Château d'Hauteville (Saint-Légier)
Le château d'Hauteville est un château de plaisance situé sur le territoire de la commune vaudoise de Saint-Légier-La Chiésaz, au-dessus de Vevey en Suisse.
Pour les articles homonymes, voir Château de Hauteville.
Château d'Hauteville | |||
Château d'Hauteville | |||
Protection | Bien culturel d'importance nationale | ||
---|---|---|---|
Coordonnées | 46° 28′ 01″ nord, 6° 52′ 06″ est | ||
Pays | Suisse | ||
Canton | Vaud | ||
Commune | Saint-Légier-La Chiésaz | ||
Géolocalisation sur la carte : Suisse
Géolocalisation sur la carte : canton de Vaud
| |||
Histoire
Au Moyen Âge, le territoire d'Hauteville (Altavilla, mentionné à plusieurs reprises dans le Cartulaire de Lausanne[1]) constitue la partie basse de la seigneurie de Blonay. En proie à des difficultés financières, Jean de Blonay cède ce bien en 1300 au comte Amédée V de Savoie, dont la famille le conserve jusqu'à la conquête du Pays de Vaud par Berne en 1536. En 1565, Jean-François et Jean-Michel de Blonay rachètent la baronnie de Saint-Légier, ainsi que le domaine d'Hauteville qui en dépend.
Puis Hauteville passe en 1591 à Gérôme Gignillat. Ses héritiers le revendent en 1666 à Abraham Dubois, qui obtient du seigneur de Saint-Légier-La Chiésaz l’inféodation d’Hauteville en fief noble. La nouvelle seigneurie passe ensuite à César de la Mothe puis à Charles Jaquemin (1704).
Elle est acquise en 1734 par Jacques-Philippe d’Herwarth qui, une année plus tôt, a acquis la baronnie de Saint-Légier. Il y rattache donc la seigneurie d’Hauteville et se profile désormais comme l’une des figures les plus puissantes du bailliage de Vevey. Après avoir agrandi la maison seigneuriale d’Hauteville, il y transfère son siège de justice et en fait ainsi le centre administratif de sa juridiction[2].
Le peintre Giuseppe Antonio Petrini, étant l'auteur de plusieurs tableaux à l'huile, restés dans la famille jusqu'à la dispersion des collections en 2015, et ayant travaillé pour Herwarth à la décoration des plafonds de la maison d'Herwarth à Vevey (vers 1730), on lui a attribué également le monumental décor du grand salon d'Hauteville, avec ses peintures allégoriques et mythologiques. Mais les plus récentes études stylistiques ont mis en doute cette dernière attribution. Il s'agirait sans doute plutôt de l’œuvre d'un fils Petrini, peut-être Marco Petrini, connu surtout comme portraitiste, ou d'un autre artiste travaillant dans ce même entourage[3],[4].
En 1760, Herwarth vend à Pierre-Philippe Cannac ses terres avec tous leurs droits. Cannac, bourgeois de Vevey et de Genève, a fait fortune comme directeur des coches de Lyon. Afin de conférer à son nouveau domicile tout le lustre que mérite son état de fortune, il agrandit la maison seigneuriale d’Hauteville. Tout en conservant le noyau historique de la demeure avec ses décors peints, il la transforme entre 1760 et 1768 en un vaste château flanqué de deux ailes en retour d’équerre qui délimitent une ample cour d’honneur. Aspirant à créer un édifice représentatif dans le goût le plus récent, il fait appel à deux architectes français. L’un, François II Franque, d’Avignon, fournit les plans. L’autre, est (non pas Donat Cochet, traditionnellement cité à la suite d'une confusion), mais Claude-Pierre Cochet, fidèle collaborateur, de 1751 à 1768 environ, du peintre et architecte Jean-Antoine Morand. Il est le père de l'architecte Claude-Ennemond Cochet, ainsi que, assurément, de Donat-Claude-Philippe Cochet, exécuté à Paris en 1794, sous la Terreur[5]. On peut attribuer à Claude-Pierre Cochet le décor d'architecture feinte des façades.
Sur place, c'est un bâtisseur local, Daniel-A.- Girard qui supervise les travaux, avec la collaboration d'artisans de talent, comme le menuisier David Schade, le marbrier David III Doret, le sculpteur et doreur François Riol ou Ruolt[6]
Pierre-Philippe Cannac meurt en 1785 et laisse le domaine à son fils Jacques-Philippe Cannac, dont la fille unique, Victoire, épousera Daniel Grand de la Chaise (1761-1828), issu d’une ligne de banquiers parisiens anoblis en 1781. Elle hérite du domaine en 1794. C’est alors que le jeune couple décide de prendre le nom de Grand d’Hauteville[7]. La propriété est depuis lors restée dans la même famille, mais à l’aube du XXIe siècle, celle-ci a cependant décidé de s’en défaire.
Le château est inscrit comme bien culturel suisse d'importance nationale[8]. En 2009, il a été proposé aux autorités cantonales comme site d'implantation du futur musée cantonal des beaux-arts ; le projet prévoyait la construction d'un nouveau bâtiment pour accueillir le musée sous les terrasses du jardin actuel[9], mais sera finalement abandonné au profit du projet de Plate-forme pôle muséal à Lausanne.
En 2018, la en:Pepperdine University, établissement d'enseignement supérieur américain, décide d'installer son antenne suisse dans ces locaux. Le mandat de restauration est confié au bureau Glatz-Delachaux. Les travaux débutent en janvier 2020[10].
Mobilier
L’inventaire du mobilier a révélé une remarquable collection de meubles et pièces d’ornement, dont des consoles à dessus de marbre (1764) attribuées à Johann Friedrich Funk I, une commode d’apparat dans le goût chinois (vers 1775) estampillée par Pierre Harry Mewesen, à Paris, une autre commode d’apparat à deux tiroirs (vers 1750) estampillée par Mathieu Criaerd, à Paris, une paire d’encoignures en laques de Chine et du Japon, (vers 1775) estampillée Jean-Jacques Manser, un buste de Pierre-Philippe Cannac en terre cuite patinée à l’imitation du bronze signé François-Marie Poncet, une pendule en marbre blanc et garniture en bronze doré signée Imbert l’Aîné à Paris[11].
En 2014, l'hoirie propriétaire du château vend aux enchères à Londres le mobilier le plus prestigieux. En septembre 2015, le reste, étroitement lié à l'histoire de la famille Grand d'Hauteville depuis le XVIIIe siècle (meubles, bibliothèque, argenterie, bijoux, tableaux, etc.), est mis à l'encan lors d'une vente aux enchères dans l'enceinte même du château[12]. Plusieurs lots ont pu être acquis par des musées suisses, parmi lesquels le Musée national suisse. Des assiettes armoriées de porcelaine de Chine (vers 1770) ont été données au Musée historique de Nyon, qui a pu acquérir également quelques pièces d'argenterie[13]. Le siège de justice de la seigneurie d'Hauteville, confectionné sans doute vers 1750 pour Jacques-Philippe d'Herwarth, a été acquis par le Musée cantonal d'archéologie et d'histoire de Lausanne[2].
Bibliographie
- Le Château d'Hauteville et la Baronnie de St.-Légier et la Chiésaz, Sandag, .
- «Vente du château d'Hauteville et de son contenu» (article paru dans le magazine Tribune de l'Art en novembre 2014) repris dans A Suivre... (Bulletin de la Section vaudoise de Patrimoine suisse 65), janvier 2015, p. 4-7.
- Château d'Hauteville. Vente aux enchères, 11 et 12 septembre 2015 (catalogue imprimé), Hôtel des ventes, Bernard Piguet, Genève 2015, 354 p.
- Claire Huguenin, Denis Decrausaz, Un symbole de pouvoir. Le siège de justice du château d'Hauteville (Document publié à l'occasion de la présentation au public, le 29 octobre 2015, d'une acquisition récente du Musée cantonal d'archéologie et d'histoire), Musée cantonal d'archéologie de d'histoire, Lausanne 2015, 24 p.
- Petrini ritrovati (catalogo a cura di Chiara Naldi), Galleria Canesso, Lugano 2016 (concerne les peintures murales du grand salon et certains portraits de famille).
- Le patrimoine mobilier et documentaire d'Hauteville, revue Patrimoines. Collections cantonales vaudoises, n° 1, Lausanne 2016, 96 p.
- Vincent Lieber, Le voyage aux Indes. Porcelaines chinoises pour des familles suisses, 1740-1780, Nyon, Château de Nyon, , 189 p. (ISBN 978-2-940479-07-8), p. 50-57, 132-137.
- Denis Decrausaz, « Le petit salon du château d’Hauteville. Réflexions sur les objets du décor », Art + Architecture en Suisse, no 1, , p. 40-47 (ISSN 1421-086X).
- Monique Fontannaz, « Les propriétaires du château d’Hauteville – Tableau chronologique sommaire », Revue suisse d’art et d’archéologie, vol. 74, nos 2017/3-4, , p. 177 (ISSN 0044-3476).
- Monique Fontannaz, « Histoire architecturale du château d’Hauteville », Revue suisse d’art et d’archéologie, vol. 74, nos 2017/3-4, , p. 179-199 (ISSN 0044-3476)
- Denis Decrausaz, « Permanences et mutations dans les décors : le mobilier du château d’Hauteville, 1760-2015 », Revue suisse d’art et d’archéologie, vol. 74, nos 2017/3-4, , p. 201-216 (ISSN 0044-3476)
- Mylène Ruoss, « Les portraits du château d’Hauteville », Revue suisse d’art et d’archéologie, vol. 74, nos 2017/3-4, , p. 217-238 (ISSN 0044-3476)
- Béatrice Lovis, « Le théâtre de société au château d’Hauteville : étude d’un corpus exceptionnel (XVIIIe-XXe siècles) », Revue suisse d’art et d’archéologie, vol. 74, nos 2017/3-4, , p. 239-260 (ISSN 0044-3476)
- Marc-Henri Jordan, « Les décorations du théâtre de société de la famille Cannac au château d’Hauteville, œuvres du peintre lyonnais Joseph Audibert (1777) », Revue suisse d’art et d’archéologie, vol. 74, nos 2017/3-4, , p. 261-284 (ISSN 0044-3476)
- Alexandra Ecclesia (coord.), « Inventaire des objets provenant du château d’Hauteville se trouvant dans les collections publiques de Suisse », Revue suisse d’art et d’archéologie, vol. 74, nos 2017/3-4, , p. 285-304 (ISSN 0044-3476)
- Bernard Sournia, Intervention française au château d'Hauteville (Suisse), dans Bulletin monumental, 2018, no 176-1, p. 69-70, (ISBN 978-2-901837-71-8)
- Denis Decrausaz, « Le château d'Hauteville dans tous ses états: repères historiques et survol iconographique », Les Annales veveysanes, vol. 17, , p. 123-134 (ISSN 2235-4905).
- Nicolas Delachaux, « Hauteville, un chantier tout en finesse », A suivre (Bulletin de la section romande de Patrimoine suisse, no 81, , p. 8-11.
Notes et références
- Jean-Daniel Morerod, « Lausanne, cartulaire de » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne, version du .
- Claire Huguenin, Denis Decrausaz, Un symbole de pouvoir. Le siège de justice du château d'Hauteville (Document publié à l'occasion de la présentation au public, le 29 octobre 2015, d'une acquisition récente du Musée cantonal d'archéologie et d'histoire), Musée cantonal d'archéologie de d'histoire, Lausanne 2015, 24 p.
- Petrini ritrovati (catalogo a cura di Chiara Naldi), Galleria Canesso, Lugano 2016 (avec contribution de Manuela Kahn-Rossi consacrée à la famille d'Herwarth).
- Fontannaz 2017, p. 182 et p. 197, n. 30.
- Louis-Marie Prudhomme, Histoire générale des crimes commis pendant la révolution française… tome I, Paris 1796
- Fontannaz 2017, p. 184-185.
- Château d'Hauteville. Vente aux enchères, 11 et 12 septembre 2015 (catalogue imprimé), Hôtel des ventes, Bernard Piguet, Genève 2015, 354 p.
- [PDF] L'inventaire édité par la confédération suisse, canton de Vaud
- [PDF] « Château de Hauteville - St-Légier / La Chiésaz », sur vd.ch (consulté le )
- Nicolas Delachaux, « Hauteville, un chantier tout en finesse », A suivre (Bulletin de la section romande de Patrimoine suisse, no 81, , p. 8-11.
- Denis Decrausaz, « Permanences et mutations dans les décors : le mobilier du château d’Hauteville, 1760-2015 », Revue suisse d’art et d’archéologie, vol. 74, nos 2017/3-4, , p. 201-216 (ISSN 0044-3476).
- Voilab, « Hôtel des Ventes Genève », sur www.hoteldesventes.ch (consulté le )
- Vincent Lieber, Le voyage aux Indes. Porcelaines chinoises pour des familles suisses, 1740-1780, Nyon, Château de Nyon, , 189 p. (ISBN 978-2-940479-07-8), p. 50-57, 132-137
Liens externes
- « Le château d' Hauteville (au-dessus de Vevey, à Saint Légier) », sur swisscastles.ch (consulté le )
Voir aussi
- Portail des châteaux
- Portail arts et culture de la Suisse
- Portail du canton de Vaud