Beni Said
Aït Said (variante: Bethioua, Bettiwa, Ibettiwen, Botouïa en tifinagh : ⴰⵉⵟ ⵙⴰⵉⴹ en arabe : بني سيد Ait Said) est une tribu berbère située au nord-est du Maroc dans le massif montagneux du Rif dans l'actuelle province de Driouch. Au 18e siècle, la tribu s'est divisée en deux branches dont l'un d'eux s'est installé près de Arzew.
Elle est située entre la tribu de Beni Sidel au nord-est , Temsamane à l'ouest , Aït Oulichek ,Tafersit au sud et celle de Ibdarsen (Metalsa en rifain) au sud-est.
Chacune de ces tribus possède un centre administratif regroupant les représentants de l’État et des services publics et où a lieu le marché hebdomadaire, le souk. Le centre administratif de Ait Said est la municipalité de Dar El Kebdani.
Les villes principales sont Tazaghine et Amejjaou.
Il existe deux Beni Said dans le Rif , l'une près de Tetouan appartient aux Jbalas , l'autre près de L'oued Kert appartient aux Rifains.
Subdivision
La tribu est composée de 5 fractions ou clans appelés tharfiqt en rifain[1].
- Aït Mait au nord-est d’Ait Oulichek
- Aït Tekkouk
- Amejjaou
- Aït Zaoumi (Izaoumen) près de Temsamane.
- Aït Abdenain (Zegzawa, Irhoumen).
Histoire
René Basset nous livre une approche plus proche même des sources arabes antérieures aux migrations des Bettioua. L'historien Ibn Khaldoun (1332-1406) cite « بطيوة » (Botioua) comme l'une des trois divisions du Maroc. Au xie siècle EL Bekri dans son « كِتاب ألمسالك و ألممالك » (livre des routes et des royaumes) mentionne un « محرس بُطيوة » (Mahrs Botiouia) près de Sfax. Botioua, prononcé aussi Bettiouia, semble avoir désigné une des plus importantes tribus du Rif marocain. Renforçant cette hypothèse, ce terme a laissé plusieurs traces dans divers lieux du nord du Maroc[2].
L'historien Ibn Khaldoun nous informe notamment que le nom de Bettioua est à l'origine celui d'une grande confédération ayant pour habitat la région du Rif, ce nom se trouve tantôt écrit Botouïa, tantôt Battouya, Ibettoyen, tantôt Bettioua. Il s'agit d'un rameau des Berbères sédentaires des Sanhadja, dits 'fondateurs d'empires', dont le rameau sédentaire se trouve dans les Kabylies et dont parmi les principales de leurs réalisations figure l'empire fatimide, la Qalaa des Beni Hammad, le royaume de Bougie ou encore l'empire almohade. Parmi les principales familles sanhajis d'Alger figure les Botouïa aux côtés des Beni Mezghanna[3].
À la chute des Almohades , les Ibettiwen du Rif tombèrent aux mains des Merinides qui établirent leur souveraineté au Fès . Les habitants du Rif ne firent aucune difficulté pour reconnaître les nouveaux maîtres mérinides et découvrirent même le moyen de tirer d'eux de sérieux avantages dans l'histoire. Une des femmes des Ibettiwen, Oum el Youm, fille des Ouled Mallahi de Tafersit entra par mariage dans la famille royale et mit au monde un garçon qui devint le souverain mérinide Yaqoub ben Abdelhaq.
Le Maqsad (Vie des Saints du Rif) dit également: [...] Appelée aussi Bettiwa. Cette tribu paraît être demeurée importante et connue sous ce nom historique jusqu'au XVIIIe siècle. Dans sa 'Relation' Rolan Fréjus parle encore des Boutoye qui avaient alors un gouverneur en commun avec les Temsamanes. Peu après et sans que l'on en voie bien la raison ce nom disparaît de plus de plus de la carte. Cependant cette disparition coïncide avec l'entrée sur la scène politique de la famille rifaine des Hamamiyin de Temsamane et l'on pense que l'on puisse l'attribuer en grande partie à l'épuisement provoqué par les levées de plus en plus nombreuses d'effectifs que les Caïds de cette famille utilisèrent dans le Maroc occidental d'abord dans la guerre sainte , puis dans leur lutte contre les sultans (sièges de Larache , d'Assilah , de Badis, de Ceuta , de Tanger, de Tetouan , de Mazagan , de Taroudant). Des Bettûya qui constituèrent ces contigents bien peu de ceux qui survècurent retournèrent dans leur pays, et le plus grand nombre se fixa dans les villes conquises et leur banlieue. La tribu ainsi dépeuplée perdit de sa dénomination et celles d'anciennes sous-fractions (Beni Oulichek, Beni Said etc) s'y substituèrent[4].
En effet en 1678 , un certain général rifain Haddu Al-Battiwi , libère à l'aide de ses troupes la ville de Tanger de l'occupation britannique. L'on cite dans son armée , des Ibettiwen[5]. Ainsi dans la région du Fahs de Tanger , à Assilah et Larache les patronymes Bettioui , Abetuy et Bettiwa sont répandus[6], tout comme la chanteuse de musique andalouse Zohra Bettiwa.
Le Maroc inconnu de 1855 souvient également que : De Tazaghine , Mohamed passe à Zegzaoua. On appelle ainsi une enfilade de hameaux, se succédant sans interruption , de L'E à l'O. Non loin de ce bourg , nous remarquons le village de Bettioua , dont les Berbères d'Arzew (Bethioua) sont originaires. C'est ce qu'ils affirment eux-mêmes et c'est ce que disent les indigènes de Beni Said qui viennent dans le département d'Oran louer leurs bras aux colons. Pendant le séjour que Mohammed fit à Bettioua , il eût l'occasion de parler de ses frères que la destinée (el-mektoub) à malheureusement placée sous l'autorité chrétienne. Exploration du Rif, page 131 [7].
La tribu, comme bon nombre de tribus marocaines, garda pendant très longtemps une relative autonomie vis-à-vis du sultan marocain Bilad es Siba . En 1766, le sultan Sidi Mohamed Ben Abdallah décida de razzier plusieurs tribus rifaines dont les Beni Said pour les amener à se soumettre entièrement[8]. En 1895, la tribu possède toujours une relative autonomie, cependant un Caïd nommé par le Sultan Alaouite est toléré uniquement au marché de Kebdani.
Début 1921, les Ait Said sont soumis par le général Sylvestre lors de la campagne du Rif, durant le protectorat espagnole. Alliés avec les partisans d'Abdelkrim El Khattabi, ils se rebellèrent contre les Espagnols et les écrasèrent à Annoual (petit bourgade au nord de la tribu) avant de participer à la création de l’éphémère République du Rif.
Après la guerre du Rif, une importante famine et de nombreuses épidémies de maladies ont frappé la région, obligeant un grand nombre de Rifains à émigrer vers l'Algérie française ainsi que d'autres villes marocaines. À l'instar d'autres tribus rifaines, elle a aussi fourni un contingent important parmi la diaspora marocaine en Europe, notamment aux Pays-Bas.
Notes et références
- (es) Abdelhak Aoufi, « Haj Simohame - Sa profession », sur www.mohamedaoufi.com (consulté le )
- Le soufisme et zaouyas au Maghreb de Halima Ferhat, 2009 , pages 141 et 142|Sur la tribu des Battiwa entre Alhucemas et Taza , de la vallée du Nekkor à la Moulouya
- « Article tiré du défunt : Tablat.DzBlog.com - Tablat, ma ville, le blog de tous les Tablatis », sur Tablat, ma ville, le blog de tous les Tablatis (consulté le ).
- El Maqsad Vie des Saints du Rif au 5ème siècle par G.S.Colin, Archives Marocaines , en pages 166 et 167 Explications sur les Bettiwa.
- Amar bin Haddu al-Battiwi. The origins of this individual, however, were from the Thimsaman tribe and not from that of the Aith Sa'id, and Mawlay lsma'il had appointed him governor of al-Qsar alKbir|Tribe and Society in Rural Morocco 2014 by David M Hart , en page 163]|
- Laperrine et al., « Les Bettioua du Viel-Arzew », Revue Africaine, Samuel Biarnay, René Basset , Société Historique Algérienne, Of. Pub. Univ. Alger, vol. 54, , p. 97-194 (lire en ligne)| En Page 116 , sur Tanger et le sahel tangérois et les patronymes Abetuy et Bettioui
- Le Maroc inconnu, Auguste Mouliéras , 1855 , Exploration du Rif partie 1 , page 131 , tribu des Beni Said|
- Emile Larose, « Bulletin de l'Enseignement Public du Maroc, », n° 71, , p. 43 (lire en ligne)
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