Blowout

Dans l’industrie pétrolière, un blowout désigne l’éruption incontrôlée de pétrole brut, de gaz naturel, de condensats de gaz naturel ou du mélange de ces hydrocarbures, ou d'un autre gaz (CO2 par exemple[1]) depuis un puits de forage ou d'exploitation. Il correspond à un échec du contrôle de la pression du puits[2].

Pour le film de Brian de Palma, voir Blow Out.

Blowout (puits de Lucas Gusher, Spindletop, au Texas en 1901)
Blowout issu du puits Ixtoc I.
Autre photographie du blowout du puits Ixtoc I.
incendie après le Blowout subi par la plate-forme Deepwater Horizon, 21/04/2010

C'est l'un des risques les plus graves et les plus coûteux pour une installation de forage de gaz ou pétrole. Il augmente avec la profondeur du forage, et dans le cadre d'une recherche d'hydrocarbures non conventionnels, les forages profonds dits HP/HT (haute pression/haute température) sont de plus en plus nombreux.

Avant la pressurisation des puits, dans les années 1900, les blowouts représentent des spectacles courants.

Origines des blowouts

Réservoir sous pression

Le pétrole brut est un liquide d'origine naturelle, inflammable, composé d'un mélange d’hydrocarbures de différents poids moléculaires et d'autres composés organiques que l'on retrouve dans des formations géologiques souterraines. Comme la plupart de ces hydrocarbures sont plus légers que la roche et l'eau, ils ont tendance à migrer vers le haut, à travers les différentes strates minérales jusqu'à atteindre la surface ou se retrouver piégés dans des roches poreuses appelées roches-réservoirs, surmontées d'une couche imperméable, la roche-piège. Cependant ce processus peut être modifié par des courants d’eau souterrains capables de transporter le brut sur des centaines de kilomètres horizontalement, ou même sur de courtes distances vers les profondeurs, avant qu'il ne se retrouve enfermé par la roche-piège. Ces hydrocarbures rassemblés dans un réservoir forment un champ pétrolifère dont on extrait le pétrole par forage et pompage. La pression mesurée dans le puits de forage dépend de la profondeur de forage et des caractéristiques du kérogène et de la roche source.

Déclenchement et surveillance préventive

En 2010, le contrôle de la pression d'éruption dans les puits de pétrole s'effectue par la ré-injection sous pression des boues de forage. Si l'équilibre n'est pas obtenu, alors le pétrole mélangé au gaz et à l'eau va commencer à faire irruption dans l'espace annulaire entre le train de tiges de forage et les parois du puits ou à l'intérieur même du tube de forage, provoquant un à-coup de pression[3] (kick). Si le puits n'est pas obturé en fermant les vannes du bloc d'obturation à mâchoires (blow out preventer), un tel à-coup de pression peut dégénérer en éruption si ces fluides atteignent la surface, particulièrement s'ils contiennent du gaz qui va se dilater lors de son ascension dans le puits, diminuant d'autant la densité du fluide en éruption. Un tel à-coup de pression survient en cas de mauvais contrôle de la densité des boues réinjectées, en cas de surpression imprévue de la poche de gaz ou de perte des fluides de forages dans une formation appelée « zone de perte de circulation » (thief zone).

Le signe annonciateur d'un à-coup de pression est une modification de la vitesse de retour des boues de forage déversées dans le bac à boues.
L'équipe de forage ou l'ingénieur des boues surveillent le niveau de ce bac à boues, et une élévation de ce niveau signifie que la tête de forage a rencontré une zone de haute pression. À l'opposé la baisse de ce niveau indiquerait une perte de circulation. Le débit de retour des boues peut aussi être régulé étroitement en fonction de celui injecté dans les tubes de forage. Un ralentissement de ce débit de retour signifie qu'une partie des boues injectées s'échappe dans une zone de perte de circulation, sans que ce soit nécessairement un à-coup de pression, ni que cela ne le devienne. Une zone de haute pression provoquera, elle, l'accélération du débit de retour des boues.

Accidents notables de type blowouts

Source : industrie pétrolière[4],[5]

AnnéeNom du puits (rig)PropriétaireTypeInformations sur les dégâts
1955S-44Chevron CorporationSub Recessed pontoonsBlowout et incendie. Remis en service.
1959C. T. ThorntonReading & BatesJackupBlowout et incendie.
1964C. P. BakerReading & BatesDrill bargeBlowout dans le golfe du Mexique, destruction et 22 morts.
1965TrionRoyal Dutch ShellJackupDestruction par blowout.
1965PaguroSNAMJackupDestruction par blowout et incendie.
1968Little BobCoralJackupBlowout et incendie, 7 morts.
1969Wodeco IIIFloor drillingDrilling bargeBlowout
1969Sedco 135GSedco IncSemi-submersibleDégâts par blowout.
1969Rimrick TidelandsODECOSubmersibleBlowout (dans le golfe du Mexique).
1970Stormdrill IIIStorm DrillingJackupBlowout et dégâts induits par l'incendie.
1970Discoverer IIIOffshore Co.DrillshipBlowout (mer de Chine méridionale).
1971Big JohnAtwood OceanicsDrill bargeBlowout et incendie.
1971inconnuFloor DrillingDrill bargeBlowout et incendie, Pérou, 7 morts [réf. nécessaire].
1972J. Storm IIMarine Drilling Co.JackupBlowout (dans le golfe du Mexique).
1972M. G. HulmeReading & BatesJackupBlowout et destruction (mer de Java).
1972Rig 20Transworld DrillingJackupBlowout (golfe de Martaban).
1973Mariner ISante Fe DrillingSemi-subBlowout (Trinidad, 3 morts).
1975Mariner IISante Fe DrillingSemi-submersiblePerte du BOP durant le blowout.
1975J. Storm IIMarine Drilling Co.JackupBlowout (golfe du Mexique)[citation nécessaire].
1976Petrobras IIIPetrobrasJackupPas d'information.
1976W. D. KentReading & BatesJackupDégâts subis lors du creusement d'un puits de secours/décharge (relief well)[citation nécessaire].
1977Maersk ExplorerMaersk DrillingJackupBlowout et incendie (mer du Nord[citation nécessaire].
1977Ekofisk BravoPhillips PetroleumPlateformeBlowout en mer du Nord (Norvège)[6].
1978Scan BayScan DrillingJackupBlowout et incendie (golfe Persique)[réf. nécessaire].
1979Salenergy IISalen OffshoreJackupBlowout (golfe du Mexique).
1979Sedco 135FSedco DrillingSemi-submersibleBlowout et incendie (golfe de Campeche, puits Ixtoc I[7] ; 454 000 à 480 000 tonnes de pétrole dispersées dans l'environnement[8].
1980Sedco 135GSedco DrillingSemi-submersibleBlowout et incendie (Nigeria).
1980Discoverer 534Offshore Co.DrillshipFuite de gaz et incendie [réf. nécessaire].
1980Ron TappmeyerReading & BatesJackupBlowout (golfe Persique), 5 morts [réf. nécessaire].
1980Nanhai IIPeoples Republic of ChinaJackupBlowout (Hainan)[réf. nécessaire].
1980Maersk EndurerMaersk DrillingJackupBlowout (mer Rouge), 2 morts.[réf. nécessaire].
1980Ocean KingODECOJackupBlowout et incendie (golfe du Mexique), 5 morts[9].
1980Marlin 14Marlin DrillingJackupBlowout (golfe du Mexique)[réf. nécessaire].
1981Penrod 50Penrod DrillingSubmersibleBlowout et incendie (golfe du Mexique)[citation nécessaire].
1985West VanguardSmedvigSemi-submersibleExpulsion de gaz, blowout et incendie (mer de Norvège), 1 blessé.
1981Petromar VPetromarDrillshipExpulsion de gaz, avec chavirage du navire de forage (mer de Chine)[citation nécessaire].
1988Ocean OdysseyDiamond Offshore DrillingSemi-submersibleExpulsion de gaz, blowout au niveau du BOP suivi d'un incendie (partie anglaise de la mer du Nord), 1 mort.
1989Al BazSante FeJackupExpulsion de gaz, blowout et incendie (Nigeria), 5 morts[10].
1992Fergana Valley oil spill
puits n°5 de Mingbulak
 ?Forage continentalBlowout, fuite de 35 000 à 150 000 barils par /jour qui a duré 2 mois (259 000 à 285 000 t en tout)[11],Oil and Gas Resources of the Fergana Basin (Uzbekistan, Tadzhikistan, and Kyrgyzstan) ; Energy Information Administration ; Office of Oil and Gas ; U.S. Department of Energy ; déc. 1994, ref:DOE/EIA-0575(94) PDF, 143 pages (voir p 8)
1993ActiniaTransoceanSemi-submersibleBlowout sous-marin (Vietnam)[12]
2001Ensco 51Valaris plcJackupFuite de gaz, avec blowout et incendie (golfe du Mexique), pas de morts[13]
2002Arabdrill 19Arabian Drilling Co.JackupDestruction de la plateforme (Structural collapse), blowout, incendie et effondrement[14]
2004Adriatic IVGlobal Sante FeJackupBlowout et incendie sur la plateforme Temsah (Méditerranée/Adriatique)[15]
2007UsumacintaPEMEXJackupUn orage a déplacé le forage causant un blowout sur le puits Kab 101, tuant 22 personnes[16].
2009West Atlas / MontaraSeadrillJackup / PlatformBlowout et incendie sur rig et plateforme (Australie)[17].
2010Deepwater HorizonTransoceanSemi-submersibleBlowout et incendie sur le rig, blowout sous-marin, qui ont tué 11 personnes dans l'explosion qui a suivi (400 000 à 700 000 tonnes de pétrole dispersées dans l'environnement, avec du gaz et divers polluants)
2010Vermilion Block 380Mariner EnergyPlatformBlowout et incendie, 13 survivants, 1 blessé[18],[19].

Blowout de CO2 ; problème émergent ?

Après trente ans d'injection de CO2 (acidifiant) pour la « récupération secondaire » (« stimulation » de puits, récupération assistée de pétrole ou gaz naturel par exemple), la pression et la corrosion évolue, et le risque de blowout de CO2 augmente, notamment dans les puits vieillissants, lors des opérations de reconditionnement ou recomplétion de puits[20].
Les stockages géologiques profonds, dont le stockage géologique de CO2 pourraient aussi être concernés, notamment parce que la pression va y augmenter au fur et à mesure que l'on y injectera du gaz, alors qu'avec les puits de pétrole ou de gaz, la pression tend à diminuer au fur et à mesure de l'exploitation[1].

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Base de données

Bibliographie

  • (en) Dahl E. ; Bern T. I. ; A 100-well study of offshore blowout causes ; rendu d'enquête sur les causes de cent éruptions de puits de pétrole et de gaz en mer, faite dans le cadre du programme de sécurité maritime en mer du Nord, avec analyse des raisons de la chaîne des événements aboutissant à l'éruption) ; Norwegian maritime research, 1983, vol. 11, no4, pp. 19-26 ; Ed:Selvig, Oslo (Fiche Inist/CNRS)
  • (en) Holand, Per Offshore Blowouts Causes and Trends Doctoral Dissertation, Norwegian Institute of Technology, Department of Production and Quality Engineering, Trondheim, Norway, March 1996
  • (en) Holand, Per: Experienced Offshore Blowout Risk presented at the IADC 1996 Well Control Conference of the Americas, Rio de Janeiro 31. July - 2. August 1996.
  • (en) Holand, Per Offshore Blowouts Causes and Control, Gulf Publishing Company, Houston Texas, 1997
  • (en) Johansen, O., 2000. DeepBlow ; a Lagrangian plume model for deep water blowouts. Spill Science & Technology Bulletin 6, 103–111.
  • (en) Johansen, Ø., Rye, H., Melbye, A.G., Jensen, H.V., Serigstad, B., Knutsen, T., 2001. DeepSpill JIP––Experimental Discharges of Gas and Oil At Helland Hansen, juin 2000, Technical Report. SINTEF Report STF66 F01082, SINTEF Applied Chemistry, Trondheim (Norvège), 159 p.
  • (en) Oisten Johansen & al, DeepSpill - Field study of a simulated oil and gas blowout in deep water ; Spill Science & Technology Bulletin, Vol.8, N°s5-6, pp 433-443, Elsevier, PDF, 11 pages
  • (en) Zheng, L., Yapa, P.D., 1998. « Simulations of oil spills from underwater accidents, II: Model verification ». Journal of Hydraulic Research, IAHR 36, 117–134.
  • (en) OGP, Blowout Frequencies, OGP report 434-17 March 2010
  • (en) Blowout and Well Release Characteristics and Frequencies, 2006; SINTEF, STF50 F06112, 2006.
  • (en) Blowout and well release frequencies based on SINTEF offshore blowout database 2010 ; (revised). Scandpower report No. 19.101.001-3009/2011/R3
  • (en) S Sawaryn, W Sanstrom, G McColpin (2006), The management of drilling-engineering and well-services software as safety-critical systems ; SPE Drilling & Completion, 2006 ; onepetro.org

Vidéographie

Références

  1. Prston D. Jordan, Well blowout rates and consequences in California Oil and Gas District 4 from 1991 to 2005: implications for geological storage of carbon dioxide ; Environmental geology, 2008-05-08, Springer, (version PDF
  2. (en) R. Westergaard, All About Blowout, Norwegian Oil Review, 1987. (ISBN 82-991533-0-1).
  3. (fr) Tecnhip, Dictionnaire des sciences et techniques du pétrole, Comprehensive dictionnary of Petroleum Science and Technology, 1993. (ISBN 2710806487).
  4. All About Blowout, R. Westergaard, Norwegian Oil Review, 1987 (ISBN 82-991533-0-1)
  5. Rig disaster Website : http://home.versatel.nl/the_sims/rig/i-blowout.htm « Copie archivée » (version du 6 août 2018 sur l'Internet Archive)
  6. « Page de l'accident « Bravo » sur la base du Cedre »
  7. Oil Rig Disasters Website : http://home.versatel.nl/the_sims/rig/ixtoc1.htm « Copie archivée » (version du 6 août 2018 sur l'Internet Archive)
  8. Black Tides: The Worst Oil Spills in History, 31 mai 2010
  9. http://openjurist.org/813/f2d/679/incident-v-ocean
  10. Rig Disaster Website : http://home.versatel.nl/the_sims/rig/albaz.htm « Copie archivée » (version du 6 août 2018 sur l'Internet Archive)
  11. Oil and gas journal
  12. http://home.versatel.nl/the_sims/rig/actinia.htm « Copie archivée » (version du 6 août 2018 sur l'Internet Archive)
  13. Oil Rig Disasters website : http://home.versatel.nl/the_sims/rig/ensco51.htm « Copie archivée » (version du 6 août 2018 sur l'Internet Archive)
  14. Oil Rig Disasters Website : http://home.versatel.nl/the_sims/rig/ad19.htm « Copie archivée » (version du 6 août 2018 sur l'Internet Archive)
  15. Oil Rig Disasters Website : http://home.versatel.nl/the_sims/rig/adriatic4.htm « Copie archivée » (version du 6 août 2018 sur l'Internet Archive)
  16. Usumacinta website : http://home.versatel.nl/the_sims/rig/usumacinta.htm
  17. , ABC
  18. September 2 oil rig explosion, CNN
  19. New oil rig explosion in Gulf of Mexico « Copie archivée » (version du 6 août 2018 sur l'Internet Archive) WFRV
  20. Skinner (Well Control Engineering Manager), CO2 blowouts: An emerging problem: Well control and intervention (Cudd Well Control) ; World oil, Houston (USA), 2003, vol. 224, no1, pp. 38-42 [4 page(s) (article)] (ISSN 0043-8790) ([Fiche Inist/CNRS])
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