Henri Akoka
Henri Akoka (né le à Palikao en Algérie française et décédé le ) est un clarinettiste français. Militaire durant la Seconde Guerre mondiale, il est détenu dans plusieurs camps où il continue une activité musicale.
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(à 64 ans) |
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Conservatoires nationaux supérieurs de musique et de danse (d) |
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Clarinettiste |
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Biographie
Henri Akoka était le deuxième des six enfants d'Abraham Akoka, trompettiste. La famille quitte l'Algérie en 1926 vers Ponthierry en France, afin que les enfants puissent poursuivre leurs études de musique. Henri a commencé à jouer dans l'orchestre de l'usine de papier peint où son père travaillait, et a également joué dans des bandes sonores de films muets à partir de l'âge de 14 ans. Pendant cette période, il a étudié sous la direction de M. Briançon[1], clarinettiste à la Musique de la Garde Républicaine, qui l'encouragea à présenter le concours du conservatoire de Paris.
Henri Akoka est diplômé du Conservatoire de Paris obtenant le premier prix de clarinette en 1935[2] dans la classe d'Auguste Périer. Son frère Lucien Akoka obtient un premier prix au cornet en 1937.
Il rejoint d'abord l'Orchestre Symphonique de la Radio-diffusion de Strasbourg, puis devient membre de l'Orchestre National de la Radiodiffusion française à Paris.
Au début de la Seconde Guerre mondiale en 1939, Akoka est envoyé dans un orchestre militaire à Verdun, où il rencontre Étienne Pasquier et Olivier Messiaen[1],[3]. À Verdun, Messiaen entreprend d'écrire une pièce pour clarinette seule pour Henri Akoka[4]. Tous trois sont capturés par les forces nazies en juin 1940. Alors qu'ils attendent dans un camp de transit proche de Nancy d'être transportés dans un camp de prisonniers en Allemagne, Henri Akoka, autorisé à garder sa clarinette, lit à vue la partition et répète en plein air la composition qui deviendra l' Abîme des oiseaux pour clarinette seule de Messiaen[5]; Pasquier lui servant de pupitre. Akoka se plaignant de la difficulté technique de la pièce, la seule réponse de Messiaen fut : « Tu te débrouilles ! »[4]
« Clarinette seule. L’abîme, c’est le Temps, avec ses tristesses, ses lassitudes. Les oiseaux, c’est le contraire du Temps : c’est notre désir de lumière, d’étoiles, d’arc en ciel et de jubilantes vocalises ! »
— Olivier Messiaen, Préface à la partition Abîme des oiseaux.
Ils sont ensuite envoyés au Stalag VIII-A à Görlitz, où ils rencontrent le violoniste Jean Le Boulaire [6]. C'est pour cet ensemble atypique que Messiaen a composé son Quatuor pour la fin du temps, créé au camp le [7], qui intègre dans le troisième mouvement la pièce pour clarinette seule précédemment créée.
Après la guerre, Henri Akoka a déclaré que ce quatuor était « le seul souvenir de la guerre que je souhaite conserver » ; cependant, il ne l'a plus jamais joué[8].
L'évasion d'Henri Akoka du camp a été organisée par Karl-Albert Brüll, un gardien qui a fourni de faux papiers à Messiaen. Cependant, il a été retiré du camion de transport « à cause de son apparence juive ». Il s'est ensuite échappé en avril 1941 en sautant sur le toit d'un train en marche « avec sa clarinette sous le bras »[9]. Il est retourné à l'Orchestre national de la radio, qui opérait depuis la zone libre de Marseille [10]. Puis il changera d'identité jusqu'à la fin de la guerre pour échapper aux persécutions[11].
Henri Akoka jouait pendant la guerre une clarinette Couesnon avec un bec Couesnon refacé Périer, qui donnait une sonorité et un timbre typiquement français que Messiaen ne retrouvait pas avec les clarinettistes d'après-guerre comme Guy Deplus ; ce qui força Messiaen à changer des nuances de certains passages lors de l'enregistrement de 1963, qu'il supervisait, avec Guy Deplus à la clarinette.
Après guerre, Henri Akoka poursuit sa carrière dans les orchestres parisiens[12].
Vie privée
Marié à Jeannette Chevalier, ils ont un fils Philippe.
Akoka meurt le 22 novembre 1976 d'un cancer[13].
Postérité
Le clarinettiste David Krakauer et Matt Haimovitz rendent hommage en 2012 à Henri Akoka dans un projet donnant lieu à un enregistrement en 2017 dans l'album Akoka: Reframing Messiaen's Quartet For The End Of Time (label Pentagone).
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- (en) Rebecca Rischin, For the end of time: the story of the Messiaen quartet, Cornell University Press, (ISBN 9780801472978). .
- Rebecca Rischin, Emilie Akoka (Traducteur) et Guillaume Marlière (Traducteur), Et Messiaen composa... - Genèse du Quatuor pour la fin du Temps, Ramsay, coll. « l'indicible », , 249 p. (ISBN 9782841147694).
Notes et références
- Rischin 2006, p. 11.
- « Conservatoire de musique de Paris », La Gazette de Mostaganem : journal littéraire et d'intérêt général | organe indépendant paraissant tous les dimanches, Mostaganem, vol. seizième année, no 776, (lire en ligne, consulté le ).
- Jerzy Stankiewicz, « Olivier Messiaen à la guerre et en captivité au Stalag VIII A de Görlitz dans l’optique des recherches polonaises. : Rectifications et compléments », sur larevue.conservatoiredeparis.fr (consulté le ).
- Florent Héau, « Quatuor pour la fin du Temps, Olivier Messiaen », sur cldesol.blogspot.com, (consulté le ).
- Rischin 2006, p. 12–13.
- Rischin 2006, p. 15.
- Rischin 2006, p. 2.
- Rischin 2006, p. v, 96.
- (en) Cynthia Haven, « 100th birthday of Messiaen celebrated with a concert series », Stanford News, (lire en ligne).
- Rischin 2006, p. 85.
- Bruno Giner, Survivre et mourir en musique dans les camps nazis, Univers Poche, , 220 p. (ISBN 978-2823816075, lire en ligne).
- (en) Nigel Simeone, « Après La Guerre », The Musical Times, Musical Times Publications Ltd., vol. 145, no 1886, , p. 91–96 (lire en ligne, consulté le ).
- Rischin 2006, p. 96.