Opiniâtre

L’Opiniâtre était un vaisseau de ligne construit par Jean Geoffroy à Brest en 1749, et lancé en 1750[1]. Il fut mis en chantier pendant la vague de construction qui sépare la fin de guerre de Succession d'Autriche (1748) du début de la guerre de Sept Ans (1755)[3]. Il participa à plusieurs engagements contre la marine anglaise et fut perdu par naufrage pendant la guerre de Sept Ans.

Opiniâtre

Profil d'un vaisseau de 64 canons du même type que l'Opiniâtre
Type Vaisseau de ligne
Histoire
A servi dans  Marine royale française
Quille posée [1]
Lancement
Armé [1]
Équipage
Équipage 650 hommes[N 1]
Caractéristiques techniques
Longueur 48,7 m[1]
Maître-bau 13,1 m
Tirant d'eau 6,7 m
Déplacement 1 100 t[1]
Propulsion Voile
Caractéristiques militaires
Armement 64 canons[1]

Caractéristiques principales

L’Opiniâtre était un bâtiment moyennement artillé mis sur cale selon les normes définies dans les années 1730-1740 par les constructeurs français pour obtenir un bon rapport coût/manœuvrabilité/armement afin de pouvoir tenir tête à la marine anglaise qui disposait de beaucoup plus de navires[4]. Il faisait partie de la catégorie des vaisseaux dite de « 64 canons » dont le premier exemplaire fut lancé en 1735 et qui sera suivi par plusieurs dizaines d’autres jusqu’à la fin des années 1770, époque où ils seront définitivement surclassés par les « 74 canons[N 2]. »

Sa coque était en chêne, son gréement en pin, ses voiles et cordages en chanvre[7]. Il était moins puissant que les vaisseaux de 74 canons car outre qu'il emportait moins d'artillerie, celle-ci était aussi pour partie de plus faible calibre, soit :

Cette artillerie correspondait à l’armement habituel des 64 canons. Lorsqu'elle tirait, elle pouvait délivrer une bordée pesant 540 livres (soit à peu près 265 kg) et le double si le vaisseau faisait feu simultanément sur les deux bords[8]. Chaque canon disposait en réserve d’à peu près 50 à 60 boulets, sans compter les boulets ramés et les grappes de mitraille[7].

Pour nourrir les centaines d’hommes qui composait son équipage, c’était aussi un gros transporteur qui devait avoir pour deux à trois mois d'autonomie en eau douce et cinq à six mois pour la nourriture[9]. C'est ainsi qu'il embarquait des dizaines de tonnes d’eau, de vin, d’huile, de vinaigre, de farine, de biscuit, de fromage, de viande et de poisson salé, de fruits et de légumes secs, de condiments, de fromage, et même du bétail sur pied destiné à être abattu au fur et à mesure de la campagne[9].

Une courte carrière (1750-1757)

Le combat du Cap-Français auquel participa l’Opiniâtre en 1757.

Ce vaisseau était commandé par le capitaine de Moëlien lors de la campagne dans la flotte de 18 voiles de Dubois de La Motte en chargée de convoyer des renforts pour le Canada (onze transports et quatre frégates escortés par trois vaisseaux). Il fut à cette occasion armé en flûte, c'est-à-dire réduit à 22 canons pour permettre le transport de 9 compagnies du Béarn. Le , alors qu'il rentrait du Canada et qu'il était en vue des côtes bretonnes à Penmarc'h, il fut attaqué par une frégate anglaise de 36 canons et un senau de 12 canons[10]. Bien que toujours armé en flûte, il réussit à se débarrasser de ses adversaires après un long combat. Ses 22 canons avaient tiré 523 projectiles[10].

En 1756, l’Opiniâtre gardait le même capitaine, mais se voyait intégré à une division de trois vaisseaux deux frégates et une corvette sous les ordres de Guy François de Kersaint[11]. Elle avait pour mission d’aller attaquer les établissements anglais de la côte d’Afrique occidentale puis de passer aux Antilles. Elle partit de Brest fin [12]. En , elle détruisit les comptoirs anglais du Sénégal et de Gambie, capturant de nombreux navires négriers puis elle passa à Saint-Domingue[12]. Au moment où il allait quitter l’île en accompagnant un grand convoi marchand, il apprit la présence de la division de la division du capitaine Forest qui avait été envoyée de la Jamaïque pour l’intercepter[13]. Ayant pris ses disposition, il accepta le combat contre les quatre vaisseaux anglais qui lui donnèrent chasse le . À l’issue d’un violent combat, les Anglais lâchèrent prise et la division de Kersaint pu reprendre sa route le après s’être réparée et avoir reformé le convoi marchand[12].

La division arriva un mois plus tard sur les côtes de France. Cette croisière bien conduite avait durée treize mois. Elle fut cependant marquée par un naufrage : celui de l’Opiniâtre, dans la nuit du 13 au , dans le port de Brest. Le Conseil de guerre conclut à la perte du vaisseau à la suite d'une erreur humaine : deux lieutenants, le chevalier de Roussel Préville et le chevalier de Landemont furent punis d’interdiction temporaire de commander[12]. L’Opiniâtre fait partie des trente-sept vaisseaux perdus par la France pendant la guerre de Sept Ans[14].

Notes et références

Notes

  1. Le ratio habituel, sur tous les types de vaisseau de guerre au XVIIIe siècle était d'en moyenne 10 hommes par canon, quelle que soit la fonction de chacun à bord. L'état-major est en sus. Cet effectif réglementaire pouvait cependant varier considérablement en cas d'épidémie, de perte au combat, de manque de matelots à l'embarquement ou de désertion lors des escales[2].
  2. Les 74 canons en étaient par ailleurs un prolongement technique apparu neuf ans après le lancement du premier 64 canons, le Borée[5],[6]. Sur la chronologie des lancements et les séries de bâtiments, voir aussi la liste des vaisseaux français.

Références

  1. « L’Opiniâtre », sur threedecks.org (consulté le ).
  2. Acerra et Zysberg 1997, p. 220. Voir aussi Jean Meyer dans Vergé-Franceschi 2002, p. 105.
  3. Villiers 2015, p. 126.
  4. Meyer et Acerra 1994, p. 90-91.
  5. Acerra et Zysberg 1997, p. 67.
  6. Meyer et Acerra 1994, p. 90-91.
  7. Acerra et Zysberg 1997, p. 107 à 119.
  8. Selon les normes du temps, le navire, en combattant en ligne de file, ne tirait que sur un seul bord. Il ne tirait sur les deux bords que s'il était encerclé ou s'il cherchait à traverser le dispositif ennemi. Base de calcul : 1 livre = 0,489 kg.
  9. Jacques Gay dans Vergé-Franceschi 2002, p. 1486-1487 et Jean Meyer dans Vergé-Franceschi 2002, p. 1031-1034.
  10. Lacour-Gayet 1910, p. 258.
  11. Les deux autres vaisseaux étaient l’Intrépide (74 canons), navire amiral de Kersaint, et le Greenwich (50). Les frégates étaient la Sauvage et la Licorne de 32 canons. Troude 1867-1868, p. 344-345
  12. Lacour-Gayet 1910, p. 390 et 391.
  13. Troude 1867-1868, p. 344-345
  14. Dix-huit vaisseaux pris par l'ennemi ; dix-neuf vaisseaux brûlés ou perdus par naufrage. Vergé-Franceschi 2002, p. 1327.

Voir aussi

Sources et bibliographie

 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Michel Vergé-Franceschi, La Marine française au XVIIIe siècle : guerres, administration, exploration, Paris, SEDES, coll. « Regards sur l'histoire », , 451 p. (ISBN 2-7181-9503-7)
  • Michel Vergé-Franceschi (dir.), Dictionnaire d'histoire maritime, Paris, éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 1508 p. (ISBN 2-221-08751-8 et 2-221-09744-0, BNF 38825325). 
  • Jean Meyer et Martine Acerra, Histoire de la marine française : des origines à nos jours, Rennes, Ouest-France, , 427 p. [détail de l’édition] (ISBN 2-7373-1129-2, BNF 35734655)
  • Martine Acerra et André Zysberg, L'essor des marines de guerre européennes : vers 1680-1790, Paris, SEDES, coll. « Regards sur l'histoire » (no 119), , 298 p. [détail de l’édition] (ISBN 2-7181-9515-0, BNF 36697883)
  • Jean-Michel Roche (dir.), Dictionnaire des bâtiments de la flotte de guerre française de Colbert à nos jours, t. 1, de 1671 à 1870, éditions LTP, , 530 p. (lire en ligne)
  • Alain Demerliac, La Marine de Louis XV : Nomenclature des Navires Français de 1715 à 1774, Nice, Oméga,
  • Rémi Monaque, Une histoire de la marine de guerre française, Paris, éditions Perrin, , 526 p. (ISBN 978-2-262-03715-4)
  • Patrick Villiers, La France sur mer : De Louis XIII à Napoléon Ier, Paris, Fayard, coll. « Pluriel », , 286 p. (ISBN 978-2-8185-0437-6). 
  • Onésime Troude, Batailles navales de la France, t. 1, Paris, Challamel aîné, 1867-1868, 453 p. (lire en ligne)
  • Georges Lacour-Gayet, La Marine militaire de la France sous le règne de Louis XV, Honoré Champion éditeur, (1re éd. 1902) (lire en ligne). 

Articles connexes

Lien externe

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