Modélisation en Pi des lignes électriques
La modélisation en Pi des lignes électriques permet de représenter le comportement électrique attendu de celles-ci. Elle est basée sur les équations des télégraphistes. Le calcul des paramètres électriques utilisé pour la modélisation repose sur les équations de Maxwell. Le modèle avec une seule section en Pi n'est valable que pour de faibles fréquences et des lignes électriques courtes, dans le cas contraire plusieurs sections en Pi doivent être connectées e série.
Équations des télégraphistes
Une portion de ligne électrique peut être représentée par le quadripole ci-contre où
- La résistance linéique (par unité de longueur) du conducteur est représentée par une résistance série (exprimée en ohms par unité de longueur).
- L'inductance linéique est représentée par une self (Henry par unité de longueur).
- La capacité linéique entre les 2 conducteurs est représentée par un condensateur C shunt (Farad par unité de longueur).
- La conductance linéique du milieu diélectrique séparant les 2 conducteurs est représentée par une résistance shunt (Siemens par unité de longueur). La résistance dans ce modèle a une valeur de ohms.
Dans ce modèle, on définit la tension en tout point éloigné d'une distance x du début de la ligne et à tout instant t la tension et le courant . Les équations s'écrivent :
De la formulation ci-dessus, on peut tirer 2 équations aux dérivées partielles ne faisant chacune intervenir qu'une variable :
Modèle en Pi
Impédance et admittance
En considérant les pertes, l'impédance Zl et l'admittance Yq se calculent comme suit [1]:
Avec la constante de propagation, avec Z' l'impédance linéique de la ligne et Y' l'admittance linéique de la ligne. Et , l'impédance de la ligne. l est la longueur de la ligne.
Pour une ligne sans perte :
Pour une ligne aérienne courte, inférieure à 80 km, on peut négliger les capacitances et simplifier l'impédance [2]:
- ou
Nombre de Pi à utiliser
Une section en Pi n'est constituée que d'éléments concentrés. Avec une seule section, le modèle en Pi n'est valable qu'en basse fréquence pour de faible longueur de ligne. Quand la longueur ou la fréquence augmente, le nombre de sections en Pi à connecter en série pour avoir une modélisation correcte doit être augmenté.
Une ligne peut être considérée comme "courte", c'est-à-dire modélisable avec une seule section en Pi, jusqu'à 200 km pour une ligne aérienne en 50 Hz et de 100 km pour un cable. Le nombre de sections en Pi doit augmenter proportionnellement avec la fréquence et inversement proportionnel à la longueur de ligne[3],[2].
Calcul des paramètres électriques pour une ligne aérienne
Conducteur équivalent
Les lignes à haute tension, surtout à plus de 220 kV, ne possèdent pas un conducteur unique par phase, mais de faisceaux de conducteurs en contenant de 2 à 4 (voir image ci-contre). Il est possible de modéliser un faisceau de conducteurs par un conducteur équivalent de rayon [4]:
Où requivalent est le rayon équivalent du faisceau, rC le rayon des conducteurs, rT le rayon du cercle formé par le faisceau, n le nombre de conducteurs par faisceau (voir image).
Distance inter-faisceaux / conducteur équivalente
Pour un système triphasé, il est possible de définir une distance équivalente entre les conducteurs, ou faisceaux de conducteurs selon le cas, en calculant la moyenne géométrique[anglais 1]. Dans le cas d'un système triphasé simple, elle vaut[5] :
Pour le cas d'un système double (deux lignes triphasés de chaque côté du pylône)[5] :
Résistance de la ligne
La résistance linéaire d'un conducteur à 20 °C est[6] :
Avec la section et la résistivité du matériau conducteur. Pour un conducteur en cuivre la résistivité est de l'ordre de 1,8 x 10-8 Ω∙m pour de l'aluminium de 3 x 10-8 Ω∙m[6].
La résistance de la ligne dépend également de la température :
Où est la coefficient de température et la différence en kelvins entre la température et 20 °C[6].
Dans le cas d'un faisceaux de conducteurs, ces derniers étant en parallèle la résistance doit être divisée par le nombre de conducteurs.
Inductance
L'inductance linéique d'une ligne vaut[7] :
Avec n le nombre de conducteurs par faisceau et la permittivité du conducteur. Dans le cas est égal à 1, on peut définir un rayon équivalent [anglais 2]:
Deux conducteurs
Soit un système constitué d'une ligne aller et d'une ligne retour d'une longueur l, considérer comme très grande devant les autres distances, et espacées d'une distance d. En prenant un contour circulaire autour d'un conducteur de longueur et en y appliquant le théorème d'Ampère on a[8]:
Pour (rayon du conducteur) on obtient : Pour on obtient :
L'énergie contenue dans le conducteur W est égale à :
Où est la perméabilité magnétique du conducteur.
[...]
Or
avec Li l'inductance interne du conducteur.
Donc
En linéique
Maintenant que l'inductance interne est connue, il reste à déterminer l'inductance externe. On prend en compte le champ créé par un seul conducteur entre lui et l'autre conducteur (où le champ s'annule):
Or
Avec le flux magnétique. En linéique :
L'inductance totale extérieure étant celle provoquée par le conducteur aller et le conducteur retour, et l'inductance interne se sommant également on a:
En considérant un perméabilité magnétique égale , l'équation devient:
Système triphasé
Pour un système triphasé on considère un conducteur de retour fictif situé entre les 3 phases. Les équations ci-dessus sont encore applicables, il faut de plus calculer les inductances mutuelles entre phases[8]. Attention les conducteurs sont simples ici, pour le détails avec des faisceaux de conducteur se référer à la note[7].
Avec B1 le champ appliqué sur le conducteur 1 par le courant traversant le conducteur 3.
À partir de d, le conducteur du retour influence le champ. On obtient donc :
Le système étant symétrique M12=M23=M31=M.
L'inductance d'une ligne, Lligne est donc régie par l'équation suivante :
Le système étant triphasé . D'où :
En simplifiant (en linéique):
Valeurs typiques de l'impédance
Ci-dessous quelques valeurs typique pour un réseau 50 Hz avec des conducteurs aluminium / acier de section d'aluminium 240 mm2 et d'acier 40 mm2[9],[10].
Tension de la ligne (kV) | Nombre de conducteurs par faisceau | Impédance (Ω/km) |
---|---|---|
110 | 1 | 0,12 + j0,4 |
220 | 2 | 0,06 + j0,3 |
380 | 4 | 0,03 + j0,25 |
D'autres valeurs pour la résistance seulement[7] :
Tension de la ligne (kV) | Nombre de conducteurs par faisceau | Résistance (Ω/km) |
---|---|---|
70 | 1 | 0,09-0,35 |
110 | 1 | 0,12 |
220 | 2 | 0,04-0,09 |
380 | 4 | 0,03 |
Et l'inductance[7] :
Tension de la ligne (kV) | Nombre de conducteurs par faisceau | Inductance (Ω/km) |
---|---|---|
70 | 1 | 0,2 - 0,4 |
110 | 1 | 0,4 |
220 | 2 | 0,3 |
380 | 4 | 0,25 |
Capacité
Dans un système triphasé, il y a des capacités entre les lignes et la terre, mais également entre lignes. L'objectif est de synthétiser le tout dans une seule capacité "moyenne" Cb égale pour les trois lignes :
Dans laquelle les et sont les permittivité diélectrique du vide et du matériau (dans le cas de l'air pour les lignes vaut environ 1).
On peut démontrer en utilisant le théorème de Kennelly que[7] :
Avec CL la capacité mutuelle et CT la capacité à la terre
Afin de modéliser le potentiel nul de la terre, on utilise le principe des miroirs. C'est-à-dire qu'on modélise des conducteurs fictifs placés de manière symétrique à la terre par rapport aux conducteurs réels et chargés de manière opposée. La terre a alors un potentiel nul.
Soit le cas représenté ci-contre d'un seul conducteur. Le potentiel d'un point Pi arbitraire, distant de aij du conducteur réel et de aij* du conducteur fictif est d'après le théorème de Gauss : [11] :
Le même principe est utilisé pour un système triphasé. Pour chaque point P on a alors l'équation:
En plaçant les pointsi P sur les conducteurs 1, 2 et 3, les potentiels valent alors U1, U2 et U3.
On peut présenter le problème précédent sous forme matricielle : U = M * Q. Avec U le vecteur des tensions des 3 conducteurs, Q les 3 charges et M une matrice constitué des pour i et j allant de 1 à 3.
Le système est considéré symétrique (voir commutation des phases) :
Et
Une distance équivalente égale à la moyenne géométrique entre faisceaux est calculée avec la méthode présentée ci-dessus pour le système réel, notée D, et le système fictif, notée D*. Une hauteur moyenne géométrique est également définie :
Par ailleurs tous les conducteurs ont le même rayon r. Les termes diagonaux valent donc Et tous les autres termes .
En résolvant le système matriciel, on obtient : avec i=1..3.
En approximant D* par , on obtient :
d'où :
Par définition :
Conductance
Une résistance doit être représentée en parallèle aux capacités pour être complet. Elle est due au effet corona et aux fuites de courant (causées par la pollution sur les isolateurs par exemple). Pour une ligne de 380 kV elle vaut[12] :
Temps sec | Temps humide |
---|---|
3 nS/km | 30 nS/km |
Valeurs typiques de l'admittance
Ci-dessous quelques valeurs typiques pour un réseau 50 Hz[13].
Tension de la ligne (kV) | Nombre de conducteurs par faisceau | Admittance (uS/km) |
---|---|---|
110 | 1 | 3 |
220 | 2 | 3,9 |
380 | 4 | 4,3 |
Calcul des paramètres électriques pour un câble
Admittance
Pour les câbles, les calculs de résistance et d'inductivité sont identiques[14]. La capacité vaut :
Avec r1 le rayon de l'âme et r2 le rayon intérieur de l'écran. La capacité entre les lignes est négligeable.
La conductance est égale à[14]:
Quelques valeurs typiques[14],[7],[15] :
Tension de la ligne (kV) | Résistance (Ω/km) | Réactance (Ω/km) | Admittance ((uS/km) |
---|---|---|---|
36 | 0,06-0,16 | 0,10 - 0,17 | 40 -120 |
150 | 0,03-0,12 | 0,12 - 0,22 | 30 - 70 |
Type d'isolation du câble | ||
---|---|---|
Papier imprégné | 2 - 3 10−3 | 3,3-3,5 |
PVC | 3,5 - 8,0 | |
Éthylène propylène | 2,8 - 3,5 | |
Polyéthylène | 0,2 - 0,5 10−3 | 2,2-2,3 |
Polyéthylène réticulé | 2,3 - 6 |
La norme IEC 60287-1-1 fournit de nombreuses formules pour le calcul des paramètres électriques des câbles.
Transposition des lignes
La capacité ligne-terre dépend de la hauteur à laquelle se trouve le conducteur ou faisceau de conducteur. Dans les exemples précédents, un de ces conducteurs se trouve plus haut que les deux autres. Si rien n'est fait, la capacité de cette phase vis-à-vis de la terre serait différente de celle des deux autres phases, ce qui n'est pas souhaitable pour un système triphasé symétrique[16],[7].
Pour résoudre le problème, on commute les phases entre elles à intervalle régulier au moyen d'un pylône de transposition. Pour des lignes d'une longueur inférieure à 200 km deux transpositions, ce qui permet à chaque ligne d'avoir en moyenne le même comportement capacitif, suffisent[16]. Les courants induits par les trois phases se compensent alors.
Voir aussi
Références
- Kindersberger 2009, p. 232
- (en) « Modeling of Transmission Lines » (consulté le )
- Kindersberger 2009, p. 234
- Kindersberger 2009, p. 196
- Kindersberger 2009, p. 197
- Kindersberger 2009, p. 199
- Thierry Van Cutsem, Analyse et fonctionnement des systèmes d'énergie électrique, université de liège, (lire en ligne)
- Kindersberger 2009, p. 200
- Kindersberger 2009, p. 204
- Autres valeurs d'impédance sur <(en) Analysis of System Transients Working Group, Modeling Guidelines for Switching Transients, IEEE, (lire en ligne)
- Kindersberger 2009, p. 208
- Kindersberger 2009, p. 213
- Kindersberger 2009, p. 212
- Kindersberger 2009, p. 223
- (en) Houssem Rafik et El- Hana Bouchekara, Transmission and Distribution of Electrical Power, (lire en ligne)
- Kindersberger 2009, p. 213
Traduction
- geometric mean distance, GMD en anglais
- geometric medium radius, GMR en anglais
Bibliographie
- (de) Joseph Kindersberger, Grundlagen der Hochspannungs- und Energieübertragungstechnik, TU Munich,
Normes
- IEC 60287-1-1 Câbles électriques – Calcul du courant admissible – Partie 1-1: Equations de l’intensité du courant admissible (facteur de charge 100 %) et calcul des pertes – Généralités, 2006
- CIGRÉ Brochure 531 Cable Systems Electrical Characteristics, 2013
Lien externe
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