Geneviève Lantelme

Geneviève Lantelme, nom de scène de Mathilde Hortense Claire Fossey, est une actrice française, une célébrité, une icône de la mode et une courtisane du début du XXe siècle, née dans le 18e arrondissement de Paris le et morte près de Rees en Allemagne le .

Geneviève Lantelme
Portrait par Léopold-Émile Reutlinger (1908).
Biographie
Naissance
Décès
(à 28 ans)
Rhin
Sépulture
Nom de naissance
Mathilde Hortense Claire Fossey
Nationalité
Activités
Période d'activité
À partir de
Vue de la sépulture.

Considérée par ses contemporains comme une des plus belles femmes de la Belle Époque, sa disparition précoce et mystérieuse à 28 ans lors d'une croisière sur le Rhin contribua à sa légende.

Biographie

Jeunesse

Mathilde est le troisième enfant d’Édouard Fossey, un caissier devenu comptable, et de sa femme Claire, dont le nom de jeune fille est Lantelme[1]. Née le à Paris dans le 18e arrondissement[2], Mathilde a deux sœurs aînées et une troisième plus jeune. En 1895, les parents de Mathilde divorcent, et le tribunal donne la garde des enfants à Édouard. La chose, plutôt inhabituelle, s’expliquerait d’après Simone Le Bargy[3] par le fait que sa mère l’oblige à travailler dès quatorze ans dans la maison close qu’elle dirige.

Mais Mathilde parvient à obtenir la protection d’hommes importants, notamment Henry Poidatz, banquier et propriétaire du journal Le Matin, dont elle devient la maîtresse à la fin de son adolescence. Avec son appui, elle s’oriente vers une carrière d’actrice et choisit comme nom de scène le nom de jeune fille de sa mère, Lantelme, associé au prénom Geneviève. Poidatz la recommande auprès d’Alphonse Franck, le directeur du Théâtre du Gymnase à Paris, où elle a fait ses débuts dans une comédie intitulée La Bascule le , tenant le rôle d’une femme de ménage limité à quelques lignes de dialogue[4].

Carrière

Plusieurs petites pièces suivent, et en , Geneviève Lantelme entre au Conservatoire de Paris pour étudier l’art dramatique[5]. Elle y reçoit l’enseignement de l’acteur Maurice de Féraudy, sociétaire de la Comédie-Française. Bien que les étudiants du Conservatoire ne soient pas autorisés à se produire sur scène avant l’obtention de leur diplôme, elle continue à apparaître dans les salles parisiennes pendant la période de ses études, sous le nom de Telmy[6]. Elle termine sa formation sans recevoir ni prix ni distinction, et reprend ses activités sur scène sous le nom de Lantelme.

Le , elle joue dans L’Âge d’aimer, dont le rôle principal est interprété par Réjane. Ayant entendu que son ami Alfred Edwards, patron de presse et dramaturge amateur, venait d’écrire une pièce nommée Par Ricochet et était à la recherche d’une actrice, Réjane lui présente Lantelme, qui devient bientôt sa maîtresse, avant de devenir son épouse.

En , elle signe un contrat avec le Théâtre Réjane, mais le rompt deux ans plus tard car tous les rôles principaux sont interprétés par Réjane. Celle-ci poursuit Lantelme pour violation de contrat, et l’emporte : la jeune actrice est contrainte de payer 20 000 francs de dommages et intérêts[7].

Malgré cet événement, l’année 1908 n’est pas si mauvaise pour Geneviève Lantelme : en novembre elle interprète un rôle de premier plan, celui de Marthe Bourdier, dans Le Roi de Gaston Arman de Caillavet, Robert de Flers et Emmanuel Arène. Elle joue aux côtés de Albert Brasseur et Amélie Diéterle et cette pièce s’avère être l’un des plus grands succès du théâtre français. Elle fait alors la couverture de revues comme Le Théâtre, Les Modes ou Femina et apparaît sur de nombreuses cartes postales. Au cours de sa courte carrière, elle est souvent photographiée et mise en vedette dans la presse à travers l’Europe et l’Amérique du Nord, son goût pour la mode lui valant de collaborer avec les stylistes Madeleine Vionnet ou Jeanne Paquin lorsque paraissent leurs créations. Lantelme fait connaître son intérêt pour les chapeaux de grande taille.

L'œuvre de Jules Grün, Un vendredi au Salon des artistes français, immortalise en 1911 Geneviève Lantelme, représentée au centre du tableau, à droite d'Angelo Mariani debout au premier plan. Musée des beaux-arts de Rouen[8].

Vie sentimentale

De 1906 à 1909, Geneviève Lantelme partage les attentions sentimentales d’Alfred Edwards avec sa quatrième épouse, Misia Sert. Misia est très jalouse de la maîtresse de son mari, et écrit dans ses mémoires: « Je m’étais arrangée pour obtenir une photographie de Lantelme, elle ornait ma coiffeuse, et je faisais des efforts désespérés pour lui ressembler, coiffer mes cheveux de la même manière, porter les mêmes vêtements. » Marcel Proust s’en est inspiré dans À la recherche du temps perdu comme modèle pour le triangle amoureux constitué par Robert de Saint-Loup, Gilberte Swann et Rachel[9].

Finalement, la jeune femme remporte la bataille sentimentale et le , Geneviève et Alfred se marient à Rouen.

Décès

Dans la nuit du 24 au , Geneviève Lantelme disparaît au cours d’une croisière sur le Rhin qu'elle fait avec son mari et quelques amis à bord du yacht L’Aimée. Le drame se produit sur le fleuve, près du village de Rees en territoire allemand. Le corps de Geneviève Lantelme est trouvé le près d'Ober-Mœrmter au dessus de Rees[10]. Les autorités concluent à un accident après enquête et autorisent le rapatriement de la victime. La dépouille mortelle de la comédienne est arrivée par le train, gare du Nord à Paris le et transportée directement dans un caveau de la chapelle du cimetière du Père-Lachaise. L'inhumation a lieu le dans le caveau de la famille Edwards.

En ce qui concerne les circonstances de l'accident, il est rapporté que, ayant trop bu de champagne, Geneviève Lantelme ouvre la fenêtre de la cabine pour avoir un peu d’air frais et s’assied sur le rebord ; le yacht est alors sujet à une secousse et la jeune actrice est précipitée dans le fleuve.

L’accident suscite beaucoup de controverses tant en France que dans le reste du monde occidental et beaucoup spéculent sur le fait qu’Edwards ait assassiné sa femme. Cette théorie se développe notamment parce que les autorités compétentes découvrent dans sa cabine une carte (la dernière écrite par Lantelme) destinée à André Brulé et disant qu’Edwards appartenait à ses yeux déjà au passé et qu’elle pensait divorcer.

À l’automne 1911, deux journaux français, La Dépêche parlementaire et La Griffe, publient cette accusation ; Edwards les poursuit pour diffamation et gagne son procès, les deux journaux échappant cependant à de lourdes réparations.

Sépulture

La police au tombeau de Geneviève Lantelme en 1911.

Geneviève Lantelme est enterrée au cimetière du Père-Lachaise. Sa sépulture subit deux actes de vandalisme. Le premier survient dans la nuit du et choque le tout-Paris ; l’actrice ayant été enterrée avec une partie de sa collection de bijoux, un groupe de malfaiteurs profane la crypte, mais ne parvient pas à trouver le butin, évalué à 578 000 francs[note 1]. Les bijoux sont rendus à la famille Fossey dès le lendemain, et la dépouille est transférée dans un autre tombeau à la division 94. Aussi la seconde tentative de vol, en 1916, s’avère d’emblée parfaitement vaine.

Théâtre

Galerie

Voir aussi

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Liens externes

Notes et références

Notes

  1. La bande du losange, un groupe de pilleurs du cimetière du Père-Lachaise en 1914 sera soupçonnée après leur arrestation mais sans qu'un lien ne puisse être démontrée avec la profanation de 1911.

Références

  1. « documents about Fossey family » (consulté le )
  2. Archives de Paris : État civil du 18e arrondissement de Paris - acte de naissance no 2343 de Mathilde Hortense Claire Fossey. Cote du document : V4E / 7500, vue 16 sur 25. Archives de Paris, 18 boulevard Sérurier 75019 Paris.
  3. Simone Le Bargy, Sous de nouveaux soleils, Paris, Gallimard,
  4. « Lantelme bio: part 1 » (consulté le )
  5. « Courrier des théâtres », Le Figaro, (lire en ligne)
  6. Maurice Mayen, Le Yacht mystérieux : La Mort de Lantelme, Éditions Astéria,
  7. « Lantelme bio (part 2) » (consulté le )
  8. « Un vendredi au Salon des artistes français », sur le site du musée des beaux-arts de Rouen.
  9. George D. Painter, Marcel Proust : a biography. Vol. 2 :, Londres, Chatto & Windus,
  10. Le Matin, « On retrouve le corps de Lantelme : mais les circonstances de sa mort sont mal éclaircies », Le Matin, Paris, no 10012, , p. 1 (lire en ligne).
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