Travailleur indépendant

Un travailleur indépendant, ou travailleur autonome au Canada, est à la fois entrepreneur, propriétaire (de ses moyens de production) et son propre employé (sans être pour autant salarié). Il est maître de ses décisions concernant son travail mais doit toutefois s'adapter aux demandes de sa clientèle.

« Freelance » redirige ici. Pour les autres significations, voir Freelance (homonymie).

Le terme anglais « freelance » est aussi utilisé, notamment dans les services intellectuels.

La progression du nombre de travailleurs indépendants dans les sociétés occidentales depuis le milieu des années 2000[1] transforme le marché du travail[2],[3].

Avantages et inconvénients

Les travailleurs indépendants apprécient généralement un plus large choix de missions que dans un emploi régulier, et ont presque toujours bien plus de libertés quant à leurs horaires de travail. Si quelqu'un n'est pas freelance par choix, l'expérience permet néanmoins de s'ouvrir à de nouvelles compétences et de se créer un réseau de contacts, avec éventuellement l'espoir d'être embauché à plein temps par l'un d'entre eux.

Le principal inconvénient est l'incertitude du travail et donc du revenu, avec en plus l'absence dans certains pays de sécurité sociale et de retraite, surtout dans les pays en développement, à moins que le travailleur indépendant ne soit client d'une caisse de retraite et d'autres services de sécurité sociale. Ces dépenses peuvent représenter de 20 à 40 % du revenu net.

En France, le travailleur indépendant a pour obligation de cotiser pour l'ensemble des cotisations à une caisse d'assurance-maladie et de retraite, c'est-à-dire à la fois les cotisations employeur et les cotisations d'employé. Ceci porte généralement le total des prélèvements sociaux obligatoires (et d'assurance responsabilité professionnelle) à 53 % des revenus d'exploitation. En France, les frais et les investissements professionnels sont déductibles des charges. À titre de comparaison, un travailleur qui encaisserait des CESU en France, chèques qui sont réservés à l'emploi au domicile du client, aurait 50 % de prélèvement avec très peu de démarches. De plus, certains de ces revenus en CESU ne sont pas imposables à l’impôt sur le revenu. Comme le salarié de courte durée (vacataire), le travailleur indépendant doit demander des rémunérations suffisamment élevées pour couvrir ses congés, car quand il est en congé il ne travaille pas et n'est donc pas payé.

L'autre inconvénient est que les travailleurs indépendants doivent s'occuper des contrats, des clauses légales, de la comptabilité, du marketing et d'autres fonctions d'entreprises sans pour autant être des spécialistes de ces domaines.

Les horaires de travail peuvent être plus longs que ceux des employés et des ouvriers, si le travailleur indépendant facture au forfait ou au résultat et non à l'heure effective.

L'accès au crédit bancaire est aussi compliqué pour les travailleurs indépendants car les banques sont habitués à des profils plus classiques de salariés[4].

En cas d'accident du travail, d'arrêt maladie ou de maladie professionnelle il peut être difficile de faire valoir ses droits résultant de ses cotisations (en France versées au RSI).

Un travailleur indépendant peut, en fonction de la mission à réaliser et de l'entreprise avec qui il travaille, travailler depuis chez lui ou directement dans les locaux de l'entreprise. Quand il a la possibilité de travailler d'où il le souhaite, il peut également choisir de travailler dans un espace de coworking. L'espace de coworking permet au travailleur indépendant de réaliser sa ou ses mission(s) dans un espace dédié à ce type d'activité et au développement de son réseau : espace de travail, cuisine, salle de repos, salle de jeux, etc.

Le développement des espaces de coworking est largement dû au nombre croissant de personnes à travers le monde qui sont devenues travailleurs indépendants, notamment avec des entreprises spécialisées comme Regus ou WeWork.

Le phénomène du freelancing

Parmi les travailleurs indépendants se trouvent de plus en plus de freelances qui opèrent en particulier dans le domaine des services intellectuels.

La progression du nombre de freelances dans les sociétés occidentales[1] est considérée comme un phénomène de société aux conséquences multiples sur le marché du travail[2],[3].

En France, en 2019, 90 % des freelances déclarent avoir choisi ce statut et 88 % ne souhaitent pas revenir à une activité salariée à temps plein[5].

En 2020, on compte près de 1,2 millions de freelances en France. En 10 ans, cela représente une augmentation de 110 %.

Chiffres liés au travail indépendant

Dans le monde

Le cabinet McKinsey estime que 20 à 30 % de la population en âge de travailler aux États-Unis et en Europe (162 millions de personnes) tirerait ses revenus en indépendant (au sens large, professions libérales incluses)[2].

En Europe

Selon l'EFIP, le nombre de freelances s'établirait à 9 millions en Europe, soit environ 25 % des actifs[6].

En France

Le nombre de travailleurs indépendants en France est évalué à 3,1 millions par l'INSEE en 2016, soit 12 % des personnes en emploi[7].

L'INSEE, dans un « panorama de l’emploi et des revenus des non-salariés », détaille au les chiffres suivants[8] :

  • 3,5 millions d'indépendants, dont 3,2 millions cotisent au régime de protection sociale des non salariés (1,9 million d'indépendants classiques, 0,9 million d'auto-entrepreneurs, 0,4 million dans l'agriculture) et 0,3 million au régime général des salariés. Ces données correspondent à un accroissement 33 % par rapport à 2008, augmentation principalement due aux auto-entrepreneurs, alors que les effectifs de non-salariés classiques ont baissé de 11 %. Ils ont diminué dans tous les secteurs sauf la santé (+ 24 %).
  • Les services aux entreprises et les services mixtes regroupent 23 % des non-salariés, les services aux particuliers hors santé 21 %, le commerce et l’artisanat commercial 18 %, la santé et l’action sociale 18 % et la construction 13 %.
  • En 2017, le revenu d’activité moyen des non-salariés dans l’ensemble des secteurs est de 2 580 euros nets par mois. Les non-salariés classiques gagnent en moyenne 3 580 euros, contre 470 euros pour les micro-entrepreneurs, pour qui l’activité non salariée est complémentaire à une activité salariée dans 29 % des cas. Les écarts de revenus sont importants : pour les non-salariés classiques, le revenu mensuel moyen varie de 1 650 euros dans les services aux particuliers à 5 600 euros dans la santé et l’action sociale.


Aspects juridiques et administratifs

En Europe, il existe quelques organisations de défense des travailleurs indépendants, dont la Confédération européenne des indépendants, plus ou moins reconnues par les instances européennes, qui jouent généralement un rôle de groupe de pression.

En France

Le travailleur indépendant doit être enregistré en tant qu'entreprise, puisqu'il émet des factures. Certaines activités ont leur régime particulier, mais dans la plupart des cas il peut opter principalement entre deux statuts : l'entreprise individuelle ou la société. Il peut aussi s'associer avec son prestataire dans une société en participation (SEP). L'entreprise individuelle est plus simple à gérer qu'une société, mais implique pour le travailleur indépendant d'être responsable sur ses biens propres des dettes, alors qu'avec une société seul le capital garantit les dettes. La forme la plus répandue d'entreprise individuelle est le régime d'auto-entrepreneur (1,1 million en 2016).

Le régime social des indépendants gère la protection sociale obligatoire du travailleur indépendant : retraite, prévoyance et remboursement des frais de santé. La responsabilité civile professionnelle du freelance est engagée, directement sur ses biens personnels. Il est responsable au remboursement des dettes ou des conséquences des préjudices qu’il pourrait occasionner à autrui ou à ses clients pendant l’exercice de son activité professionnelle[9].

Un journaliste, pigiste occasionnel ou journaliste permanent, ne peut être rémunéré comme travailleur indépendant, il est nécessairement salarié (loi Cressard). Dès lors, pour que Pôle emploi détermine la quotité de travail (proportion de temps partiel jusqu'à temps plein) le pigiste ou journaliste doit présenter des attestations d'employeur comportant des décomptes mensuels d'heures travaillées, de jours travaillés et de jours de congés payés.

De même un artiste est soumis à des conventions (d'origine syndicale) spécifiques qui impliquent qu'il soit produit et au régime des intermittents qui mêlent rémunération au cachet et règles d'indemnisations. Dès lors on ne parle plus de « travailleur indépendant ».

Cependant, pour se simplifier grandement l'aspect administratif, certains choisissent le portage salarial, c'est par exemple le cas des développeurs[10], qui induit soit de rémunérer une société de portage, soit de trouver une société portant gracieusement, ou en échange d'un loyer ou d'un droit de préférence.

Au Québec

Bien qu'il n'existe pas de législation québécoise qui porte spécifiquement sur les faux indépendants, les tribunaux ont développé une jurisprudence sur ce sujet, laquelle est liée au lien de subordination de l'article 2085 du Code civil du Québec. Par exemple, dans l'arrêt Betanzos c. Premium Sound "N" Picture Inc[11], la Cour supérieure conclut que M. Betanzos est un salarié de l'entreprise en raison de son lien de subordination et de sa dépendance économique envers son entreprise, malgré le fait que son contrat le catégorisait comme travailleur autonome. Dans l'arrêt Gaston Breton Inc. c. L'Union des routiers, brasseries, liqueurs douces et ouvriers de diverses industries, local 1999 [12], le tribunal conclut que les distributeurs-vendeurs font partie des salariés de l'entreprise et sont liés par un contrat de travail plutôt que par un contrat d'entreprise, malgré ce qu'affirme leur contrat.

En Suisse

Pour être reconnu comme indépendant, un freelance doit déposer un dossier auprès d'une caisse de compensation AVS. C’est la caisse de compensation AVS qui, après examen du dossier de l’indépendant, décidera ou non d'octroyer le statut d’indépendant. Pour cela, le freelance doit notamment démontrer qu'il supporte le risque économique de son activité ainsi que le risque de réputation. Il doit par ailleurs montrer une indépendance financière envers ses clients, c’est-à-dire démontrer qu’il ne dépend pas d’un client en particulier.

La forme juridique relative au statut d’indépendant est la Raison Individuelle. Les raisons individuelles sont considérées comme des sociétés de personnes, à la différence des sociétés de capitaux. Il s’agit de la forme juridique la plus commune en Suisse selon Office Fédéral de la Statistique[13].

Les indépendants sont soumis aux cotisations sociales de l’AVS (1er pilier). Ces cotisations sont progressives en fonction des revenus générés par l’activité indépendante. Le pourcentage minimum de cotisation est de 5.371% dès un revenu de 9'600 CHF. Le pourcentage maximum est de 10.00% dès que les revenus dépassent les 57'400.- CHF.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Liens externes

Notes et références

  1. « 2014, l'année qui révolutionna le marché du travail », Le Huffington Post, (lire en ligne, consulté le ).
  2. Sophy Caulier, « Freelance, une option de plus en plus prisée », sur Le Monde, (consulté le ).
  3. « Les freelances s'intègrent durablement dans les grandes entreprises », Le Figaro, (lire en ligne, consulté le ).
  4. « Crédit immobilier : les auto-entrepreneurs oubliés du système », sur Lesechos.fr, (consulté le ).
  5. Maurice Midena, « Heureux Comme Les Freelances en 2019 ! », sur Forbes France, (consulté le )
  6. « La start-up Malt (Hopwork) surfe sur la vague du freelancing », Forbes France, (lire en ligne, consulté le ).
  7. « Les indépendants : le rebond amorcé dans les années 2000 se poursuit en 2016 - Insee Première - 1768 », sur www.insee.fr (consulté le )
  8. Laurianne Salembier, Guilhem Théron (Insee), « Panorama de l’emploi et des revenus des non-salariés », sur insee.fr,
  9. « COMMENT RECRUTER EN CONTRAT FREELANCE? »
  10. « Pourquoi le portage salarial est avantageux pour les professionnels du web ? », sur siecledigital.fr (consulté le )
  11. 2006 QCCS 4690
  12. [1980] T.T.471
  13. Office fédéral de la statistique, « Activité économique, forme juridique, répartition régionale », sur www.bfs.admin.ch (consulté le )
  14. Tout doit disparaître ou le Réveil des indépendants, sur le site abes.fr.
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