Fondation Jean-Jaurès

La Fondation Jean-Jaurès est une fondation reconnue d'utilité publique[2] créé en 1992 par l'ancien Premier ministre socialiste Pierre Mauroy avec le soutien de la Première ministre Édith Cresson[3] avant la déroute du Parti socialiste (PS) aux élections législatives de 1993.

Fondation Jean-Jaurès
Penser pour agir
Histoire
Fondation
Cadre
Type
Fondation politique
Forme juridique
Fondation
Domaine d'activité
Autres organisations fonctionnant par adhésion volontaire
Siège
Pays
Organisation
Président
Direction
Affiliation
Budget
2,1 millions d'€[1]
Site web
Identifiants
SIREN
OpenCorporates

Créée 78 ans après la mort de Jean Jaurès et 41 ans après celle de son dernier enfant, elle n'a aucun lien avec sa famille.

Elle est présidée depuis 2013 par l'ancien ministre socialiste Henri Nallet. La Fondation Jean-Jaurès est considérée comme proche du PS[4] et a été depuis 2017 proche de La République en marche[5] et a reçu à partir de cette année d'importantes subventions gouvernementales, puis a participé fin 2021 au lancement du comité de soutien national pour la campagne présidentielle d'Anne Hidalgo[6].

Histoire

Liens avec le Parti socialiste depuis 1992

La création en 1992 de la Fondation Jean-Jaurès intervient après le congrès de Rennes, où émergent de profondes divisions au Parti socialiste et avant les élections législatives de 1993 qui le voient perdre 218 de ses 275 députés.

Alors que le concept de « fondation politique » n’existe pas encore en France, Pierre Mauroy, premier secrétaire du PS, souhaitait que celui-ci se dote, à l’instar des autres partis socialistes européens, d’un outil de promotion de la démocratie et de rayonnement de l’expérience socialiste française[7].

La coopération entre le PS et la fondation prend néanmoins une forme opérationnelle par la réalisation de projets communs, cofinancés par le PS et la fondation (colloques, séminaires, etc.). Elle a vocation à extérioriser le message et les valeurs portées par le Parti socialiste. Si la fondation exerce ses activités dans le cadre idéologique qui est celui du PS, elle en est un outil complémentaire qui agit en toute indépendance. Le programme d’activités et les choix stratégiques des actions sont élaborés en autonomie complète par rapport au PS.[réf. nécessaire]

D’autres fondations du même type ont suivi le même exemple en France, comme la Fondation Robert Schuman chez les centristes pro-européens, puis la Fondation Gabriel Péri côté communiste ou la Fondation pour l’innovation politique à droite[8].

Difficultés en 2017

Le budget provisoire voté en 2016 était de 2,73 millions d'euros. La Fondation bénéficiait alors de subsides versés par les présidences des deux Assemblées et les groupes parlementaires socialistes par le biais de la réserve parlementaire, supprimée après l'élection d'Emmanuel Macron. Le directeur général adjoint de la Fondation, Laurent Cohen, envisage alors « une perte sèche de 300 000 euros »[9]. Depuis 2017, le budget de la Fondation Jean-Jaurès n'a pas bénéficié d'une augmentation de subventions publiques[10],[11].

Liens avec le parti d'Emmanuel Macron

Bien qu'historiquement proche du Parti socialiste, la Fondation Jean-Jaurès est ensuite également en « excellents termes » avec La République en marche, estime Grégory Rzepski du Monde diplomatique en 2019[12]. Le directeur général Gilles Finchelstein a été critiqué au PS pour avoir pris la parole au nom de la fondation, lors d'une réunion des parlementaires de La République en marche, en juin 2017[9]. « Nous ne nous situons pas par rapport à un parti ou un homme, mais par rapport à des valeurs et des idées », a-t-il répliqué lors d'un colloque début septembre 2017[9] dans son discours de clôture, en estimant que la Fondation était « indépendante, européenne, et social-démocrate ».

Gilles Finchelstein travaille pour l'agence publicitaire Havas Worldwide[13], qui selon Mediapart « représente les trois quarts de ses activités »[14] et a continué à s’infiltrer dans la machine politique, en « jetant son dévolu sur Emmanuel Macron », bien avant son élection, « pour être depuis 2017 installée au cœur même du pouvoir ».

Un des bureaux de la fondation fut occupé longtemps par Ismaël Emelien, devenu en 2017 conseiller spécial d'Emmanuel Macron. Selon Le Monde, il a longtemps côtoyé Gilles Finchelstein, pour le compte de Dominique Strauss-Kahn puis à l’agence Havas. D'autres dirigeants de la Fondation Jean-Jaurès se disent « distincts sans être distants » de ceux de La République en marche.

Descendants de Jaurès

La Fondation Jean-Jaurès, créée 78 ans après la mort de Jean Jaurès et 41 ans après celle de sa fille, n'a aucun lien avec ses descendants, déjà disparus.

« Il n'y a pas de descendance dans la famille Jaurès, que des membres collatéraux », selon Bernard Louvet, président des Amis de Saint-Roch, qui entretient la tombe de Castres, où furent inhumés la mère de Jean, Marie-Adélaïde Jaurès (1822-1906) et son frère, le vice-amiral Louis Jaurès (1860-1937), député du cartel des gauches en 1924. Selon lui, sa nièce Yvonne Régnier-Jaurès, décédée en mai 1982, venue à Castres en 1959, pour le centième anniversaire de la naissance de Jaurès, fut la dernière ayant droit à venir se recueillir sur la tombe[15].

Deux décennies après la création de la Fondation Jean-Jaurès, lors du centenaire de la mort de Jean Jaurès en 2014, Monique Bonnier Pitts, petite-fille de Pierre Renaudel (1871-1935), contacta la Fondation Jean-Jaurès pour lui proposer un buste de son grand-père[16], puis découvrit, au cours de rangements effectués un week-end, un ensemble de boîtes d’archives[16], données à la Fondation[16].

En 1902, Pierre Renaudel avait succédé à Jules Vallès à la tête du quotidien Le Peuple[17] puis devint délégué à la propagande de la SFIO en 1905[17], quand son unification par Jaurès ouvre l'Humanité, qu'il a cofondée en 1904 avec Jaurès[17], aux guesdistes. Avant que ce quotidien devienne en 1911 l'organe officiel de la SFIO au congrès de Saint-Quentin, il en devient chef de la rédaction dès 1908. Témoin, fin juillet, de l’assassinat de Jean Jaurès causé par son opposition à la Guerre de 1914-1918, il rédigea 4 jours après la « Une » du de l'Humanité, qui fit entrer la SFIO dans l'union sacrée pour la guerre, en écartant les recours tels que la grève générale simultanée dans plusieurs pays[18]. Pierre Renaudel sera battu aux législatives de 1919, après avoir été remplacé en par Marcel Cachin à la direction de l'Humanité, au moment du changement de majorité à la SFIO[17], le quotidien sortant du giron socialiste lors du Congrès de Tours, qui voit la scission créant le Parti communiste français.

Objectifs

Selon les archivistes

Selon Emmanuelle Jouineau, responsable du Centre d'archives socialistes à la Fondation Jean-Jaurès à partir de 1999, la FJJ a « toujours eu comme objectif d’être un lieu d’échanges et de débats pour toutes les tendances du mouvement socialiste et de la gauche en général »[8]. Depuis 2012, Guillaume Touati est le responsable du Centre d'archives socialistes à la Fondation Jean-Jaurès[19].

Selon la même source, s'exprimant en 2011 dans une revue universitaire, la Fondation Jean-Jaurès est « organiquement et financièrement indépendante du PS »[8]. Même si elle a vocation à le suivre « dans les combats politiques de notre époque »[8], elle se place « en dehors de l’« appareil » du parti socialiste »[8], sur le « modèle des fondations politiques allemandes, comme la Friedrich Ebert Stiftung ». La Fondation Friedrich-Ebert a été fondée par des sociaux-démocrates allemands dès 1925[8].

Selon les statuts

La fondation a pour but de « favoriser l’étude du mouvement ouvrier et du socialisme international, de promouvoir les idéaux démocratiques et humanistes par le débat d’idées et la recherche, de contribuer à la connaissance de l’homme et de son environnement, de mener des actions de coopération économique, culturelle et politique concourant à l’essor du pluralisme et de la démocratie dans le monde[20]. »

Utilité publique

La fondation a été reconnue d’utilité publique par décret de la Premier ministre Edith Cresson à sa création en février 1992[3].

Organisation

Présidents

  • Pierre Mauroy, ex-premier ministre socialiste, fondateur et premier à la présidence de la fondation ne l'a quittée qu'à son décès en 2013.
  • Henri Nallet, président depuis 2013, fut ministre socialiste de l'Agriculture (1985–1986) puis dirigea d'autres ministères socialistes de 1988 à 1992. De à , il occupa trois postes de direction au sein des Laboratoires Servier, avec « un revenu annuel très important estimé à 812 000  »[21] et fut conseiller du président Jacques Servier. Lorsque éclate le scandale du Mediator, il est entendu comme témoin assisté à partir de décembre 2013 car accusé de trafic d'influence[22]. Deux ans après, son élévation au grade de commandeur de la Légion d'honneur le suscita des réserves[23],[24] et sa nomination mise en suspens[25].

Directeurs généraux

Secteurs

  • Un secteur « Coopération internationale » vise à favoriser l’émergence ou la consolidation de la démocratie dans le monde, via des séminaires ou des stages de formation thématiques destinés à des militants ou cadres de partis, mais aussi à des élus ou futurs élus. La Fondation intervient chaque année dans une quarantaine de pays et des colloques internationaux.
  • Un secteur « Études et recherches » organise des colloques, rencontres publiques ou fermées et groupes de travail. Il publie plusieurs collections d'ouvrages (essais, notes, newsletters électroniques) se voulant un laboratoire d’idées entre la France et l’Europe, entre le monde politique et la société civile.

Siège et archives

La Fondation Jean-Jaurès a entreposé les documents de l'histoire contemporaine du Parti socialiste dans un « Centre d'archives socialistes (CAS) », hébergé au no 6 de la cité Malesherbes, dans le 9e arrondissement de Paris. Il est chargé de collecter et conserver les archives du mouvement socialiste, avec traitement informatisé, organiser des colloques et séminaires et diffuser des textes historiques ou de contributions originales. Thierry Mérel, diplômé en archivistique, y surveille 1 500 mètres linéaires dont environ « 16 000 ouvrages » et « 2 000 affiches »[9]. L’objectif est de numériser les archives repérées, pour les préserver des manipulations rendues délicates par l’état de certains documents[16].

En 1998, la Fondation Jean-Jaurès s'est installée juste à côté, au no 12 de la cité Malesherbes, dans l'immeuble acheté par le journal quotidien socialiste Le Populaire en décembre 1936, siège de la SFIO en 1937. Réquisitionné par les Allemands sous l'Occupation, il fut récupéré par le Parti socialiste en 1944.

Observatoires

En 2014, la Fondation Jean-Jaurès fonde un Observatoire des radicalités politiques, co-dirigé par Jean-Yves Camus et Frédéric Potier[26] auquel participent des journalistes, historiens et sociologues, tels Rudy Reichstadt[27], Nicolas Lebourg, Joël Gombin ou Sylvain Crépon. Ces membres nient toute orientation partisane[28].

En 2021, l'Observatoire des médias est lancé, et dirigé par le journaliste David Medioni[29].

Chloé Morin anime l'Observatoire de l’opinion jusqu'en 2020[9] Antoine Bristielle lui succède la même année[30]. Amandine Clavaud, est responsable Europe au secteur international[9] et directrice de l'Observatoire Égalité femmes-hommes[31]. Jérémie Peltier a été nommé en juillet 2017, directeur des études de la Fondation[9].

Un Observatoire de l'éducation dépend aussi de la Fondation Jean-Jaurès[32]. Quelques semaines après l'assassinat le 16 octobre 2020 à Conflans-Sainte-Honorine, dans les Yvelines du jeune professeur d’histoire-géographie Samuel Paty[33], il a lancé un "baromètre sur les enseignants"[32], qui a publié en juillet 2021 une étude, réalisée avec l'Institut de sondages Ifop[32], dont elle conclut que « les enseignants semblent aujourd’hui imprégnés d’une vision très « juridique » et « minimaliste » de la laïcité »[32].

Propositions

En mai 2016, un peu avant la présidentielle, la fondation s'exprime en faveur de l'idée d'un revenu universel de base de 750 euros par mois[34]

Budget

Montants

Le budget de la Fondation Jean-Jaurès dépassait 2 millions d'euros dès 2010. Son budget global pour l'année 2010 s'élevait à 2 100 000 , dont 80 % provenant de différents services et ministères de l'État et seulement 2 % des groupes socialistes du Parlement et du Sénat[35]. Le budget 2018 s'élevait à 2 982 000 [35].

Les locaux ont été agrandis de deux étages acquis dans un immeuble voisin en 2006. Le budget provisoire voté en 2016 était de 2,73 millions d'euros[9].

Subventions

En 2016, la fondation a reçu 230 000  de subvention au titre de la réserve institutionnelle de la présidence de l'Assemblée nationale[36], dont le président était Claude Bartolone, dans le cadre de la réserve parlementaire.

En 2017, ce montant était sept fois plus élevé : la fondation a reçu 1,69 million d'euros de l’État, sur décision du chef de cabinet du Premier ministre[5]. En 2018 et 2019, la Fondation a perçu 1,2 million d'euros de la part des subventions du Premier ministre.[37]

Droit et fiscalité

Il n’existe, en France, aucune loi spécifique aux fondations politiques et la Fondation Jean-Jaurès fut la première à sa création en 1992. Le droit privé les autorise à recevoir, si reconnues d’utilité publique, des subventions des entreprises et des dons et legs de particuliers, avec des avantages fiscaux.

Les autres ressources de la fondation viennent de la vente de publications et des services rendus à la « famille socialiste » : gestion et animation des archives du PS, ex-SFIO.

Études remarquées

Complotisme et Gilets jaunes

Quelques semaines après l'essor du mouvement des Gilets jaunes, la FJJ lance une « étude » sur le sujet, publiée ensuite en janvier 2019 sous forme de note[38], rédigée par le journaliste Roman Bornstein[39] en s'appuyant, en partie, sur un questionnaire diffusé au sein de groupes Facebook de gilets jaunes[40]. L'étude affirme que seulement 48 % des gilets jaunes estiment que l'attentat de Strasbourg du 11 décembre 2018[41], a bien été perpétré par Chérif Chekatt, contre 65 % des Français en général[41], et se base dessus pour affirmer que le mouvement des Gilets jaunes est « complotiste ».

Selon France Culture, c'est une « hypothèse que dessine la Fondation Jean Jaurès », plus qu'un portrait méthodologiquement étayé, dans son étude. La démarche laisse la place à la méthode de l'« hypothèse », a aussi observé un article dans Libération[42], consacré à cette « note dont les conclusions divisent »[42] et qui « s'intéresse surtout à Maxime Nicolle, alias Fly Rider, et Eric Drouet figures des gilets jaunes très actives sur les réseaux sociaux », car l'auteur a beaucoup « travaillé à partir de leurs lives Facebook »[42]. Bien qu'eux-mêmes se revendiquent « apolitiques », la Fondation Jean-Jaurès estime que Drouet est un « factieux »[42], observe Libération. La journaliste Aude Lancelin, directrice de publication du Média, a qualifié à cette occasion la FJJ de « gauche antisociale »[42] et fustigé son besoin de désigner comme « ennemis publics » les deux gilets jaunes, animateurs d'un mouvement « qui lui échappe sur le terrain »[42].

Le Parti communiste français (PCF), a lui dénoncé une étude émaillée par « d'importants biais méthodologiques »[43] car centrée sur certaines catégories sociales et « prétendant démontrer que les catégories populaires sont fortement perméables au complotisme », sans s'intéresser aux ravages de ce mal dans d'autres catégories sociales. La critique du PCF est venue une semaine après celle du site d'information Arrêts sur images[44] qui avait surtout observé que les résultats de cette étude avaient « encore une fois, été relayés de manière partiale dans les médias »[44], la façon de les présenter s'y prêtant, en retenant « un angle propre à allécher l'appétit médiatique »[44], afin d'obtenir de « gros titres alarmistes »[44], par exemple un article du magazine Le Point, titré « 40 % des Gilets jaunes sont très complotistes »[41],[44].

Complotisme et anti-masques

Les biais méthodologiques d'une autre étude de la Fondation Jean-Jaurès, consacrée au profil des membres des groupes Facebook anti-masques français[45], et rendue publique au début du mois de septembre, ont aussi été critiqués dès sa sortie[46]. L'étude avait en particulier recouru à un questionnaire posté sur ces groupes Facebook, en laissant libre « qui le souhaitait d'y répondre »[46].

En seulement jours[Combien ?], plus de 1000 réponses à l’enquête sont remontées à la Fondation Jean-Jaurès par cette voie[45] et elles avaient ensuite été comparées à des questions posées à la population française plus largement, ou dans des enquêtes récentes et dans une l'étude d'automne 2018 sur les groupes Facebook de « gilets jaunes »[45]. Tout en concédant que cette méthodologie peut difficilement « prétendre à la représentativité de l'ensemble des anti-masques dans la population française », Antoine Bristielle, professeur de sciences sociales à l'Université Grenoble-Alpes, qui a signé la note envoyée à la presse, avait estimé que cependant, de « par son ampleur, cette étude donne un très bon aperçu du profil des individus »[45].

Voile des étudiantes et parents d'élèves

Quelques semaines après l'assassinat le 16 octobre 2020 à Conflans-Sainte-Honorine, dans les Yvelines du professeur d’histoire-géographie Samuel Paty[33], l'Observatoire de l’éducation, qui dépend de la Fondation Jean-Jaurès[32], a lancé un « baromètre sur les enseignants »[32], qui a publié en juillet 2021 une étude, réalisée avec l'Institut de sondages Ifop[32], dont elle conclut que « les enseignants semblent aujourd’hui imprégnés d’une vision très « juridique » et « minimaliste » de la laïcité »[32].

Le sondage montre pourtant que 96 % des enseignants sont favorables à la loi de 1905 sur la laïcité (contre 88 % des Français), et 92 % à celle de 2010 sur la burqa (contre 88 % des Français), deux tiers d'entre eux interprétant de plus comme une remise en cause de la laïcité les demandes de viande halal/casher dans les cantines scolaires et seulement 20 % (contre 23 % des Français) étant favorables des horaires réservés aux femmes dans les piscines publiques.

Malgré cela, le corps enseignant « apparaît dans cette enquête systématiquement plus favorable que le reste des Français au port de signes religieux »[32], en raison de « la position des « jeunes profs » »[32] conclut l'étude, en se basant en fait sur les réponses à deux questions non inclues dans les lois sur la laïcité: le port du voile pour les étudiantes majeures et celui des parents accompagnant une sortie scolaire, sur lequel un accrochage médiatique venait d'opposer en novembre 2019 le ministre de l'Éducation à la FCPE[47], première fédération des conseils de parents d'élèves avec 40 % des sièges dans les lycées et collèges, contre 10,6 % à la PEEP[48].

Malgré l'écrasante majorité favorable aux lois sur la laïcité, le quotidien Ouest-France se demande, à la publication de ce sondage, s'il s'agit « d'un manque de formation sur les principes qui régissent le statut de fonctionnaire » ou d'une « prise de position en connaissance de cause qui renvoie à une pénétration importante dans notre société comme dans la jeune génération ? » [33], tandis que L'Express souligne « une rupture générationnelle, les plus âgés étant très attachés à la laïcité tandis que les plus jeunes sont dans une logique plus anglo-saxonne, plus libérale »[49].

Pronostic sur la non conquête de mairies par EELV en 2020

Le 13 mars 2020, à l'avant-veille des élections municipales, Gilles Finchelstein, directeur général de la Fondation Jean-Jaurès, a publié une note pour « éclairer sur la possible surprise du parti Europe Écologie-Les Verts »[50], alors porté par d'excellents sondages, en jugeant « hypothétique qu’il détienne un nombre substantiellement plus important de mairies à l’issue du second tour »[50]. Pronostic démenti, quelques heures après le second tour, avec une trentaine de villes importantes prises par ce parti[51], dont 8 de plus de 100 000 habitants, avec Marseille, Lyon, Bordeaux, Strasbourg, Grenoble, Annecy, Besançon ou encore Poitiers[52].

La note de la Fondation Jean-Jaurès reconnaissait que 50 % des Français estiment que ce serait une bonne chose qu'EELV dirige la commune où ils habitent mais mettait en avant « les préoccupations en matière de sécurité une faiblesse supplémentaire pour une formation dont le champ de légitimité demeure étroit »[50].

Théorie du vote utile à la présidentielle 2022

Le 28 octobre, une « étude pour la Fondation Jean-Jaurès (FJJ) » sur le thème du "Vote utile" fait la « Une » de nombreux médias, mais souvent au conditionnel[53] et contestée par Anne Hidalgo, candidate PS qui le juge « pas sérieux » et risquant de « provoquer de grandes colères »[54]. C'est la première à parler de « vote potentiel » et plus d'« intention de vote » pour un des sondages sur la présidentielle 2022.

La veille du 28 octobre, un dossier, distinct de cette étude, a été consacrée par la même FJJ à l'impact d'Eric Zemmour « sur le positionnement des autres candidats », mais sans mentionner l'étude qui sera publiée le lendemain[55],[56].

Cette « étude pour la Fondation Jean-Jaurès » est en fait une simple « note pour la Fondation Jean-Jaurès » d'Adélaïde Zulfikarpasic[57], à en-tête de la Fondation Jean-Jaurès[57], de 5 pages et sans annexes. Elle est publiée sur son site internet, sans mentionner que l'auteure occupe le poste de directrice de BVA Opinion[57],[58]. Dès ses deux premiers paragraphes, elle se réfère à un « sondage BVA paru le 14 octobre 2021 »[59], deux semaines plus tôt, mais sans jamais préciser ses questions posées. Le sondage est présent depuis cette date sur le site de BVA, qui l'a réalisé pour la radio RTL et l'opérateur télécoms Orange[59], mais il ne mentionne pas les chiffres dont parle Adélaïde Zulfikarpasic dans sa note du 28 octobre[59]. Ce sondage précise que 9 % des électeurs inscrits ont répondu qu'ils « ne s'intéressent pas » à la présidentielle, contre 18 % qui s'y « intéressent un peu », 31 % qui « intéressent assez » et 41 % qui s'y « intéressent beaucoup »[60]. Il précise que les sondés ont dû noter sur une échelle de 1 à 10 leur certitude d'aller voter: 59 % ont donné la note 1, 11 % la note 2, et 30 % une des 8 autres notes possibles[60]. Parmi les personnes « certaines d'aller voter », seulement 52 % à 58 %, selon les scénarios, « ont exprimé une intention de vote et se disent sûres de leur choix »[61]. La note d'Adélaïde Zulfikarpasic[57] s'intéresse, dans ce sondage, à ceux des électeurs de Benoit Hamon (6,3 % des suffrages exprimés en 2017) certains d'aller voter en 2022 et qui ont, de plus, dévoilé leur intention de vote. Elle est pour Emmanuel Macron dans une proportion de 20 % à 26 % (selon les autres candidats présents)[57], observe-t-elle, en estimant que cette proportion est une justification du concept de potentiel de vote, incluant pour chaque électeur un second choix possible: chez ceux de Benoit Hamon en 2017, un sur deux (49 %) « déclare qu’il pourrait voter pour Emmanuel Macron au premier tour » dont 14 % précisant être « sûr » de pouvoir le faire.

Ce sondage du 14 octobre a testé plusieurs raisons possibles de ce vote potentiel, en offrant le choix entre deux réponses, révèle la note d'Adélaïde Zulfikarpasic : « dans une optique de vote utile, pour faire barrage à l’extrême droite » a recueilli 45 %[57],[58] et « par défaut, parce que c’est le moins pire » 36 %[57],[58]. Ce concept de potentiel de vote a aussi été testé pour les « sympathisants LFI »[57],[58]: ceux qui, au total « pourraient voter pour Emmanuel Macron au premier tour », seraient 25 %[57],[58], Adélaïde Zulfikarpasic dont 4 % « sûrs » de pouvoir le faire[57],[58]. La même question, sur les raisons de ce vote « potentiel » pour Macron, leur a été posée. « Dans une optique de vote utile, pour faire barrage à l’extrême droite » a recueilli 41 %[57],[58].

La note d'Adélaïde Zulfikarpasic ne précise cependant pas quelle proportion a répondu « par défaut, parce que c’est le moins pire »[57],[58] et ce chiffre de 41 % devient, le même jour, sur les sites du quotidien Les Échos et de France Info : « 41 % des sympathisants La France insoumise envisagent de voter pour Emmanuel Macron au premier tour et ainsi faire barrage à l'extrême droite, selon une étude publiée par la Fondation Jean-Jaurès »[62]. Tentant d'étayer ce chiffre, jugé étonnant par plusieurs médias, France Info cite Adélaïde Zulfikarpasic, qui estime que cela relève d'une mécanique « fondée sur une idée centrale : celle que la gauche ne pourra pas – en l'état actuel des choses – figurer au second tour de cette élection présidentielle »[62]. Le même article de France Info dit que « le vote utile en faveur d'Emmanuel Macron dès le premier tour, pour faire barrage à l'extrême droite en cas de candidature du polémiste Eric Zemmour, est envisagé par 54 % des électeurs se déclarant pour Yannick Jadot et par 57 % de ceux penchant pour Anne Hidalgo »[62] alors que ces deux pourcentages correspondent aux réponses sur les raisons d'un vote potentiel pour Macron : « Quand on leur en demande la raison, ils répondent majoritairement « dans une optique de vote utile, pour faire barrage à l’extrême droite » », mentionne la note Adélaïde Zulfikarpasic[57],[58] en ajoutant que c'est le cas de « 54 % des électeurs d’Anne Hidalgo pouvant envisager de voter pour Emmanuel Macron », et de « 57 % de ceux de Yannick Jadot » pouvant envisager la même chose[57],[58].

En fait, c'est seulement 25 % et 38 %, respectivement, des « sympathisants » LFI et écologistes, qui « pourraient aussi » voter Macron, dans ce qui ressemble à une confusion entre 1er et second tour, rectifie lendemain France Culture, en introduction d'une analyse historique sur le vote utile[53], terme plusieurs fois utilisé aussi au second tour de diverses élections présidentielles, notamment en avril 2002[53].

Les quotidiens Le Monde et Libération n'ont pas repris l'étude de la Fondation Jean-Jaurès. L'erreur de chiffres est cependant aussi dans Le Parisien[63] et Valeurs actuelles[64] reprenant l'article dans Les Échos[65]. Ce dernier attribue même ces chiffres à un autre sondage BVA des 22 et 23 septembre, qu'Adélaïde Zulfikarpasic n'évoque pourtant qu'au 18e paragraphe de sa note, et qui n'est pas consacré aux intentions de vote à la présidentielle[66], ne les abordant à aucun moment[66], mais à des questions d'actualité et aux baromètres de popularité de personnalités politiques[66]. Ce baromètre de septembre proposait aux électeurs ayant une sympathie préétablie une liste de 10 à 11 personnalités[66], censées en être proche, avec à chaque fois une ou deux exceptions, en demandant pour chacune s'ils souhaitent qu'elle ait « plus d'influence dans la vie politique française »[66]. Les sympathisants socialistes y sont 50 % à dire oui pour Édouard Philippe mais seulement 30 % pour Olivier Véran[66]. Dans sa note pour la FJJ, Adélaïde Zulfikarpasic, au 18e paragraphe, estime que sa « thèse du vote utile » est confirmée par ce chiffre de 50 %[66], « probablement parce que les sympathisants de gauche ont, pour partie d’entre eux, intégré plus ou moins consciemment qu’à court terme le futur se jouerait sans la gauche »[66]. Dès son premier paragraphe, l'article de France Info mentionne lui aussi que l'étude de la FJJ « s'appuie sur les résultats d'un sondage de BVA Opinion réalisé fin septembre »[62] en mettant en lien le même que Les Échos[62].

Notes

  1. Le budget, consulté le 29 octobre 2012.
  2. « Fondation Jean-Jaurès : cours et conférences en ligne », sur France Culture (consulté le )
  3. LePolitique.com. Index : Associations politiques.
  4. « Les doléances exhumées de la France des ronds-points », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
  5. Grégory Rzepski, « Ces viviers où prolifèrent les « experts » médiatiques », sur Le Monde diplomatique, .
  6. « Présidentielle 2022 : l'ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve va présider le comité de soutien national d'Anne Hidalgo », sur Franceinfo, (consulté le )
  7. « Pierre Mauroy : à la fondation Jean-Jaurès, il fut aussi un pionnier », La Voix du Nord, (lire en ligne)
  8. "Le Centre d'archives socialistes de la Fondation Jean-Jaurès. Nouvelles sources d'archives et perspectives de recherche sur le parti socialiste", par Emmanuelle Jouineau, responsable du Centre d'archives socialistes à la Fondation Jean-Jaurès à partir de 1999, dans la revue Histoire@Politique, en 2011
  9. "La Fondation Jean-Jaurès cherche son point d’équilibre" le 28 octobre 2017 dans Le Monde par Jean-Baptiste de Montvalon
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  66. Sondage réalisé du 22 au 23 septembre 2021 pour Orange et RTL, commenté par Christelle Craplet, DE BVA Opinion

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