nadr. Hamid ibn Mukhlid ibn Zanjawayh rapporte ainsi dans son Kitab al-Amwal, que ce serait Miqdad ibn Amr qui l'aurait mis à mort. Il existe cependant des versions (celle rapportée par At-Tabarani dans al-Awsat au numéro 3892, ou celle d'Abu al-Faraj al-Isfahani dans son Kitab al-Aghani) dont les chaînes de transmissions remontent jusqu'aux compagnons du prophète (ibn Abbas, Ali), mais celle-ci sont rendues inauthentiques par la présence de narrateurs inconnus, pas fiables, très faibles voire carrément des menteurs. Quoi qu'il en soit, Ibn Kathir a tout de même recourt à l'histoire de l’exécution de Nadr dans son tafsir (interprétation du Coran) du verset 31 de la sourate 8.

Sources primaires islamiques

Badr dans le Coran

La bataille de Badr est l'une des rares batailles explicitement décrites dans le Coran. Elle est même mentionnée nommément dans le cadre d'une comparaison avec la bataille d'Uhud.

Sourate 3: La famille d'Imran[23]

« 121. Lorsqu'un matin, tu (Mahomet) quittas ta famille, pour assigner aux croyants les postes de combat et Allah est Audient et Omniscient.

122. Quand deux de vos groupes songèrent à fléchir ! Alors qu'Allah(DIEU) est leur allié à tous deux ! Car, c'est en Allah que les croyants doivent placer leur confiance .

123. Allah vous a donné la victoire, à Badr, alors que vous étiez humiliés. Craignez Allah (DIEU) donc. Afin que vous soyez reconnaissants !

124. (Allah vous a bien donné la victoire) lorsque tu disais aux croyants ; "Ne vous suffit-il pas que votre Seigneur vous fasse descendre en aide trois milliers d'Anges" ?

125. Mais oui! Si vous êtes endurants et pieux, et qu'ils [les ennemis] vous assaillent immédiatement, votre Seigneur vous enverra en renfort cinq mille Anges marqués distinctement.

126. Et Allah (DIEU) ne le fit que (pour vous annoncer) une bonne nouvelle, et pour que vos coeurs s'en rassurent. La victoire ne peut venir que d'Allah (DIEU), le Puissant, le Sage ;

127. pour anéantir une partie des mécréants ou pour les humilier (par la défaite) et qu'ils en retournent donc déçus. »

La bataille de Badr est également mentionnée dans la sourate 8 : Al-Anfal, qui détaille le comportement et les opérations militaires. "Al-Anfal" signifie "le butin" et fait référence à la discussion d'après-guerre au sein de l'armée musulmane sur la manière de diviser le pillage de l'armée Quraychite. Bien que la sourate ne nomme pas Badr, elle décrit la bataille, et on pense généralement que plusieurs de ces versets datent de la bataille ou peu après, comme ceux cités plus haut.

Dans la culture

Notes et références

  1. (en) « Sahih Muslim / Hadith 1763 », sur Quranx.com (consulté le )
  2. « Mohamed fin politique et guerrier », sur Le Point
  3. (en) Richard A. Gabriel, Campaigns and commanders, vol. 11 : Muhammad: Islam's first great general, University of Oklahoma Press, , 255 p. (ISBN 978-0-8061-3860-2 et 0-8061-3860-2, présentation en ligne), p. 86.
  4. Saifur Rahman Al-Mubarakpuri, When the Moon Split, DarusSalam, (lire en ligne), p. 147.
  5. Sameh Strauch, Biography of the Prophet, Darussalam Publications, , 992 p. (ISBN 978-9960-98-032-4, lire en ligne), p. 400.
  6. Mosab Hawarey, The Journey of Prophecy; Days of Peace and War (Arabic), Islamic Book Trust, (lire en ligne) Note : le livre contient une liste des batailles de Mahomet en arabe, la traduction anglaise est disponible ici.
  7. D'après les chroniques de Tabari, la version la plus exacte avance que le nombre de musulmans était de 314 hommes.
  8. Le Coran, « La Famille d’Imran », III, 13, (ar) آل عمران ; Le Coran, « Le Butin », VIII, 5-6, 15-19, 47-48, 65, (ar) الأنفال.
  9. Le Coran, « Le Butin », VIII, 9, (ar) الأنفال.
  10. Le Coran, « La Famille d’Imran », III, 124, (ar) آل عمران.
  11. Le Coran, « Le Butin », VIII, 12, (ar) الأنفال.
  12. Rashid al-Din, « Khalili Collection, MSS. 727, folio 66a », Jami' al-Tawarikh, 1305-14.
  13. Le Coran, « Le Butin », VIII, 17, (ar) الأنفال.
  14. « La bataille de badr », (consulté le )
  15. ABOUL FIDA' ISMAIL BEN KATHIR (trad. Ahmad harakat), L'interprétation Du CORAN (TEXTE ET EXPLICATIONS) تفسير ابن كثير »], vol. 2, Beyrouth - Liban, Dar el Fiker, , 890 p., p. 144
  16. (en) « Sahih Bukhari / Hadith 3008 », sur Quranx.com (consulté le )
  17. William Muir, The Life of Mahomet, Londres, Smith, Elder and Co., , Volume 3 éd. (lire en ligne), p. 122
  18. William Muir, « The Life of Mahomet: With Introductory Chapters on the Original Sources for the Biography of Mahomet, and on the Pre-Islamite History of Arabia », London, Smith, Elder and Co, (consulté le ), ix
  19. (en) « Battles », sur Al-Islam.org, (consulté le )
  20. (en) « Sahih Bukhari / Hadith 240 », sur Quranx.com (consulté le )
  21. (en) « Sahih Bukhari / Hadith 520 », sur Quranx.com (consulté le )
  22. Al Tabaqat-al-Kubra, Muhammad Ibn Sa'd, Volume 2, p. 260, ghazwatul Badr, Darul Ihya'it-Turathil-'Arabi, Beirut, Lebanon, First Edition, (1996)
  23. (en) « Le Coran/Sourate 3 : La famille d’Imran (Al-Imran) - wikilivres », sur wikilivres.org (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

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