Marie-Madeleine de Pazzi

Marie-Madeleine de Pazzi (en italien : Maria Maddalena de’ Pazzi), en religion sœur Marie-Madeleine (en italien : Maria Maddalena ), née le à Florence et morte le dans la même ville, est une carmélite de l'ancienne observance (ou carmélite chaussée), grande mystique, dont la spiritualité et les écrits ont profondément influencé la société de Florence du XVIIe siècle.

Pour les articles homonymes, voir Sainte Marie-Madeleine.

Marie-Madeleine de Pazzi

La Vision de sainte Marie-Madeleine de Pazzi (vers 1640-1674), huile sur toile de Pedro de Moya, musée des Beaux-Arts de Grenade.
Sainte, mystique
Naissance
Florence, république de Florence
Décès   (41 ans)
Florence, grand-duché de Toscane
Nom de naissance Caterina de' Pazzi
Nationalité Italienne
Ordre religieux Grands Carmes (O-Carm)
Vénéré à couvent des carmélites, Florence
Béatification
par Urbain VIII
Canonisation
par Clément IX
Vénéré par l'Église catholique romaine, ordre du Carmel, à Florence
Fête 25 mai

Béatifiée en 1626, elle est canonisée par le pape Clément IX le . Elle est fêtée le 25 mai.

Si la sainte jouit d'une grande notoriété et influence, y compris en France, au XVIIIe siècle, celle-ci se perd après la Révolution française. De nos jours plusieurs publications lui sont consacrées.

Biographie

Enfance et spiritualité

Attribué à Santi di Tito, Sœur Marie-Madeleinede Pazzi à l'âge de 16 ans, avant son entrée au Carmel (1583), localisation inconnue.

Catherine de Pazzi est née le dans une famille de la haute noblesse Florentine, les Pazzi, dont un ancêtre avait été le premier à entrer à Jérusalem lors de la Première croisade. Elle est aussi apparentée à Francesco de Pazzi, chef de la Conjuration des Pazzi. Elle est la seconde enfant de Camillo di Geri de' Pazzi et de son épouse, née Maria Buondelmonti; elle a eu trois frères.

Très jeune, elle mène une vie de piété et d'oraison. Elle a deux jésuites comme directeurs spirituels et confesseurs, les Pères Rossi et Blanca. Ils lui enseignent la prière et l'instruisent dans la foi chrétienne. Lorsqu'elle fait sa première communion (à l'âge de 10 ans), elle fait vœu, secrètement, d'entrer dans les ordres[1]. Elle a sa première extase mystique à l'âge de 12 ans. Elle est pensionnaire à deux reprises chez les Chevalières de Malte, à San Giovannino, de 1574 à 1578 et de 1580 à 1581[2].

Elle continue son éducation dans un couvent franciscain de Cortone où elle apprend à connaître la spiritualité de François d'Assise qu'elle qualifie plus tard de « père spirituel », tandis qu'elle considère sainte Claire comme son « avocate ». Mais ses parents, s'opposant à sa vocation religieuse, l'en retirent deux ans après afin de la marier.

Entrée au Carmel

Catherine refuse le mariage, elle va même jusqu'à dire à son père : « Je livrerais plutôt ma tête au bourreau, que ma chasteté à un homme »[1]. Ses parents finissent par céder, et Catherine peut entrer au Carmel à Sainte-Marie-des-Anges (le plus ancien couvent de l’ordre) le , alors qu'elle n'a que 16 ans, quelques semaines après la mort de la carmélite espagnole Thérèse de Jésus. Elle prend le nom de sœur Marie-Madeleine[2]. Catherine a choisi ce couvent car c'est l'un des rares à avoir obtenu le privilège que les religieuses communient chaque jour[3].

Elle est encore novice quand elle tombe gravement malade. Les religieuses craignant pour sa vie, et redoutant qu'elle ne meure bientôt, lui font prononcer ses vœux de religieuse avant le terme normal de son noviciat[4]. Mais sœur Marie-Madeleine survit et tombe dans un ravissement durant quarante jours[3].

Vie au Carmel

Le carmel de Sainte-Marie-des-Anges, à l’époque où y vécut Marie-Madeleine, comptait presque quatre-vingts religieuses. Plusieurs moniales avaient un haut profil spirituel, comme la mère Evangelista del Giocondo, ou Pacifica del Tovaglia l’une des « secrétaires » et amies de la sainte. Marie-Madeleine est d’abord vicaire pour l’accueil des jeunes filles qui fréquentaient la maison d’hôtes (1586-1589)[2]. À partir de 1589, elle participe, à des titres variés, à la formation des novices. Elle devient sous-prieure du couvent en 1604.

Elle vit dans la plus extrême austérité, s'adonnant à la prière et à la méditation, s'infligeant des mortifications permanentes. Elle a un grand souci des pauvres, et prie sans cesse pour les prêtres, pour le renouveau spirituel de l'Église. À titre de pénitence, durant cinq années, elle ne se nourrit que de pain, à l'exception des dimanches où elle consomme d'autres nourritures, en se limitant à ce qui est autorisé pendant le Carême[5].

Vie mystique et mort

Elle bénéficie de grandes grâces mystiques et éprouve de profondes extases. Elle s'adonne beaucoup à la dévotion du Précieux Sang de Jésus-Christ.

De 1585 à 1590, elle vit une longue période de sécheresse spirituelle qui ne s'achève que le jour de la Pentecôte. Ses sœurs carmélites racontent que plusieurs fois, tout en étant en extase, elle poursuivait normalement ses travaux quotidiens[3]. Elle a laissé de nombreux écrits. De son vivant, plusieurs miracles lui sont attribués qui la rendent célèbre, ainsi qu'après sa mort par son intercession[5].

Épuisée par ses jeûnes et ses intenses mortifications, elle tombe malade et passe ses trois dernières années de manière très tourmentée. Elle meurt le à l'âge de 41 ans[2].

Culte de la sainte et canonisation

Sépulture et reliques

À sa mort, elle est enterrée dans le chœur de l'église du monastère[6]. Lorsque les religieuses quittent leur couvent sous Napoléon Ier[7], elle récupèrent la dépouille de la sainte pour l'installer dans leur nouveau couvent. Le corps de sainte Marie-Madeleine est aujourd'hui exposé dans un cercueil de verre dans le couvent des carmélites de Florence, sur les collines surplombant la ville. Sa dépouille n'est pas à proprement parler incorrompue, car si le corps est conservé en intégralité, la peau est brune et dure, elle semble comme pétrifiée[8]. Sainte Marie-Madeleine de Pazzi jouit d'une très forte vénération à Florence[3].

Béatification et canonisation

Déjà de son vivant, ses sœurs et les Florentins la considéraient comme une sainte. Son procès en béatification est ouvert dès 1611 (soit quatre ans après sa mort).

Le , elle est béatifiée par le Pape Urbain VIII. Elle est canonisée par le Pape Clément IX le . Sa biographie par Vincenzo Puccini a été traduit en français en l'honneur de sa canonisation et illustrée par Abraham Diepenbeek.[9] Son corps est resté in-corrompu jusqu'à présent[5].

Sa fête a été fixée au 25 mai. Dans l'Ordre du Carmel, sa fête est célébrée avec rang de mémoire[10].

Jusqu'au XVIIIe siècle

Au XVIIe siècle, elle jouissait d’une grande popularité en France, grâce aux Carmes de la Réforme de Touraine qui firent connaître sa vie et son message. Le Père Léon de Saint-Jean a rédigé plusieurs ouvrages dont une biographie de sainte Marie-Madeleine de Pazzi rééditée six fois jusqu'en 1669.

Mais au XVIIIe siècle, la Révolution française chasse de France les Carmes qui transmettaient le message et la vie de la sainte florentine. Il y eut cependant plusieurs traductions d'ouvrages au cours du XIXe siècle. En 1837, paraissait la Vie de sainte Marie-Madeleine de Pazzi qui fait l'objet de cinq éditions successives. En 1873, Dom Anselme Bruniaux publie les Œuvres de sainte Marie-Madeleine de Pazzi. Au XXe siècle, nous avons la biographie de Sainte Marie-Madeleine de Pazzi par Maurice Vaussard qui connaît trois éditions de 1921 à 1925. Et enfin, du même auteur, Extases et lettres de Sainte Marie-Madeleine de Pazzi, modeste recueil d’écrits de la Sainte.

De nos jours

À partir des années 2000, sortent de nombreux titres : Les Quarante Jours, Les Huit jours de l’Esprit Saint, Cinq ans dans la fosse aux lions. Les trois extases de la Passion de Jésus (collection Flèche de feu aux Éditions de l’Abbaye de Bellefontaine). La revue Mélanges carmélitains a également publié deux articles dédiés à la sainte dans les numéros 1 (2003) et 3 (2005)[11].

Lors du quatrième centenaire de sa mort, le Pape Benoît XVI a dit dans son homélie du que Marie-Madeleine demeurait encore aujourd'hui : « une source d’inspiration spirituelle des carmélites de l’antique observance, qui voient en elle la sœur qui a parcouru tout entière la voie de l’union transformante en Dieu, et qui désigne Marie comme « l’étoile » du chemin vers la perfection ». Et qu'elle était : « pour tous, cette grande sainte (qui) a le don d’être une maîtresse de spiritualité, particulièrement pour les prêtres envers lesquels elle a toujours nourri une véritable passion »[12].

Citations

  • Prière de sainte Marie-Madeleine de Pazzi au Saint Esprit : « L'Esprit pénétrant vient dans l'âme comme une source qui la submerge. De même que deux fleuves jaillissants se mêlent de telle façon que le plus petit perde son nom et prenne celui du plus grand, c'est ainsi que cet Esprit divin agit quand il vient dans l'âme pour s'unir à elle. Il faut que l'âme, qui est la plus petite, perde son nom et s'abandonne à l'Esprit. C'est ce qui se produira si elle se tourne vers l'Esprit pour ne plus faire qu'un avec Lui. Par l'élan de l'amour, l'Esprit, qui est à la fois immobile et très mobile, s'introduit en nous ».
  • À propos du Précieux Sang : « Le mardi 3 juillet, ayant communié, j’entendis Jésus m’appeler : " Viens, ma colombe, ma belle, viens " (Ct 2,13-14). Puis l’Amour unitif me dit : " Toutes les âmes qui ont part au Sang de Jésus sont belles ", et je compris que si une âme pouvait connaître l’importance et le prix que lui donne la participation aux mérites de ce Sang et à l'amour de Dieu, elle se fondrait de douceur. À l’inverse, eût-elle connaissance de ce qu’elle est sans l’amour de Dieu et privée des mérites de ce Sang, dans l’excès de sa douleur, elle deviendrait poussière et moins que poussière »[13].
  • Marie-Madeleine à ses sœurs : « Ne sentez-vous pas combien il est doux de nommer la Volonté de Dieu ? Mes sœurs, oh ! que la Volonté de Dieu est aimable ! »[1].
  • « Je quitterai le monde sans avoir pu comprendre comment la créature peut se résoudre à commettre un péché contre son Créateur »[1].
  • « Si je savais qu'en disant une parole à une autre fin que pour l'amour de Dieu, je dusse devenir plus grande qu'un Séraphin, je ne le ferais jamais »[1].
  • Ses dernières paroles furent adressées à ses sœurs : « Je vous prie, au nom de Notre-Seigneur, de n'aimer que Lui seul ! »[1].

Galerie

Publications

  • Marie-Madeleine de Pazzi, Les huit jours de l'Esprit saint : Révélations et lumières, Jérôme Millon, coll. « Atopia », , 237 p. (ISBN 978-2-84137-161-7, lire en ligne).
  • Marie-Madeleine de Pazzi, Cinq ans dans la fosse aux lions : 1585, Jérôme Millon, coll. « Atopia », , 274 p. (ISBN 978-2-84137-132-7, lire en ligne).
  • Marie-Madeleine de Pazzi, Les Quarante Jours, Jérôme Millon, (1re éd. 1584 (édition établie et annotée par Gianfranco Tuveri), 217 p. (ISBN 978-2-84137-132-7, lire en ligne).
  • Marie-Madeleine de Pazzi et frère Gianfranco Maria Tuveri, Les trois extases de la passion de Jésus, Éditions de l'Abbaye de Bellefontaine, coll. « Flèche de feu », , 160 p. (ISBN 978-2-85589-805-6).

Notes et références

Sources

  • Abbé L. Jaud, Vie des saints pour tous les jours de l'année, Tours, Maison Alfred Mame et Fils, .

Notes

  1. « Sainte Marie-Madeleine de Pazzi », sur magnificat.ca, Magnificat Canada (consulté le ). Tiré de l'ouvrage de l' abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950.
  2. Chiara Vasciaveo, « Marie-Madeleine de' Pazzi, le trésor caché de l'Église », sur 30giorni.it, 30 Jours, (consulté le ).
  3. (en) « Mary Magdalene de Pazzi », sur carmelitanacollection.com, Carmelitana Collection (USA) (consulté le ).
  4. Une procédure d'urgence existait dans l'ordre, et existe toujours, permettant à une religieuse en formation de faire ses vœux définitif rapidement afin de mourir carmélite. Cependant, de nos jours, si la religieuse se rétablit, elle doit poursuivre sa formation et prononcer à nouveau ses vœux au terme normal de sa formation (ce qui ne fut pas fait à l'époque). Voir par exemple Thérèse des Andes.
  5. R. P. Dom Prosper Guéranger, abbé de Solesmes, L’Année liturgique : Le Temps pascal, t. 3, H. Oudin, , 12e éd., 600 p. (lire en ligne), p 578-583.
  6. Le couvent Sainte-Marie-des-Anges a été fermé en 1808, un temps séminaire de l'archidiocèse de Florence, il est aujourd'hui utilisé par différentes associations culturelles.
  7. Napoléon Ier fait fermer le couvent et expulse les carmélites.
  8. La conservation du corps est parfois considérée comme miraculeuse, mais dans ce cas précis, il n'y a pas eu d'étude ou de déclaration officielle.
  9. Vincenzo Puccini, La Vie de Sainte Marie Magdelene de Pazzi, Religieuse Carmelite de l’Ancienne Observance du Monastere de Sainte Marie des Anges, à Florence, Paris, Chez Sebastien Cramoisy, (lire en ligne)
  10. Les heures du Carmel (trad. du latin), Lavaur, Éditions du Carmel, , 347 p. (ISBN 2-84713-042-X), p58
  11. « Présentation de Sainte Marie Madeleine de Pazzi », sur carm-fr.org, Les Grands Carmes de France (consulté le ).
  12. Lettre du pape Benoît XVI du 29 avril 2007 à l'occasion du IVe centenaire de la mort de sainte Marie-Madeleine de Pazzi
  13. Extrait du livre Les Quarante jours (d'extases)

Annexes

Bibliographie

  • Gianfranco Maria Tuveri, La sainte flamme : Sur les pas de sainte Marie-Madeleine de Pazzi, Les Plans-sur-Bex (Suisse)/Paris, Parole et Silence, coll. « Grands Carmes », , 193 p. (ISBN 978-2-84573-686-3).
  • Virgilio Cepari, Vie de Sainte Marie Madeleine de Pazzi, Nabu Press, , 282 p. (ISBN 978-1-248-93110-3).
  • (fr + en) Gregoire De Saint-Martin, Vie de Sainte Marie Madeleine de Pazzi, Carmélite, Nabu Press, , 598 p. (ISBN 978-1-289-79691-4).
  • M.-M. Vaussard et Maurice Vaussard, Extases et lettres : De sainte Marie-Madeleine de Pazzi, Seuil, .
  • Mélanges carmélitains : Histoire, mystique et spiritualité, vol. 1, Pierre Téqui, (ISBN 978-2-7403-1052-6), Article du Frère Gianfranco M. Tuveri : La prière au Carmel : sainte Marie Madeleine de Pazzi (1566-1607).
  • Mélanges carmélitains : Histoire, mystique et spiritualité, vol. 3, Pierre Téqui, (ISBN 2-7403-1224-5), Article du Père Gianfranco Tuveri : Marie-Madeleine de Pazzi et Thérèse de l’Enfant-Jésus, Sœurs dans l’Esprit.

Liens externes

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