Carcinome hépatocellulaire

Le carcinome hépatocellulaire (CHC) ou hépatocarcinome (en anglais, hepatocellular carcinoma ou HCC) est un cancer primitif du foie. C'est le type de cancer du foie primaire le plus fréquent chez les adultes et la cause de décès la plus fréquente chez les personnes atteintes de cirrhose[1].

Pour les articles homonymes, voir CHC et HCC.

Carcinome hépatocellulaire
Carcinome hépatocellulaire chez un sujet présentant une hépatite C. Pièce d'autopsie.
Symptômes Hépatomégalie, amaigrissement, douleur abdominale, sueur et ictère
Traitement
Médicament Ginsenoside Rg3 (d), sorafénib et Y-90 microshperes in the treatment of unresectable hepatocellular carcinoma (d)
Spécialité Oncologie
Classification et ressources externes
CIM-10 C22.0
CIM-9 155
ICD-O M8170/3
OMIM 114550
DiseasesDB 7547
MedlinePlus 000280
eMedicine 278354
MeSH D006528

Mise en garde médicale

Ce cancer survient dans le cadre d'une inflammation chronique du foie et est plus étroitement liée à une hépatite virale chronique (hépatite B ou C) ou à une exposition à des toxines comme l'alcool ou l'aflatoxine. Certaines maladies, comme l'hémochromatose et le déficit en alpha 1-antitrypsine, augmentent considérablement le risque de développer un CHC. Le syndrome métabolique et la NASH sont également de plus en plus reconnus comme des facteurs de risque de CHC[2].

Comme pour tout cancer, le traitement et le pronostic du CHC varient en fonction des particularités de l'histologie tumorale, de la taille, de la propagation du cancer et de l'état de santé général.

La grande majorité du CHC se trouve en Asie et en Afrique subsaharienne, dans des pays où l'hépatite B est endémique et où beaucoup sont infectés dès la naissance. L'incidence du CHC aux États-Unis et dans d'autres pays en développement augmente en raison d'une augmentation des infections par le virus de l'hépatite C. Elle est plus fréquente chez les hommes que chez les femmes pour des raisons inconnues[2].

Épidémiologie

Décès par cancer du foie normalisés selon l'âge pour 100 000 habitants en 2004[3].
  • pas de données
  • < 7.5
  • 7.5-15
  • 15-22.5
  • 22.5-30
  • 30-37.5
  • 37.5-45
  • 45-52.5
  • 52.5-60
  • 60-67.5
  • 67.5-75
  • 75-110
  • > 110

C'est par ordre de fréquence au niveau mondial le cinquième cancer le plus fréquent chez l'homme et le septième chez la femme. Il est aussi le plus fréquent des cancers primitifs du foie (loin devant le cholangiocarcinome et, plus rare encore, l'hémangioendothéliome). L'incidence annuelle mondiale est d'environ 500 000 nouveaux cas par an[4]. Dans les pays non développés, son incidence a particulièrement augmenté ces vingt dernières années en raison de l’augmentation de l’incidence de la cirrhose due au virus de l’hépatite B ou de l'hépatite C. 85 % des cas se situent dans les pays en voie de développement dans les zones d'endémie des hépatites[4].

Il survient presque toujours sur une maladie hépatique préexistante, exceptionnellement sur un foie sain : cirrhose dans plus de 90 % des cas et plus rarement hépatopathie chronique non cirrhotique, le plus souvent virale (hépatite B ou C chronique) mais aussi alcoolique. Certaines souches de virus B ou C sont plus susceptibles de causer un cancer[5],[6]. Le risque dépend également de la cause de la cirrhose. Il est plus élevé en cas de cirrhose post hépatite C, post hémochromatose et post hépatite B. Le risque est un peu plus réduit lors des cirrhoses post alcoolique[7].

En Afrique et en Asie, l’aflatoxine, une mycotoxine sécrétée par Aspergillus flavus, parasitant les arachides, est aussi responsable de l'apparition du CHC[8].

Le surpoids, associé au diabète dans le cadre du syndrome métabolique, augmente sensiblement le risque de survenue du cancer du foie[9].

Au contraire, la consommation de café pourrait avoir un effet protecteur[10].

Causes

Les facteurs incriminés sont identiques à ceux de la cirrhose :

Le carcinome hépatocellulaire est donc la plupart du temps une complication d'une maladie hépatique déjà présente, il existe ainsi deux maladies, un cancer et un état précancéreux ; cette particularité conditionne le pronostic et la démarche thérapeutique car il faut prendre en considération les deux affections en même temps.

La stéatose hépatique non alcoolique  un trouble en nette augmentation dans le monde  est un facteur de risque pour ce cancer[11].

Le CHC se développe à partir d'un foyer initial localisé puis envahit les vaisseaux portes et métastase dans le foie lui-même par l'intermédiaire des branches portales, ce qui explique le caractère souvent multiloculaire du cancer et la tendance à la thrombose néoplasique des branches, puis du tronc de la veine porte.

Diagnostic

Clinique

Il est le plus souvent asymptomatique à ses débuts. Il doit être suspecté chez tout patient ayant une maladie du foie chronique avec une décompensation sans cause évidente.

Biologique

Il est suspecté devant une augmentation de l'alpha-fœtoprotéine. Au-dessus de 20 μg·l-1,Diagnostic certain si le taux est supérieur à 500 ng/mL, ou supérieur à 400 ng/mL en présence de cirrhose et de nodule de plus de cm hypervascularisé à l'imagerie, sa spécificité dépasserait les 90 % avec une sensibilité autour de 60 %[12].

Imagerie

L'échographie, IRM, TDM permettent de le visualiser. L'échographie reste l'examen le plus simple, avec une très bonne sensibilité (un peu moindre dans les stades précoces)[13]. L'IRM et le scanner sont de sensibilité et de spécificité équivalente[14]. L'examen d'imagerie peut suffire pour établir le diagnostic si l'image est caractéristique.

Anatomo pathologique

L'analyse histologique d'un échantillon prélevé à la ponction-biopsie hépatique permet de lever tout doute sur le diagnostic.

Nouvelles méthodes

La recherche de mutations génétiques n'est en 2019, que de peu d'utilité dans la prise en charge de ce type de cancer[15].

L'injection d'une bactérie probiotique modifiée, permet par un test d'urine ultérieur de détecter le cancer du foie[16].

Formes

  • expansive : Le CHC est encapsulé, uni ou multinodulaire
  • infiltrante
  • mixte (fréquente)
  • diffuse : toujours observée sur cirrhose, elle se caractérise par de multiples nodules de petites tailles disséminés

Pronostic

Le pronostic est corrélé suivant la classification du cancer en forme précoce, intermédiaire ou avancée suivant des critères établies par le « Barcelona Clinic Liver Cancer » (BCLC)[17]. La tumeur a un fort potentiel de croissance, avec un doublement spontané de sa taille entre un mois et un an[18]. Le pronostic global est mauvais en raison de l'existence de la cirrhose sur le foie non tumoral qui limite les possibilités de traitement. En fait, la détection de petites tumeurs et les progrès thérapeutiques modifient son pronostic. Les taux de survie atteignent, à cinq ans, de 50 à 70 %[19].

Si la tumeur n'est pas résécable, l'espérance de vie ne dépasse guère un à deux ans[20].

Traitement

La prise en charge des hépatocarcinomes a fait l'objet de plusieurs recommandations publiées par des sociétés savantes internationales : celles, américaines, datent de 2018[21], celles, européennes, de la même année[22].

Préventif

Il est celui de la prévention et du traitement des hépatopathies, dont le vaccin contre l'hépatite B.

Le traitement antiviral des hépatites virales pourrait diminuer l'incidence des carcinomes hépatiques. Cela semble être vrai dans le cas d'une hépatite B[23]. dans le cas d'une hépatite C, le traitement antiviral ne préviendrait l'apparition de l'hépato carcinome qu'en cas de réponse virale effective[24].

Le dépistage précoce de l'hépatocarcinome dans les populations à risque peut, en théorie, en améliorer le pronostic. Il est fait par une échographie hépatique tous les six mois[15]. La preuve de l'efficacité de cette stratégie n'est cependant pas définitivement établie, certaines études prouvant un bénéfice en termes de mortalité[25], d'autres non[26]. L'échographie hépatique a une très bonne spécificité (supérieure à 90 %) et une moins bonne sensibilité (de l'ordre de 60 %)[27]. Il peut être complété par la recherche d'une élévation du taux sanguin d'alpha-fœtoprotéine, avec une sensibilité et une spécificité imparfaite[28].

Curatif

Il est valable pour de petites tumeurs, peu nombreuses, sans métastases non résécables. Il est dans ce cas chirurgical avec une résection de la (ou des) tumeurs. Dans certains cas (tumeur de petite taille), une ablation non chirurgicale est possible : thermoablation par radiofréquence, embolisation de la tumeur, la première technique semblant avoir de meilleurs résultats[29]. Le risque de récidive subsiste cependant, du fait de la persistance du terrain.

La transplantation hépatique est le choix préférentiel quand il existe une dysfonction hépatique, même sévère, sous-jacente ou en cas de tumeur non résécable[30]. Le taux de récidive est le moins élevé, d'autant que le tissu hépatique fibreux, terrain du cancer, est retiré. Le principal obstacle à la diffusion de ce type de traitement reste la pénurie de greffons. .

Palliatif

Si la fonction hépatique est conservée, une chimio-embolisation intra-artérielle (administration d'une chimiothérapie directement au sein de la tumeur, couplée avec l'obturation des artères nourricières de cette dernière) peut être proposée avec une augmentation de la survie de quelques mois[31]. La chimiothérapie systémique classique n'a pas d'efficacité[32].

L'emploi de sorafénib, un inhibiteur de tyrosine kinase multicible qui présente une double action anti-proliférative et anti-tumorale, a un intérêt qui s'avère être modéré (prolongation de trois mois de la durée de survie)[33]. Le lenvatinib a des résultats équivalents[34]. Le régorafénib[35], ainsi que le cabozantinib[36] ou le ramucirumab[37], peuvent être utilisés en seconde ligne. l'atezolizumab ssocié au bévacizumab est plus efficace en termes de durée de rémission que le sorafénib[38].

Dépistage

Il est important chez les patients porteurs d'une cirrhose quelle qu'en soit la cause. Il se fait par l'échographie hépatique et le dosage de l'alpha-fœtoprotéine[39].

Notes et références

  1. (en) Jordi Bruix, Josep M. Llovet et Alejandro Forner, « Hepatocellular carcinoma », The Lancet, vol. 379, no 9822, , p. 1245–1255 (ISSN 0140-6736 et 1474-547X, PMID 22353262, DOI 10.1016/S0140-6736(11)61347-0, lire en ligne, consulté le )
  2. (en) Vinay Kumar, Abul K. Abbas et Jon C. Aster, Robbins and Cotran Pathologic Basis of Disease, Professional Edition E-Book, Elsevier Health Sciences, , 1472 p. (ISBN 978-0-323-29635-9, lire en ligne), p. 870–873
  3. « WHO Disease and injury country estimates », sur World Health Organization, (consulté le )
  4. (en) El-Serag HB, « Hepatocellular carcinoma » N Engl J Med. 2011;365:1118-1127
  5. (en) Yang HI, Yeh SH, Chen PJ et al. « Associations between hepatitis B virus genotype and mutants and the risk of hepatocellular carcinoma » J Natl Cancer Inst. 2008;100:1134-1143
  6. (en) Bruno S, Crosignani A, Maisonneuve P, Rossi S, Silini E, Mondelli MU, « Hepatitis C virus genotype 1b as a major risk factor associated with hepatocellular carcinoma in patients with cirrhosis: a seventeen-year prospective cohort study » Hepatology 2007; 46: 1350-1356
  7. (en) Fattovich G, Stroffolini T, Zagni I, Donato F, « Hepatocellular carcinoma in cirrhosis: incidence and risk factors » Gastroenterology. 2004;127:Suppl 1:S35-S50
  8. Klotz F, Debonne JM, Richecoeur M, « L’hépatocarcinome sous les tropiques » Acta Endoscopica Volume 1999;29 [PDF]
  9. (en) Calle EE, Rodriguez C, Walker-Thurmond K, Thun MJ, « Overweight, obesity, and mortality from cancer in a prospectively studied cohort of US adults » N Engl J Med. 2003;348:1625-1638
  10. (en) Larsson SC, Wolk A, « Coffee consumption and risk of liver cancer: a meta-analysis » Gastroenterology 2007;132:1740-1745
  11. https://www.pourquoidocteur.fr/Articles/Question-d-actu/40310-Cancer-produits-chimiques-eternels-emballages-alimentaires-ustensiles-cuisine-multiplie-les-risques
  12. (en) Trevisani F, D’Intino PE, Morselli-Labate AM, Mazzella G, Accogli E, Caraceni P et al. « Serum alpha-fetoprotein for diagnosis of hepatocellular carcinoma in patients with chronic liver disease: influence of HBsAg and anti-HCV status » J Hepatol. 2001;34:570-5
  13. (en) Singal A, Volk ML, Waljee A, Salgia R, Higgins P, Rogers MA et al. Meta-analysis: surveillance with ultrasound for early-stage hepatocellular carcinoma in patients with cirrhosis Aliment Pharmacol Ther. 2009;30:37-47.
  14. Roberts LR, Sirlin CB, Zaiem F et al. Imaging for the diagnosis of hepatocellular carcinoma: a systematic review and meta-analysis, Hepatology, 2018;67:401-421
  15. Villanueva A, Hepatocellular carcinoma, N Engl J Med, 2019;380:1450-1462
  16. "Juin 2015: The Same Probiotic That’s In Your Yogurt Could Detect Liver Cancer"
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  39. Tzartzeva K, Obi J, Rich NE et al. Surveillance imaging and alpha fetoprotein for early detection of hepatocellular carcinoma in patients with cirrhosis: a meta-analysis, Gastroenterology, 2018;154:1706-1718.e1

Voir aussi


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