Charlotte Montard

Charlotte Montard, née Charlotte Binet le 8 mars 1889 et décédée le 4 mai 1960[1], est une téléphoniste des PTT engagée à l'Action française durant l'entre-deux-guerres.

Charlotte Montard
Biographie
Naissance

Lisieux (Normandie)
Décès

Créteil (Île-de-France)
Activité

Biographie

En 1912[2], elle se marie à Eugène Gaston Montard, herboriste, délégué des Camelots du Roi de Neuilly[3].

Téléphoniste au central d'Auteuil dans les PTT, elle surveille les conversations téléphoniques de Louis Malvy, député du Lot, en se branchant sur sa ligne[4]. Démasquée, elle est renvoyée et immédiatement embauchée par l'Action française où elle poursuit ses écoutes de plusieurs personnalités politiques. Elle rapporte minutieusement les conversations à Pierre Lecœur, chef des Camelots du Roi.

L'évasion de Léon Daudet

Du fait d'une plainte d'un chauffeur de taxi pour diffamation dans l'affaire Philippe Daudet, Léon Daudet, cadre de l'Action française, est sommé d'effectuer cinq mois de prison. Il refuse et se barricade avec les Camelots du Roi dans les locaux de l'Action française, rue de Rome, le 10 juin 1927. Après une résistance de trois jours, il est emprisonné à la prison de la Santé le 13 juin 1927 avec Joseph Delest, gérant du journal L'Action française, condamné à deux mois de prison.

Charlotte Montard et son bébé sont arrêtés pour un interrogatoire au sujet de l'évasion de Léon Daudet.

Pendant la détention des deux hommes, Charlotte Montard poursuit ses écoutes et apprend « l'ordre d'élargissement immédiat d'un anarchiste détenu à la Santé ; une décision qui lui est un trait de lumière »[4]. Charlotte Montard fait part à Pierre Lecœur, de son plan d'évasion. Il se résume en un canular téléphonique consistant à saturer toutes les lignes téléphoniques « de la préfecture de police, de la Sûreté générale, des ministères de l'Intérieur et de la Justice avec le concours de Camelots »[4]. En saturant les lignes, Charlotte Montard serait alors à même de contrôler la distribution des appels de la prison de la Santé. Yves Real del Sarte, Pierre Juhel, M. et Mme Martin et quelques autres militants sont mobilisés dans ce plan tenu secret. Le 25 juin 1927, lors de la pause déjeuner, Charlotte Montard appelle le poste du directeur de la Santé, M. Catry[5], en se réclamant comme la standardiste du cabinet du ministre de l'Intérieur. Pierre Lecoeur, doué d'un talent d'imitation, incarne au téléphone le ministre Albert Sarraut et ordonne la libération sans condition de Léon Daudet, Joseph Delest et de Pierre Semard, communiste, pour faire bonne mesure. André Real del Sarte incarna le secrétaire du ministre lorsque le directeur de la prison, pris d'un doute, voulu une confirmation. Les trois hommes furent libérés et une équipe de Camelots du Roi se chargea d'exfiltrer Léon Daudet et Joseph Delest en Belgique. Le directeur Catry de la prison fut suspendu[6].

De son côté, Charlotte Montard fut rapidement suspectée par la police et arrêtée avec son bébé Philippe François Louis Montard de quatre mois[7],[8]. Elle fut écrouée à la prison de Saint-Lazare puis libérée quelque temps après[6].

Charlotte Montard ne fut pas créditée pour cette évasion rocambolesque mais « c'est pourtant bien cette petite bonne femme inconnue qui eut l'idée de cette évasion, en conçut tout le mécanisme, et la réalisa pratiquement seule »[6]. Elle raconte tout le détail de l'évasion dans un récit autobiographique Comment j'ai fait évader Léon Daudet ? publié en 1932[3].

Description d'une étape du canular téléphonique pour libérer Léon Daudet de la prison de la Santé.

Le retrait de l'Action française

Charlotte Montard quitte l'Action française en 1929 et dans la lignée de Louis Dimier et de son ouvrage Vingt ans d'Action française, elle publie Quatre ans d'Action française en 1931[9]. Dans ce livre, elle n'hésite pas à régler ses comptes et livre un portrait à charge de Maurras en le décrivant comme « un vieillard manœuvré par ses hommes, en proie à des colères infantiles, plus navrant que terrible »[10]. Elle accuse l'Action française « d'impuissance, de faiblesse et de connivence maquillée avec le régime républicain »[10].

Œuvres

  • Charlotte Montard, Une Election royaliste à Touffouville, Paris, Éditions Lori, non daté
  • Charlotte Montard, Quatre ans à l'Action Française, Paris, Éditions Lori, , 252 p.
  • Charlotte Montard, Comment j'ai fait évader Léon Daudet ?, Paris, Éditions Lori, , 254 p. (lire en ligne)

Notes et références

  1. « Acte de naissance no 65 (vue 18/98) de Charlotte Binet du registre des naissances de l'année 1889 de la commune de Lisieux »,
  2. « Acte de mariage no 252 (vue 8/20) de Charlotte Binet et "Eugène Gaston Montard" du registre des mariages de l'année 1912 de Paris » (consulté le )
  3. Charlotte Montard, Comment j'ai fait évader Léon Daudet, Paris, Editions Lori, , 254 p. (lire en ligne)
  4. Éric Vatré, Léon Daudet, FeniXX réédition numérique, (ISBN 978-2-402-24835-8, lire en ligne)
  5. Albert Marty, L'Action française racontée par elle-même, Nouvelles Editions Latines, (ISBN 978-2-7233-0325-5, lire en ligne)
  6. Franju 1961.
  7. Action française, « L'Action française », sur Gallica, (consulté le )
  8. Le Journal, (lire en ligne)
  9. Charlotte Montard, Quatre ans à l'Action française: ce que j'ai vu ce que j'ai entendu, Les Éditions Lori, (lire en ligne)
  10. Julien Cohen, « Esthétique et politique dans la poésie de Charles Maurras » (consulté le )

Bibliographie

  • Jacques Franju, Le grand canular, Paris, (Seghers) réédition numérique, (ISBN 978-2-232-14446-2, lire en ligne)

Liens externes

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