Datolite
La datolite est une espèce minérale appartenant au groupe des silicates sous-groupe des nésosilicates, de formule CaB(SiO4)(OH) avec des traces : Mn, Mg, Al, Fe. Il s'agit précisément d'un hydroborosilicate assez rare, transparent, à éclat vitreux, incolore à blanc, à l'état pur. La formule brute double est parfois usitée, soit Ca2B2(SiO4)2(OH)2[3].
Datolite Catégorie IX : silicates[1] | |
Datolite - Connecticut | |
Général | |
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Numéro CAS | |
Classe de Strunz | 9.AJ.20
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Classe de Dana | 54.2.1a.1
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Formule chimique | CaBSiO4(OH) |
Identification | |
Masse formulaire[2] | 159,979 ± 0,013 uma H 0,63 %, B 6,76 %, Ca 25,05 %, O 50 %, Si 17,56 %, |
Couleur | incolore, blanc, mais aussi plus rarement blanc verdâtre, gris, grisâtre, rose clair, marron, jaune, jaune rouge, jaune miel, vert clair, vert, vert olive, rouge, améthyste, couleur variable parfois sur un même échantillon |
Classe cristalline et groupe d'espace | Prismatique - 2/m groupe d'espace P21/c |
Système cristallin | monoclinique |
Réseau de Bravais | primitif P paramètres de maille a = 9,66 Å, b = 7,64 Å, c = 4,83 Å β = 90,09° Z = 4 |
Clivage | indistinct, imparfait et difficile |
Cassure | irrégulière, inégale, conchoïdale à subconchoïdale (fragile) |
Habitus | petit cristaux prismatiques, cristaux aciculaire courts ou aplatis sur gangue (taille atteignant 4 mm), cristaux tabulaires épais ou en plaque, en prisme court équidimensionnel, lenticulaire ou colonnaire, à doubles faces (pyramidale et prismatique) ; bloc granuleux ou agrégats sphériques ou globulaires ; masses fréquemment grenues et compactes présentant à la cassure un aspect de porcelaine fine, masses compactes, masses microcristallines ou cryptocristallines radiées, masse fibreuse botryoïdale (en grappe) ou nodulaire, masse réniforme |
Faciès | granuleux (explication du nom grec dateisthai) |
Échelle de Mohs | 5,5 (parfois réduite à 5) |
Trait | blanc |
Éclat | vitreux très net, gras ou graisseux sur la cassure, subrésineux sur les fragments de la cassure |
Propriétés optiques | |
Indice de réfraction | nα = 1.626 nβ = 1.653 - 1.654 nγ = 1.670 |
Biréfringence | Biaxial (-) ; δ = 0,0440 (biréfringence maximale) |
Pouvoir rotatoire | 2V = 74° (74°57 selon Alfred Lacroix, opus cité) |
Dispersion | 2 vz ~ r > v ou ρ > ν nette ; dispersiométrie faible |
Fluorescence ultraviolet | bleue sous UV courts (courtes longueurs d'onde) et luminescence |
Transparence | transparent à translucide |
Propriétés chimiques | |
Densité | 2,985 (entre 2,9 et 3, parfois 2,8 à 3 dans l'ancienne littérature) |
Solubilité | soluble dans les acides |
Propriétés physiques | |
Magnétisme | aucun |
Radioactivité | aucune |
Unités du SI & CNTP, sauf indication contraire. | |
Outre les masses nodulaires à structure granulaire caractéristique, ce sont le plus souvent des petits cristaux de maille monoclinique comme à Arendal ou à Andreasberg, de l'ordre d'un millimètre, qui sont présents dans les druses de roches éruptives basiques telles que les diorites, kersantites, diabases, gabbros, serpentines, mélaphyres... Mais des cristaux remarquables peuvent atteindre 12 cm[4].
Historique de la description et appellations
Inventeur et étymologie
La datolite a été décrite par le minéralogiste dano-norvégien Jens Esmark en 1806. Son nom vient du grec scientifique δατεῖσθαι dateisthaï ou datusthaï, « ce qui est partagé » et λίθος lithos, « pierre », en allusion à sa forme massive à structure fréquemment grenue ou granulaire, en (micro ou crypto)cristaux agglomérés, mais apparemment assez distincts par la brillance de ses nombreuses faces à contour pseudo-pentagonal[5].
Le cristal a longtemps été considéré comme orthorhombique, tant par ses propriétés géométriques, optiques ou d'habitus.
Elle a reçu le nom de humboldtite par Armand Lévy en 1823 car il avait observé un minéral monoclinique. Le minéralogiste Alfred Lacroix qui le classe définitivement comme monoclinique la nommait également datholite en 1892.
La botryolite est une variété fibreuse en grappe de raison, dite botryoïdale. Il s'agit d'un synonyme parfois usité.
Topotype
Les gisements miniers de fer d'Arendal, au voisinage de Christiansand, au sud-ouest de la Norvège, étaient très célèbres au XIXe siècle. La datolite se trouve en lit avec la magnétite, elle apparaît autant sous forme granulaire cristalline que sous forme fibreuse botryoïdale.
Caractéristiques physico-chimiques
Le minéral datolite dévoile des teintes très variables : incolore, blanc, gris, jaune, marron, vert... Sa densité se situe entre 2,9 et 3.
Grâce à sa dureté sur l'échelle de Mohs avoisinant 5,5 et surtout son faciès granulaire tranché, qui acquièrent une belle texture par polissage les plus beaux échantillons sont parfois taillés en gemme.
La datolite est attaquée par les acides forts. Elle gonfle et forme une gelée. L'analyse chimique révèle la présence d'acide borique. Ceci permet avec l'absence d'alumine de distinguer l'échantillon des zéoltithes, qui parfois l'accompagnent.
Le minéral bouillonne au chalumeau. il fond en un verre clair. La couleur au test de flamme est verte.
Chauffé en tube fermé, CaBSiO4(OH) relargue de l'eau visible sur la paroi, puis se décompose en poussières alcalines avant calcination.
Distinctions cruciales
La datolite se distingue de son analogue minéral calcite, cette dernière étant moins dure et faisant effervescence à l'acide chlorhydrique dilué. Parmi ses autres analogues, l'apophyllite est moins dure, présente des éclats différents et surtout un clavage parfait, alors que la danburite présente d'autres clivages.
Cristallochimie
Les petits cristaux aplatis sur gangue peuvent atteindre la taille de 4 mm, quatre fois plus importante que les petits cristaux d'Arendal en Norvège ou de la montagne saint Andréas dans le Harz. Ils sont généralement transparents. Ils ont une cohésion cassante, et engendrent facilement des poussières blanches.
Les petits cristaux sont rares dans les gisements métallifères et les roches granitiques.
Les cristaux prismatiques sont généralement courts, mais ils peuvent être tabulaires et épais, équidimensionnels, lenticulaires... Les masses sont fréquemment grenues, mais aussi fibreuses, compactes, réniformes, microcristallines...
Elle sert de chef de file à un groupe de minéraux isostructuraux, le groupe de la datolite, encore nommé groupe de la gadolinite :
- Bakerite Ca4(H5B5Si3O20)
- Calcybeborosilite-(Y) (REE,Ca)2[](B,Be)2(SiO4)2(OH,O)2 P 21/a 2/m
- Datolite CaBSiO4(OH) P 21/c 2/m
- Gadolinite-(Ce) (Ce,La, Nd,Y)2Fe2+Be2Si2Si3O10
- Gadolinite-(Y) Y2Fe2+Be2Si2Si3O10
- Hingganite-(Ce) (Ce,Ca)2([],Fe)Be2Si2O8[(OH),O]2 P 21/a 2/m
- Hingganite-(Y) Y2([])Be2Si2O8(OH)2 P 21/a 2/m
- Hingganite-(Yb) (Yb,Y)2([])Be2Si2O8(OH)2 P 21/a 2/m
- Homilite Ca2(Fe2+Mg)B2Si3O10
La datolite est aussi isomorphe de l'euclase BeAlSiO4OH P 21/a; 2/m d'un point de vue géométrique.
De larges cristaux de datolite trouvés dans la magnétite de la mine de fer de Haytor dans le Dartmoor en Devonshire, montrent une complète altération en calcédoine : ces matériaux de pseudomorphose, qui ne sont plus de la datolite, se nomment haytorite.
Cristallographie
Sur la face {001}, il est possible d'observer de fines stries plus ou moins ondulées.
- Paramètres de la maille conventionnelle : = 9,66 Å, = 7,64 Å, = 4,83 Å ; Z = 4 ; V = 356,46 Å3
- Densité calculée = 2,98 g cm−3
Le plan des axes optiques est {010}. Déjà, Alfred Lacroix en 1892 définissait l'ellipsoïde caractéristique des indices de réfractométrie des petits cristaux d'Andreasberg par :
- α=1,626 ; β=1,655 ; γ=1,67 (jaune)
- α=1,6248 ; β=1,6535 ; γ=1,667 (rouge)
Gîtes et gisements
La datolite est un minéral borosilicate de formation secondaire dans les roches basiques ignées, que l'on trouve dans les cavités ou druses, à l'instar des zéolithes qui l'accompagnent parfois.
Gîtologie et minéraux associés
Ce corps minéral se trouvent dans les veines et revêtements des cavités de roches magmatiques mafiques. La datolite est facilement observable dans les diabases de la vallée du Connecticut. Elle se trouve souvent avec la cholérite dans les diabases ou dolérites.
Il apparaît communément dans les vacuoles des roches volcaniques. Il accompagne souvent des zéolites dans le basalte. Les géodes de basaltes contiennent parfois aussi des agates en croissance libre.
Il est aussi présents dans les druses des filons métalliques ou de minerais métallifères. Il est commun dans les gisements de cuivre exploités dans la région du lac Supérieur dans l'État du Michigan. Dans cette région cuprifère, la texture rocheuse est finement granulaire et la roche est variablement colorées en bande. L'inclusion variable de l'élément cuivre explique la variation de coloration, tout comme les minéraux diversement associés au différentes étapes de la précipitation hydrothermale. Elle est moins fréquente dans les gisements de magnétite.
Il est présent dans les gneiss, tout comme dans les schistes à hornblende. C'est un minéral typique des fentes alpines. Il est enfin bien observable dans les gîtes des skarns borifères. On le retrouve dans les géodes des tuffs; dans les skarns ou les pierres à chaux.
Elle est associée aux minéraux suivants : axinite, calcite, quartz, danburite, apophyllite, babingtonite, épidote, grenats, prehnite, zéolites, cuivre natif, magnétite.
Gisements producteurs de spécimens remarquables
- Allemagne
- Kalisalzgrube, Buggingen, Müllheim, Bade-Wurtemberg[6]
- Sankt Andreasberg, massif du Harz , petits cristaux des druses, analogues à ceux topotypes d'Arendal, dans les veines d'argent natif et de diabase
- Autriche
- Bleidächer, Obersulzbachtal, Hohe Tauern, Salzburg[7]
- Canada
- États-Unis
- dans les diabases affouillées par la rivière Connecticut, Connecticut
- dépôts cuivreux du lac supérieur tels que la mine Quincy, Michigan
- carrière Lane quarry, Westfield, comté de Hampden au Massachusetts (belles cristallisations)
- site de Bergen et Paterson au New Jersey
- France
- Raon-l'Étape, Vosges, Lorraine[9]
- Ancienne carrière de la Pomme de Pin, côte Saint-Dié, col de Sainte-Marie-aux-Mines ou sur Wisembach. selon le géologue Daubrée, le minéral datolite tapisse fréquemment les druses des kersantites, très fréquentes dans ce massif (granito)gneissique.
- Grande-Bretagne
- Bishopton dans le Renfrewshire
- près Édimbourg
- Japon
- mine de cuivre d'Iwato, préfecture de Miyazaki
- Mexique
- Charcas, San Luis Potosi, très gros cristaux
- Tchéquie
- Moravie
- Norvège
- Arendal kommune, Aust-Agder fylke[10]
- Russie
- Dalnegorsk, Primorskiy Kray, cristaux exceptionnels
- Australie
- Tasmanie, fins spécimens de collection
Usage
Minéral de collection relativement dur, elle peut être utilisée comme pierre précieuse et gemme, parfois comme objet support après un polissage.
Notes et références
- La classification des minéraux choisie est celle de Strunz, à l'exception des polymorphes de la silice, qui sont classés parmi les silicates.
- Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
- La formule simple s'écrit parfois CaB[(OH)(SiO4)].
- (en) John W. Anthony, Richard A. Bideaux, Kenneth W. Bladh et Monte C. Nichols, The Handbook of Mineralogy : Silica, Silicates, vol. II, Mineral Data Publishing, .
- Le verbe grec dateomaï ou δατεῖσμαί signifie diviser, partager.
- (de) Otto Braitsch, Gerhard Gunzert, Wolfhard Wimmenauer et Reinhold Thiel, « Über ein Datolithvorkommen am Basaltkontakt im Kaliwerk Buggingen (Südbaden) », Beiträge zur Mineralogie und Petrographie, vol. 10, no 1, , p. 111-124 (DOI 10.1007/BF01192540).
- (de) Albert Strasser, Die Minerale Salzburgs, , 348 p. (ISBN 978-3-900885-00-7).
- (en) Ann P. Sabina, Rocks and minerals for the collector : Geological Survey of Canada, Miscellaneous Report 33: Buckingham – Mont-Laurier – Grenville, Quebec Hawkesbury – Ottawa, Ontario, (lire en ligne), p. 18-19.
- (de) Artur Wittern et Jean-Renaud Journée, Mineralien finden in den Vogesen : Ein Führer zu über 40 Fundstellen, Cologne, Sven Von Loga, , 160 p. (ISBN 978-3-87361-255-6), p. 27-28.
- (de) Martin Heinrich Klaproth, « Chemische Untersuchung des Datoliths », Neues allgemeines Journal der Chemie, vol. 6, , p. 107-110 (lire en ligne).
Voir aussi
Bibliographie
- Ronald L. Bonewitz, Margareth Carruthers, Richard Efthim, Roches et minéraux du monde, Delachaux et Niestlé, 2005, 360 pages (traduction de l'ouvrage anglo-saxon, publié par Dorling Kindersley Limited, Londres, 2005), en particulier p. 313. (ISBN 2-603-01337-8)
- Alfred Lacroix, Minéralogie de la France et de ses anciens territoires d'Outremer, description physique et chimique des minéraux, étude des conditions géologiques et de leurs gisements, 6 volumes, Librairie du Muséum, Paris, 1977, réédition de l'ouvrage initié à Paris en 1892 en un premier tome. En particulier, pour la datholite décrit dans le premier volume, p.
- Rupert Hochleitner (trad. de l'allemand), 300 roches et minéraux, Paris, Delachaux et Niestlé, , 256 p. (ISBN 978-2-603-01698-5), p. 161
- * Henri-Jean Schubnel, avec Jean-François Pollin, Jacques Skrok, Larousse des minéraux, sous la coordination de Gérard Germain, éditions Larousse, Paris, 1981, 364 p. (ISBN 2-03-518201-8). entrée datolite p. 131.
Liens externes
- (en) Handbook of Mineralogy Datolite sur le Manuel de minéralogie anglo-saxon
- (en) Mineral galleries
- (en) Présentation du minéral sur Mindat
- (en) Datolite sur le site Webmineral
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