I Modi
I Modi (Les Façons ou Les Positions), aussi connu comme Les Seize Plaisirs ou sous le titre latin De omnibus Veneris Schematibus, est un livre érotique de la Renaissance italienne, dans laquelle une série de positions sexuelles sont représentées explicitement sous forme de gravures[3].
Pour les articles homonymes, voir Modi.
I Modi | |
Des fragments survivants de la deuxième édition de I Modi du British Museum[2]. | |
Auteur | Giulio Romano (gravures) puis : Pierre l'Arétin (poèmes) puis : Agostino Carracci (gravures) |
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Pays | Italie |
Genre | art érotique |
Version originale | |
Langue | italien |
Éditeur | Marcantonio Raimondi |
Lieu de parution | Rome |
Date de parution | 1524 1527 1798 |
Si l'édition originale a été complètement détruite par l'Église catholique, des fragments d'une édition ultérieure ont toutefois survécu. La deuxième édition était accompagnée des Sonnets luxurieux écrits par Pierre l'Arétin, qui décrit les actes sexuels représentés.
Les illustrations originales ont été copiées, probablement par Agostino Carracci, et cette version a survécu.
Éditions
L'édition originale
L'édition originale a été créée par le graveur Marcantonio Raimondi, en s'inspirant de seize images de positions sexuelles d'une série de peintures érotiques que Giulio Romano était en train de réaliser pour le nouveau Palais du Te de Mantoue de Frédéric II de Mantoue[4].
Raimondi avait travaillé avec Raphaël, mort en 1520 et avait réalisé des impressions de ses œuvres. À la mort de Raphaël, c’est Giulio Romano, son assistant, qui hérite de l’entreprise et de l’équipe du peintre. Romano dessine les seize gravures gravées et imprimées par Raimondi en 1524.
Ces gravures conduisent à l'emprisonnement de Raimondi par le pape Clément VII et à la destruction de toutes les copies. Romano quant à lui n'a pas été poursuivi car, contrairement à Raimondi, ses images n'étaient pas destinées à la présentation publique.
Les sonnets
Pierre l'Arétin compose ensuite seize sonnets sexuellement explicites (Sonnets luxurieux) pour accompagner les gravures et obtenu la libération de Raimondi. I Modi sont publiés une deuxième fois en 1527, avec ces poèmes[N 1]. C'est la première fois que le texte érotique et les images sont combinées[5].
La papauté saisit une fois de plus toutes les copies accessibles. La répression est totale. Raimondi, mis en prison, s'évade à cette occasion. Aucune copie originale de cette édition n'a survécu, à l'exception de quelques fragments au British Museum et de deux copies de la posture 1. Une copie, peut-être contrefaite[N 2],[6], composée d'illustrations grossières obtenues par xylographie, imprimée à Venise en 1550[N 3] et reliée à des textes contemporains, a été découverte dans les années 1920, contenant quinze des seize postures.
Malgré la perte apparente des originaux de Raimondi, il semble avéré qu'au moins un ensemble complet a survécu, puisque les gravures par xylographie de 1550 et les gravures dites de Caracci s'accordent dans tous leurs aspects tant en composition qu'en style avec les fragments qui ont survécu. Certes, à moins que le graveur de l'édition de Caracci n'ait eu accès aux fragments du British Museum et n'ait reconstitué ses compositions à partir de ceux-ci, les similitudes sont trop flagrantes pour être accidentelles.
Au XVIIe siècle
Au XVIIe siècle, un fellow du All Souls College d'Oxford s'est aventuré à Oxford University Press à lancer l'impression des Sonnets luxurieux de l'Arétin et des gravures scandaleuses de Giulio Romano. Le doyen, le Dr John Fell, a confisqué les plaques de cuivre et menacé d'expulsion les personnes impliquées. Le texte des sonnets de l'Arétin, cependant, a survécu[7].
Au XVIIIe siècle
Une nouvelle série de gravures graphiques et explicites de positions sexuelles a été réalisée par Camillo Procaccini ou plus probablement par Agostino Carracci[N 4] pour une réimpression ultérieure des poèmes de l'Arétin[8],[9].
Leur production s'est déroulée dans un environnement post-tridentin qui encourageait l'art religieux et restreignait l'art profane et public. Elles sont surtout connues dans l'édition de 1798 de l'ouvrage imprimé à Paris sous le titre L'Arétin d'Augustin Carrache ou Recueil de Postures Érotiques, d'Après les Gravures à l'Eau-Forte par cet « Artiste Célèbre », Avec le Texte Explicatif des Sujets d'Agostino Carracci, ou Une collection de poses érotiques, d'après les gravures de Carracci, de cet artiste célèbre, avec les textes explicites sur le sujet. « Cet artiste célèbre » est probablement Jacques Joseph Coiny (1761-1809).
Liste des estampes gravées par Coiny (1798)
Plusieurs éléments de l'œuvre suggèrent une connaissance érudite des textes classiques, car tous les couples représentés appartiennent au monde grec ou romain et vont des divinités (Jupiter et Junon) aux amoureux célèbres (Antoine et Cléopâtre). L'artiste a parfois minoré l'aspect obscène, ajoutant à chaque personnage ses attributs traditionnels, par exemple :
- les apparats luxueux des banquets de Cléopâtre, abandonnés en bas à gauche de la scène d'amour ;
- les armes d'Achille, également abandonnées dans le coin inférieur gauche.
Cette suite de 19 estampes a inspiré de nombreux artistes au cours des siècles suivants, comme Paul Avril[10].
Image | No. | Titre | Masculin | Féminin | Position | Notes |
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1 | Venus Genetrix | - | Venus Genetrix | - | - | |
2 | Pâris et Oenone | Pâris | Oenone | Côte à côte, l'homme au-dessus | ||
3 | Angelique et Medor | Medor | Angelique | Femme sur le dessus | Personnages de Roland | |
4 | Le satyre et la nymphe | Satyre | Nymphe | Position du missionnaire (homme sur le dessus et debout, femme couchée) | ||
5 | Julia avec un athlète | Un athlète | Julia | Position inversée, femme debout | Femme guidant le pénis | |
6 | Hercules et Déjanire | Hercule | Déjanire | Position du missionnaire (femme soutenue par un homme) | ||
7 | Mars et Venus | Mars | Venus | Missionnaire, Femme au-dessus, allongé, non assis, le pied gauche soutenu par un tabouret | ||
8 | Le Culte de Priapus | Pan, ou satyre mâle | Satyre femelle | Missionnaire (homme debout, femme assise) | ||
9 | Antoine et Cléopâtre | Marc Antoine | Cléopâtre | Missionnaire côte à côte | Femme guidant le penis | |
10 | Bacchus et Ariane | Bacchus | Ariane | Position sexuelle de Leapfrog - femme entièrement soutenue | Les jambes de la femme ne s'agenouillent pas comme d'habitude dans cette position. | |
11 | Polyenos et Chriseis | Polyenos (fiction) | Chryseis | Missionnaire (homme en haut et debout, femme couchée) | ||
12 | Un satyre et son épouse | Satyre mâle | Satyre femelle | Missionnaire (homme debout, femme assise) | ||
13 | Jupiter et Junon | Jupiter | Junon | (Homme debout / à genoux, femme appuyée (ou plus précisément, femme en partie couchée, en partie appuyée sur le lit, et en partie appuyée sur le bras gauche) | ||
14 | Messaline dans un lupanar | Client | Messaline | Missionnaire (femme couchée, homme debout) | ||
15 | Achille et Briséis | Achille | Briséis | Debout, l'homme soutient entièrement la femme. | ||
16 | Ovide et Corinne | Ovide | Corinne | Missionnaire (homme en haut, femme guidant le pénis en érection dans son vagin) | pénétration en ayant les jambes à l'extérieur. | |
17 | Énée et Didon accompagnés par Cupidon | Énée | Didon | Doigté de l'index de la main gauche | ||
18 | Alcibiade et Glycera | Alcibiade | Glycera | Missionnaire (homme en haut et debout, femme couchée et jambes en l'air) | ||
19 | Pandora | ? Épiméthée (figure couronnée) | Pandore | Côte à côte | Le garçon à la bougie comme référence classique. Le satyre a une érection à cause de son voyeurisme. | |
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « I Modi » (voir la liste des auteurs).
Notes
- D'où le titre traditionnel anglais Aretino's Postures.
- Max Sander, qui a découvert le volume, pense qu'il s'agit de l'édition originale de 1527 ; d'autres universitaires le contestent.
- Anciennement propriété de Toscanini, aujourd'hui dans une collection privée.
- Annibale Carracci, frère d'Agostino, a également achevé la fresque élaborée des Amours des Dieux pour le Palais Farnese à Rome où se trouvait l'Hercule Farnèse qui les a influencés. Ces images sont tirées des Métamorphoses d'Ovide et comprennent des nus, mais contrairement aux gravures sexuelles, ne sont pas explicites mais plutôt intimes, ne représentant pas directement l'acte sexuel.
Références
- (en) « Collection en ligne du British Museum ».
- (en) « Collection en ligne du British Museum ».
- (en) Walter Kendrick, The Secret Museum, Pornography in Modern Culture, , p. 59.
- (en) I Modi : the sixteen pleasures. An erotic album of the Italian renaissance Giulio Romano : edited, translated from the Italian and with a commentary by Lynne Lawner, Northwestern University Press, , 132 p. (ISBN 0-7206-0724-8).
- « I Modi », sur hixstoire.net (consulté le ).
- (en) P.J. Kearney, A History of Erotic Literature, Macmillan, .
- (en) R. W. Ketton-Cremer, Humphrey Prideaux : Norfolk Assembly, Londres, Faber & Faber, , p. 65.
- (en) « Agostino Carracci », sur History of Art (consulté le ).
- « Les Lascives », ironie, no 84, (lire en ligne).
- « Paul Avril », sur arterotisme.com (consulté le ).
Voir aussi
Bibliographie
Articles connexes
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