Joachimisme
Le Joachimisme (dont les membres sont appelés Joachimites ou Spirituels, ce dernier moment pouvant cependant susciter la confusion en raison de ses nombreux autres usages) est un courant millénariste, né des Franciscains et disciples de l'abbé Joachim de Flore, initiateur d'un mouvement hétérodoxe apparu au XIIe siècle, qui proposera au XIIIe siècle la stricte observance de la Règle franciscaine. Cette période est considérée comme l'une des plus douloureuses pour l'ordre franciscain.
Inspiration de Joachim
Les œuvres de Joachim divisent l'histoire en trois âges. Le premier est l'âge du père, l'âge de l'Ancien Testament, le deuxième l'âge du Fils, donc le monde du christianisme. Le troisième et âge final serait celui du Saint-Esprit. Dans cet âge ultime un nouvel «évangile éternel» serait révélé « accomplissant » et remplaçant l’Église organisée, après quoi la société serait refondée sur une base utopique d'égalité et de monachisme. Le premier âge est dit avoir duré quarante-deux générations, ainsi que le deuxième. Joachim semblait suggérer que l'ère chrétienne prendrait fin en 1260 avec la venue de l'Antéchrist. Alors surviendrait l'âge utopique.
Initialement, Joachim ne fut pas condamné, et des efforts récents ont même été faits pour sa canonisation, car on diverge sur le sens de ce qu'il proférait. Plusieurs lectures estiment que l'âge utopique évoque le Ciel proprement dit, et prendrait place après la Seconde venue du Christ, après l'Antéchrist et les Tribulations. Dire qu'alors, l’Église ne serait plus nécessaire, devient acceptable.
Controverse
En 1215, certaines de ses idées ont été condamnées par le concile de Latran IV. En outre, ses admirateurs en sont venus à croire que cette nouvelle ère allait commencer avec l'arrivée d'un Pape vertueux de l'ordre franciscain. Ils ont considéré que Célestin V était ce pape. Sa démission puis sa mort subséquente dans les cachots du prochain pape Boniface VIII ont été vues comme un signe de la venue de l'Antéchrist. Dans le même temps, ou peu avant, ils décidèrent même que les écrits de Joachim constituaient en fait l'Évangile éternel, ou en montraient la voie. Les papes étant désormais considérés par eux comme l'Antéchrist et l'Église comme la prostituée de Babylone, l'Église catholique romaine en vint à traiter les membres de ce groupe comme des agents du mal sévèrement réprimés.
Influences
Les idées des Joachimites eurent une influence sur de nombreux mystiques et théologiens ultérieurs, notamment les frères du Libre-Esprit, dont la conception de l'histoire a des ressemblances notables, les Ranters (en) et l'hérésie des dolciniens puis sur des mouvements protestants comme celui des Shakers.
Au vingtième siècle, elles se retrouvent dans le personnalisme de Nicolas Berdiaieff. Plus récemment encore, certains groupes chrétiens New Age, tels que la Congrégation de Mita (en) et le Mouvement du Saint Esprit (en), ont pu s'inspirer du Joachimisme. Il est possible, enfin, d'opérer quelques rapports entre ce courant et le marxisme, en particulier pour le concept de dictature du prolétariat.
Références
- Bernard McGinn, The Calabrian Abbot: Joachim of Fiore in the History of Western Thought (New York, MacMillan, 1985).
- Marjorie Reeves, The Influence of Prophecy in the Later Middle Ages: A Study in Joachimism (Notre Dame (IN), University of Notre Dame Press, 1993).
- Lerner, R. E. The Feast of Saint Abraham: Medieval Millenarians and the Jews (Philadelphia, University of Pennsylvania Press, 2000).
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