Observatoire de la petite sirène
L′Observatoire de la petite sirène, ou Observatoire des discours idéologiques sur l’enfant et l’adolescent, est un collectif pluridisciplinaire franco-belge de professionnels praticiens et chercheurs[1], qui effectue du lobbying dans le but d'interdire toute transition médicale aux mineurs trans.
Ce collectif entend alerter en particulier sur « les dérives possibles d'une médicalisation trop rapide pouvant donner lieu à des modifications corporelles irréversibles »[2] aux mineurs trans. Les critiques émises à son égard par des journalistes et des militants LGBT consistent en ce qu'il diffuse une panique morale et adopte une position conservatrice en refusant l'autodétermination des mineurs trans.
Historique
Les trois fondatrices et co-présidentes de l'Observatoire de la petite sirène sont les psychanalystes Céline Masson, Caroline Eliacheff et Anna Cognet[1].
S'intéressant tout particulièrement aux questions de la dysphorie de genre, l'Observatoire prône l'interdiction de toute transition médicale chez les mineurs[3] et dénonce à ce sujet l'influence d'un « lobbying trans »[4][source insuffisante], positions qui lui vaudront des accusations répétées de transphobie.
Caroline Eliacheff et Céline Masson publient en février 2021 un premier « appel » via une liste de diffusion qui rassemble « tout le gratin de la psychanalyse, des parents d’autistes, des psychiatres, des neuroscientifiques, des journalistes… », selon le psychiatre Patrick Landman[3].
Le 21 septembre 2021, le Collectif envoie un email aux députés examinant la proposition de loi visant à interdire les thérapies de conversion en France, afin que la notion d'identité de genre soit exclue du texte; il justifie cette recommandation par le fait qu'une « attitudes de prudence » des professionnels vis-à-vis des enfants trans pourrait s'en retrouver criminalisée comme « visant à réprimer l’identité de genre vraie ou supposée d’une personne ».[5]. Bien que, d'après plusieurs journalistes, le collectif ait « l’oreille d’une partie du camp conservateur »[6],[7], la proposition d'exclusion de l'identité de genre n'est pas adoptée[8].
En 2022, dans un essai intitulé La Fabrique de l'enfant transgenre et dans un article[9], Caroline Eliacheff et Céline Masson, observant une « augmentation des cas d’enfants voulant changer de genre »[10], alertent sur ce qu’elles estiment être des dérives du « transgenrisme » chez les mineurs[11], un phénomène de « contagion sociale » selon elles « influencé par le discours de militants trans », qu'elles assimilent à un « embrigadement idéologique ». Ces déclarations sont jugées «transphobes» par des activistes[12].
Les deux psychanalystes portent le sujet au niveau de l'État français via l'Observatoire de la petite sirène[3][pas clair].
Invitées par la société suisse de psychanalyse à l'université de Genève pour présenter leur livre en mai 2022, Caroline Eliacheff et Céline Masson se voient empêchées de poursuivre leur intervention par une quinzaine d'étudiants militants LGBT+[13],[14],[15].
Critiques
Mediapart a publié une enquête, qui qualifie les positions du collectif de conservatrices[3]; le quotidien déclare que Caroline Eliacheff et Céline Masson, dans leur livre, « récusent la transphobie, tout en refusant l'autodétermination aux personnes trans », et reprennent la théorie controversée de la dysphorie de genre à apparition rapide[3]. Qualifiant de « désinformation » les positions du collectif et de ses deux principales autrices, plusieurs professionnels de santé intervenant auprès de mineurs transgenres en France précisent à Mediapart que leurs interventions ne comportent jamais de prescriptions de bloqueurs de puberté avant la puberté, ni de modifications corporelles avant 16 ans, seules les torsoplasties (concernant une part très faible des adolescents trans) étant autorisées avant la majorité[16]. Ces professionnels témoignent que le parcours de transition laisse de multiples possibilités aux mineurs de déterminer le genre dont ils se sentent proches, et d'être informés de l'aspect irréversible des modifications corporelles[16].
D'après le journaliste Marc Belpois dans Télérama, l'Observatoire diffuse une « panique morale face à l’explosion des demandes de consultation dans les centres spécialisés[17]. »
À l'été 2022, Karine Espineira démissionne du conseil scientifique de la Dilcrah pour dénoncer sa présidence par un membre du conseil scientifique de l’Observatoire de la petite sirène, le sociologue Smaïn Laacher[18]. La Dilcrah, interpellée par 9 associations LGBT au sujet d'une possible promotion des thérapies de conversion dans un guide diffusé par ce collectif, fait savoir en juillet 2022 que Smaïn Laacher démissionne du conseil scientifique de l'Observatoire de la Petite Sirène[19]. Mais ce dernier, dans un droit de réponse à une lettre ouverte cosignée par plusieurs enseignants de l'Université de Picardie Jules-Verne, précise qu'il n’y a «aucune relation, d’aucune sorte, entre la tribune évoquée[20] [et sa] démission du CS de l’Observatoire de la Petite Sirène»[21]. Cette lettre ouverte qualifie l'Observatoire de « lobby groupusculaire voué à soutenir et diffuser la transphobie la plus crasse sous un douteux vernis scientifique [...] et dont les liens avec l’extrême-droite catholique sont bien établis »[21].
Notes et références
- (en) « Qui sommes-nous | Observatoire de la Petite sirène », sur Petitesirene (consulté le ).
- Le Point.fr, « Changement de genre des mineurs : l’appel de personnalités aux médias », sur Le Point, (consulté le ).
- Rozenn Le Carboulec, « Mineurs trans : des groupuscules conservateurs passent à l’offensive », sur Mediapart (consulté le ).
- « Disney, école, sport, réseaux sociaux... Le lobbying trans s'introduit à tous les niveaux de la société », sur Le Figaro, (consulté le ).
- « "Il n'y a rien à guérir" : l'interdiction des "thérapies de conversion" des homosexuels pourrait devenir un délit », sur FranceTvInfo, (consulté le ).
- « Ce point qui empêche la loi sur les thérapies de conversion de faire l'unanimité », sur Le HuffPost, (consulté le ).
- « Thérapies de conversion : des députés LR demandent le retrait du terme "identité de genre" du texte », sur Valeurs actuelles, (consulté le ).
- « "Thérapies de conversion" : le Sénat ne cède pas aux sirènes d'une prétendue idéologie du genre », sur Causette (consulté le ).
- Caroline Eliacheff et Céline Masson, « L'enfant-transgenre, une mystification contemporaine ? », Les Cahiers de la Justice, vol. N° 4, no 4, , p. 555–557 (ISSN 1958-3702, DOI 10.3917/cdlj.2104.0555, lire en ligne, consulté le ).
- « Transidentité : deux spécialistes de l’enfance alertent sur l’augmentation des "dysphories de genre" », La Croix, (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le ).
- Espace analytique, dossier, « Caroline Eliacheff, Céline Masson, La Fabrique de l'enfant trans-genre », sur espace-analytique.org (consulté le ).
- Sophie Simon, « Littérature polémique – De quoi parlent ces ouvrages jugés "transphobes" par des activistes ? »
, sur Tribune de Genève, (consulté le ).
- Laure Lugon, « La liberté d’expression menacée à l’Uni de Genève », Le Temps, (ISSN 1423-3967, lire en ligne, consulté le ).
- Alexandre Cudré, « Des militants LGBTQ+ interrompent une conférence jugée "transphobe" », sur Blick, (consulté le ).
- Léman Bleu Télévision, « Une conférence sur la transidentité perturbée à l'uni », sur lemanbleu.ch (consulté le ).
- Rozenn Le Carboulec, « Comment les mineurs trans sont pris en charge : face à la désinformation, des médecins racontent », sur Mediapart (consulté le ).
- « Enfants transgenres : comment mieux les comprendre ? », sur Télérama, (consulté le ).
- Rozenn Le Carboulec, « Mineurs trans : la délégation interministérielle contre la transphobie en pleine crise », sur Mediapart (consulté le ).
- « Rencontre au sujet de l'Observatoire de la Petite sirène - Communiqué de presse commun », sur uvyk.mjt.lu (consulté le ).
- Il s'agit le tribune parue dans le Point du 7 juillet 2022.
- L'équipe des rédacteurs d'Academia, « Transphobie : lettre ouverte à l’Université Picardie Jules Verne », sur Academia (consulté le ).
Voir aussi
Bibliographie
- Caroline Eliacheff et Céline Masson, La Fabrique de l'enfant transgenre, éditions de l'Observatoire, janvier 2022
Liens externes
- Site officiel
- Argumentaire critique sur l’Observatoire de la petite sirène porté par 14 associations LGBT
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