Herminie Vaneukem

Herminie Vaneukem (aussi orthographié Vaneuken, Waneukem, Waneuken, née en ou dans la province de Hainaut, morte après ) est une espionne et couturière belge. Durant la Première Guerre mondiale, elle travaille pour le réseau Carlot-Louis qui surveille les mouvements ferroviaires. Arrêtée, elle est condamnée à mort, puis, après une grâce, sa peine est ramenée aux travaux forcés à perpétuité.

Herminie Vaneukem
Biographie
Naissance
Décès
Après
Nationalité
Activités
Couturière, espionne
Autres informations
Condamnée pour

Biographie

Herminie Vaneukem est la fille d'Arille Vaneukem, manœuvre à Marcinelle[1]. Elle travaille comme couturière à Bruxelles.

Alors qu'elle n'a que vingt ans, elle est recrutée, par l'intermédiaire de son père lui-même porteur occasionnel de courriers, par Adolphe Lampert pour le réseau d'espionnage belge Carlot-Louis de Victor Ernest, député socialiste suppléant de Charleroi et échevin de Jumet. Le réseau surveille les convois ferroviaires allemands et transmet ces renseignements via les Pays-Bas au service de renseignement britannique Cameron. Herminie Vaneukem est coursière pour le réseau sous le nom de code « Rosette ». La fonction des coursiers est dangereuse, les contrôles sont fréquents, la liberté de mouvement réduite et les laissez-passer chers et difficiles à obtenir[2],[3]. Les coursiers sont rémunérés de trois à six francs belges par jour, plus les frais de déplacement . Herminie Vaneukem accomplit sa mission de délivrer les courriers avec succès, mais les destinataires sont souvent réticents à participer à des activités d'espionnage[1].

Parti du Hainaut, le réseau étend ses activités vers le Brabant et la Flandre orientale mais les premiers membres sont arrêtés au printemps 1915 par la Polizeistelle de Bruxelles et plusieurs d'entre eux sont exécutés au Tir national[2].

Adolphe Lampert, qui a succédé à Victor Ernest, réfugié aux Pays-Bas, est arrêté en décembre 1915. Il passe aux aveux et accepte de travailler pour la police allemande. Le réseau Carlot-Louis tombe en février 1916. Herminie Vaneukem est arrêtée[2].

Elle comparaît avec 2 autres femmes et 36 hommes membres du réseau à Mons devant le Feldgericht, dans ce qu'on appelle Le grand procès de Mons. En raison du nombre inhabituel de prévenus, l'audience se tient dans la salle des redoutes du théâtre de Mons[2]

Le procès a lieu les 29 février et 1er mars 1916.

L'avocat d'Herminie Vaneukem, Thomas Braun du Comité de défense gratuite des belges devant les juridictions allemandes, n'a eu ni la possibilité de s'entretenir avec sa cliente ni de consulter le dossier. Il prononce une plaidoirie vibrante, insistant sur sa jeunesse :

« Messieurs les généraux, plusieurs d'entre vous, sûrement, ont des filles de l'âge d'Herminie ; elles en ont la fraîcheur, elles en ont les chansons. Un jour viendra où il vous sera donné de les revoir, de les embrasser, de vous retrouver avec elles dans la paix et la chaleur de votre foyer. Au coin du feu, sous la douce lumière de la lampe familiale, un soir, elles vous interrogeront et vous diront : « Père, raconte-nous donc les belles histoires du temps où tu faisais la guerre?» Vous accéderez à leur désir, parce qu'il n'est point de père, allemand, belge ou français, qui ne cède à semblable requête. Vous leur parlerez du procès de Mons, le plus important procès d'espionnage surgi à ce jour; vous leur parlerez — vous ne pourrez pas ne pas parler — de la petite Herminie, du rôle qu'elle a joué, de la façon dont elle l'a joué… Et lorsque votre fille, mon général, vous demandera, anxieusement, ses yeux dans vos yeux : « Père, toi qui tenais le sort de cette jeune fille entre tes mains, qu'as-tu fait? » Dites-moi, qu'aimerez-vous mieux pouvoir lui répondre :«Je l'ai fait fusiller » ou « Je l'ai graciée »[1]

Le ministère public requiert contre Herminie Vaneukem une double condamnation à mort et dix ans de prisons, le Conseil de guerre prononce une sentence de condamnation à mort. Mais le tribunal introduit lui-même un recours en grâce qui fait commuer la peine en travaux forcés à perpétuité[1]. La forte réaction internationale à la suite de l'exécution d'Edith Cavell a sans doute joué en faveur d'Herminie Vaneukem. Cependant, la condamnation à mort de Gabrielle Petit, prononcée un peu plus tard, a bien été exécutée.

Sur les 17 condamnations à mort requises par le ministère public lors du procès, neuf ont été prononcées par le Conseil de guerre et sept ont été exécutées dès le lendemain du prononcé, le matin du 2 mars 1916. Les deux condamnés graciés sont Herminie Vaneukem et Adolphe Lampert. Celui-ci sera condamné, après la guerre à vingt ans de prison pour sa collaboration avec l'ennemi.

Aucune information sur la vie d'Herminie Vaneukem après la guerre ne nous est parvenue.

Bibliographie

  • Chantal Antier, Résister, espionner : nouvelle fonction pour la femme en 1914-1918, dans Guerres mondiales et conflits contemporains 2008/4 (no 232), p. 143-154 Lire en ligne
  • Chantal Antier, Espionnage et espionnes de la Grande Guerre, Revue historique des armées, 247, 2007 Lire en ligne
  • Louis Maraite : Le Rôle des Cheminots dans la Bataille de Liège, Liège 2014. Lire en ligne
  • Sophie De Schaepdrijver : Gabrielle Petit: The Death and Life of a Female Spy in the First World War, Londres, Bloomsbury, 2015.

Articles connexes

Références

  1. Charles Tytgat, Nos fusillés : (recruteurs et espions), Bruxelles, Charles Bulens & Cie, (lire en ligne), p. 127-148
  2. Emmanuel Debruyne, « L’appareil répressif allemand dans l’arrondissement judiciaire de Mons, 1914-1918 », dans Mons dans la tourmente : Justice et société à l’épreuve des guerres mondiales (1914-1961), Presses universitaires de Louvain, coll. « Histoire, justice, sociétés », (ISBN 978-2-39061-036-6, lire en ligne), p. 23–51
  3. Emmanuel Debruyne, « Patriotes désintéressés ou espions vénaux ? Agents et argent en Belgique et en France occupées, 1914-1918 », Guerres mondiales et conflits contemporains 2008/4 (n° 232), , p. 25-45 (lire en ligne)
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