Joseph Lebeau
Joseph Lebeau (Huy, -, Huy) est un homme politique belge, de tendance libérale, qui fut de facto le chef de l'exécutif du royaume de Belgique du au .
Pour les articles homonymes, voir Lebeau.
Joseph Lebeau | |
Joseph Lebeau (ca. 1855). | |
Fonctions | |
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Chef de cabinet belge | |
– | |
Monarque | Érasme-Louis Surlet de Chokier (Régent) Léopold Ier (Roi) |
Gouvernement | Lebeau I |
Coalition | Parti catholique - Libéral |
Prédécesseur | Étienne de Gerlache |
Successeur | Félix De Mûelenaere |
– | |
Monarque | Léopold Ier |
Gouvernement | Lebeau II |
Coalition | Libéral |
Prédécesseur | Barthélémy de Theux |
Successeur | Jean-Baptiste Nothomb |
Gouverneur de la province de Namur | |
– | |
Prédécesseur | Goswin de Stassart |
Successeur | Édouard d'Huart |
Biographie | |
Date de naissance | |
Lieu de naissance | Huy (Liège) |
Date de décès | |
Lieu de décès | Huy (Belgique) |
Nationalité | belge |
Parti politique | Libéral |
Diplômé de | ULg |
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Chefs de cabinet belges | |
Biographie
Activiste libéral de Liège
Joseph Lebeau est né à Huy en 1794. Joseph Lebeau descend en ligne directe de Jehan le Bel (de la maison d'Isle de la Cange). Les Le Beau de Hemricourt descendent du frère de Joseph Lebeau. Son éducation est confiée à un de ses oncles maternels, qui est prêtre. Malgré cette éducation, il s'inscrit en 1819 à la loge maçonnique de Huy, « les Amis de la parfaite intelligence ». En , il passe son doctorat en droit à l'université de Liège. Il commence alors à se passionner pour la politique, notamment pour les discours de Manuel et de Royer-Collard, rapportés dans les journaux.
Il fonde alors à Liège avec Charles Rogier, Firmin Rogier et Paul Devaux un journal libéral, le Matthieu Lansbergh, qui devient ensuite le Politique. Peu à peu, ce journal en vient à prôner l'union des catholiques et des libéraux contre Guillaume Ier des Pays-Bas. À cette époque, il écrit aussi un livre, Observations sur le pouvoir royal, qui défend la limitation des pouvoirs du souverain.
Député au Congrès national
À la révolution de 1830, Charles Rogier part pour Bruxelles où il devient ministre du gouvernement provisoire. Le 30 septembre, Lebeau est nommé avocat général à Liège, à la place de Charles Nicolas Joseph de Warzée d’Hermalle. Dans le courant du mois d'octobre, il soutient le projet de donner le trône de Belgique au prince d'Orange[1]. En novembre, il est élu député au Congrès national.
Il prend parti en janvier 1831 contre la candidature de Louis d'Orléans au trône de Belgique. Il a en effet compris que le soutien du Royaume-Uni est indispensable pour pérenniser l'indépendance de la Belgique et que cette puissance n'accepterait qu'elle prenne pour souverain le fils du roi des Français. Il soutient donc Auguste de Leuchtenberg. La majorité se rallie cependant à Louis d'Orléans, mais le roi Louis-Philippe refuse l'offre.
Chef de cabinet
C'est alors qu'Étienne de Sauvage, nommé par Érasme-Louis Surlet de Chokier pour former un gouvernement, fait appel à Joseph Lebeau. Celui-ci accepte à condition que Paul Devaux soit également membre du gouvernement. Cette proposition se heurte dans un premier temps à la volonté de Surlet de Chokier. En effet, celui-ci, persistant à croire que le soutien de Paris seul était nécessaire à la jeune Belgique, ne voulait pas de deux partisans des thèses opposées dans son gouvernement. Pourtant, de Sauvage réussit à le convaincre et forme son exécutif. Il est composé de :
- Étienne de Sauvage, ministre de l'Intérieur,
- Charles de Brouckère, ministre des Finances (remplacé par Auguste Duvivier le ),
- Antoine Barthélemy, ministre de la Justice,
- le colonel Constantin d'Hane-Steenhuyse, ministre de la Guerre (remplacé par Amédée de Failly le ),
- Joseph Lebeau, ministre des Affaires étrangères,
- Paul Devaux, ministre sans portefeuille.
Ce gouvernement n'a officiellement pas de chef, mais Joseph Lebeau en assure la direction de facto. Tout d'abord, il entreprend de trouver un roi à la Belgique. Paul Devaux lui suggère la candidature de Léopold de Saxe-Cobourg et Gotha, veuf de la princesse de Galles et oncle maternel de l'héritière du trône britannique (la future reine Victoria), et il se rallie immédiatement à ce choix. Lord Palmerston soutient cette idée et fait savoir à Lebeau que dans cette hypothèse, la Belgique pourrait récupérer le Luxembourg, que lui refusaient les protocoles de Londres du .
Reste à convaincre le prince lui-même. Celui-ci accepte à condition que la Belgique trouve un arrangement avec les grandes puissances européennes. Il apporte néanmoins son soutien à la diplomatie belge dans ses négociations avec la conférence de Londres, qui accepte finalement que la Belgique puisse acheter le Luxembourg. Jean-Baptiste Nothomb imagine de son côté un stratagème pour récupérer également le Limbourg. En effet, les protocoles de Londres du stipulaient que les Pays-Bas retrouveraient leurs frontières d'avant 1790. Or, à cette date, de nombreuses enclaves existaient à l'intérieur des Provinces-Unies, que Nothomb espérait pouvoir échanger contre le Limbourg. Le , la conférence de Londres édicte le Traité des XVIII articles, qui permet à la fois le rachat du Luxembourg et l'échange du Limbourg.
Le prince Léopold déclare qu'il accepte le trône de Belgique si le Congrès national ratifie ce traité. Joseph Lebeau doit alors utiliser tous ses talents d'orateur pour défendre le texte devant le Congrès, radicalement opposé à toute négociation concernant l'intégrité du territoire belge. Pour le convaincre, il annonce même solennellement qu'il quitterait le pouvoir une fois le traité ratifié. Il reçoit l'appui de certains députés, tel Félix De Mûelenaere. Les débats, qui durent plusieurs jours, s'achèvent le 9 juillet avec la ratification du traité par 126 voix contre 70.
Joseph Lebeau part alors pour Londres proposer officiellement la couronne au prince Léopold. Après son intronisation, celui-ci demande à Lebeau de constituer un gouvernement. L'homme refuse, tenu par son engagement vis-à-vis du Congrès, et il recommande au roi Félix De Mûelenaere. Il retrouve à Liège son poste d'avocat général.
Campagne des Dix-Jours
Le 2 août, le roi, alors à Liège pour sa Joyeuse Entrée, apprend que les troupes hollandaises marchent sur la Belgique. Il réalise que l'appui de la France et du Royaume-Uni est indispensable pour résister, mais ne peut lui-même faire appel aux puissances étrangères en vertu de la constitution (article 121). Comme alors le Congrès est dissous et que les nouvelles chambres ne sont pas encore élues, il fait appel à Joseph Lebeau, qui n'est même plus ministre, pour rédiger une demande d'aide à Londres et à Paris. L'homme politique s'exécute et accepte ensuite de devenir ministre sans portefeuille.
L'attaque hollandaise entraîne des défaites locales et le recul général des troupes belges. Voulant éviter de connaître les risques d'une guerre de rues comme en , les Hollandais contournent la capitale par l'est, mais l'arrivée de l'armée française appelée par le roi Léopold Ier et Lebeau les contraint à se retirer dans la place forte d'Anvers. Dès la fin des hostilités, à la prise d'Anvers, Lebeau démissionne et retourne à Liège.
Il est à nouveau ministre dans le gouvernement d'Albert Goblet d'Alviella (ministre de la Justice, 1832-1834). Il est ensuite gouverneur de la province de Namur, tout en restant député. Il convainc les parlementaires à ratifier le Traité des XXIV articles qui établit définitivement l'indépendance de la Belgique reconnue et garantie par les grandes puissances. Après la signature du traité par Guillaume Ier des Pays-Bas Joseph Lebeau se retire provisoirement de la vie politique parlementaire en prenant prétexte que sa relation avec le chef du gouvernement Barthélémy de Theux de Meylandt était devenue conflictuelle. Celui-ci le nomma ambassadeur de Belgique auprès de la Diète de Francfort.
Premier gouvernement libéral homogène
Il est rappelé au pouvoir par le roi en 1840 et met en place le premier gouvernement libéral homogène (Mathieu Leclercq à la Justice, Édouard Mercier aux Finances, Charles Liedts à l'Intérieur, Charles Rogier aux Travaux publics et aux Beaux-Arts et le général Gérard Buzen à la Guerre). Ce gouvernement est marqué par des dissensions entre le roi et le chef du gouvernement et surtout par l'opposition du Sénat aux mains des catholiques. Ceci pousse finalement Lebeau à remettre sa démission un an à peine après la constitution du gouvernement.
Il refuse en 1851 l'offre du roi de revenir au pouvoir. Il renonce à son mandat de député en 1863. Il retourne à Huy après les élections de 1864 et y meurt en mars 1865.
Œuvres
- Jean Bartelous, Nos Premiers Ministres, de Léopold Ier à Albert Ier, Bruxelles, J.M. Collet,
- Carlo Bronne, Joseph Lebeau, Bruxelles, La Renaissance du livre, coll. « Notre passé », , 114 p.
- Fernand Daxhelet, Joseph Lebeau, Bruxelles, Charles Dessart,
- Théodore Juste, Joseph Lebeau d'après des documents inédits, Bruxelles, C. Muquardt,
Hommages
- À Bruxelles, la rue Joseph Lebeau[2] porte son nom depuis 1891 et sa statue se dresse avenue de Tervueren à Woluwé-Saint-Pierre.
- À Liège, la rue Lebeau fait face à la rue Paul Devaux ; les deux rues sont adjacentes à l'avenue Rogier.
- À Huy, une statue de Joseph Lebeau, par Guillaume Geefs est installée en 1868, à l'extrémité de l'avenue Joseph Lebeau.
Notes et références
- Jean Stengers, Histoire du sentiment national en Belgique des origines à 1918, tome 1, Les Racines de la Belgique, éditions Racine, Bruxelles, 2000 (ISBN 2-87386-218-1), p. 198.
- http://www.ebru.be/Streets/bruxelles-1000-rue-joseph-lebeau.html
Liens externes
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