Famille Nairac

La famille Nairac est une famille française, originaire du Tarn, qui a prospéré dans le négoce et le commerce maritime à Bordeaux, à l'île Maurice et à Amsterdam aux XVIIIe et XIXe siècles.

Histoire

Les Nairac, de tradition protestante, étaient forgerons, puis armuriers, à Gijounet (Tarn) aux XVIe et XVIIe siècles.
Au XVIIIe siècle, ils se lancèrent avec succès dans le raffinage de sucre, le négoce, et l'armement maritime à Bordeaux dont celui des navires négriers.

David Nairac, maitre serrurier à Gijounet, marié vers 1625 avec Judith Calvet, eut trois fils auteurs de trois branches :

  • Philippe Nairac (1628-1708), armurier à Gijounet, auteur de la branche ainée, implantée à Bordeaux vers 1750, puis à Maurice vers 1830, dont postérité patronymique à Maurice et à Bordeaux
  • Jean Nairac (1634-1706), armurier à Gijounet, auteur de la branche cadette, implantée à Bordeaux à partir de 1720
  • Alexandre Nairac (1646-1712), marchand à Castres (Tarn), auteur de la troisième branche, qui se partagea entre Castres et Bordeaux à partir de 1670.

La famille (de) Nairac laisse une riche correspondance qui instruit l'historiographie sur la traite négrière et les politiques de négoce colonial.

Branche de Philippe Nairac

Philippe Nairac (1628-1708) à partir de Bordeaux, travaillait dans le négoce des denrées coloniales en lien avec son fils Guillaume Nairac installé à Amsterdam aux Provinces-Unies[1].

Branche de Jean Nairac

Jean Nairac (1634-1706) fut entre autres père de Paul Nairac (1694-1759), raffineur et armateur à Bordeaux, dont trois fils développèrent avec succès le commerce maritime, et notamment l'armement négrier  :

Pierre Paul Nairac (1732-1812)

Pierre Paul Nairac donna à son fils, Paul Nairac, un précepteur lettré (et futur abolitionniste) Jean-Paul Marat venu de Suisse. Paul Nairac fit sa médecine à Bordeaux, épousa en 1760 Jeanne Barbe Wetter puis monta à Paris en 1762[2].

Pierre-Paul Nairac était armateur et raffineur, associé à son frère Élisée I et à son fils Laurent Paul. Il possédait une flotte de quatre navires, dont trois navires négriers, et deux raffineries de sucre[3] dans le quartier Sainte-Croix à Bordeaux. Il fut député du tiers-état aux États généraux de 1789[4], qui tenait à l'Exclusif colonial[2]. Appuyé par les députés de l'Assemblée constituante et des commerçants, Pierre Paul Nairac prit la parole pour argumenter pour la liberté commerciale[2].

Grâce à l'argent du négoce et de la traite négrière, il fit construire entre 1775 et 1777 un hôtel particulier à Bordeaux, dénommé Hôtel Nairac[5], selon les plans dressés par l'architecte Victor Louis. Le coût de l'opération fut de 233 000 livres. Nairac revendit cet hôtel particulier à des négociants en 1792[6].

Élisée Étienne Nairac (1734-1791)

Chateau Nairac à Barsac, Gironde.

Frère cadet du précédent, Élisée Nairac père rejoint en 1790 la franc-maçonnerie bordelaise dans la loge « L'Amitié »[7]. Il fait construire en 1786 le château Nairac à Barsac, en Gironde[8] sur un domaine qui appartenait à la fille d'un planteur de Saint-Domingue (Elisabeth Prost)..

Il avait fondé en 1767 avec son frère, Paul II, la société « Paul Nairac et fils aîné » que son fils Elysée II reprit.

Elisée Nairac meurt en 1791 et deux de ses filles, Henriette (1765-1837) et Emilie (1766-1834) héritent du domaine. Elles restent célibataires, et dirigent le domaine jusqu’à leur décès[9]. En 1837, les héritiers Nairac le vendent à Bernard Capdeville.

Jean-Baptiste de Nairac (1738-1817)

Jean-Baptiste Nairac, né à Bordeaux, s'établit à La Rochelle comme négociant. En 1773, il était syndic de la chambre de commerce de La Rochelle. Le 24 germinal an V, le département de la Charente-Inférieure l'envoya siéger au Conseil des Cinq-Cents[10]. Il fut sénateur sous l'Empire. Il épousa le Marie Belin, fille de Claude Etienne Belin, l'un des plus brillants armateurs rochelais[11].

Il fut anobli pour avoir pratiqué la traite et assez logiquement, réticent en son temps à l'abolitionnisme, ne s'intéressant qu'au profit ou à la banqueroute - et de loin aux problèmes coloniaux[12] ; il s'exprima en ces termes le  : « Si la politique condamne celle des Amis des Noirs, l'humanité est forcée de leur rendre hommage (...) cette société attaquée de toute part, est au moment de s'anéantir absolument (...) cela n'empêche pas que ses principes trop propagés ne puissent accélérer une révolution dans nos colonies qui les anéantirait dans le sang de ses habitants, tant blancs que noirs »[12]

Plantation coloniale et traites négrières

Carte de l'Isle Bourbon, 1753.

De 1764 à 1792, les trois frères Nairac ont organisé 24 expéditions déplaçant 3 250 tonneaux[12],[13], expéditions dont 18 déportèrent plus de 8 000 Africains[14],[15], ce qui les place en tête des négriers bordelais.

Ils étaient propriétaires de plusieurs navires : le plus gros vaisseau de Bordeaux, Le Pactole (900 tonneaux) qui portait bien son nom, Le Maréchal de Duras (400-500 tonneaux), Le Neptune (400-500 tonneaux), Le Vengeur (400-500 tonneaux), Le Restaurateur (400-500 tonneaux) et Le Roitelet de mers (80 tonneaux)[12],[13].

Ils possédaient un domaine (Habitation de Nairac) en 1786, à l'île Bourbon (St- Pierre de la Réunion), dans la région du Tampon actuel, qui comprenait 414 esclaves dont 98 enfants, 2 invalides, 24 domestiques, etc[16].

Elisée II, fils d'Elisée Etienne, poursuivit les activités négrières de son père, lors de la reprise bordelaise des années 1802-1804[13].

Notes et références

  1. Philippe Norel et al., L'Invention du marché. Une histoire économique de la mondialisation, Paris, Seuil, , 592 p. (ISBN 978-2-02-100763-3, lire en ligne), section 10
  2. Eric SAUGERA, Bordeaux port négrier (XVIIe-XIXe siècles), Karthala, (lire en ligne), p. 111-112
  3. « Des négriers français si prospères », sur www.historia.fr (consulté le )
  4. Pierre-Paul Nairac sur le site de l'assemblée nationale
  5. L'hôtel particulier est situé cours de Verdun et abrite la cour administrative d’appel de Bordeaux depuis le 23 décembre 1999.
  6. Bordeaux : cour administrative d’appel de Bordeaux
  7. Éric Saugera, Bordeaux, port négrier. XVIIe – XIXe siècles, J&D - Karthala, 1995, (ISBN 2-84127-042-4)
  8. Sur la trace de la traite des noirs à Bordeaux de Danielle Pétrissans Cavailles
  9. « Histoire du domaine », sur abcduvin.com (consulté le )
  10. Jean-Baptiste Nairac sur le site de l'Assemblée nationale
  11. p.59 Jean Michel Deveau, Le commerce rochelais face à la Révolution, correspondance de Jean-Baptiste Nairac ( 1789-1790) page 59, Ed.Rumeur des Âges, La Rochelle, 1989
  12. Jean Mondot, L'esclavage et la traite sous le regard des Lumières, Bordeaux, Presses Universitaires de Bordeaux, (lire en ligne), p. 99, 117, 119, 124
  13. Un tonneau donne un profit de 1 200 à 1 500 livres. Voir Claire Sibille, Guide des sources de la traite négrière, de l'esclavage et de leurs abolitions, 2007, La Documentation française.
  14. Eric Saugera, « La famille Nairac et la traite négrière », sur les.traitesnegrieres.free.fr, (consulté le )
  15. « 5 000 à 6 000 nègres », selon J. Monot, 2004, op. cit.
  16. J. V. Payet, Histoire de l'esclavage à l'île Bourbon (Réunion), L'Harmattan, , p. 80

Voir aussi

Articles connexes

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