Roue à aubes

La roue à aubes est une roue de construction particulière, munie de pales (ou aubes)[1], permettant de créer ou de restituer un mouvement rotatif d'axe au départ d'un mouvement linéaire de fluide. Elle constitue ainsi le cœur d'un moteur hydraulique. Initialement simples et de construction très facile, elles ont évolué au fil du temps, avec les progrès de l'hydro et de l'aérodynamique pour devenir les turbines hydrauliques d'aujourd'hui.

La roue à augets est une amélioration de la roue à aubes : au lieu d'être simplement équipée de pales poussées par la force du courant (roues par dessous) ou par l'énergie d'une chute d'eau (roues par dessus), elle comprend des augets qui se vident les uns dans les autres ; à débit d'eau égal, le poids de l'eau contenue dans plusieurs augets successifs alors que les autres sont vides accentue le déséquilibre de la roue qui tourne plus vite ou avec beaucoup plus de puissance et d'inertie, et sans à-coup.

Types de roues

On distingue principalement trois types de roues équipées d'aubes ou d'augets :

Roues "en dessous"

Le courant d'eau passe sous la roue. Celle-ci tire sa force de la pression de l'eau sur des aubes. Le rendement de ce type de roue ne dépasse pas 20%. Son coursier, la partie creusée du sol dans laquelle passe la roue, doit être parfait pour éviter toute perte de pression, ce qui nécessite un entretien régulier. Une amélioration a été apporté par le mathématicien Poncelet en utilisant des aubes arrondies, qui permettent une meilleure récupération de la force hydraulique, grâce à une diminution des turbulences. Le rendement peut ainsi atteindre 80%[2].

Roues "en dessus"

Un ruisseau ou une dérivation, en amont de la rivière, s'écoule sur la partie supérieure de la roue. C'est le type le plus performant, qui accepte un faible débit d'eau. L'eau remplit des augets, c'est son poids qui crée le mouvement ; pour une question de rendement, la roue ne doit pas baigner dans l'eau d'écoulement à sa base si elle tourne dans le sens contraire du courant. Ces roues, qui sont apparues après les roue "en dessous", peuvent être installées sur des chutes d'eau supérieures à 4 mètres[2].

Roues "de côté"

Appelées aussi roues de poitrine, il s'agit d'une variante des roues "en dessus" : l'eau est dirigée dans des augets par le côté. Elles conviennent au moyennes retenues d'eau (entre 2.5 et 5 mètres). Leur rendement est supérieur à celui des roues "en dessous" moyennant un entretien soigné du coursier[2].

Une roue à augets.
Triple roue (Vassili Polenov, 1880).

La roue qui capte et transmet l'énergie de l'eau

La première exploitation mécanique de la roue à aubes fut la création de moteurs hydrauliques « au fil de l'eau ». Leurs applications furent diverses, du moulin à grain jusqu'aux industries mécaniques.

Nombre des engrenages en bois puis en métal des moulins ont préfiguré les pièces mécaniques de machines et véhicules actuels.

Une autre extension fut la noria, combinaison de réceptacles et de pales, qui permet d'irriguer largement les abords des fleuves. En Syrie, les grandes norias de Hama peuvent mesurer jusqu'à 21 mètres de diamètre. Elles peuvent être alimentées par le courant ou par une force animale, humaine ou un moteur.

La roue pendante

Quand le moulin est construit sur un pont, ou même sur pilotis, cette roue est forcément située au-dessous de l’édifice. On dit alors que le moulin est à roue pendante. On devait la hausser ou la descendre au moment des crues et des périodes de sécheresse, afin qu’elle reste en contact avec l’eau. La roue pendante est une roue à aubes qui peut être montée ou descendue grâce à un système de relevage avec vis et vérins. À l’intérieur du moulin, les vis et vérins en bois sont sur le plancher, sorte de plate-forme à laquelle est suspendue la roue motrice et qui supporte l’ensemble du mécanisme et les meules[3].

Autre principe de roue pendante (roue suspendue, volante, flottante ou oscillante) que l'on trouvait sur la Loue : le moulin Pouguet[4] à Ornans, le moulin de Vuillafans[5] et le moulin Lambert[6] à Chenecey-Buillon dont les roues étaient suspendues à l’intérieur d’un châssis qui fait saillie au-dessus de la rivière. Ces roues étaient fixées à des poutres métalliques pouvant pivoter à une extrémité et s'élever au gré de la hauteur d'eau de la Loue grâce à un système de chaînes enroulées sur un treuil (invention de l'Ornanais Étienne Joseph Pouguet[7]).


La roue motrice

L'application inverse fut l'invention du bateau à roues à aubes, transmettant le mouvement (Système bielle-manivelle) d'une machine à vapeur chauffée au bois (puis au charbon) à de grandes roues à aubes, soit une de chaque côté[1], soit une seule à la poupe. La faiblesse du rendement de la roue à aubes[note 1], l'encombrement (et donc le coût) et la prise au vent, alliés à une fragilité importante (surtout pour les navires militaires), les fit abandonner au profit des hélices sauf dans des cas particuliers de faible tirant d'eau (bateaux sur le Mississippi, par exemple).

La fragilité des roues à aubes en haute mer a été maintes fois mise en lumière, notamment à bord de l'Elise (lors de la première traversée de la Manche à la vapeur) ou du Great-Eastern , pourtant conçu par le célèbre ingénieur Isambard Brunel, qui se retrouva en très mauvaise posture lors d'une forte tempête en 1861.

Initialement les roues à aubes étaient à pales plates fixes et seule la pale verticale au point bas fonctionnait de façon satisfaisante, mais assez rapidement les ingénieurs navals conçurent des pales à surface courbe, articulées par rapport au moyeu et actionnées par un système de bielles et un excentrique en forme d'étoile (appelé "Star-system" par les ingénieurs britanniques) qui permettait à toutes les pales immergées de prendre un appui correct sur l'eau.

Les avantages et les inconvénients respectifs de la roue à aubes et de l'hélice (qui nécessitait des machines à rotation plus rapide) étaient l'objet de vives controverses au milieu du XIXe siècle et l'amirauté britannique procéda à divers tests de remorquage (Tug o' war) entre deux navires de puissance équivalente équipés respectivement de roues à aubes ou d'une hélice (Alecto Vs Rattler , Niger Vs Basilisk) qui démontrèrent la nette supériorité de l'hélice[8].

Certains pédalos fonctionnent sur le même principe.

Un propulseur hybride entre la roue à aubes et l'hélice, le système Voith, utilisant un plateau tournant à axe vertical, entièrement immergé, et des pales totalement orientables est utilisé sur bon nombre de navires à usage portuaire où côtier tels que dragues, remorqueurs, chalands de servitude. Son principal avantage est une remarquable maniabilité "tous azimuts".

Une grande roue à l'arrière[9]
Deux roues de part et d'autre du bateau[1]

Utilisation du symbole de la roue à aubes

  • En héraldique, pour la ville de Mulhouse.

Notes et références

Notes

  1. Le rendement décroît dans les eaux agitées où les mouvements du bateau et les vagues perturbent les aubes. En eaux très calmes, la roue à aubes peut avoir néanmoins un meilleur rendement que l'hélice.

Références

  1. Principe de la roue à aubes des bateaux « Belle Époque » de la CGN Sur le site bateaux-du-leman.ch
  2. « explication sur la roue », sur tpe-rouesdelisle.wifeo.com (consulté le )
  3. « L’art de la meunerie », publiée par Pommier dans la Maison Rustique du XIXe siècle -1836-, T. III, p. 405.
  4. « Moulin Pouguet, puis Perrot, puis Chays, actuellement logement », sur bourgognefranchecomte.fr (consulté le ).
  5. « Moulin de Vuillafans », sur bourgognefranchecomte.fr (consulté le ).
  6. « Moulin Lambert puis scierie », sur bourgognefranchecomte.fr (consulté le ).
  7. http://moulinsdefrance.free.fr/pages/2tr12n90t5.htm
  8. (en) « Basilisk paddle sloop », sur musée maritime de Greenwich, gravure légendée
  9. bateau roue à aubes vancouver Sur le site dailymotion.com

Voir aussi

Bibliographie

  • Claude Rivals, « Histoire d’un patrimoine », FFAM, Route d'Avenay Cidex 22, 14210 Évrecy (www.moulinsdefrance.org Présentation FFAM)
  • Revue Moulins de France, revue spécialisée trimestrielle
  • « Roues hydrauliques », d'Alain Schrambach, Éd. FFAM, , 160 pages ; n° spécial 22 de Moulins de France, illustrations, plans, croquis ; FFAM Route d'Avenay Cidex 22, 14210 Évrecy.
  • (en-US) Terry S. Reynolds, Stronger Than a Hundred Men: A History of the Vertical Water Wheel, Johns Hopkins University Press, 1983, 2002 ; (ISBN 0801872480 et 9780801872488)

Articles connexes

Liens externes

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