Hachd al-Chaabi
Les Hachd al-Chaabi (en arabe : الحشد الشعبي, « Unités de mobilisation populaire ») sont une coalition paramilitaire de milices en majorité chiites formée en 2014 pendant la seconde guerre civile irakienne[2].
Ne doit pas être confondu avec Hachd al-Watani.
Hachd al-Chaabi Unités de mobilisation populaire | |
Idéologie | Islamisme chiite (en majorité) Khomeinisme (en partie) Nationalisme irakien(en partie) |
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Objectifs | Instauration en Irak d'un gouvernement islamiste chiite fondé sur le Velayat-e faqih (en majorité) |
Statut | Actif |
Site web | al-hashed.net |
Fondation | |
Date de formation | |
Pays d'origine | Irak |
Actions | |
Zone d'opération | Irak |
Période d'activité | Depuis 2014 |
Organisation | |
Chefs principaux | • Faleh al-Fayadh (président) • Abou Mehdi al-Mouhandis (chef militaire) |
Membres | 60 000 à 140 000[1] |
Allégeance | Irak |
Soutenu par | Iran Irak |
Organisation
Fondation
Le , à Nadjaf, trois jours après la chute de Mossoul, l'ayatollah Ali al-Sistani appelle au djihad contre l'État islamique, entraînant l'arrivée de milliers de volontaires dans les rangs des milices chiites[3],[4].
Selon Allan Kaval et Louis Imbert, journaliste pour Le Monde : « Ces hommes, formés durant les années 2000 dans la lutte contre « l’occupant » américain, puis dans la guerre civile entre groupes sunnites et chiites, étaient jusque-là perçus par bien des Irakiens comme des criminels, des semeurs de trouble. Avec la bénédiction de l’ayatollah Ali Al-Sistani, qui ne les porte pourtant pas dans son cœur, ils se rachètent tout en acquérant d’un coup une légitimité nationale. Étroitement encadrés par des conseillers politiques et militaires iraniens dépêchés sur les fronts, ils vont alors étendre leur influence »[5].
Commandement
Le président des Hachad al-Chaabi est Faleh al-Fayadh, conseiller à la sécurité nationale ; mais le numéro 2, Abou Mehdi al-Mouhandis, le chef des Kataeb Hezbollah, est d'après l'AFP « le véritable homme fort du Hachd car, font valoir les experts, il est celui qui est le plus proche de l'Iran »[1]. Ce dernier est tué par une frappe aérienne ciblée américaine à proximité de l'aéroport international de Bagdad le [6].
Effectifs
Début 2015, les effectifs des Hachd al-Chaabi sont estimés entre 60 000 et 90 000 hommes[7]. Fin 2016, elles revendiquent 142 000 combattants[8]. Fin 2017, le Parlement affirme avoir compté 110 000 combattants[1].
Composition
Les Hachd al-Chaabi regroupent 60 à 70 milices, si certaines d'entre-elles sont sunnites, chrétiennes, yézidies ou shabaks, la grande majorité sont des brigades chiites armées et financées par l'Iran et épaulées par des conseillers militaires iraniens[4],[9],[10],[8],[11],[12]. Au sein des Hachd al-Chaabi, les groupes sont rassemblés ou divisés en plusieurs brigades[13]. Certaines milices particulièrement importantes, comme l'Organisation Badr, sont présentes dans plusieurs brigades[13]. Le chercheur Morgan Lotz dresse la liste complète des différentes milices qui composent les Hachd al-Chaabi[14].
- 1re brigade : Organisation Badr et Liwa al-Imam Muhammad al-Jawad[13]
- 2e brigade : Division de combat de l'Imam Ali[13],[15]
- 3e brigade : Organisation Badr[13]
- 4e brigade : Organisation Badr[13]
- 5e brigade : Organisation Badr[13]
- 6e brigade : Kataeb Djound al-Imam[13]
- 7e brigade : Liwa al-Muntadhar[13]
- 8e brigade : Saraya Ashura[13]
- 9e brigade : Organisation Badr et Liwa Kerbala[13]
- 10e brigade : Organisation Badr[13]
- 11e brigade : Liwa Ali al-Akbar[13],[15]
- 12e brigade : Harakat Hezbollah al-Nujaba[13]
- 13e brigade : Liwa al-Tafuf[13],[15]
- 14e brigade : Brigade Sayyed al Shuhada (en)[13]
- 15e brigade : Quwat al-Shaheed al-Sadr et and Kataeb al-Fatah al-Mubin[13]
- 16e brigade : Organisation Badr et Brigades turkmènes[13]
- 17e brigade : Saraya al-Djihad[13]
- 18e brigade : Saraya al-Khorasani[13],[15]
- 19e brigade : Ansar Allah al-Awfiya et Tashkil al-Hussein al-Thair[13]
- 20e brigade : Liwa al-Taff[13]
- 21e brigade : Organisation Badr[13]
- 22e brigade : Organisation Badr[13]
- 23e brigade : Organisation Badr[13]
- 24e brigade : Organisation Badr[13]
- 25e brigade : Quwat al-Shaheed al-Sadr al-Awal[13],[15]
- 26e brigade : Division de combat d'al-Abbas[13]
- 27e brigade : Organisation Badr et Quwat al-Shaheed al-Qa'id Abu Muntadhar al-Muhammadawi[13]
- 28e brigade : Saraya Ansar al-Aqeeda[13]
- 29e brigade : Kataeib Ansar al-Hujja[13]
- 30e brigade : Organisation Badr et milice chabak[13],[16]
- 31e brigade : Kataeb al-Tayyar al-Risali[13]
- 33e brigade : Quwat Wa'ad Allah[13]
- 35e brigade : Quwat al-Shaheed al-Sadr[13]
- 36e brigade : Organisation Badr, Liwa al-Hussein et Régiment Lalesh[13]
- 39e brigade : Harakat al-Abdal[13]
- 40e brigade : Brigades de l'imam Ali[13]
- 41e brigade : Asaïb Ahl al-Haq[13]
- 42e brigade : Asaïb Ahl al-Haq (Quwat/Liwa al-Shaheed al-Qaid Abu Mousa al-Amiri)[13]
- 43e brigade : Asaïb Ahl al-Haq (Saba al-Dujail)[13]
- 44e brigade : Liwa Ansar al-Marja'iyya[13]
- 45e brigade : Kataeb Hezbollah[13]
- 46e brigade : Kataeb Hezbollah (Saraya al-Difa al-Shaabi)[13]
- 47e brigade : Kataeb Hezbollah (Saraya al-Difa al-Shaabi)[13]
- 50e brigade : Brigades de Babylone[13],[16]
- 51e brigade : Brigade Salah al-Din[13]
- 52e brigade : Organisation Badr et Brigades turkmènes[13]
- 53e brigade : Organisation Badr et Liwa al-Hussein[13]
- 55e brigade : Organisation Badr[13]
- 56e brigade : Liwa Hashd Shuhada Kirkuk[13]
- 66e brigade : Saraya Ansar al-Aqeeda[13]
- 88e brigade : Milice sunnite[13]
- 90e brigade : Fursan al-Joubour[13]
- 91e brigade : Nawader Shammar[13]
- 92e brigade : Brigades turkmènes[13]
- 93e brigade : Jaysh al-Mu'ammal (en)[13]
- 110e brigade : Organisation Badr[13]
- 201e brigade : Garde de Ninive[13]
- 313e brigade : Brigades de la paix[13]
- 314e brigade : Brigades de la paix[13]
Liens avec le gouvernement irakien et l'armée irakienne
Le gouvernement irakien de Haïder al-Abadi souhaiterait dépolitiser ces milices en les intégrant dans une Garde nationale, mais le projet de loi correspondant, en , n'a pas été accepté par le Parlement[17].
Fin , une loi votée au Parlement reconnaît les Hachd al-Chaabi comme une composante des Forces armées irakiennes, placée sous l'autorité directe du Premier ministre[18]. Cependant cette intégration reste théorique[12]. Les tentatives des gouvernements irakiens pour placer les Hachd al-Chaabi sous l'autorité de l'État échouent[19]. En 2019, un budget de 2,17 milliards de dollars est alloué aux Hachd[19].
Le , dans un sermon lu en son nom à la mosquée de Kerbala, l'ayatollah Ali al-Sistani appelle à la dissolution des Hachd al-Chaabi et à l'intégration de leurs combattants au sein des services de sécurité de l’État irakien[20].
Lors des Élections législatives irakiennes de 2018, les milices se dotent d'une branche politique et se regroupent autour de l'Alliance Fatah[19].
La 80e brigade, principalement composée de Yazidis, est en revanche réputée proche du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui était intervenu en Irak en 2014 pour protéger cette population des persécutions de l’État islamique. La brigade est régulièrement ciblée par des attaques aériennes de l'armée turque[21].
Idéologie
La plupart des milices chiites sont pro-iraniennes, proches du guide de la Révolution Ali Khamenei, et leur objectif est l'instauration en Irak d'un gouvernement islamique chiite fondé sur le Velayat-e faqih[8]. Six groupes chiites en revanche, proches de l'ayatollah Ali al-Sistani, rejettent le Velayat-e faqih[8]. Enfin les Brigades de la paix, dirigées par Moqtada al-Sadr, tiennent une position nationaliste et cherchent à s'éloigner de l'influence iranienne[22].
Politique
En 2018, après la défaite de l'État islamique, les Hachd al-Chaabi aspirent à jouer un rôle politique en Irak[16]. Comme les milices ne peuvent pas présenter de candidats, beaucoup de leurs chefs démissionnent pour pouvoir participer aux élections[16]. Ils forment une coalition appelée « l'Alliance Fatah » et surnommée la coalition « des moudjahidines »[16]. Les Hachd al-Chaabi demeurent cependant divisés entre les « khameneistes », les « sistanistes » et les « sadristes »[16]. Contre l'avis de Moqtada al-Sadr, « l'Alliance du Fatah » apporte son soutien au Premier ministre Haïder al-Abadi[16]. Cependant l'alliance, formée le , ne dure que 24 heures ; al-Abadi décide finalement de concourir séparément aux législatives[23]. L'Iran soutiendrait pour sa part une candidature d'Hadi Al-Ameri, le chef de l'Organisation Badr[23].
Pertes
Environ 7 500 membres des Hachd al-Chaabi sont tués entre et lors de la seconde guerre civile irakienne[24]. En , Ahmed Al-Assadi, porte-parole des Hachd al-Chaabi, annonce que près de 8 000 miliciens ont été tués et 14 000 blessés au cours du conflit[12]. Cependant en , il hausse le bilan des pertes entre 2014 et 2017 à 9 000 morts et 23 000 blessés[19].
Exactions et crimes de guerre
Les milices ont été accusées de nombreux crimes de guerre durant la seconde guerre civile irakienne — racket, enlèvements, meurtres, disparitions forcées, viols, pillages — visant principalement des civils sunnites dans les zones reconquises à l'État islamique[10]. Amnesty International a ainsi recueilli des témoignages décrivant des rafles et exécutions sommaires visant de jeunes hommes[25].
Le , 29 prostituées et deux hommes proxénètes sont massacrés dans le quartier de Zayouna, à Bagdad, probablement par des miliciens chiites[26],[27]. Le , des combattants des Hachd al-Chaabi massacrent au moins 68 civils sunnites dans une mosquée à Hamrine près de Bakouba, dans la province de Diyala[28],[29],[30],[31]. Le , 56 à 77 jeunes hommes sunnites sont fusillés par des miliciens dans le village de Barwana, également dans la province de Diyala[32],[33],[34]. Après la reprise de Tikrit à l'État islamique, des témoins indiquent des destructions d'habitations civiles pour les milices. À ce propos, le vice-président irakien Osama al-Nujaifi (en) déclare que « C’est un message négatif, qui déforme le vrai sens de cette victoire, parce ce sont des actes de vengeance contre des civils »[35]. Les milices sont supposées agir en vengeance du massacre de Tikrit, durant lequel plus de mille prisonniers de guerre chiites ont été exécutés par l'État islamique. Selon Human Rights Watch, en les miliciens chiites exécutent au moins plusieurs dizaines de civils sunnites, ravagent des maisons et de mosquées, et commettent des enlèvements et des pillages dans les environs de Mouqdadiyah, dans la province de Diyala[36]. Lors de la bataille de Mossoul, les milices chiites ont également exercé de nombreuses vengeances à l'encontre de la population sunnite[37].
Membres notables
Bibliographie
Morgan Lotz, Comprendre les Gardiens de la Révolution islamique - Leurs engagements et leurs actions, L'Harmattan, , 274 p. (ISBN 978-2-343-25525-5)
Vidéographie
- Vice news, « The Battle for Iraq: Shia Militias vs. the Islamic State » [vidéo], sur youtube, .
Liens externes
- Jean-Pierre Perrin, « Irak : ces milices chiites, fers de lance contre l’EI », Libération, .
- Romain Caillet, « Le « Jihad chiite » en Syrie et en Irak », Jihadologie, .
Notes et références
- AFP, « Irak: le Hachd al-Chaabi, supplétif crucial mais parfois encombrant », Le Point,
- « La bataille est « mal préparée », selon le président du Parlement irakien », L’Orient-Le Jour,
- Pierre-Jean Luizard, Le piège Daech, l'État islamique ou le retour de l'Histoire, La Découverte, , p. 182
- Louis Imbert, « Quel rôle tiennent les milices chiites dans la bataille de Mossoul ? », Le Monde,
- Allan Kaval et Louis Imbert, « Après le « califat » de l’EI en Irak et en Syrie, l’Iran, maître du jeu régional », Le Monde,
- Hala Kodmani, « Abou Mehdi Al-Mouhandis, l'autre victime du raid contre Soleimani », Libération,
- Hélène Sallon, « En Irak, les milices chiites, fer de lance du gouvernement », Le Monde,
- Pierre Barbancey, « Les milices chiites d’Irak,un pouvoir dans le pouvoir », L'Humanité,
- (en) « The caliphate strikes back », The Economist,
- Samia Medawar, « Les exactions des Hachd al-Chaabi poussent-elles les sunnites dans les bras de l’EI ? », L’Orient-Le Jour,
- Allan Kaval, « Les milices chiites à l’assaut de la frontière entre l’Irak et la Syrie », Le Monde,
- Hélène Sallon, « L’intégration des milices, un défi pour l’État irakien », Le Monde,
- (en) Aymenn Jawad Al-Tamimi, « Hashd Brigade Numbers Index »,
- Morgan Lotz, Comprendre les Gardiens de la Révolution islamique - Leurs engagements et leurs actions, Paris, L'Harmattan, , 274 p. (ISBN 978-2-343-25525-5, lire en ligne), p. 100-121
- Matteo Puxton, « Milices chiites irakiennes: le choix de l'Iran pour Liwa al-Tafuf », France Soir,
- Araz Muhamad Arash et Sylvain Mercadier, « Les milices, un enjeu capital de la reconstruction politique de l’Irak », Orient XXI,
- (en) « Why Iraq needs to depoliticize their Popular Mobilization Units », Al-Monitor,
- Louis Imbert, « En Irak, le combat des milices pour leur respectabilité », Le Monde,
- Hélène Sallon, « Après la mort du général Soleimani, les milices pro-iraniennes veulent parfaire leur mainmise sur l’Irak », Le Monde,
- Reuters, « Irak : les milices doivent être dissoutes, dit l'ayatollah Sistani », L’Orient-Le Jour,
- AFP, « Le bilan du raid aérien turc contre une clinique passe à 8 morts », sur L'Orient-Le Jour,
- Jean-Baptiste Assouad, « Les milices chiites irakiennes, ces autres acteurs de la lutte contre l’EI », L’Orient-Le Jour.,
- Georges Malbrunot, « En Irak, al-Abadi renonce à s'allier avec les milices chiites », Le Figaro,
- « شمول 7500 من شهداء الحشد بقانون التقاعد - شبكة الاعلام العراقي »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), Iraqnews,
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- L'Obs avec AFP, « Irak: 32 morts dans une attaque, Washington déterminé à agir contre l'État islamique »,
- France 24 avec AFP et Reuters, « Irak : près de 70 morts dans l'attaque d'une mosquée sunnite »,
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- « Irak : Les milices ont commis de nombreux abus, voire des crimes de guerre », Human Rights Watch,
- OLJ et AFP, « Massacre présumé de sunnites en Irak, le gouvernement demande une enquête », L’Orient-Le Jour,
- « Un habitant de Tikrit : "Les milices chiites détruisent nos maisons" », France 24,
- Le Point avec AFP, « Irak : les attaques de milices pourraient devenir des crimes de guerre »,
- « État islamique : Reportage exclusif – Mossoul : l’odeur doucereuse des cadavres… », Le Courrier du Maghreb et de l'Orient, (consulté le )
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