Martinus Gosia
Martinus Gosia, né vers 1100 à Bologne ou Crémone[1], mort en 1166 ou 1167 à Bologne, est un juriste italien, professeur de droit à Bologne, illustre représentant de l'école des « glossateurs ». Sa profonde connaissance du droit le fit surnommer Copia legum.
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Il est l'un des « quatre docteurs » de Bologne, supposés avoir été les disciples directs d'Irnerius, fondateur de la première école de droit de Bologne vers 1085. Les autres sont Bulgarus, Jacobus de Boragine et Hugo de Porta Ravennate. Il commença son activité d'enseignement vers 1125, étant aussi, comme ses collègues, avocat et conseil juridique. Le rôle des « quatre docteurs » fut notamment important auprès de l'empereur Frédéric Barberousse : celui-ci rencontra les doctores et les discipuli bolonais pendant son premier voyage en Italie, en mai 1155, et surtout ce sont les juristes de Bologne, réunis en commission (avec vingt-huit représentants des cités lombardes), qui rédigèrent la constitution impériale adoptée dans la diète de Roncaglia (constitution De regalibus, ). Cette législation, inspirée du Corpus juris civilis de l'empereur Justinien, base de l'enseignement des écoles de Bologne, consacrait l'empereur germanique comme l'héritier de la plenitudo potestatis des empereurs romains, ce qui suscita des réactions très négatives dans de nombreuses cités italiennes. Cependant, la ville de Bologne elle-même était alors du parti de l'empereur (et n'adhéra à la Ligue lombarde qu'à l'automne 1167). C'est en 1155 ou 1158 que Frédéric Barberousse, répondant à une pétition des maîtres et étudiants bolonais, promulgua l'authentica « Habita », charte de protection et texte fondateur pour l'Université de Bologne et ensuite toutes les universités européennes.
Dans l'histoire de l'école des « glossateurs » de Bologne, l'opposition entre Martinus Gosia et son collègue Bulgarus est restée célèbre. Martinus se référait non seulement au droit romain, mais aussi au droit canonique[2], voire au droit germanique, et préconisait des solutions juridiques conformes à la notion souple d'équité[3] ; Bulgarus défendait l'exclusivité du droit romain, raison d'être des écoles de Bologne, et l'application stricte des règles écrites. Martinus pensait, comme les canonistes, que le « droit naturel » (l'une des trois subdivisions du droit, avec le droit des gens et le droit civil) se confondait avec les prescriptions bibliques, alors que Bulgarus, tenant plus exclusif d'un corpus juridique d'origine essentiellement païenne, soutenait que droit naturel et prescriptions bibliques, bien qu'ayant des points de contact, ne se confondaient pas. Cela étant, le clivage entre les deux écoles n'est pas toujours très clair dans les polémiques postérieures[4]. Par la suite, ce sont les partisans de Bulgarus qui dominèrent l'Université de Bologne, mais les gosiani (dont Placentin, qui alla fonder une école à Montpellier vers 1170) eurent de l'influence notamment en France. Les tombeaux de Martinus et Bulgarus sont placés face-à-face dans l'église Saint-Procule.
Martinus est l'auteur du texte le plus ample qui soit resté des « quatre docteurs », la monographie De jure dotium, sur le droit des dots. Sinon restent ses gloses sur les différentes parties du Corpus juris civilis. L'Apparatus Institutionum est un recueil de ses gloses sur les Institutes.
Bibliographie
- Alfred Hessel, Storia della città di Bologna dal 1116 al 1280, éd. italienne par Gina Fasoli, Bologne, Alfa, 1975 (p. 47-58).
- Gero Dolezalek, « Der Glossenapparat des Martinus Gosia zum Digestum Novum », Zeitschrift der Savigny-Stiftung für Rechtsgeschichte, Romanitische Abteilung, LXXXIV, 1967, p. 245-349.
- André Gouron, « L'influence martinienne en France : sur quelques témoignages précoces de la pratique méridionale », Europäisches Rechtsdenken in Geschichte und Gegenwart. Festschrift für Helmut Coing zum 70. Geburtstag, Munich, 1982, p. 93-112.
Notes
- Il était natif de Bologne selon des indications de Placentin, Guglielmo da Pastrengo, Cino da Pistoia, de Crémone selon une chronique généralement digne de foi, rédigée vers 1200 par un prêtre Jean de Crémone. La première hypothèse peut être faussement déduite du fait qu'il a passé presque toute sa vie à Bologne.
- Selon Hostiensis (Comm. in Decretales) : « Martinus enim spiritualis homo fuit, et secundum tempus quod tunc currebat semper divinæ legi adhærebat contra rigorem juris civilis ».
- Odofrède, hostile à Martinus, parle (in Dig. vet., L. 4, § 5) d'« équité imaginaire et de la bourse » (« Dixit Martinus, de sua ficta æquitate et bursali, propter quas passus est multas verecundias [...] »). L'expression « æquitas bursalis » est d'interprétation incertaine : une équité qu'on fait fléchir avec de l'argent? une équité que l'auteur trouve, non dans les lois, mais dans son propre fonds (bursa)?
- Azon, partisan de Bulgarus, reproche à Martinus de s'attacher à la lettre comme un Juif : « Martinus inhærebat litteræ tamquam Judæus ».
Liens externes
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