I Want to Go Home

I Want to Go Home est un film français d'Alain Resnais sorti en 1989.

Pour la chanson, voir I Want to Go Home (chanson).

I Want to Go Home

Réalisation Alain Resnais
Scénario Jules Feiffer
Acteurs principaux
Sociétés de production MK2 Productions, Films A2, La Sept, Investimage, Sofinergie, Sofima, CNC
Pays de production France
Genre Comédie
Durée 100 minutes
Sortie 1989

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Synopsis

Joey Wellman, habitant de Cleveland, auteur d'un comic-strip « syndiqué » un peu oublié, Hepp Cat (il n'est plus publié que dans cinquante journaux, et même pas dans sa ville natale), se rend en France où est organisée une exposition sur le thème de la bande dessinée. Sa réelle motivation est de retrouver sa fille Elsie étudiante depuis deux ans à Paris où elle fuit la culture américaine, qu'elle abhorre, et son père, qui en est un produit typique : étonné que le monde entier ne parle pas anglais, capable de se mettre en colère devant un téléphone à cartes ou devant une énigme telle que la coexistence de pièces et de billets de cent francs.

Lena, la compagne de Joey (ni son épouse, il le précise, ni la mère d'Elsie), tente malgré tout de profiter de la destination romantique que constitue Paris. Elsie n'accueille volontairement pas son père à l'aéroport, ni ne se rend à l'exposition de bandes dessinées... Le père et la fille se retrouvent finalement, et se fâchent. Joey propose à sa fille de venir passer le week-end à la maison de campagne d'un brillant intellectuel parisien rencontré le soir même. Elsie n'en a aucune envie, mais elle finit par s'apercevoir que le destin lui a joué un tour : l'intellectuel en question n'est autre que Christian Gauthier, spécialiste de Flaubert à qui Elsie tente en vain de faire lire sa thèse.

Genèse du film

Le film s'est fait dans un contexte assez inhabituel. Tout d'abord, Alain Resnais n'était pas au meilleur de sa forme, financièrement parlant. La plupart de ses derniers films n'avaient pas été très rentables excepté Mélo, et aucun producteur n'avait particulièrement envie de se lancer dans une aventure cinématographique avec lui, excepté Marin Karmitz. Karmitz et Resnais se mettent d'accord pour réaliser un film dont le thème serait les rapports entre la France et les États-Unis. Le titre premier, Faux-amis, aurait dû explorer ce que les traducteurs appellent « faux-amis », des mots proches, parfois de même racine linguistique mais ayant des sens différents voire opposés. Resnais, qui n'est pas scénariste de ses films, choisit de travailler avec Jules Feiffer, un auteur célèbre pour ses pièces de théâtre (Petits meurtres...) mais aussi pour un comic-strip qu'il a écrit et dessiné pendant près d'un demi-siècle pour le New Yorker, Playboy, Rolling Stone, etc. Feiffer est aussi l'auteur de The Great Comic book heroes (1965), un des premiers essais sérieux sur la bande dessinée.

Malgré le statut d'auteur de bande dessinée et malgré la passion que ce médium inspire à Resnais depuis toujours, il est établi au départ que le film ne parlera en aucun cas de bandes dessinées.

Après avoir exploré diverses pistes (un ancien combattant américain revient sur les lieux du Débarquement...), Resnais et Feiffer dénoncent leur bonne résolution : le héros de leur film sera un auteur de bandes dessinées. Le film est tourné en anglais, et les doubleurs en français ont pris un accent américain prononcé.

La réalisation

Il faut beaucoup de temps pour détailler ce qu'est la réalisation chez Resnais (notamment son souci marqué de tourner les scènes dans l'ordre qu'elles prennent au scénario, ce qui ouvre le champ à une part d'improvisation scénaristique), et notamment dans I Want to Go Home. Une particularité de ce film est l'insertion de Hep Cat et Sally Cat, les deux personnages du comic-strip de Joey Wellman, à divers moments du film : on voit Hep Cat dialoguer avec Joey et Sally Cat dialoguer avec Elsie (on apprendra plus tard que Joey avait créé Sally Cat pour sa fille). Ces incrustations très artificielles ont gêné une partie du public. Cela rappelle le fameux Comment tuer votre femme, de Richard Quine (où Jack Lemmon est un auteur de bandes dessinées qui veut redevenir célibataire...).

Il y a dans I want to Go Home un grand sens de la chorégraphie, particulièrement étonnant dans les scènes du vernissage de l'exposition, celle de la fête chez Christian Gauthier et enfin celle du bal masqué chez la mère de Christian Gauthier. Les personnages se cherchent, se trouvent, continuent des conversations avec d'autres que ceux avec qui ils les ont commencées, etc. Les mouvements de caméra sont fluides et dynamiques, très proches chaque fois du sentiment qu'ils sont censés évoquer. Resnais est en effet un grand amateur de comédie musicale.

La thématique

Les spectateurs ont boudé le film et la critique l'a mal perçu. Marin Karmitz suggère que l'affiche était ratée. Alain Resnais pense à présent que les références à des auteurs de bandes dessinées comme Herriman, Eisner, Spiegelman ou Al Capp n'auront amusé ou intéressé que des spécialistes, ces auteurs étant passablement méconnus en France.

Le fait de parler de bande dessinée est un premier point rédhibitoire : on ne mélange pas impunément deux médiums aussi différents et en même temps concurrents comme sont le cinéma et la bande dessinée. Le film sort en 1989, période à laquelle la bande dessinée a subitement fatigué le public qui l'avait fêtée dans les années 1970 (à partir de l'exposition « Bande dessinée et figuration narrative » au musée des arts décoratifs de Paris) jusqu'aux « années Lang ».

En 1989, des magazines de bande dessinée coulaient chaque semaine (Pilote, Circus, Charlie, Métal), un groupe de presse ultra-catholique (Ampère) s'emparait de plusieurs grandes maisons comme Dargaud, l'éditeur Futuropolis était racheté par Gallimard, laissé à l'abandon par Étienne Robial. Enfin, plusieurs auteurs décidaient que rester des auteurs de bandes dessinées nuisait à leurs ambitions d'artistes – ou donnaient l'impression d'avoir cet état d'esprit : les uns devenaient cinéastes, d'autres chanteurs (Kent, Cleet Boris, etc.), d'autres peintres (Kiki Picasso).

Le fait que le film évoque entre autres un décalage entre deux civilisations (France bavarde et cynique, Amérique simple et sincère) n'est pas une meilleure explication.

Selon Marin Karmitz qui s'exprime à ce sujet dans les bonus de l'édition en DVD, I Want to Go Home est un film sérieux et mélancolique déguisé en comédie. Peut-on parler de la vieillesse d'un homme (Joey), de l'urgence qu'il ressent à se rabibocher avec sa fille en utilisant un prétexte scénaristique réputé « fun » et léger comme la bande dessinée ? Sans doute ce n'était pas permis. Peut-on parler des grands changements d'une civilisation en utilisant ce petit bout de lorgnette que sont les « funnies », les « comics » ? Là encore, il semble que ce projet soit sacrilège. Parler de la vieillesse d'un homme et celle d'un monde, c'est probablement déprimant.

Fiche technique

Distribution

Bibliographie

  • Alain Boillat, « I Want to Go Home : l'auteur de comics sur sol français. Les (im)possibilités d'un dialogue », dans Marc Atallah et Alain Boillat (dir.), BD-US : les comics vus par l'Europe, Gollion, Infolio, , 171 p. (ISBN 978-2-88474-824-7), p. 99-127.

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