Courlis cendré

Numenius arquata

Numenius arquata
Courlis cendré (Numenius arquata)
Classification (COI)
Règne Animalia
Classe Aves
Ordre Charadriiformes
Famille Scolopacidae
Genre Numenius

Espèce

Numenius arquata
(Linnaeus, 1758)

Statut de conservation UICN


NT  : Quasi menacé

Le Courlis cendré (Numenius arquata) est une espèce d'oiseaux limicoles de la grande famille des scolopacidés. C'est celui des courlis qui habite l'espace le plus étendu, puisqu'il se reproduit dans toute l'Europe tempérée et l'Asie (jusqu'en Asie du Sud-Est[1]). On en a même aperçu en Nouvelle-Écosse. En Europe, on le désigne souvent par la simple dénomination de « courlis », car il y est généralement le représentant majoritaire de son espèce.

Il peut être facilement confondu avec le courlis corlieu (plus grand migrateur, plus petit en taille, au bec à la courbure moins réguliers et dont la tête présente un motif de plumage différent)[2].

C'est un oiseau à longue durée de vie, un spécimen ayant atteint 32 ans[2]

Description

C'est le plus grand limicole de son genre, d'une longueur de 50 à 60 centimètres et d'une envergure d'un maximum d'un mètre. Son manteau est principalement d'un marron grisâtre, avec un arrière-train blanc et un bec très long et courbé d'environ 10 à 15 cm (plus long chez la femelle adulte). Son poids se situe entre 575 et 950 grammes[3].

Le cri familier dont cet oiseau tire son nom est un courli-i assez long et retentissant.

La seule espèce qui lui ressemble sur la plus grande partie de son habitat est le courlis corlieu. Celui-là est plus petit, avec un bec plus court présentant une sorte de pliure plutôt qu'une courbe régulière.

Le courlis cendré (également dénommé « courlis eurasien » ou « courlis européen »[4]) est une des espèces auxquelles s'applique l'Accord sur la conservation des oiseaux d'eau migrateurs d'Afrique-Eurasie. Sa chasse était autorisée en France depuis 2012[5]. Un arrêté ministériel du autorisait la chasse de 6 000 courlis cendrés, or le Conseil d'État a été saisi en référé par la LPO. Cet arrêté a été annulé par une décision du , face à la menace d'extinction qui pèse sur cet oiseau inscrit sur la liste rouge de l'UICN[6]. Par arrêté du ministre de la transition écologique du 12 juillet 2021, la chasse au courlis cendré est suspendue jusqu'au 30 juillet 2022[7].

Aire de répartition

Vert foncé : Résident / Vert clair : Nidification / Bleu foncé : Hivernage / Bleu clair : Migration

Sédentaire au Royaume-Uni et sur la façade atlantique en France et Belgique, il est nicheur en Europe occidentale, mais aussi en Scandinavie, Europe centrale, dans les pays baltes et dans l'ouest et centre de la Russie[2].

Il hiverne sur les littoraux de toute l'Europe du Sud, de l'Afrique et de la péninsule arabique et du Moyen-Orient, jusqu'en Inde et sur les îles du nord de l'Océanie et de l'Asie du sud-est[2].

Distribution

Le Courlis cendré se reproduit de l’Europe occidentale au Cercle arctique et à la Mandchourie centrale. Il hiverne surtout le long des côtes de l’Islande à l’Afrique du Sud, au Japon et aux Philippines.

C'est une espèce migratrice dans la plus grande partie de son habitat, hivernant en Afrique, en Europe du Sud et en Asie du sud. Il est présent toute l'année dans le climat plus doux de l'Irlande, de la Grande-Bretagne et des côtes européennes voisines. Il est extrêmement grégaire en dehors de la période de reproduction.

Éthologie et alimentation

Comportement

À l'exception de la période de reproduction, le courlis cendré est généralement très grégaire. Durant la saison de reproduction, le mâle effectue des parades aériennes en glissant avec les ailes ouvertes lui donnant une allure d’un rapace qui plane, surtout lorsque le bec est invisible. Monogame, les deux parents partagent les tâches liées à prise en charge des petits[8].

Nidification et habitats

Creux peu profond, au sol, garni d'herbe (4 œufs/1 ponte/avril-juillet).

La plupart du temps on l'observe sur des zones humides littorales à vasières (slikkes) et bancs de sable découvrant à marée basse, dans les grands estuaires, et dans les mangroves en zone tropicale[2].

Reproduction

En saison de reproduction le couple (cet oiseau est sexuellement mature à deux ans) quitte le milieu marin pour trouver des sites de reproduction ; C'est le mâle seul qui construit le nid, dans une dépression à même le sol, dans l'herbe[2] (ce qui l'expose à un risque élevé de destruction dans les prairies retournées ou fauchées au moment de la reproduction).

La femelle y pond 4 œufs brun verdâtre incubés durant 27 à 29 jours[2].

Seuls 46 % des œufs éclosent et parmi eux, 28 % donneront un jeune viable[2].

C'est une espèce en déclin depuis plusieurs décennies[2]. La pollution des vasières, les marées noires peuvent affecter ses populations[2], ainsi que la chasse.

Reproduction en France

Œuf de Numenius arquata - Muséum de Toulouse

Il se reproduit de mars à mai, dans des prairies à végétation assez basse, tourbières. La femelle pond dans un nid rudimentaire à même le sol, 3 à 5 œufs de couleur brun olive tachetés. L’incubation dure environ 28 jours. Les jeunes sont nidifuges et très souvent élevés par le mâle. Ils volent et sont indépendants au bout de 32 à 38 jours. Il niche en faibles effectifs en France, principalement dans l’Ouest, le Centre Ouest, du Rhône à l’Alsace en passant par la Champagne.

Hivernage en France

Le Courlis cendré présente en France une distribution hivernale essentiellement littorale avec des effectifs tendant à la stabilité au cours de la période 1975-2000.

Alimentation

Tout le long de l’année, le régime alimentaire comporte des annélides, des insectes, des crustacés, des mollusques, des baies et des graines, occasionnellement des vertébrés comme des petits poissons, des amphibiens, des lézards, des jeunes oiseaux (et probablement des œufs) et de petits rongeurs.

La plupart du temps, cet oiseau recherche ses aliments dans le sédiment, en s'adaptant aux horaires des marées[9], sur des zones humides souvent chassées, ce qui l'expose à ingérer des billes de plomb de chasse toxiques, qu'il confond avec du grit ; en hivernage sur le littoral, au cours de la journée, les rythmes d'alimentation des oiseaux varient d'un site à l'autre. Des différences importantes furent mises en évidence dans le rythme d’activité des oiseaux : alors que dans l’estuaire de la Somme les courlis consacrent une faible part de la période diurne à l’alimentation, tel n’est pas le cas dans l’estuaire de la Seine où cette activité est très régulière durant la journée et suit le rythme des marées[10].

Chant

Les cris habituels se présentent sous la forme de « tlu-ih » ou « cour-li » sonores, pleins, voire de « cou-cou-kiou » enroués et de « cou-cour-li » lents, prolongés, répétés. Ce chant débute généralement lentement puis il s'accélére en long trille.

Taxinomie

D'après Alan P. Peterson, cette espèce est constituée des trois sous-espèces suivantes :

  • Numenius arquata arquata (Linnaeus) 1758
  • Numenius arquata orientalis C.L. Brehm 1831
  • Numenius arquata suschkini Neumann 1929

État des populations, pressions, menaces, causes de régression

Cette espèce est chassée depuis l'antiquité[11], et ses œufs, mal protégés, ont probablement également été exploités par l'homme depuis la préhistoire.

L'espèce est en régression dans le monde, pour des raisons qui semblent encore incomplètement cernées. Mais outre la fragmentation et régression ou dégradation de ses habitats (recul des prairies[12] et dégradation des zones humides), des études ont montré qu'il pouvait être victime de saturnisme aviaire à la suite de l'ingestion de grenaille de plomb (grenaille qui contient aussi de l'arsenic)[13]. Dans certains de ses habitats, le dérangement pourrait aussi être en cause[14].

Bien que l'espèce soit classée « quasi-menacée » en France, le gouvernement décide par un arrêté du 31 juillet 2019 d'en autoriser la chasse (qui faisait l'objet d'un moratoire depuis 2008)[15]. L'arrêté autorisant la reprise de cette chasse est cependant suspendu en référé par le Conseil d'Etat le 26 août 2019[16],[17],[18].

En Irlande, la population de Courlis cendré a chuté de 96 % en 30 ans : le nombre de couples d'oiseaux est passé de 12 000 dans les années 1980 à 138 en 2017. La population de Courlis cendré décline également en France et au Royaume-Uni[19].

Le courlis cendré dans la culture populaire

Odonymie

Il existe une rue des Courlis sur le territoire de la commune d'Étaples.

Dans l'aéronautique

Les SUC-10 Courlis et SUC-11G Super Courlis sont des avions de tourisme qui présentent la particularité d'avoir une hélice propulsive.

Dans la musique

Olivier Messiaen a consacré à cet oiseau une pièce, qui en porte le nom, de son Catalogue d'oiseaux.

The Curlew est une composition de l'artiste britannique Peter Warlock.

Notes et références

  1. Engelbach, P. (1951). Les grands échassiers de l’Indochine et leur identification sur le terrain.
  2. Michel Vallance (2007) "Faune sauvage de France: biologie, habitats et gestion" ; Ed. Le gerfaut, 2007, 415 p..
  3. Site inpn.mnhn.fr, fiche sur le courlis cendré, consulté le 18 juillet 2021.
  4. Site oiseaux.net, fiche du courlis cendré, consulté le 18 juillet 2021.
  5. Laurent Radisson, « Deux espèces de la liste rouge de l'UICN deviennent chassables », Actu-Environnement, (consulté le ).
  6. LPO, « Conseil d’Etat : le Courlis cendré n’aurait pas dû être chassé l’an dernier »,
  7. DILA, « Journal Officiel de la République Française du 28 juillet 2021 »,
  8. Site oiseaux-birds.com, page sur le courlis cendré, consulté le 19 juillet 2021.
  9. Ponsero, A., Triplet, P., Aulert, C., Joyeux, E., Meunier, F., & Perin, R. (2008). Rythme hivernal d'alimentation du Courlis cendré (Numenius arquata) dans cinq grandes baies et estuaires français. Alauda, 76(2), 89–100.
  10. comportement alimentaire en hivernage (Ponsero et al., 2008).
  11. Tomé, C. (2005). Note sur l'exploitation des oiseaux «aquatiques». Paléorient, 74–78.
  12. Broyer J (2001) Plaidoyer pour une politique européenne en faveur des écosystèmes prairiaux ; Le Courrier de l'environnement de l'INRA, (43), 41–50.
  13. Bono, G. D., & Braca, G. (1973). Lead poisoning in domestic and wild ducks. Avian Pathology, 2(3), 195-209.
  14. Flamant, N., Benhini, C., Sueur, F., & Triplet, P. (2005). Effets des dérangements sur les oiseaux d’eau en période estivale dans la Réserve Naturelle de la Baie de Somme. Aves, 42(1–2), 23–32.
  15. « Le gouvernement souhaiterait autoriser la chasse de 36 000 oiseaux menacés », sur LCI,
  16. Paul Guyonnet, « Contre l'État, la justice au secours du courlis cendré », sur Le Huffington Post, (consulté le ).
  17. https://www.dalloz-actualite.fr/flash/conseil-d-etat-vole-au-secours-du-courlis-cendre
  18. https://www.dalloz-actualite.fr/sites/dalloz-actualite.fr/files/resources/2019/09/433434_-_ligue_pour_la_protection_des_oiseaux.pdf
  19. « L’autorisation de la chasse au Courlis cendré, oiseau menacé, fait hurler les écologistes », sur leparisien.fr,

Voir aussi

Références taxinomiques

Lien externe

Bibliographie

  • Buchel, E. (2003). Évolution récente des populations de courlis cendré (Numenius arquata) des principaux rieds alsaciens. Ciconia, 27, 45–63.
  • Branciforti J. & Muller S. (2003). Influence des pratiques agricoles sur l'utilisation de l'habitat chez deux espèces d'oiseaux typiques des vallées alluviales du nord-est de la France: Le tarier des prés saxicola rubetra et le courlis cendré Numenius arquata. Alauda, 71(2), 159–174.
  • Broyer, J., & Roché, J. (1991). La population nicheuse de courlis cendré Numenius arquata du bassin de la Saône. Alauda, 59(3), 129–135 (résumé).
  • Conseil de l'Europe Plan de gestion européen Natura 2000, 2007–2009
  • Maheho R. & Triplet P. (2001). Le courlis cendré Numenius arquata hivernant en France: Évolution des effectifs et modalités d'occupation de l'espace. Alauda, 69(1), 1-8 (résumé).
  • Salvi, A. (1993). Le Courlis cendré (Numenius arquata) en Lorraine: nidification, migrations, hivernage. Contexte dans le nord-est de la France [The curlew in Lorraine: breeding, migration, wintering. Context in northeastern France]. Ciconia, 167, 1-31.
  • Triplet et al. (2003). Rythme d'activité hivernale diurne de l'huîtrier pie Haematopus ostralegus, du courlis cendré Numenius arquata et du bécasseau variable Calidris alpina en Baie de Somme. Alauda, 71(4), 459–468 (résumé).
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