Grande Colombie
La Grande Colombie (en espagnol : Gran Colombia), officiellement République de Colombie (espagnol : República de Colombia) était un ancien pays du nord de l'Amérique du Sud et du sud de l'Amérique centrale qui exista dans le premier tiers du XIXe siècle. Le nom de Grande Colombie est utilisé pour la différencier de l'actuelle Colombie. Outre cette dernière, le pays regroupait les actuels Équateur, Venezuela, Panama, une partie du nord du Pérou et du nord-ouest du Brésil. Il est est né de l'indépendance d'une partie de l'Amérique du Sud vis-à-vis de l'Espagne.
Pour les articles homonymes, voir Colombie (homonymie).
(es) República de Colombia
Drapeau |
Blason |
Statut | République |
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Capitale | Bogota |
Langue(s) | Espagnol |
Population | 2 379 888 hab. (1825)[1] |
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Densité | 0,776 hab./km2 |
Superficie | 3 064 800 km2 |
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Proclamation de la République | |
Ley de División Territorial de la República de Colombia | |
Dissolution de la fédération |
Entités précédentes :
Entités suivantes :
Le , les habitants de Bogota instaurèrent la première assemblée représentative à défier l'autorité espagnole. L'indépendance ne fut proclamée qu'en 1813 et la République fut proclamée le [2].
Simón Bolívar en fut le président et Francisco de Paula Santander le vice-président. Bogota était sa capitale.
La Grande Colombie fut scindée en trois pays en 1830 après la déclaration du général José Antonio Páez :
En 1903, le Panama pris son indépendance de l'actuelle Colombie avec le soutien des États-Unis, qui avaient décidé de reprendre en main la construction du canal de Panama.
Toponymie
Le choix du nom du pays revient à Simón Bolívar, il choisit de l'appeler Colombie en hommage à Christophe Colomb :
« Cette nation s’appellera Colombie, afin de rendre justice et gratitude au créateur de notre hémisphère. »
Ce n'est qu'après sa dissolution que le pays recevra le nom de « Grande Colombie », afin de le distinguer de l'actuelle Colombie.
Histoire
Vision prophétique de « la lettre de Jamaïque »
Après la chute de la Première République du Venezuela, Simón Bolívar s'exile en Jamaïque, où il rédige la « Lettre de Jamaïque », dans laquelle en 1815 il a une vision prophétique de l'avenir de l'Amérique du Sud espagnole et où il projette la création de la Grande Colombie.
Congrès d'Angostura
Angostura (aujourd'hui Ciudad Bolívar), la capitale de la Guyane vénézuélienne sur l'Orénoque, est prise en . Simón Bolívar mène une campagne en Nouvelle-Grenade (Colombie actuelle), et par la victoire de Boyacá () il libère le territoire, Bogota est prise le . Le gouvernement de la Nouvelle-Grenade est confié au général Santander. Un congrès est donc réuni à Angostura, qui vise à rassembler la Nouvelle-Grenade (qui a été conquise), et le Venezuela (en cours de conquête) en un seul État sous le nom de Colombie.
Congrès de Cúcuta
Le congrès consultatif de 1821 se réunit à Cúcuta pour rédiger la Loi fondamentale de la République de Colombie (Constitution de la Grande Colombie).
Les élites dirigeantes entendent alors tenir éloignées les masses populaires de l'exercice du pouvoir. Environ 90 % de la population colombienne est exclue du droit de vote[3].
Dissolution de la Grande Colombie
La Grande Colombie, créée en 1819, commence sa dissolution en 1826 ; plusieurs facteurs sont à l'origine de cette crise.
Séparatisme vénézuélien prôné par le général Páez
La révolution séparatiste appelée La Cosiata, dirigée par le général José Antonio Páez en 1826, où les municipalités de Caracas et Valencia ignorent l'autorité du gouvernement de la Colombie et depuis 1821 demandent une réforme de la Constitution de Cúcuta.
Convention d'Ocaña
Critique de la Constitution de Cúcuta et ouverture de la Convention
La Constitution de Cúcuta était critiquée à cause de sa tendance au centralisme à une époque où certains considéraient qu'il était difficile d’intégrer politiquement et administrativement trois pays avec des caractéristiques et des situations très différentes. La divergence de points de vue entre Bolivar et Santander provoque en 1827 la consolidation des partisans bolivariens et santanderiens. Des assemblées populaires et militaires se joignent à l'un ou l’autre groupe.
Le Congrès de la Grande-Colombie décide de convoquer en 1827 la Grande Convention nationale pour le mois de mars 1828, afin de réformer la constitution de 1821 pour tenter de résoudre les problèmes issus l'intégration. La convention s'installera officiellement le dans la ville d'Ocaña, lieu qui était le plus central pour l'arrivée des Vénézuéliens, Néogranadiens, Quiteños et des régions de la côte atlantique. La convention se développe dans une ambiance d’intérêts de partis en présentant deux projets de réforme constitutionnelle.
Bolivaristes
Les bolivaristes sont des conservateurs (menés par Simón Bolívar), favorable à un État centralisé et s'appuyant sur l'Église. Ils proposent :
- des pouvoirs extraordinaires pour le président de la République en temps de guerre ;
- un mandat présidentiel de huit ans ;
- des droits de co-législateur accordés au président ;
- une réunion annuelle avec les assemblées départementales ;
- une magistrature à vie pour les magistrats de la haute Cour de Justice.
Santanderistes
Les santanderistes sont des libéraux (menés par le général Francisco de Paula Santander), favorables à un État décentralisé, à la prééminence de l'État dans l'enseignement et les affaires civiles, et un suffrage plus élargi. Les idées santandéristes principales sur les plans socio-politiques et politico-économiques sont :
- le fédéralisme comme moyen de défense de la liberté du peuple de Nouvelle-Grenade ;
- la défense de la liberté de culte par la séparation de l'Église et de l'État ;
- la défense du libre commerce et de la propriété privée ;
- la défense de l'égalité des droits et devoirs de tous les citoyens sans prise en compte du statut social, de la religion, de l'origine ethnique ;
- la promotion de l'éducation publique comme moyen d'élévation dans la société des classes les plus défavorisées ;
- l'abolition de l'esclavage ;
- la défense du gouvernement civil ;
- l'abolition de l'impôt sur le travail ;
- la défense de la social-démocratie.
Finalement, sans arriver à un accord, le la convention se dissout et un peu plus tard, au mois d'août, la dictature de Bolivar s'imposera avec un grand appui populaire.
Conflit contre le Pérou
Le Pérou envahit la Grande Colombie dans la région de l'Équateur en 1828. Simón Bolívar intervient contre le Pérou, et celui-ci est défait en 1829.
Fin de règne de Bolívar et dissolution de la Grande Colombie
Entre le et mars 1830, Bolívar gouverne par décret, tel un dictateur. Cela n'empêche pas la sécession du Venezuela le . Le , Bolívar convoque le Congrès Admirable afin de trouver une solution à la crise institutionnelle. Le congrès ne peut éviter la sécession du Venezuela. La santé de Bolívar se détériore rapidement et le , il donne sa démission. Domingo Caicedo devient président par intérim.
Le , le Distrito del Sur (district du Sud) déclare à son tour son indépendance et devient l'Équateur.
Le , Antonio José de Sucre, que Bolívar considérait comme son successeur spirituel, est assassiné.
Une nouvelle Constitution est promulguée au Venezuela le sous l'impulsion du général Paez. Le territoire du nouveau pays y est défini comme celui que couvrait en 1810 (avant toutes modifications) la Capitainerie générale du Venezuela.
Le , Bolívar meurt à Santa Marta.
Ce qui reste de la Grande-Colombie, correspondant au District de Nouvelle-Grenade (regroupant les actuels pays de Colombie, du Panama ainsi que la côte des Mosquitos dans l'actuel Nicaragua) se regroupe le lors de la convention d'Apulo sous la vice-présidence provisoire de Domingo Caicedo. Le la convention grenadine fait de la Nouvelle-Grenade une république appelée République de Nouvelle-Grenade (espagnol : República de la Nueva Granada). Un régime présidentiel est établi et Francisco de Paula Santander est élu par le Congrès de la République de Colombie pour quatre ans. La nouvelle constitution est adoptée le .
Politique et institutions
Présidents et vice-présidents de la République
Nom | Dates du mandat | Charge | Carrière |
---|---|---|---|
Présidents de la République et présidents par intérim | |||
Simón Bolívar | - | Président (élections indirectes) |
Général |
Domingo Caicedo | - | Président par intérim | Militaire et homme politique |
Joaquín Mosquera | - | Président (élections indirectes) |
Juriste, militaire et homme politique |
Rafael Urdaneta | - | Président par intérim | Militaire et homme politique |
Domingo Caicedo | - | Président par intérim | Militaire et homme politique |
Vice-président n'ayant pas exercé la présidence par intérim | |||
Francisco de Paula Santander | - | Vice-Président, chargé du pouvoir exécutif | Militaire |
1819 - 1824
Les territoires sont divisés durant le Congrès de Cúcuta en trois grands départements, eux-mêmes subdivisés en provinces.
- Département de Venezuela - actuel Venezuela.
- Département de Cundinamarca - actuels Colombie et Panama.
- Département de Quito - actuel Équateur et territoire au nord du río Marañón dans l'actuel Pérou.
1824 - 1826
Le est adoptée par le Congrès de la République de Colombie la Ley de División Territorial de la República de Colombia, qui redéfinit l'organisation politico-administrative du territoire.
Celui-ci est réorganisé en trois districts, divisés en départements puis en provinces :
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1826 - 1830
Le est promulguée une loi additionnelle à celle de 1824 qui réorganise certains départements :
- le département d'Apure rejoint le département de l'Orénoque, tandis que les provinces de Cumaná, Barcelona et Margarita sont regroupées au sein du département de Maturín.
- au sein du département de Magdalena, la partie sud-est de la province de Carthagène des Indes devient la province de Mompox[4].
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Armée
Durant les années 1820, le budget de l'armée représente les 3/4 du budget national[5].
Géographie
La grande Colombie couvrait une grande partie du nord de l'Amérique du Sud et l'extrême sud de l'Amérique centrale. Elle reprenait plus ou moins le territoire de la Vice-royauté de Nouvelle-Grenade suivant le principe Uti possidetis juris.
Elle englobait les actuels pays de Colombie, Venezuela, Équateur et Panama ainsi qu'une partie du nord du Pérou et du nord-ouest du Brésil en Amazonie.
Démographie
La population de la Grande Colombie est multiethnique. Elle est composée d'Espagnols, d'Indiens, de Mulâtres, de Noirs, de Métis et de Zambos[6].
De manière générale, la population est répartie de façon très hétérogène.
Selon les estimations réalisées en 1822, la population de la Grande Colombie est distribuée par département de la manière suivante[7],[8] :
Numéro | Département ou province |
Population |
---|---|---|
1 | Orinoco | 174 000 |
1.1 | Cumaná | 70 000 |
1.2 | Barcelona | 44 000 |
1.3 | Guyana | 45 000 |
1.4 | Margarita | 15 000 |
2 | Venezuela | 430 000 |
2.1 | Caracas | 350 000 |
2.2 | Barinas | 80 000 |
3 | Zulia | 162 100 |
3.1 | Coro | 30 000 |
3.2 | Trujillo | 33 400 |
3.3 | Mérida | 50 000 |
3.4 | Maracaibo | 48 700 |
4 | Boyacá | 444 000 |
4.1 | Tunja | 200 000 |
4.2 | Socorro | 150 000 |
4.3 | Pamplona | 75 000 |
4.4 | Casanare | 19 000 |
5 | Cundinamarca | 371 000 |
5.1 | Bogotá | 172 000 |
5.2 | Antioquia | 104 000 |
5.3 | Mariquita | 45 000 |
5.4 | Neiva | 50 000 |
6 | Cauca | 193 000 |
6.1 | Popayán | 171 000 |
6.2 | Chocó | 22 000 |
7 | Magdalena | 239 000 |
7.1 | Cartagena | 170 000 |
7.2 | Santa Marta | 62 000 |
7.3 | Riohacha | 7 000 |
8 | Quito | 550 000 |
8.1 | Quito | 230 000 |
8.2 | Quixos & Macas | 35 000 |
8.3 | Cuenca | 78 000 |
8.4 | Jáen de Bracamoros | 13 000 |
8.5 | Maynas | 56 000 |
8.6 | Loja | 48 000 |
8.7 | Guayaquil | 90 000 |
9 | Panamá | 80 000 |
9.1 | Panamá | 50 000 |
9.2 | Veragua | 30 000 |
Total | Grande Colombie | 2 463 000 |
Le recensement de 1825 donne, par district, les résultats suivants concernant la population[9] :
District | Hommes libres | Esclaves | Indigènes indépendants | Population totale | |
---|---|---|---|---|---|
Norte (Venezuela) | 609 545 | 50 088 | 26 579 | 686 212 | |
Centro (Nouvelle Grenade) | 1 182 500 | 45 830 | 144 771 | 1 373 110 | |
Sur (Équateur) | 485 021 | 6 975 | 52 481 | 524 477 | |
Totaux | Grande Colombie | 2 227 066 | 102 902 | 203 831 | 2 583 799 |
Économie
L’économie et les rapports sociaux sont fortement marqués par l'esclavage et le servage. Plusieurs modes de production différents coexistent (le servage, l'esclavage, le communisme primitif et l’économie naturelle d'autosubsistance) mais l'exploitation des populations indigènes et surtout des populations noires réduites en esclavage reste le fondement de l'économie[3]. Le communisme primitif de certaines communautés indiennes — que l’administration coloniale espagnole s'était attachée à détruire sans y parvenir complètement — devient la cible des libéraux, qui par idéologie (le progrès étant perçu comme incompatible avec le maintien de rapports sociaux barbares) ou cupidité (l’agrandissement des haciendas nécessitant la disparition des terres collectives) ne pouvaient que difficilement tolérer[3]. La concentration de la propriété fut ainsi plus forte que durant la colonisation espagnole[10].
Dans la culture populaire
La grande Colombie peut être reformée dans le jeu Heart of Iron IV grâce un système de décisions.
Notes et références
- (es) Colombia una nación multicultural : Su diversidad étnica[PDF], p. 27, DANE
- (es) « La Gran Colombia que no fue », sur elespectador.com, (consulté le ).
- Michel Gandilhon, La guerre des paysans en Colombie. De l'autodéfense agraire à la guérilla, Paris, Les nuits rouges,
- (en) « Cuerpo de leyes de la República de Colombia, que comprende todas las leyes, decretos y resoluciones dictados por sus congresos desde el de 1821 hasta el último de 1827. », Caracas, Imprenda de Valentín Espinal, , p. 488-489
- L'Amérique ibérique de 1570 à 1910, Thomas Calvo, Nathan Université, p246.
- (es) Severin Lorich, « Observaciones sobre Colombia, su Gobierno, etc. », (consulté le )
- Datos publicados por el Instituto Geográfico de Weimar en 1823, en base a la subdivisión de la Gran Colombia de 1822. Por tal motivo no se incluye a la Provincia de Guayaquil.
- Alexander von Humboldt (2011). Political Essay on the Island of Cuba: A Critical Edition. University of Chicago Press, p. 215-217. Edición de Vera M. Kutzinski & Ottmar Ette. (ISBN 978-0-22646-567-8).
- Datos publicados por Manuel María Paz y Felipe Pérez en 1890, en base a la subdivisión de la Gran Colombia de 1824.
- Romaric Godin, « Pourquoi Hugo Chavez a trahi Simon Bolivar », sur La Tribune,
Voir aussi
- Provinces unies d'Amérique centrale
- Confédération Pérou-Bolivie
- Guerre Grande Colombie-Pérou (1828-1829)
- Relations entre la Colombie et le Venezuela
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