Cône asymptotique

En mathématiques, et plus précisément en analyse convexe, le cône asymptotique d'un convexe fermé non vide d'un espace vectoriel est l'aspect qu'il prend lorsqu'on le voit d'infiniment loin (la définition précise est donnée ci-dessous) ; il ressemble alors à un cône. Cette description intuitive permet de « comprendre » pourquoi le cône asymptotique est réduit à un point si, et seulement si, le convexe auquel il est associé est borné. Un élément du cône asymptotique est appelé une direction asymptotique de l'ensemble convexe de départ. Lorsqu'on suit une direction asymptotique, en partant d'un point d'un convexe fermé non vide, on reste dans cet ensemble.

Certains auteurs[1] préfèrent utiliser les appellations cône de récession et direction de récession à cône asymptotique et direction asymptotique, parce que la notion n'a pas de rapport direct avec celle d'asymptote. Le qualificatif asymptotique est en réalité utilisé ici comme dans la locution comportement asymptotique, comme un substitut de l'expression à l'infini.

Voici quelques cas où ce concept peut être utile.

  • Comme signalé ci-dessus, on peut montrer qu'un convexe fermé non vide est borné si, et seulement si, son cône asymptotique est réduit à zéro, ce qui revient à dire qu'il ne contient pas de demi-droite. Cette propriété de bornitude pourra donc être obtenue par l'intermédiaire du calcul et de l'examen de son cône asymptotique, souvent possible si l'ensemble convexe a lui-même une expression analytique.
  • Appliqué aux ensembles de sous-niveaux d'une fonction convexe, cette méthode peut parfois donner des conditions pour que l'ensemble des minimiseurs de cette fonction soit non vide et borné.
  • Le concept intervient aussi dans des conditions pour pouvoir séparer des convexes, pour que la somme de deux convexes fermés soit fermée, pour que l'image linéaire (en particulier la projection) d'un convexe fermé soit fermée, etc.
  • Ce concept peut être transporté à une fonction convexe, en prenant le cône asymptotique de son épigraphe. Cela conduit à la notion de fonction asymptotique d'une fonction convexe, qui décrit son comportement à l'infini.

Des notions semblables peuvent aussi se définir pour des ensembles non convexes[2].

Connaissances supposées : les bases de l'analyse (notamment la notion de limite) et la notion d'ensemble convexe.

Notations et définitions

On suppose dans cet article que et sont des espaces vectoriels réels de dimension finie.

Cône et direction asymptotiques  On appelle cône asymptotique (ou cône de récession) d'un convexe fermé non vide , l'ensemble noté et défini par

Un élément de cet ensemble est appelé direction asymptotique (ou direction de récession) ; il s'agit donc d'un vecteur tel que, quels que soient et (ou ), on a .

Propriétés

Le cône asymptotique du convexe non vide est clairement l'intersection pour les des cônes

Si n'est pas fermé, l'ensemble peut dépendre de . Par exemple, si

est l'orthant positif si , alors que . À l'inverse, si est fermé, tous les se confondent avec  ; c'est pour cette raison que certains auteurs préfèrent définir le cône asymptotique d'un convexe fermé[3] et que l'hypothèse de fermeture de est en général faite ci-dessous.

Autres expressions du cône asymptotique  Soit un convexe fermé non vide. Alors est un cône convexe fermé contenant . De plus :

  • il existe des suites et telles que  ;
  • , quel que soit .

Le corollaire suivant exprime à sa manière qu'un convexe fermé est borné si, et seulement si, il ne contient pas de demi-droite, c'est-à-dire d'ensemble de la forme , où et .

Cône asymptotique d'un convexe borné  Soit un convexe fermé non vide. Alors est borné si, et seulement si, .

Aspects calculatoires

Voici quelques règles de calcul.

Cône  Un convexe fermé non vide est un cône (si et) seulement si .

On rappelle qu'une intersection de convexes (resp. de fermés) est un convexe (resp. un fermé).

Intersection et inclusion  Si est une famille non vide de convexes fermés d'intersection non vide, on a
En particulier, pour tous convexes fermés et , on a :

On rappelle que l'image réciproque d'un convexe (resp. d'un fermé) par une application linéaire est un convexe (resp. un fermé).

Image réciproque par une application linéaire  Soient une application linéaire et un convexe fermé de tel que . Alors

On rappelle que l'image d'un convexe par une application linéaire est convexe, mais que celle d'un convexe fermé n'est pas nécessairement fermée (même si le convexe est un cône). La situation est donc, d'emblée, plus compliquée que celle de l'image réciproque et va faire apparaître des adhérences. Par ailleurs, en général, l'inclusion (immédiate) n'est pas une égalité. La condition suffisante donnée ci-dessous pour avoir l'égalité n'est qu'un exemple ; elle n'est nullement nécessaire.

Image par une application linéaire  Soient une application linéaire et un convexe fermé non vide de . Si , alors est fermé et .

Si , on peut avoir , comme dans le cas où et  ; on a et , si bien que.

Exemples

Pavé de ℝn

Soient et deux vecteurs vérifiant . On considère le pavé , où les inégalités vectorielles doivent s'entendre composante par composante. C'est un convexe fermé non vide de . Son cône asymptotique est donné par

Clairement, est borné si, et seulement si, toutes les composantes de et sont finies, ce qui se produit par la formule précédente si, et seulement si, est réduit à zéro.

Polyèdre convexe

  • La représentation primale d'un polyèdre convexe consiste à l'écrire comme la somme d'un polytope (enveloppe convexe d'un nombre fini non nul de points ) et d'un cône convexe polyédrique (enveloppe conique d'un nombre fini de points ) :
    Dans ce cas, le cône asymptotique de s'écrit :
  • Un polyèdre convexe peut aussi s'écrire de manière duale comme l'intersection d'un nombre fini de demi-espaces :
    est linéaire, tandis que et sont deux vecteurs vérifiant . Comme est l'image réciproque du convexe fermé non vide par une application linéaire, son cône asymptotique se calcule facilement :

Notes et références

  1. Par exemple, Rockafellar 1970, p. 61.
  2. Voir Auslender et Teboulle 2003.
  3. C'est le cas de Hiriart-Urruty et Lemaréchal 1993 mais pas celui de Rockafellar 1970, qui définit le cône asymptotique comme l'intersection des pour .

Voir aussi

Article connexe

Théorème de Dieudonné (en)

Bibliographie

  • (en) A. Auslender et M. Teboulle, Asymptotic Cones and Functions in Optimization and Variational Inequalitites, New York, Springer, coll. « Springer Monographs in Mathematics »,
  • (en) J. M. Borwein et A. S. Lewis, Convex Analysis and Nonlinear Optimization, New York, Springer, , 2e éd. (1re éd. 2000) (lire en ligne)
  • (en) Jean-Baptiste Hiriart-Urruty et Claude Lemaréchal, Convex Analysis and Minimization Algorithms I: Fundamentals, Springer, coll. « Grund. math. Wiss. » (no 305), (lire en ligne)
  • (en) Jean-Baptiste Hiriart-Urruty et Claude Lemaréchal, Fundamentals of Convex Analysis, Berlin, Springer, (1re éd. 2001) (lire en ligne)
  • (en) R. Tyrrell Rockafellar, Convex Analysis, Princeton, NJ, Princeton University Press, coll. « Princeton Mathematical Series » (no 28), (lire en ligne)
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