Jeanne d'Arc, portrait des échevins

Le portrait de Jeanne d'Arc dit « Portrait des échevins » est un tableau d'un peintre anonyme portant la date de 1581 et aujourd'hui conservé au musée historique et archéologique de l'Orléanais à Orléans (Loiret).

Tableau dit des échevins d’Orléans
Tableau original exposé au musée historique et archéologique de l'Orléanais.
Artiste
Inconnu
Date
Type
Matériau
Localisation

Histoire

L'origine et la destination de ce tableau n'est pas assurée, deux possibilités sont évoquées par les historiens. Soit il aurait été peint en 1575 pour le roi de France Henri III qui l'offre aux échevins d'Orléans pour qu'il soit placé à l'hôtel-de-ville lors de sa visite le , le cartouche ayant été ajouté par la suite. Soit il a été effectivement peint en 1581 pour le compte de la ville d'Orléans sous le mandat du maire François Colas des Francs[1].

Description

Le tableau est une peinture à l'huile sur toile mesurant 128 × 80 cm. Il comporte dans sa partie inférieure un cartellino rédigé en latin désignant La Pucelle et portant la date de 1581. Dans ce portrait civil[2], Jeanne d'Arc est représentée en costume de cour : debout, elle porte une robe blanche décolletée à taille haute, avec des manches à crevés, une large ceinture foncée et décorée et un corsage lacé noir (violet sous le lacet) sur une chemisette blanche. Elle a deux colliers d'or, le plus large est constitué d'entrelacs d'anneaux (allusion à son emprisonnement) et le deuxième d'un jonc tressé. Elle brandit dans la main droite une épée à la lame fleurdelisée (la pointe en l'air symbolisant la Justice rendue) et tient dans la main gauche un mouchoir de linon blanc. Sur sa tête, un béret à panache de plumes blanches est retenu par un ruban noir noué sous le menton[3].

La dédicace en latin qui occupe le bas du tableau est la suivante :

« IN ICONEM IANAE VOCOLAVRIAE VIRAGINIS AVRELIAE •
VIRGO REDIT • GALLO MVTA VEL IMAGINE FOELIX •
QUAM NVUMEN QVONDAM PATRIAE NON MACHINA MISIT
SVBSIDIO • AVGVRIUM BONE REX HENRICE SALVTA •
DE COELIS EXCITA TVIS VIRGO ALTERA VOTIS
FORTVNET REGNI AVSPICIVM • LANCEMQZ RETRACTET
VTRAQZ VT ANTIQVVM TVA SAECLA RECVNDAT IN AVRVM •
G•V•G•PP•1581•
 »

« La Pucelle revient en France, heureuse d'y être, même à l'état de muette image ; Elle qu'autrefois Dieu, et non quelque artifice humain, a envoyé au secours de la patrie : Bon roi Henri, salue cet augure : Qu'une autre Pucelle[4], venue du ciel pour combler tes vœux, rende ton règne fortuné ; et que ces deux Pucelles, en y rétablissant la justice, ressoudent ton siècle à l'antique âge d'or ! - Germain Vaillant de Guelis, de Paimpont[5]. 1581 »

 Traduction proposée par le chanoine Cochard[6] :

Étude iconographique

Le tableau ne peut être considéré comme un portrait réaliste. Longtemps il a été rapproché des représentations de Judith, des théories allant même jusqu'à supposer que le tableau aurait été repris d'une première version dépeignant Judith, le peintre aurait remplacé dans la main gauche la tête d'Holopherne par un mouchoir. Cette thèse a été définitivement rejetée par un examen aux rayons X réalisé en 2016 qui ne montre aucun indice allant dans ce sens[7].

Influence et copies

Ce tableau, recopié plusieurs fois et publié en gravure, notamment par Noël Le Mire, constitue pour de longues années un modèle pour l'iconographie de Jeanne d'Arc, inaugurant même une série qu'on a appelé Les Jeannes empanachées[8]. Cette représentation en robe avec chapeau empanaché, pourtant anachronique pour une femme du XVe siècle, s'impose avec pour seule concurrence la représentation en statue sur le Monument à Jeanne d'Arc sur le pont d'Orléans[9] d'une Jeanne d'Arc agenouillée, en armure et sans couvre chef. La version avec panache connaîtra même un renouveau à l'époque romantique[10]. Elle ne sera définitivement abandonnée qu'après 1860 où les modèles en bergère ou en armure deviendront omniprésents.

Une copie fidèle du tableau d'Orléans peint au XIXe siècle est visible au Musée Louis-Philippe du château d'Eu (Seine-Maritime)[11]. Une autre copie visiblement très inspirée du tableau des échevins se trouve dans les salons de l’Hôtel Groslot, à Orléans, mais l'artiste a mis l'épée dans la main gauche de Jeanne[12].

Notes et références

  1. Oljalvo 1979.
  2. Laurent Salomé, Jeanne d'Arc : les tableaux de l'histoire, 1820-1920, Réunion des musées nationaux, , p. 19.
  3. Michaud-Fréjaville 2005, p. 260.
  4. Il s'agirait d'après Cochard de Louise de Vaudémont, épouse du roi, originaire de Lorraine.
  5. Il s'agit de l'auteur de ce texte, abbé de Paimpont puis évêque d'Orléans (1516-1587), et non du peintre qui aurait fait le tableau.
  6. Théophile Cochard (1836-1914). Publié dans Images de Jeanne d'Arc, catalogue de l'exposition pour le 500e anniversaire de la libération d'Orléans, imprimerie nationale, 1979.
  7. Patrick Peccatte, « Les Figurations sensuelles et érotiques dans l'imagerie de Jeanne d’Arc », article publié sur le site dejavu.hypotheses.org [lire en ligne].
  8. Les genres de Jeanne d'Arc sur le site Musea-univ-angers.fr.
  9. Le monument est édifié vers 1470, détruit par les huguenots en 1562, il est reconstruit aussitôt et disparaît définitivement en 1792 pendant la Révolution française.
  10. Michaud-Fréjaville 2005, p. 269.
  11. Notice no 07140000971, base Joconde, ministère français de la Culture
  12. Jeanne au panache sur le site Orleansmaville.fr.

Voir aussi

Bibliographie

  • Images de Jeanne d’Arc. Hommage pour le 550e anniversaire de la libération d’Orléans et du Sacre, catalogue de l'exposition à Paris, Hôtel de la Monnaie, 1979.
  • Adrien Harmand, Jeanne d'Arc : ses costumes, son armure : essai de reconstitution, Paris, imprimerie Aulard, librairie Ernest Leroux, , 403 p.
  • Jean Maurice (dir.) et Daniel Couty (dir.), Images de Jeanne d'Arc : actes du colloque de Rouen, 25-26-27 mai 1999, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Études médiévales » (no 1), , VIII-281 p. (ISBN 2-13-049952-X).
  • Françoise Michaud-Fréjaville, « Jeanne aux panaches romantiques », Cahiers de recherches médiévales, Orléans / Paris, CEMO / Honoré Champion, no 12 « Une ville, une destinée : Orléans et Jeanne d'Arc. En hommage à Françoise Michaud-Fréjaville », , p. 259-272 (lire en ligne).
  • David Ojalvo, « Deux "portraits" de Jeanne d’Arc du Musée historique d’Orléans », Bulletin de la Société Archéologique et Historique de l'Orléanais, Société archéologique et historique de l'Orléanais, no 49, , p. 143-152.
  • François Pupil, « Une image envahissante », dans Philippe Martin (dir.), Jeanne d'Arc : les métamorphoses d'une héroïne, Nancy, Éditions Place Stanislas, , 177 p. (ISBN 978-2-35578-035-6), p. 46-59.

Articles connexes

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