Camino del Norte

Le Chemin du Nord, ou Camino del Norte en espagnol, est un itinéraire secondaire du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle. Il est la continuité en territoire espagnol de la voie de Soulac, voie côtière française.

Chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle : Camino francés et chemins du nord de l’Espagne *

Chemin du Nord (en violet)
Pays Espagne
Subdivision Communauté autonome du Pays Basque, Cantabrie, Asturies, Galice
Type Culturel, religieux
Critères (ii) (iv) (vi)
Numéro
d’identification
669
Zone géographique Europe et Amérique du Nord **
Année d’inscription 1993 (17e session)
Année d’extension 2015 (39e session)
* Descriptif officiel UNESCO
** Classification UNESCO

Le Camino del Norte est également appelé Ruta de la Costa, par opposition au Camino francés qui est aussi appelé la Ruta Interior.

Ce chemin de pèlerinage est antérieur au très connu Camino francés. Il reprend en partie le Camino Primitivo (chemin primitif) des pèlerins des premiers siècles à Saint-Jacques-de-Compostelle. La popularité grandissante du pèlerinage de Saint-Jacques entraine une hausse de fréquentation importante sur ce Chemin du Nord de près de 15 % par an (depuis 2005). Il rassemble aujourd'hui 6 % des pèlerins recensés à Santiago.

Historique

Du IXe siècle au milieu du XIIe siècle, les pèlerins suivaient la côte nord de l'Espagne, dans les terres contrôlées par les royaumes chrétiens espagnols[1]. Ce premier chemin de pèlerinage, utilisé jusqu'au milieu du XIIe siècle a pris le nom de « Camino del Norte ».

La reconquête des hauts plateaux a ouvert aux pèlerins la route via le centre du pays. Ainsi, dès la prise de la ville de Saragosse le , le roi Alphonse Ier d'Aragon incite les pèlerins français, se rendant à Saint-Jacques, à passer par les nouvelles villes conquises[2]. Il crée ainsi une nouvelle route de pèlerinage que les Espagnols nommeront Camino francés[3]. Ainsi, en 1140, quand le moine Aimery Picaud se rend à Saint-Jacques puis rédige son Guide du Pèlerin[4], il indique les villes étapes du Camino francés, sans indiquer l’existence du Camino del Norte[5].

Le découpage de la côte nord de la péninsule Ibérique constituait un sérieux handicap à la circulation, aggravé par la présence des nombreux fleuves se jetant dans l'océan et qu'il fallait franchir. De plus, le relief accidenté et les nombreuses forêts (de la côte Nord), offraient des lieux d'embuscades pour les brigands, ou les loups[6],[7]. Ces éléments, ajoutés à la volonté politique de favoriser la route intérieure, ont réduit rapidement l'affluence de cette voie de pèlerinage au profit du Camino francès.

L'itinéraire allait d'Irun à Bilbao par Saint-Sébastien et Guernica. Puis, il rejoignait Santander, par Castro-Urdiales et Laredo, avant de poursuivre vers Oviedo, par Santillana del Mar, San Vicente de la Barquera et Llanes. À partir d'Oviedo, le chemin de la côte accueillait des jacquets venus de León. D'Oviedo, les pèlerins allaient à La Espina par Cornellana, où le monastère, fondé en 1024, est rattaché à l'Ordre de Cluny en 1122. Ils pouvaient gagner Lugo par l'intérieur des terres (par le Camino Primitivo), ou suivre la côte à Canero, puis, après avoir franchi le pont qui tremble à Luarca, continuer jusqu'à Ribadeo. De là, ils pouvaient soit rejoindre le Camino francés par Lugo, vers Palas de Rei, soit passer par Mondoñedo, Villalba et Sobrado, et rejoindre enfin le camino, à Labacolla.

De nos jours

À la fin du XXe siècle, la hausse de fréquentation du chemin de Saint-Jacques entraine une redécouverte et une nouvelle fréquentation de ce chemin. Peu fréquenté au XXe siècle comme voie de pèlerinage, cette même route, de nos jours, voit son nombre de pèlerins croitre très rapidement[8]. La "sur fréquentation" du Camino francès pousse un certain nombre d'entre eux à venir rechercher un peu plus de solitude sur le Camino del Norte, moins connu[9]. Les mois de juillet et aout sont les plus fréquentés[10],[11].

Une des albergue les plus anciennes (et les plus connues) est l'albergue du Padre Ernesto à Güemes (commune de Bareyo). Depuis 2010, avec la hausse de fréquentation, de nouvelles albergues s'ouvrent sur le chemin.

Présentation du chemin actuel

Les pèlerins venant de Bretagne, ou de l'Ouest de la France, ont la possibilité de suivre un itinéraire côtier dont la partie française se termine en Aquitaine par la Voie de Soulac. Le « Camino del Norte » débute à Bayonne pour rejoindre Irun et ensuite longe la côte nord espagnole jusqu'en Galice, à Ribadeo, où son tracé plonge vers le Sud-Ouest pour rejoindre le Camino francés à Arzúa.

Aujourd'hui, les pèlerins arrivés à Irun peuvent également quitter le camino del Norte et rejoindre le Camino francés au niveau de Burgos en suivant une voie secondaire passant par Vitoria-Gasteiz. Autre possibilité : bifurquer par Oviedo pour traverser la cordillère Cantabrique et couper en ligne droite vers Saint-Jacques en suivant le « Camino Primitivo ». Cette voie, la plus ancienne, et franchissant des cols à 2000m d'altitude est le plus difficile des chemins menant à Saint-Jacques.

En France

Pays basque

San Sebastian

Cantabrie

Santander, palacio de la Magdalena

Asturies

Oviedo, San Julián de Los Prados

Galice

Saint-Jacques
  • Mondoñedo ;
  • Vilalba, capitale "da terra chà", le plat pays, et l’église San Simon ;
  • Sobrado et son Monasterio dos Monjes ou dos Monxes, (monastère des moines) ;
  • Arzúa, et sa chapelle de la Madeleine.

À cette dernière étape, le Camino del Norte rejoint le Camino francés qui continue, en passant notamment par :

  • A Lavacolla, ou Lavacolla ; c'est ici que les pèlerins se purifiaient, en se lavant et changeant de vêtements, avant d'entrer dans la ville de Monsieur saint Jacques ;
  • Monxoi, ou Monte del Gozo ou Mont-Joie ;
  • Saint-Jacques-de-Compostelle.

Le Camino Primitivo

Ce camino, réputé difficile (bien que le point le plus élevé, le Puerto del Palo, 1146m, soit moins élevé que celui du Camino Frances, il présente beaucoup plus de dénivelées) et sauvage s'est équipé dernièrement de nombreux gites pour pèlerins. Si au Xe siècle et XIe siècle les chaines montagneuses traversées étaient bien peuplées et offraient des étapes régulières pour les pèlerins alors nombreux, la désertification des campagnes au XXe siècle a laissé, de nos jours, de vastes secteurs inhabités. Cela n'a pas été sans problèmes lors de la remise en place du camino, car plusieurs étapes de montagnes atteignaient les 70 km entre deux gites aux tout début des années 2000. La hausse de fréquentation du pèlerinage a entrainé des municipalités et des particuliers à ouvrir des accueils de pèlerins dans les secteurs dépourvus, et de nos jours (en 2017), il n'existe plus d'étape supérieure à 25-30 km entre 2 hébergements. Cette amélioration des conditions d'accueil explique la hausse rapide des pèlerins prenant ce chemin (nombre multiplié par 10 en 10 ans).

Asturie

Galice

  • O Cadavo
  • Lugo
  • San Roman de Retorta
  • Melide : arrivée sur le Camino Francès

Statistiques de fréquentation

Depuis les années 2000, le Camino del Norte connait une forte augmentation de fréquentation de l'ordre de 15 % par an. En 2015, 6 % des pèlerins ayant reçu leur compostella avaient suivi ce parcours. Entre 2005 et 2015, le trafic a été multiplié par 4 (3 800 en 2005 à 15 800 en 2015)[12]. Le Camino Primitivo voit une progression encore plus forte, passant de 1000 personnes en 2005 à 11 400 pèlerins en 2015. Ils représentent aujourd'hui plus de 4 % des pèlerins arrivant à Santiago[12].

Cumul mensuel de pèlerins (en 2015)

Comme pour la fréquentation du Camino francés, la fréquentation se fait essentiellement l'été, avec une période creuse en hiver (Voir statistiques du Pèlerinage de Saint-Jacques). Néanmoins ce chemin du Nord, réputé plus difficile que le camino francès est parcouru toute l'année.

Un enjeu économique pour les régions

Avec plus de 15 000 pèlerins en 2015[12] et une croissance de 15 % par an depuis 10 ans, le poids économique du camino pour les régions traversées ne cesse de croitre. Avec un budget annoncé de 20 à 30 € par pèlerin et par jour[13],[14], la manne économique devient rapidement significative pour certaines régions traversées. On observe une augmentation régulière de l'offre d'hébergement pour les pèlerins par l'ouverture de nouvelles albegues privées[15].

Le projet de modifier le tracé du Camino del Norte en Galice entre Baamonde (Begonte) et Sobrado de los Monjes[16], porté par la Junte de Galice, a suscité une vive réaction d'hostilité de la population actuellement située le long de ce tracé (et qui souhaite le conserver)[17].

Dans les arts

Littérature

  • Jean-Christophe Rufin, Immortelle randonnée, Guerin, (ISBN 978-2-35221-061-0 et 2-35221-061-5) prix Nomad's.

Notes et références

  1. Le centre et le sud du pays étant tenus par des royaumes musulmans. La traversée de ces royaumes musulmans par des pèlerins étrangers se rendant sur un lieu de pèlerinage chrétien, tenu par un royaume "ennemi" (du chef musulman local) présentait un risque important pour la sécurité des pèlerins. C'est pourquoi ceux-ci préféraient suivre la côte, pour rester dans des terres contrôlées par des rois catholiques.
  2. Nompar de Caumont 2009, p. 192-193.
  3. Ce nom de "Camino francés", est dû au nombre important de pèlerins français (ou venant de France) empruntant cette route.
  4. Son guide"Codes de Saint-Jacques de Compostelle", livre IV a été publié en 1882 chez Maisonneuve à Paris.
  5. Nompar de Caumont 2009, p. 141-144.
  6. Jacques Clouteau, Il est un beau chemin semé d'épines et d'étoiles : le voyage de Compostelle avec le petit âne ferdinand, Les Sables-d'Olonne, les éditions du vieux crayon, , 352 p. (ISBN 978-2-916446-18-9), p. 20.
  7. Nompar de Caumont 2009, p. 203.
  8. Quelques chiffres issus des statistiques tenues par le Padre Ernesto dans son albergue de Güemes (Bareyo) : 1999 : passage du premier pèlerin dans son albergue ; 2005 : 1100 pèlerins décomptés sur l'année ; 2010 : 2700 pèlerins ; 2013 : 7600 pèlerins
  9. En 2015 l'association des pèlerins de Saint-Jacques comptait 172 000 pèlerins sur le camino francès pour seulement 15 800 sur le camino del Norte.
  10. De 3500 à 4500 pèlerins (par mois) en juillet et aout. Les marcheurs, durant l'été, sont majoritairement de nationalité espagnole. Le reste de l'année, les pèlerins étrangers dominent.
  11. (es) Oficina de Acogida al Peregrino, « La Peregrinación a Santiago en .... », sur Oficina de Acogida al Peregrino, /peregrinossantiago.es (consulté le ).
  12. (es) Oficina del Peregrino, « Informe estadístico Año 2015 » [PDF], sur Oficina de Acogida al Peregrino, peregrinossantiago.es, (consulté le ).
  13. Marie-Virginie Cambriels, Miam miam dodo : édition 2012, Les Sables d'Olonne, Les éditions du Vieux Crayon, coll. « Miam Miam Dodo », , 256 p. (ISBN 978-2-916446-34-9), p. 14.
  14. Le tarif journalier dépend pour beaucoup du mode d'hébergement (camping, gite donativo, hotel, ...). En 2015, un mode de pèlerinage "confort" approcherait les 40 €/jour.
  15. Il s'agit de petits gites d'accueil ouverts par des particuliers à destination des pèlerins, dans une maison mitoyenne à la leur, voire dans leur propre maison de village.
  16. (es) « A Baamonde se lo cargan del mapa », La Vox de Galicia, (lire en ligne).
  17. (es) « Vecinos de Baamonde muestran de nuevo su rechazo a cambios en el trazado del Camino Norte », La Vox de Galicia, (lire en ligne).

Annexes

Voir aussi

Guides sur le Camino del Norte

  • François Lepere et Y. Terrien, LE CAMINO DEL NORTE : Le chemin le long de la Mer, François Lepere Éditions, , 210 p. (ISBN 978-2-915156-46-1).
  • Yean-Yves Grégoire, Chemin côtier, Camino del norte vers Compostelle, Rando Editions, coll. « Chemin de l'Histoire », , 224 p. (ISBN 978-2-84182-527-1).
  • Andrée Duhalde et Philippe Duhalde, Sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle : Le Camino del Norte, le chemin le long de la mer, Lepère éditions, coll. « Guide de poche du randonneur et du pèlerin », , 172 p. (ISBN 978-2-915156-30-0).
  • "El Camino de Santiago por la Costa o Camino Norte". Ángel González. 2004
  • "El Camino de Santiago". Antón Pombo. Ed. Anaya Touring. 2004
  • (es) "El Camino de Santiago - Dos rutas por Euskadi. Eusko Jaurlaritza" - Gouvernement Basque. 2006. Une édition en castillan et dans euskara (séparément)

Autres ouvrages

  • Nompar de Caumont, Chemins de Compostelle : Trois récits de pèlerins partis vers Saint-Jacques 1417- 1726- 1748, Paris, Cosmopole, , 227 p. (ISBN 978-2-84630-043-8).

Liens externes

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