Subjonctif
Le subjonctif est un mode grammatical exprimant un fait pensé ou imaginé (opinion, fait irréel, incertain ou simplement envisagé), par contraste avec l'indicatif, qui est censé rapporter les faits réels.
Le portugais, l'espagnol et quelques autres langues romanes sont les langues où il existe un subjonctif futur, servant à exprimer l'éventuel du futur (en portugais : Se tu tiveres dúvidas, liga-me. : « Si tu en viens à douter, appelle-moi. »).
Langues indo-européennes
Français
Dans la langue française au début du XXIe siècle, deux temps sont majoritairement utilisés, le subjonctif présent, et sa forme accomplie exprimant l'antériorité, le subjonctif passé. Les autres temps existants sont utilisés marginalement : il s'agit du subjonctif imparfait et de sa forme accomplie, à savoir le subjonctif plus-que-parfait, normalement employés lorsque le verbe de la principale est au passé.
Subjonctif et indicatif
Le subjonctif est employé pour souligner une incertitude ou une irréalité, là où l'indicatif indiquerait une certitude. Par exemple :
- Il est possible qu’il vienne (incertitude) / Il est certain qu'il viendra (certitude).
- Je cherche un hôtel qui ait une piscine avec un bassin pour les petits (pour l'instant c'est une vue de l'esprit et un tel hôtel n'existe peut-être pas) / Je cherche un hôtel qui a une piscine avec un bassin pour les petits (je sais qu'un tel hôtel existe, je veux l'identifier).
Le subjonctif sert aussi à exprimer un fait réel, mais en le présentant comme une pensée ou une idée envisagée ; alors que l'indicatif servirait à rapporter un fait en tant que tel. Par exemple :
- Qu'il soit né en 1475, c'est prouvé, il n'y a aucun doute là-dessus. (Le fait est d'abord présenté comme une hypothèse ou comme une allégation, puis on en précise ensuite la conformité avec le réel.) / Il a été prouvé qu'il était né en 1475. (Fait simplement rapporté.)
- Le fait qu'il se soit fâché avec ses parents me désole. / Le fait qu'il s'est fâché avec ses parents me désole. (La deuxième phrase insiste sur la réalité du fait. Dans la première phrase, le fait n'est pas moins réel mais il est énoncé de manière plus neutre.)
Subjonctifs imparfait et plus-que-parfait
Les subjonctifs imparfait et plus-que-parfait peuvent remplacer les subjonctifs présent et passé à la façon dont l'imparfait et le plus-que-parfait remplacent le présent et le passé composé lors de la concordance des temps lorsque le verbe de la principale est au passé. Exemples :
- Elle déteste que je vienne sans prévenir. / Elle détestait que je vinsse sans prévenir.
- On s'étonne qu'il soit parti sans dire au revoir. / On s'étonna qu'il fût parti sans dire au revoir.
Depuis le XXe siècle, la concordance des temps du subjonctif avec l'imparfait et le plus-que-parfait n'est plus considérée comme nécessaire, y compris à l'écrit, et n'est que peu pratiquée[réf. nécessaire].
Emplois
Ce n'est pas parce qu'il y a une conjonction de subordination que l'on emploiera forcément le subjonctif. Le subjonctif est affaire de sens, de sémantique[1]. Néanmoins, le seul critère sémantique n'est pas systématique ce qui rend la maîtrise du subjonctif français délicate pour les non-francophones[2].
Le subjonctif présent exprime généralement un fait envisagé qui n'est pas encore réalisé au moment de l'énonciation. Il s'emploie dans des propositions principales comme dans des propositions subordonnées.
- Commandement : le subjonctif présent, à la 3e personne du singulier ou du pluriel, peut exprimer un commandement.
- Qu’ils finissent leur travail s’ils veulent sortir !
- Qu’on m’apporte ce livre !
- Souhait ou désir : le subjonctif, dans une proposition indépendante, peut exprimer un souhait ou un désir.
- Si elle veut partir, qu’elle parte !
- Que Dieu vous bénisse !
- Honni soit qui mal y pense !
- Ainsi soit-il !
- Indignation ou étonnement : le subjonctif, dans une proposition indépendante, peut exprimer l’indignation ou l’étonnement.
- Moi, que je fasse une chose pareille ? Jamais !
- Après certains verbes : le subjonctif s’emploie dans la subordonnée si le verbe de la principale exprime le doute, l’improbabilité, la volonté, le désir, la défense, la nécessité, la possibilité, l’impossibilité ou un sentiment.
- Je doute que vous arriviez à temps.
- Il est peu probable que je puisse y aller.
- Je veux que vous écoutiez.
- J’attends que vous répondiez.
aimer que
apprécier que
attendre que
consentir à ce que
défendre que
désirer que
douter que
être content que
être désolé que
être étonné que
être fâché que
être furieux que
être heureux que
être ravi que
être surpris que
être triste que
exiger que
il convient que
il est bon que
il est dommage que
il est douteux que
il est essentiel que
il est important que
il est impossible que
il est improbable que
il est juste que
il est nécessaire que
il est obligatoire que
il est peu probable que
il est possible que
il est préférable que
il est rare que
il est regrettable que
il est temps que
il est utile que
il faut que
il ne faut pas que
il semble que
il suffit que
il vaut mieux que
interdire que
ordonner que
proposer que
recommander que
refuser que
s’attendre à ce que
s’opposer à ce que
souhaiter que
tenir à ce que
vouloir que
L'indicatif est cependant employé après « il me (te, etc.) semble que »[3].
- Après certaines conjonctions : le subjonctif s’emploie dans la subordonnée après certaines conjonctions.
- Il fait tout pour qu’elle soit heureuse.
- Il s’est caché de peur qu’elle ne le voie.
- Nous irons demain, à moins qu’il ne pleuve.
- Il est parti sans qu’on s’en aperçoive.
- Vous y arriverez pourvu que vous travailliez.
- Si vous êtes malade et que vous ne puissiez pas venir, téléphonez-moi.
à condition que
de peur que
pourvu que
à moins que
de sorte que
que … ou
à supposer que
en attendant que
qui que
afin que
jusqu’à ce que
quoi que
avant que
malgré que (avec avoir)[4]
quoique
bien que
non pas que
sans que
ce n’est pas que
non point que
si … et que
de crainte que
non que
soit que… soit que…
de façon que
où que
de manière que
pour que
etc
- Dans les propositions subordonnées relatives : le subjonctif s’emploie dans la subordonnée relative si l’antécédent du pronom relatif est un superlatif ou les mots le premier, le seul ou le dernier, pour exprimer l’incertitude.
- Ce sont les seules fautes que je voie (subjonctif présent). Je n’ai pas trouvé d’autres fautes que celles-ci, mais il y en a peut-être d’autres.
- Ce sont les seules fautes que je vois (indicatif présent). Voilà les seules fautes que j’ai vues.
- Je cherche un étudiant qui soit (subjonctif présent) parfaitement bilingue. Je souhaite qu’il y ait un tel étudiant, et je cherche.
- Je cherche un étudiant qui est (indicatif présent) parfaitement bilingue. Je sais qu’il y a un tel étudiant, et je le cherche.
- Après les verbes de pensée et de déclaration à la forme négative ou interrogative : le subjonctif peut s’employer dans la subordonnée après les verbes de pensée et de déclaration à la forme négative ou interrogative. Cependant, si l’on veut insister sur la réalité du fait plus que sur le doute, on emploie l’indicatif.
- Je ne crois pas que ce soit (subjonctif présent) là le plus court chemin. À mon avis, ce n’est pas le plus court chemin.
- Il ne croit pas que c’est (indicatif présent) le plus court chemin. Je suis certain que c’est le plus court chemin, mais il pense que non.
- Après la conjonction « Que » remplaçant la conjonction « Si » : le subjonctif s’emploie après la conjonction « que » remplaçant la conjonction « si ».
- Si vous venez dans la région et que vous désiriez me rencontrer, appelez-moi la veille. Si vous venez dans la région et si vous désirez me rencontrer, appelez-moi la veille.
- L'attraction modale : le subjonctif s’emploie souvent dans une subordonnée complément d’objet qui dépend elle-même d’une autre subordonnée dont le verbe est au subjonctif
- Bien que Paul prétende que sa femme sache l’anglais, elle n’en comprend pas un mot. Le verbe sache est au subjonctif parce qu’il dépend de prétende qui est lui-même au subjonctif : on appelle cela l’attraction modale.
Certaines tournures courantes ont supprimé le « que », notamment dans les énoncés géométriques : « Soient deux droites D et D′ », ou bien dans l'exclamation « Vivent les mariés ». Ces verbes sont respectivement les subjonctifs présents de la troisième personne du pluriel du verbe être et vivre. En langue soutenue, il existe un emploi atypique du subjonctif pour le verbe savoir à la forme négative : Je ne sache pas qu'il en soit ainsi. Il exprime alors une affirmation atténuée[5].
Présent
Le subjonctif présent des verbes réguliers se forme en utilisant la première personne du singulier de l'indicatif présent, auquel on y ajoute la terminaison du subjonctif (qui change de voyelle par rapport à l'indicatif).
Indicatif présent | Subjonctif présent | |||
---|---|---|---|---|
Verbes en -ar | Verbes en -er ou -ir | Verbes en -ar | Verbes en -er ou -ir | |
yo | -o | -o | -e | -a |
tú | -as | -es | -es | -as |
vos (Argentine) | -es | -as | ||
vos (Amérique centrale) | -és | -ás | ||
él / ella / usted | -a | -e | -e | -a |
nosotros | -amos | -emos / -imos | -emos | -amos |
vosotros | -áis | -éis | -éis | -áis |
ellos / ellas / ustedes | -an | -en | -en | -an |
Ainsi, le verbe trabajar (« travailler ») au subjonctif donne : yo trabaje (« que je travaille »), tú trabajes (« que tu travailles »), él trabaje (« qu'il travaille »), nosotros trabajemos (« que nous travaillions »), vosotros trabajéis (« que vous travailliez »), ellos trabajen (« qu'ils travaillent »).
Les verbes qui sont irréguliers à la première personne du présent de l'indicatif, continuent de suivre cette irrégularité au présent du subjonctif. On retire alors le « -o » de la première personne du présent de l'indicatif pour y ajouter les terminaisons ci-dessus, ainsi :
- yo ponga (« que je mette ») formé à partir de l'indicatif présent yo pongo, yo traiga (« que j'apporte »), nosotros tengamos (« que nous ayons »), ustedes quieran (« que vous (vouvoiement pluriel) vouliez »), ellos construyan (« qu'ils construisent »), ustedes vean (« qu'ils voient »), yo pida (« que je demande »).
Enfin, certains verbes ont des irrégularités spéciales, en dépit de leur petit nombre. Il s'agit de : « ir » (« aller »), « saber » (« savoir »), « ser » (« être »), « haber » (« avoir ») ; qui donne : que yo vaya (que j'aille), que yo sepa (que je sache), que yo sea (que je sois), que yo haya (que j'aie).
Futur
Le subjonctif futur s'utilise peu et principalement en droit. Il est, dans le langage courant, souvent remplacé par d'autres temps du subjonctif.
- « Quien insultare a la Reina... » (dans le langage courant, « Quien insulte »), pour « qui insulte la Reine... » ;
- « Sea lo que fuere » (dans le langage courant, « Sea lo que sea »), pour « quoi qu'il en soit ».
Le subjonctif futur s'utilise principalement en milieu légal, par exemple :
- « Serán castigados con uno a seis meses de prisión, »
- « Los que concurrieren al cuarto oscuro. »
- « Los que introdujeren en el sobre. »
- « Los que dañaren las boletas. »
- « Los que condujeren a otros electores. »
Futur simple du subjonctif | Futur antérieur du subjonctif | |
---|---|---|
Ser | yo fuere tú fueres él fuere nosotros fuéremos vosotros fuereis ustedes fueren ellos fueren |
yo hubiere sido tú hubieres sido él hubiere sido nosotros hubiéremos sido vosotros hubiereis sido ustedes hubieren sido ellos hubieren sido |
Estar | yo estuviere tú estuvieres él estuviere nosotros estuviéremos vosotros estuviereis ustedes estuvieren ellos estuvieren |
yo hubiere estado tú hubieres estado él hubiere estado nosotros hubiéremos estado vosotros hubiereis estado ustedes hubieren estado ellos hubieren estado |
Notes et références
- Quand utiliser le subjonctif présent ?
- Natalia Youssef, Propositions pour l’enseignement du subjonctif aux adultes arabophones : Application aux étudiants des universités syriennes, Cergy Pontoise, Université de Cergy Pontoise, (lire en ligne)
- Valentine Watson Rodger, Mieux traduire, mieux s'exprimer : cahier d'exercices pour l'apprentissage du français écrit et parlé, Canadian Scholars’ Press, , 266 p. (ISBN 978-1-55130-134-1, lire en ligne)
- « Peut-on dire « malgré que » ? »
- Le petit Grevisse, Grammaire française, De Boeck, 2005 (ISBN 978-2801113561) § 363, Remarque 2.
Annexes
Bibliographie
- Charles Appert, De l'esprit du subjonctif dans la langue française, ou Analyse logique, grammaticale et philosophique de ce mode, comparé à l'indicatif, etc., Naples : chez Borel & chez Marotta & Paris : chez Barrois, 1823 (→ lire en ligne)
- Brigitte Eisenkolb, L’emploi du subjonctif en français contemporain. Une étude contrastive d'écrits de lycéens français et allemands, Sarrebruck, Éditions universitaires européennes,
- Natalia Youssef, Propositions pour l’enseignement du subjonctif aux adultes arabophones : Application aux étudiants des universités syriennes, Cergy Pontoise, Université de Cergy Pontoise, (lire en ligne)
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