Normes des victoires aériennes durant la Première Guerre mondiale

Au cours de la Première Guerre mondiale, l'aviation militaire se développe et les premières victoires aériennes tombent. Les services aériens nationaux concernés développent dès lors leurs propres méthodes d'évaluation et d'attribution des victoires.

René Fonck, l'as le mieux classé parmi les survivants de la guerre, à côté de son Spad XIII.

Certains pays, comme la France, sont stricts, exigeant des témoins indépendants ou ne certifiant que la destruction de l'avion ennemi tandis que d'autres pays, comme la Grandre-Bretagne, sont plus laxistes, préférant récompenser la victoire morale (avion « hors-de-contrôle ») à la victoire physique (avion détruit). L'Allemagne ne va par contre comptabiliser que les victoires aériennes effectuées au-dessus de ces lignes.

La question du partage des victoires, à savoir lorsque plusieurs pilotes indiquent avoir détruit un même appareil ennemi, est également répondue différemment d'un pays à l'autre et parfois même d'un escadron à l'autre au sein d'une même force armée. Pour ce qui est des observateurs, la certification va dépendre de l'avion, du pays ou même des escadrons.

L'aviation militaire étant à ses balbutiement au début de la guerre et devant le nombre accru de réclamations de victoires, les systèmes de certifications évoluent au cours du conflit. La partie administrative et la vérification se renforcent, que cela soit du côté britannique ou allemand.

L'entrée en guerre tardive des États-Unis amène également à des différences dans la comptabilité, les pilotes américains servant dans des unités britanniques ou françaises, adoptant alors l'une ou l'autre norme.

Bien que des normes existent et que des listes d'as aient été créées (pilotes ou observateurs ayant au moins cinq victoires à leur actif), il est difficile, voire impossible, de comparer les pilotes ou les différentes forces aériennes impliquées dans le conflit en se basant uniquement sur le seul nombre de victoires aériennes certifiées. Avec l'évolution des avions, des techniques de pilotages, des stratégies et l'évolution des normes, la comparaison avec les as de la Seconde Guerre mondiale n'a pas lieu d'être.

Relevé des victoires

Le nombre de victoires aériennes des pilotes représentés dans la liste des as de la Première Guerre mondiale (pilotes ayant au moins cinq victoires à leur actif) ne peut souvent pas être définitif, mais est basé sur des listes détaillées qui sont les meilleures sources d'information disponibles. La perte d'enregistrements (en particulier les enregistrements des pertes et des avions perdus, qui sont au mieux un très bon guide du degré de revendication excessive) par malchance et par le passage du temps - et le détail avec lequel ces enregistrements sont conservés en premier lieu - complique souvent la reconstruction du décompte réel pour un as donné[1]. De plus, le système allemand de confirmation des victoires commence à disparaitre en  ; après , les registres qui ont survécu sont des registres d'unités[2].

Chaque pays a de plus ses propres règles. Par exemple, seul l'Empire britannique, et plus tardivement dans la guerre les États-Unis, acceptent les victoires « hors de contrôle »[alpha 1], et ce, sans confirmation extérieure[1]. Dès lors, la comparaison entre les différents forces aériennes impliquées est difficile, voire impossible[1]. L'évolution de la formation des pilotes et les capacités offensives des avions évoluent fortement durant le conflit, ce qui explique les disparités entre le nombre de victoires créditées au début et à la fin de la guerre[1].

Notion d'as

Si le terme « as » désigne désormais tout pilote/observateur ayant au moins cinq victoires à son actif, cette notion n'est apparue que durant le conflit, d'abord en France[1]. Ainsi, dans l'Empire britannique, ce terme n'est pas connu initialement par les pilotes[1]. Le décompte des victoires n'y est d'ailleurs pas mis en avant et l'armée refuse toute propagande ou glorification des pilotes[1]. Le nombre de victoires est bien publié quotidiennement mais pas le nom des pilotes concernés[1]. Les Allemands n'utilisent pas non le terme d'« as », mais désignent les pilotes allemands qui ont un grand nombre de victoires aériennes par le terme Kanone gros canon »)[3]. Au début de la guerre, quatre victoires suffisent pour être reconnus et recevoir d'éventuelles décorations[3]. Pour recevoir Pour le Mérite, plus haute récompense de prussienne, seize victoires sont nécessaires, puis vingt et à la fin de la guerre, près de trente[3]. L'armée publie le noms et les scores des meilleurs pilotes, pour le bien du moral des civils[3]. Des cartes postales, les Sanke, sont même éditées, glorifiant les pilotes[3].

Pays de l'Entente - Alliés

Le décompte des victoires alliées sur le front de l'ouest est bien plus compliqué que du côté allemand[4]. Plus de 90% des combats aériens se déroulent au-dessus ou derrière les lignes allemandes et les vents tendent à repousser les avions vers l'est et à empêcher les pilotes alliés à rejoindre leur base[4],[2]. De ce fait, les alliées peuvent difficilement confirmer les dires des pilotes, de même que les pilotes voient rarement les avions ennemis s'écraser au sol[4].

Belgique

Willy Coppens, surnommé le « tueur de Drachen », est le premier as belge avec 37 victoires homologuées et six probables.

En 1914, l'« Aviation Militaire Belge » entame la Première Guerre mondiale avec quatre escadrons, dont deux seulement sont pleinement opérationnels. Chaque escadron est équipé chacun de Farman, des avions pensés pour la reconnaissance aérienne[5],[6]. Dès le , un pilote allemand est abattu, à la carabine, par un équipage belge[7]. Il s'agit de la première victoire aérienne air-air de l'histoire, mais aucune réclamation n'est posée par le pilote et l'observateur belges[7]. Il faut attendre le pour qu'un équipage belge soumette sa première victoire aérienne[8].

Pour être comptabilisés, les avions ennemis doivent tomber dans les lignes alliées d'un pays partiellement occupé par l'ennemi, ou être vus tombant dans les lignes allemandes par des troupes alliées au sol[9]. La confirmation par d'autres pilotes alliés n'est pas autorisée. Ainsi, les réclamations non confirmées sont plus nombreuses que les victoires officielles[10].

Bien que le système belge de comptage des victoires soit censé refléter le système français plutôt que le système britannique, les listes de victoires des as belges contiennent toujours des victoires confirmées avec la mention FTL (forced to land - forcés d'atterrir) et OOC (out of control - hors de contrôle)[11]. L'inspection des listes de victoires des pilotes belges montre également que les victoires sont partagées, sans être fractionnées[11].

France

René Fonck, premier as français.

Les normes françaises de confirmation des victoires aériennes sont strictes[12]. La victoire n'est accordée que pour la destruction d'un avion ennemi constatée par un témoin indépendant, tel qu'un observateur d'artillerie, un fantassin ou un autre pilote. Les victoires certifiées entrent généralement dans l'une des quatre catégories de destruction :

  1. Avion ennemi chutant en flammes, vu par un témoin indépendant ;
  2. Avion ennemi s'écrasant au sol, vu par un témoin indépendant ;
  3. Avion ennemi se désintégrant en vol, vu par un témoin indépendant ;
  4. Avion ennemi tombant en captivité derrière les lignes de combat françaises ou alliées[12].

Les victoires probables ne sont pas comptabilisées pour le score du pilote, mais elles sont notées[12]. Des exemples de victoires probables peuvent être la chute d'un avion ennemi hors de contrôle sans qu'il soit vu en train de s'écraser, ou une réclamation sans confirmation indépendante[12].

Les observateurs comme les pilotes peuvent devenir des as[13]. Les victoires peuvent être partagées, et comptées comme un ajout de un au score de chaque « vainqueur » plutôt que d'être divisées de manière fractionnée[13]. Dans certains cas, la destruction d'un seul avion allemand ou austro-hongrois s'est donc vue ajouter au score d'une demi-douzaine d'aviateurs français, voire plus[13].

Grande-Bretagne et Commonwealth britannique

Comme pour les autres pays, l'Empire britannique emploie l'aviation comme moyen de reconnaissance au début de la guerre[14]. Certains pilotes embarquent bien des armes et même un mitrailleuse Lewis mais le poids est trop important, ce qui dégrade fortement les performances des avions[14]. Le Vickers FB 5, qui entre en service en 1915, est le premier avion anglais pensé entièrement pour le combat[14].

Un décompte qui évolue

Billy Bishop, pilote canadien et meilleur as de l'Empire Britannique avec 72 victoires créditées.

Le décompte des victoires aériennes par les Britanniques est déterminé par la volonté du haut commandement de maintenir une offensive aérienne continue[4]. Dès le début, ils considèrent comme victorieuses les actions qui déjouent les intentions des Allemands[4]. Leur système de comptage est orienté vers la reconnaissance de la victoire morale que représente le fait de contrecarrer les actions offensives de l'ennemi, ainsi que la victoire physique que représente la destruction de ses avions[4].

Un pilote britannique ou du Commonwealth appartenant au Royal Flying Corps (RFC) et au Royal Naval Air Service, ou les pilotes australiens de l'Australian Flying Corps, peuvent être crédités d'une victoire pour avoir détruit un avion ennemi, pour l'avoir abattu et mis hors de contrôle, pour l'avoir capturé ou pour avoir détruit un ballon d'observation ennemi[4]. Au tout début des combats aériens, en 1915 et 1916, les victoires peuvent également être attribuées pour avoir forcé un avion ennemi à atterrir en territoire allié ou ennemi[4]. Contrairement aux autres forces aériennes de l'époque, en acceptant ces victoires « hors de contrôle », les autorités britanniques n'exigent pas nécessairement une vérification indépendante au sol d'une victoire pour l'attribuer[1].

En 1917, le nombre de victoires « hors de contrôle » (« out of control »), « abattu » (« driven down ») et « forcé à atterrir » (« forced to land ») surcharge le système de notation[15]. Alors que les combats aériens s'intensifient au point que les pilotes britanniques soumettent jusqu'à 50 réclamations certains jours, le système de comptage sature[15]. En , la nouvellement formée Royal Air Force cesse, soi-disant, de comptabiliser les victoires « hors de contrôle » mais les crédite toujours aux pilotes pour l'attribution des décorations. Les victoires se limitent aux avions ennemis détruits, aux avions ennemis abattus hors de contrôle s'ils semblent si endommagés qu'ils vont s'écraser, et aux avions capturés[15]. Les quartiers généraux des Squadron (escadron), des Brigade (brigade) et des Wing (en) (escadre) tiennent tous compte des scores individuels et des scores des unités[15].

La difficulté des doublons

Le système d'approbation commence par un rapport de combat du Squadron qui est soumis au quartier général de la Wing[1]. Celui-ci transmet à son tour le rapport au quartier général de la Brigade. La Wing ou la Brigade peuvent approuver ou désapprouver le rapport ; parfois, l'une confirme la victoire et l'autre non[1]. Le système n'est pas centralisé et différentes patrouilles alliées peuvent soumettre des rapports pour un même engagement avec l'ennemi, rendant l'identification compliquée. De plus, les victoires sont rapportées par le QG du RFC via un communiqué[1]. L'heure limite pour le communiqué quotidien (surnommé « Comic Cuts » par les pilotes) est fixée à 16 h[1]. L'adoption d'un système qui ne rend pas toujours compte d'un événement le jour où il se produit réellement ajoute à la confusion causée par le double compte rendu[1].

Il est donc assez ardu pour les historiens de retrouver et compter correctement les différentes victoires[1]. Certains bombardements, ou simplement le temps, ont également détruits des archives[1].

La gestion des victoires partagées

Dans les cas où plus d'un pilote (ou observateur) est impliqué dans une victoire britannique, la pratique est particulièrement incohérente. Puisqu'après tout un seul avion ennemi est détruit, la victoire au niveau de l'unité (Squadron ou Wing par exemple) n'est comptabilité qu'une fois[1]. D'un autre côté, dans certains cas, tous les pilotes concernés peuvent recevoir un crédit complet à leur score personnel, car les victoires à cette époque ne sont pas divisées de manière fractionnée, comme cela pourra être le cas durant la Seconde Guerre mondiale[1]. À titre d'exemple frappant, pas moins de douze pilotes du RFC ont chacun revendiqué une victoire parce qu'ils ont contribué à détruire un Albatros D.III le [16]. Cependant, certains squadrons ne comptent ces victoires que pour l'unité concernée sans les créditer à un individu, ou comptent les scores « partagés » séparément des victoires « solo » d'un pilote particulier[17].

Dans le cas d'équipages de biplaces, le pilote et l'observateur peuvent tous deux être crédités d'une victoire[17]. La règle habituelle consiste à créditer toutes les victoires au pilote d'un Sopwith 1½ Strutter ou d'un Bristol F.2 Fighter biplace, mais l'observateur/tireur n'est crédité que pour les cas où il a tiré avec son arme[17]. Certains squadron tiennent des listes distinctes des as pilotes et des as observateurs, d'autres non[17].

Ballons d'observation

Tout comme les autres pays, la Grande-Bretagne comptabilise bien la destruction des ballons d'observations comme une victoire aérienne[17]. Si à partir de 1918, les ballons doivent être en flamme pour être considérés comme détruits, ce n'est pas spécialement pas le cas plus tôt durant le conflit, des ballons s'effondrant sur eux-mêmes étant suffisant[17].

Par contre, dès 1917, le formulaire de réclamation pour les ballons d'observation est différent de celui pour les avions ennemis et est rarement conservé avec les archives des rapports de combat[17]. Cette distinction amène à un nombre de ballons détruits sous-estimés[17].

Italie

Francesco Baracca, meilleur as italien de la guerre, vers 1916.

Lors de l'entrée en guerre de l'Italie, les forces aériennes de l'armée royale et de la marine royale sont peu entrainées et mal équipées[18]. Elles font face à une armée austro-hongroise plus efficace[18]. Après des formations auprès de la France et l'arrivée de Nieuport 11 en 1916, l'aviation italienne peut enfin rivaliser avec son ennemi. Francesco Baracca, qui deviendra le premier as du pays, réalise la première victoire aérienne italienne le [18]. Le pays enchaîne les victoires et obtiendra finalement la supériorité aérienne à la fin de la guerre[18].

Des règles strictes

L'Italie ne codifiera officiellement ses normes des victoires aériennes qu'à la fin 1918[19]. Les historiens s'accordent néanmoins sur certaines règles tacites[19]. Au début de la guerre, il existe quelques différences entre les unités mais les règles s'uniformisent rapidement et sont strictement respectées[19].

Un pilote reçoit ainsi une victoire aérienne si l'avion ennemi tombe en territoire sous contrôle italien ou si d'autres pilotes et/ou observateurs au sol des puissances alliées confirment indépendamment la destruction de l'ennemi[19]. Les témoignages peuvent arriver bien après la destruction de l'appareil (prisonniers, service ce renseignement, déserteurs ennemis, etc.). Dès lors, des victoires sont parfois homologuées bien après les faits[19].

Les victoires peuvent être partagées, plusieurs pilotes et/ou mitrailleurs recevant tout le crédit d'une victoire[19]. Ce partage peut toutefois varier en fonction des bataille et des témoignages des pilotes[19].

Un codification à la fin de la guerre

En , Pier Piccio, as et alors inspecteur des unités de chasse, codifie les procédures. Ce document, intitulé Istruzione provvisoria di impiego delle Squadriglie da Caccia (instruction provisoire pour l'utilisation des escadrons de chasse), exige au moins deux confirmations indépendantes pour approuver une victoire. Elles doivent provenir de l'artillerie, de ballons ou d'observateurs de première ligne[19]. Certaines victoires peuvent être exceptionnellement confirmées sans ces témoins si la destruction de l'appareil est confirmée par nombreux pilotes ou d'éventuels prisonniers[19].

En , le service de renseignement du Commando Generale di Aeronautica (commandement général de l'aéronautique) établit à la hâte une liste des pilotes ayant remporté au moins une victoire aérienne pendant la guerre. Celle-ci s'achève en  ; les critères d'évaluation ne sont pas connus, ce qui laisse planer un doute sur les totaux définitifs[19]. De nombreuses archives manquent et de nombreuses victoires ne sont pas toujours corroborés avec des documents officiels[19].

États-Unis

Les pilotes américains voient leurs totaux de victoires définis de plusieurs manières différentes[20]. Si et quand ils servent dans l'aviation britannique, leurs victoires sont déterminées selon les méthodes britanniques ; en effet, pas moins de 40 as américains ont servi uniquement dans des unités britanniques[20]. Il est tout aussi vrai que les Américains servant dans des unités françaises sont évalués selon les normes françaises ; il n'y a que quatre as américains qui ont servi uniquement dans des unités françaises[20].

L'US Army Air Service adopte les normes françaises pour évaluer les victoires américaines pour les pilotes sous son commandement, à une exception près : durant l'été 1918, alors qu'ils volent sous le contrôle opérationnel des Britanniques, le 17th Aero Squadron (en) et le 148th Aero Squadron (en) utilisent naturellement les normes britanniques[12].

Les observateurs américains peuvent devenir des as[21]. Les victoires peuvent être partagées entre les aviateurs[21]. Les archives de l'USAAS, qui ne recensent que les victoires remportées par les Américains en son sein, montrent que 1 513 victoires sont attribuées à des pilotes ou à des observateurs individuels pour la destruction de 756 avions allemands et de 76 ballons d'observation ; 341 de ces victoires sont partagées dans une certaine mesure, ce qui prouve que le partage des victoires est suffisamment courant pour être la norme[21]. Cependant, l'USAAS ne comptabilise pas les victoires remportées par les Américains dans les forces aériennes d'autres pays[21].

Roumanie

Dumitru Bădulescu (en), seul aș roumain selon les critères nationaux.

La Roumanie reste neutre durant les deux premières années de la guerre[22]. Elle rejoint les alliées à la fin du mois d'[22]. Elle est rapidement occupée par l'armée allemande et doit capituler à la suite de l'armistice entre la Russie bolchevique et les puissances centrales[22].

Lors de son entrée en guerre en 1916, le quartier général décide qu'une victoire aérienne correspond à un avion abattu[23]. Si plusieurs aviateurs abattent le même avion, seul celui qui est considéré comme ayant donné le coup de grâce se voit attribuer la victoire[23]. Dans le cas d'une victoire collective où l'on ne sait pas qui a donné le coup de grâce, la victoire est attribuée à l'escadron ou au groupe auquel appartiennent les aviateurs concernés[23].

Dumitru Bădulescu (en), un observateur, est ainsi le seul as roumain officiel avec 8 victoires dont cinq confirmées[22].

Empire russe

L'Empire russe entre dans la guerre avec la plus grande force aérienne, avec plus de 200 pilotes et presque autant d'avions[24]. Comme les autres pays, les avions russes ne sont pas armés et les pilotes sont seulement équipés de deux Mauser[25]. Les pilotes russes pratiquent ainsi au début de la guerre le taran, à savoir un abordage volontaire dans les airs, pratique dangereuse qui coutera la vie à de nombreux équipages[25].

L'Empire russe n'a par contre pas de normes de victoires connues.

Empire centraux

Autriche-Hongrie

Godwin von Brumowski, premier as autrichien.

L'Autriche-Hongrie entre dans la guerre avec peu d'avions et une industrie peu développée et cruellement en manque de matières premières, ce qui l'empêchera de rivaliser avec l'Italie vis-à-vis du nombre d'avions produits[26].

Le partage autorisé

Les normes austro-hongroises permettent à chaque membre d'équipage contribuant de manière significative à la défaite (pas spécialement la destruction) d'un avion, ballon ou dirigeable ennemi d'être crédité d'une victoire complète[27]. Toutes les victoires comptent de la même manière, que l'aviateur les remporte en tant que pilote de chasse, pilote de reconnaissance ou observateur/tireur aérien[27].

Pendant les six à huit premiers mois de 1918, les normes sont renforcées pour n'autoriser qu'une seule victoire certifiée par revendication, empêchant tout partage[28]. Cette restriction est ensuite révoquée et l'ancienne règle des victoires partagées est rétablie[28].

Les autorités austro-hongroises considèrent les avions ennemis contraints d'atterrir comme de véritables victoires. Cela peut être noté à travers les records de victoires de leurs as[29].

Allemagne

Manfred von Richthofen, premier as allemand, plus connu sous le nom de « baron rouge ».

Au début de la période nommée fléau Fokker (en), en , l'Empire allemand ne possède pas d'unités dédiées d'aviation de « chasse » au sein de ce qu'on appelle alors le Fliegertruppe - les premiers chasseurs Fokker Eindecker sont distribués seuls ou par paires, pour protéger les six avions biplaces que chaque unité d'observation aérienne de l'armée Feldflieger Abteilung utilise pour la reconnaissance de première ligne[30].

Des combats au-dessus des lignes allemandes

La plupart des combats aériens se déroulent au-dessus des lignes allemandes et les pilotes allemandes ne s'aventurent que très rarement au-dessus des lignes alliées[2]. Dès lors, les victoires aériennes doivent se dérouler du côté allemand, ce qui facilité grandement les confirmations[2]. Les pilotes allemands n'hésitent d'ailleurs à se poser près des débris de l'avion ennemi et piller ceux-ci pour récupérer des « souvenirs », par exemple le numéro de série de l'avion[2].

L'Allemagne demande expressément une confirmation, soit par les débris ou des témoins indépendants (autre pilote ou observateur au sol) pour créditer la victoire aérienne[2]. En 1916, alors que les escadrons de chasseurs Jasta se forment au sein de la Luftstreitkräfte nouvellement créée en octobre de la même année, chaque victoire doit être revendiquée dans un rapport de combat adressé à son commandant[31]. Le rapport est transmis à la chaîne de commandement pour évaluation[31].

Le , le futur Kurt Wintgens remporte la première victoire allemande confirmée contre un monoplan « parasol » Morane-Saulnier Type L, malgré ses deux victoires précédentes, les 1 et , contre d'autres biplaces « parasol » de type L pilotés par des Français, qui sont toutes deux tombées du côté des lignes alliées et n'ont donc pas été considérées comme des victoires aériennes « confirmées » selon les normes allemandes officielles de l'époque[32].

Pas de partage des victoires

Contrairement à d'autres pays, le partage des victoires n'est pas pris en compte, chaque victoire aérienne revenant à un équipage spécifique[31],[33]. On notera cependant qu'au début la guerre, et jusqu'en 1917, des cas de partages apparaissent, un même avion allié étant crédité pour plusieurs pilotes allemands[33]. En cas de désaccord insoluble sur une victime donnée, la victoire est créditée à une unité, mais pas à un individu[31]. La seule exception à cette règle est l'attribution d'une victoire au pilote et à l'observateur d'un biplace, peu importe qui abat l'avion[34].

Notes et références

Notes

  1. Il est parfois fait mention de victoires non confirmées (unconfirmed en anglais).

Références

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  2. Franks, Bailey et Guest 1998, p. 6.
  3. Franks, Bailey et Guest 1998, p. 14-15.
  4. Shores, Franks et Guest 1990, p. 6.
  5. « Belgian Air Service (Aviation Militaire Belge) of World War I », sur www.theaerodrome.com (consulté le )
  6. Pieters 1998, p. 10-11.
  7. Pieters 1998, p. 11-13, 21.
  8. Pieters 1998, p. 12.
  9. Pieters 1998, p. 14.
  10. Pieters 1998, p. 103.
  11. Pieters 1998, p. 34-85.
  12. Franks et Bailey 1992, p. 6.
  13. Franks et Bailey 1992, p. 112-227.
  14. Shores, Franks et Guest 1990, p. 11-12.
  15. Shores, Franks et Guest 1990, p. 6-7.
  16. « Carleton Main Clement », sur www.theaerodrome.com (consulté le )
  17. Shores, Franks et Guest 1990, p. 8.
  18. Varriale 2009, p. 7-10.
  19. Varriale 2009, p. 11-12.
  20. Franks et Bailey 1992, p. 6-7, 16.
  21. Franks et Bailey 1992, p. 6-7.
  22. (en) Mihail ORZEAŢĂ et Valeriu AVRAM, « Romanian aviation in the first world war », Romanian Military Thinking, (lire en ligne)
  23. (ro) « DESPRE AŞII AVIAŢIEI ROMÂNE ÎN RĂZBOIUL DE ÎNTREGIRE NAŢIONALĂ », BULETINUL ARHIVELOR MILITARE ROMÂNE, 78e série, vol. 4, , p. 11 (lire en ligne)
  24. Kulikov 2013, p. 6.
  25. Kulikov 2013, p. 7-14.
  26. O'Connor 1994, p. 8.
  27. O'Connor 1994, p. 9.
  28. O'Connor 1994, p. 213.
  29. O'Connor 1994, p. 272-331.
  30. VanWyngarden 2006, p. 9.
  31. Sumner et Sumner 2005, p. 22.
  32. VanWyngarden 2006, p. 24, 30.
  33. Franks, Bailey et Guest 1998, p. 7.
  34. Franks, Bailey et Guest 1998, p. 11.

Voir aussi

Bibliographie

 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

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