Hassan Hanafi
Hassan Hanafi ou Ḥasan Ḥanafī (حسن حنفي), né le 23 février 1935 et mort le 21 octobre 2021, est un professeur d'université. Il a présidé le département de philosophie à l'Université du Caire[1],[2]. Il était une autorité de premier plan sur l'islam moderne[2].
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Dans sa jeunesse, motivé par l'activisme politique révolutionnaire, il s'est associé aux Frères musulmans[1],[3]. Ensuite Hanafi a suivi des études à la Sorbonne à Paris[1]. À partir de 1967, il fut professeur de philosophie au Caire, en même temps que professeur invité par des universités en France, aux États-Unis, en Belgique, au Koweït et en Allemagne. Il a été classé parmi « les grands noms » de la tradition intellectuelle arabe post-1967[4]. Il est cité aussi par Rachid Benzine parmi les « nouveaux penseurs de l'islam »[5].
Jeunesse
Hanafi est né dans une famille d'artistes au Caire, en Égypte[3]. Il a appris à jouer du violon, instrument qu'il a continué à pratiquer par la suite[3].
Philosophie
Hanafi était un disciple de la phénoménologie d'Osman Amin[6]. Il a publié une trilogie[7] où il utilise la méthode de Husserl pour reconstruire la philosophie musulmane classique et critiquer les sources et le développement de la conscience européenne[6].
Son interprétation de l'islam a été qualifiée de socialiste et il a élaboré le concept d'une « gauche musulmane », en interprétant l'islam de manière socialiste, ou en d'autres termes d'une « troisième voie »[8]. Il a promu une interprétation de l'islam qui encourage le développement d'une éthique globale[9]. Dans ses ouvrages postérieurs, il défend l'idée que l'islam doit être compris d'une manière qui favorise le progrès et la liberté humaine[10],[11]. Le chercheur Mohammed Hashas résume :
«... certains des partisans célèbres du socialisme pour la nation arabe sont devenus des chercheurs de premier plan de ce qu'on appelle désormais « gauche musulmane », concept qui est apparu pour la première fois dans le premier numéro de la revue La gauche islamique (Al-Yassâr al-Islâmî), en 1981, sous la plume du philosophe Hassan Hanafi (né en 1935), dans le cadre de son projet de « troisième voie » pour interpréter la tradition et la modernité, une voie qui n'est ni complètement euro-moderne ni tout à fait islamique-traditionaliste ; elle est implicitement séculière-mondaine, dans la mesure où elle comprend le Sacré à la lumière des besoins socio-politiques des gens ; c'est la foi, révolutionnée pour être vécue (mina-lʻaqīda ilā thawra), comme l'indique le titre de l'un des volumes du projet. »[12]
Hanafi s'est engagé comme conseiller auprès de l'InterAction Council, une organisation à but non lucratif dont les membres sont d'anciens premiers ministres et présidents[13]. Il a également été membre de l'Association for Intercultural Philosophy, qui encourage le dialogue entre les philosophes à travers le monde[14]. Il a été l'un des premiers signataires de la lettre ouverte A Common Word Between Us and You, adressée par les chercheurs musulmans aux dirigeants chrétiens, appelant à la paix et la compréhension[15].
On se souvient aussi d'Hanafi pour ses débats universitaires avec son contemporain le philosophe Mohamed Abed Al-Jabri, qui ont été publiés en français[16].
Il a reçu nombre de distinctions académiques au cours de sa carrière[17],[18].
Accusation d'apostasie
Son livre Une invitation au dialogue a été accusé par les savants religieux conservateurs d'hérésie et d'apostasie[19],[20].
Ses opinions libérales sur l'islam ont exaspéré les érudits conservateurs de l'université al-Azhar. Par exemple, il a affirmé que le nom de Dieu devrait être changé en « Transcendance ». Les savants conservateurs d'al-Azhar ont rétorqué que Hanafi altérait l'islam. Une fatwa publiée en 1997[21], qui désignait Hanafi comme apostat, a suscité la controverse en Égypte, où nombre de penseurs libéraux ont dénoncé cette accusation[22].
En 2006, il s'attire de nouveau la colère des orthodoxes d'al-Azhar en qualifiant le Coran de « supermarché », où chacun peut trouver ce qu'il veut[23].
Postérité
Il a eu pour élève, à la Sorbonne, Abu Zayd[24].
Carool Kersten note que l'influence intellectuelle d'Hanafi s'étend au-delà du monde arabophone et englobe l'Indonésie où, parmi l'élite intellectuelle locale, Hanafi a représenté « une branche particulière des intellectuels arabes connus sous le nom de turāthiyyūn — "les penseurs de l"héritage"[25]. »
Œuvre
- Traduction du Traité théologico-politique de Spinoza sous le titre : Risâla fi l-Lâhût wa-l-Siyâsa.
- Les Méthodes d'exégèse : essai sur la science des fondements de la compréhension : "ʿIlm Uṣul al-Fiqh" (thèse de doctorat), 1965.
- La crise dans les études islamiques, 1966.
- L' exégèse de la phénoménologie : l'état actuel de la méthode phénoménologique et son application au phénomène religieux.
- « New social science : Some reflections » in Études orientales, 1990.
- Hasan Hanafî et Muhammad Al-Jâbirî. « Dialogue entre Maghreb et Machreq » in Égypte/Monde arabe, 1991.
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Hassan Hanafi » (voir la liste des auteurs).
- (en) Şerif Mardin, Cultural Transitions in the Middle East, BRILL, (ISBN 978-90-04-09873-2, lire en ligne), p. 88
- (en) Caryle Murphy, Passion for Islam: Shaping the Modern Middle East: The Egyptian Experience, Simon and Schuster, (ISBN 978-0-7432-3743-7, lire en ligne), p. 220
- (en) Francesca Maria Corrao, Islam, state, and modernity : Mohammed Abed al-Jabri and the future of the Arab world, Palgrave Macmillan, , p. 5
- Rachid Benzine, Les nouveaux penseurs de l'islam, Albin Michel, (ISBN 9782226178589), p. 18
- (en) Anna-Teresa Tymieniecka, Phenomenology World Wide: Foundations - Expanding Dynamics - Life-Engagements, A Guide for Research and Study, Springer Netherlands, (ISBN 978-1-4020-0066-9, lire en ligne), p. 320
- Hanafi, Hasan (1965), Les méthodes d'exégèse: essai sur la science des fondements de la compréhension "ʻIlm Uṣul al-fiqh", République arabe unie, Conseil supérieur des arts, des lettres et des sciences sociales, Cairo, Egypt, OCLC 2894354 ; Hanafi, Hasan (1980), L'exégèse de la phénoménologie: l'état actuel de la méthode phénoménologique et son application au phénomène religieux, Dar al-Fikr al-Arabi, Cairo, Egypt, OCLC 11867001 ; Hanafi, Hasan (1988), La phénoménologie de l'exégèse: essai d'une herméneutique existentielle à partir du Nouveau Testament, Anglo-Egyptian Bookshop, Cairo, Egypt, (ISBN 977-05-0917-5)
- (en) Zaid Eyadat, Francesca M. Corrao et Mohammed Hashas, Islam, State, and Modernity: Mohammed Abed al-Jabri and the Future of the Arab World, Springer, (ISBN 978-1-137-59760-1, lire en ligne), p. 271-302
- Susanne Olsson, Islam and the west in the ideology of Ḥasan Ḥanafī, Almqvist & Wiksell International, (ISBN 91-89652-21-5 et 978-91-89652-21-7, OCLC 238374224)
- (en) Şerif Mardin, Cultural Transitions in the Middle East, BRILL, (ISBN 978-90-04-09873-2, lire en ligne)
- (en) Caryle Murphy, Passion for Islam: Shaping the Modern Middle East: The Egyptian Experience, Simon and Schuster, (ISBN 978-0-7432-3743-7, lire en ligne), p. 219
- (en) Mohammed Hashas, « The Arab Possible State: From al-Tahtawi to al-Jabri », dans Islam, State, and Modernity: Mohammed Abed al-Jabri and the Future of the Arab World, Palgrave Macmillan US, (ISBN 978-1-137-59760-1, DOI 10.1057/978-1-137-59760-1_14, lire en ligne), p. 271
- « A Universal Declaration of Human Responsibilities | InterAction Council », sur www.interactioncouncil.org (consulté le )
- (en) « Hassan Hanafi », sur archive.artsrn.ualberta.ca, (consulté le )
- (en-US) « Signatories », sur A Common Word Between Us and You (consulté le )
- Hasan Hanafî et Muhammad Al-Jâbirî, « Dialogue entre Maghreb et Machreq », Égypte/Monde arabe, no 6, , p. 177–198 (ISSN 1110-5097, lire en ligne, consulté le )
- (en-US) admin, « The great philosopher and thinker Hassan Hanafi passed away at the age of 86 », sur Eg24 News, (consulté le )
- (en) Bindu Rai, « Leading Egyptian philosopher Hanafi dies at 86 », sur gulfnews.com, (consulté le )
- (en) « New books damage the image of Islam | Arab West Report » [archive], sur www.arabwestreport.info, (consulté le )
- Malek Chebel, Changer l'islam: Dictionnaire des réformateurs musulmans des origines à nos jours, Albin Michel, (ISBN 978-2-226-28620-8, lire en ligne)
- Dominique Avon, « Élites, doctrines et débats (xixe-xxie siècles) », Annuaire de l'École pratique des hautes études (EPHE), Section des sciences religieuses. Résumé des conférences et travaux, no 126, , p. 409 (ISSN 0183-7478, DOI 10.4000/asr.2984, lire en ligne, consulté le )
- (en) Wā’il al-Ibrāshī, « A plan to kill Hassan Hanafy in the same way as the plan to kill Naguib Mahfouz | Arab West Report », sur www.arabwestreport.info, (consulté le )
- « Religion Haro sur un intellectuel égyptien qui a comparé le Coran à un « supermarché » », sur L'Orient-Le Jour, (consulté le )
- (en) Nasr Hamid Abu Zayd et Carool Kersten (Préface), Critique of Religious Discourse, Yale University Press, (ISBN 978-0-300-20712-5, lire en ligne), p. 7
- (en) Carool Kersten, « Al-Jabri in Indonesia: The Critique of Arab Reason Travels to the Lands Below the Winds », Islam, State, and Modernity Mohammed Abed al-Jabri and the Future of the Arab World, , p. 150 (lire en ligne [PDF], consulté le )
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