Nécropole royale de Tanis

La nécropole royale de Tanis représente le chaînon manquant nécessaire pour comprendre une période obscure de l'histoire de l'Égypte antique, la Troisième Période intermédiaire.

Nécropole de Tanis
Site d'Égypte antique

Statue du dieu Houroun protégeant Ramsès II
Musée du Caire.
Noms
Actuellement Tanis
Localisation
Région Basse-Égypte
Coordonnées 30° 58′ 00″ nord, 31° 52′ 00″ est
Géolocalisation sur la carte : Égypte
Nécropole de Tanis

Edifiée sur le site archéologique de Tanis dans le delta du Nil en Basse-Égypte, en même temps que la construction d'un temple d'Amon, elle est placée au sud-ouest de l'axe du grand temple, dans l'enceinte datant du règne de Psousennès Ier.

L'enceinte marque d'ailleurs une déviation pour englober la nécropole délimitant ainsi un périmètre dans lequel plusieurs chapelles seront par la suite édifiées pour devenir à la période ptolémaïque un quartier d’habitations et d’ateliers artisanaux.

Découverte et état général

À la fin des années 1930, l'équipe de la mission française des fouilles de Tanis dirigée par le Pr. Pierre Montet travaille au dégagement du secteur sud-ouest de l'enceinte. Ils retirent une quantité imposante de terre et de sable qui s'étaient accumulés au cours des siècles[1] et aussi en grande partie du fait des travaux précédents, notamment de Mariette qui avait travaillé au dégagement du grand temple d'Amon. Ces fouilles du XIXe siècle rejetèrent de part et d'autre de l’axe du temple les déblais recouvrant davantage la zone encore inexplorée.

Dans cet espace prenant la forme d’un triangle rectangle, les égyptologues procèdent méthodiquement depuis l’est vers l’ouest, dégageant peu à peu les niveaux archéologiques. Leur objectif initial était d’atteindre celui de la fondation du temple afin d’en mettre au jour les dépôts de fondation, indicateurs précieux pour comprendre son histoire[2].

Ce faisant, ils mettent au jour dès 1938 les vestiges de constructions en briques qui semblent s'aligner le long du mur de l’avant-cour du temple, découvrant notamment un oratoire dédié au dieu Houroun contenant encore l’imposante statue du dieu faucon protégeant de ses ailes un enfant roi dont les cartouches indiquaient qu'il s'agissait de Ramsès II. La pièce unique en son genre est rapidement acheminée vers le Musée du Caire.

Poussant davantage à l'est de cet espace compris dans l'enceinte de Psousennès Ier, en , l'équipe d'archéologues dégagent devant les habitations tardives de grandes dalles qu'ils prennent en premier lieu pour un plancher, seul témoin restant d’un monument depuis longtemps disparu et recouvert par les ateliers de briques de la période gréco-romaine. En nettoyant le terrain ils découvrent rapidement des indices qui changent la nature de l'édifice mis au jour. Il ne s'agissait pas d'un sol mais du plafond d'un monument toujours existant mais enfoui sous terre.

Une dalle brisée ménage une brèche par laquelle l’accès aux salles souterraines est possible. En le nettoyant les égyptologues trouvent des vestiges caractéristiques d’une tombe… Des ouchebti au nom d’un Sheshonq, trois vases canopes, deux bouchons de ces mêmes vases, l’un représentant Douamoutef, l’autre Kébehsénouf, une boucle en forme de nœud Tyt, ou nœud d’Isis en or cloisonné, d’autres fragments d’ouchebti, cette fois au nom d’un Osorkon[3], un scarabée anépigraphe, autant de restes de viatiques funéraires royaux que les pilleurs de tombes avaient rejetés là ou égarés[4]. Le trou de voleur est rapidement dégagé et permet de s’introduire dans une tombe comportant plusieurs pièces et qui avait reçu plusieurs inhumations.

C’est la tombe d’Osorkon II.

L’exploration de ce premier tombeau royal révèle un véritable caveau familial comportant plusieurs inhumations royales toutes complètement ou partiellement pillées. En dégageant le secteur afin de pouvoir retirer les tonnes de déblais et de terres accumulées hors et dans le caveau, rapidement d’autres dalles apparaissent indiquant l’existence d’autres tombes au nord et au sud de celle d’Osorkon.

Au sud un nouveau tombeau, à nouveau pillé et au nord le tombeau de Psousennès Ier, dont la fouille ne sera effectuée qu’une fois les deux premiers caveaux systématiquement vidés et étudiés. Cette nouvelle tombe datant cette fois de la XXIe dynastie était restée close depuis l’Antiquité, livrant un ensemble de sépultures de différentes époques partiellement ou complètement intactes.

Les tombeaux

Les tombes royales de Tanis sont désignées par l’acronyme « NRT », pour « nécropole royale de Tanis » plus un numéro d’inventaire, correspondant chronologiquement à leur découverte. Ainsi la première découverte, celle d’Osorkon II est identifiée dans les ouvrages comme étant la tombe NRT I.

En tout, la nécropole royale de Tanis comporte sept tombeaux dont certains s’avèreront être de véritables cachettes royales, comprenant plusieurs sarcophages royaux appartenant aux XXIe et XXIIe dynasties :

  • NRT I, le tombeau dit d'Osorkon II a une histoire complexe. Dans une première phase, antérieure à Psousennès, il existait déjà un bâtiment à cet endroit sans qu'on puisse avec une quelconque certitude en faire la tombe de Smendès. Cet édifice a été entaillé en partie lors de l'agrandissement de NRT I par Psousennès Ier. Ce n'est que plus tard qu'Osorkon II a repris ce caveau à son compte, en l'agrandissant pour y enterrer son père Takélot Ier et son fils Hornakht. La décoration des murs, qui comprend de larges extraits des livres funéraires royaux, date de cette époque. Plus tard, Sheshonq III a fait couper la chambre 1 en deux parties par un mur. Un sarcophage y a aussi été inséré à une date inconnue. Dans son état final, NRT I comprend quatre pièces :
  • NRT I,1 : sarcophage d'un Sheshonq, peut-être Sheshonq V, installé là dans une phase tardive, pillé,
  • NRT I,2 : puits d’accès original du caveau qui a livré les restes de mobiliers funéraires royaux au moment de la découverte,
  • NRT I,3 : sarcophage du père d’Osorkon II, Takélot Ier, installé là par son fils, comme l'indiquent les textes sur les murs, pillé,
  • NRT I,4 : sarcophages d’Osorkon II, pillé, et de son fils Hornakht, partiellement intact.
Restitution de la nécropole royale de Tanis.
  • NRT II est un tombeau anépigraphe comprenant deux pièces, un puits d’accès et une chambre avec un grand sarcophage anonyme, taillé dans une ancienne architrave. Le couvercle a été brisé permettant aux pilleurs de tombes d’en vider le contenu. L’édifice très fragile n’a pas été fouillé tout de suite en raison du danger qui pesait littéralement sur les fouilleurs. Plus tard lors de la reprise de l’exploration de cette partie de la nécropole, les restes que contenait le sarcophage ont permis de l'identifier avec une grande probabilité comme la sépulture du pharaon Pimay ;
  • Le puits d’accès original du caveau, trouvé intact, comblé jusqu’à la surface,
  • L’antichambre, comprenant le reste de plusieurs mobiliers funéraires, largement pillés, avec les momies de Siamon et de Psousennès II encadrant le sarcophage intact en argent massif de Sheshonq II contenant sa momie et toutes ses parures royales,
  • NRT III,1 : caveau intact de Psousennès Ier contenant ses sarcophages et son mobilier funéraire d’une grande richesse,
  • NRT III,2 : caveau de Moutnedjemet, son épouse, réutilisé pour le pharaon Amenemopet contenant les sarcophages et le mobilier funéraire de ce roi éphémère. Moins opulent que celui de son prédécesseur, il est probable qu’il ait été une première fois pillé et sauvé par les prêtres qui le mirent à l’abri dans le caveau de sa mère (?),
  • NRT III,3 : caveau inutilisé du général et intendant d'Amon Ânkhefenmout, fils de Psousennès Ier ou de Hérihor II contenait un sarcophage intact mais vide,
  • NRT III,4 : caveau intact du général Oundjebaoundjed, probablement un parent du roi Smendès, comprenant ses sarcophages et un mobilier funéraire d’une grande valeur. Cette chambre et la précédente ne faisaient pas partie du programme architectural originel de Psousennès, mais ont été ajoutées plus tard en mordant sur le tombeau NRT I qui préexistait.
  • NRT IV : caveau peut-être initialement prévu pour le roi Amenemopet, ne comprenant qu’une seule pièce et contenant encore le sarcophage externe du roi ;
  • NRT V : caveau initial de Sheshonq III. Le plan de ce caveau est proche de celui de la NRT II avec deux pièces, un puits d’accès et la chambre funéraire. Cette dernière comprenait encore le sarcophage externe original du roi ainsi que celui de Sheshonq IV, pillé ;
  • NRT VI : caveau vide, anépigraphe et pillé, dont une seule pièce est préservée alors qu'il semble en avoir possédé au moins une seconde ;
  • NRT VII : caveau vide attenant à celui d’Osorkon II, en ruine, il comprenait sans doute deux pièces. Anépigraphe, il n’a pas été possible de lui attribuer un propriétaire. Un bloc de Psousennès était utilisé en remploi dans NRT VII, ce qui date le tombeau au plus tôt de la fin de la XXIe dynastie. Il a été détruit au plus tard lors de l'agrandissement de NRT I par Osorkon II.

Photos

Notes et références

  1. En effet, les Égyptiens ayant pour habitude de construire leurs demeures sur celles de leurs ancêtres, empilant en quelque sorte les niveaux stratigraphiques de la cité ce sont plusieurs mètres de terre et de débris qui, s’accumulant, recouvraient le site sous plusieurs tonnes de décombres protégeant ainsi les tombeaux royaux oubliés.
  2. Cet objectif a été atteint, et deux dépôts de fondations ont été découverts respectivement à l’angle sud-est et nord-est du premier pylône permettant de le dater du règne d’Osorkon II.
  3. Osorkon II.
  4. Les vases canopes et les premiers oushebti seront attribués à Sheshonq III, la boucle en or et les oushebti fragmentaires au mobilier ayant appartenu à Osorkon II.

Bibliographie

  • Tanis, l’or des pharaons, Association …, .
  • Pierre Montet, Lettres de Tanis – La découverte des trésors royaux, Editions du Rocher, .
  • Georges Goyon, La découverte des trésors de Tanis, Pygmalion, .

Articles connexes

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