Péritonite infectieuse féline

La péritonite infectieuse féline (PIF) est une maladie infectieuse des félidés due à un coronavirus félin (FCoV), dont le pronostic est presque toujours fatal.

Rein infecté par la PIF, montrant une réaction immunitaire

La PIF est une réinfection aggravée du FCoV. Le FCoV a normalement un tropisme pour les cellules intestinales et provoque une FECV (Feline Enteric CoronaVirus), une maladie relativement bénigne.

En présence d'anticorps facilitants, le FECV se transforme en péritonite infectieuse féline et développe un tropisme pour les globules blancs macrophages où le virus se reproduit. La réponse immunitaire cause une réaction fortement inflammatoire dans les tissus environnants. L’incidence de la maladie est de 1 pour 5 000 ménages où vivent un ou deux chats.

Transmission et infection

La prévalence du FCoV est très importante, en particulier lorsque de nombreux chats cohabitent. La contamination se fait par ingestion (transmission féco-orale) ou inhalation. Les fèces constituent la source la plus fréquente ; des surfaces contaminées telles que la vaisselle et les tissus peuvent également être incriminés.

La plupart des chats infectés par le FCoV ne développent aucun signe clinique, si ce n’est une diarrhée légère. Pour contracter une PIF, il faut que le chat soit réinfecté par le FCoV ou qu'il ait été vacciné contre le FCoV avec un virus inactivé ou un vaccin ciblant la seule protéine S. Si le taux d'anticorps est très élevé, les anticorps sont neutralisants. Lorsque le taux d'anticorps baisse, la balance entre anticorps neutralisants et facilitants s'inverse, et le chat risque une réinfection aggravée[1].

Anticorps neutralisants

En temps normal, les anticorps contre la protéine S ou spike du virus neutralisent le FCoV. Une fois opsonisés (c'est-à-dire « enrobés ») par des anticorps, les résidus de virus sont gobés par des globules blancs (les macrophages) via les récepteurs Fc. Un récepteur Fc est une protéine transmembranaire présente à la surface des globules blancs.

Anticorps facilitants

Les anticorps ciblant la séquence d’acides aminés IVGAITAVN du FCoV, située aux codons 767-776 de la protéine S, ne sont pas neutralisants mais facilitants. Une fois opsonisés par des anticorps facilitants, les FCoV non neutralisés sont absorbés par les globules blancs. Le problème est que le FCoV est un coronavirus capable de se reproduire dans les macrophages. En présence d’anticorps facilitants, le FCoV perd son tropisme intestinal et développe un tropisme pour les macrophages où il se réplique activement. Ce qui dégénère en péritonite infectieuse féline (PIF)[2],[3],[4],[5].

À noter que le chat peut contracter une PIF après avoir contracté le coronavirus canin (CCoV)[1]. Les anticorps facilitants du CCoV correspondent à la séquence IVGAMTSIN située aux codons 753-762 de la protéine S. La séquence IVGAMTSIN du CCoV reconnaît la séquence IVGAITAVN du FCoV, et génère donc des anticorps facilitants chez le chat.

Le risque de contracter une PIF est accru chez les chats très jeunes ou très vieux, ou encore chez les sujets immunodéprimés (atteints de leucose par exemple). Aussi, un facteur stressant, tel qu'une opération chirurgicale, peut contribuer au développement de la maladie.

Signes cliniques

La maladie peut prendre deux formes différentes : sèche ou humide. Cette dernière, représentant 60 à 70 % des cas, connait une évolution plus rapide.

Forme sèche

La PIF sèche se manifeste par un manque d’appétit accompagné de fièvre et d’un ictère. Le chat présente généralement des signes oculaires ou neurologiques. Il peut par exemple montrer des difficultés à marcher et se tenir debout, ou encore devenir aveugle.

Les symptômes neurologiques se présentent dans la forme sèche lorsque le virus a traversé la barrière hémato-encéphalique. À partir de ce moment, la maladie évolue rapidement. Le félin perd petit à petit sa motricité, provoquant au départ une asthénie, puis, une paralysie. En ce cas, le tractus intestinal pourrait être ralenti au début, puis absent. Si la paralysie apparaît, on observe d'abord une constipation puis rapidement, l'incapacité à déféquer. Idem pour le système urinaire, on peut observer une rétention d'urine et un globe vésical au niveau de la vessie. Dans les deux cas, le chat cesse d'aller dans sa litière car il ne ressent plus l'envie d’uriner.

En résumé, les symptômes intestinaux et urinaires peuvent être confondus avec d'autre maladies félines mais lorsqu'ils sont accompagnés de plusieurs signes cliniques neurologiques, ils peuvent contribuer à poser le diagnostic.

Forme humide

Liquide caractéristique de la forme humide.

La PIF humide est caractérisée par l’accumulation de liquide dans les cavités : abdomen (ascite) ou thorax (épanchement pleural). L'accumulation de liquide peut causer des difficultés respiratoires (dyspnée). Comme pour la forme sèche, le sujet perd l’appétit et développe fièvre et ictère. L'amaigrissement est fréquent.

Diagnostic

Cytologie du liquide montrant des neutrophiles, des macrophages et des lymphocytes.

Les symptômes de la PIF ne sont pas circonscrits à cette maladie, ce qui peut rendre le diagnostic compliqué. Pour la forme sèche, une hyperglobunémie polyclonale associée à une sérologie coronavirus positive peuvent orienter le diagnostic. La forme humide se manifeste par la présence d'un épanchement pleural ou abdominal caractéristique : exsudat aseptique de couleur jaune citrin présentant un taux protéique supérieur à 25 g/L et une densité supérieure à 1,025. Le diagnostic peut être confirmé post-mortem par une analyse histologique des tissus biologiques.

Traitement

Il n’existe aucun traitement officiellement autorisé en Europe spécifique de la PIF, les soins sont essentiellement symptomatiques (traitement des crises convulsives et des difficultés respiratoires), du moins aussi longtemps qu’une certaine qualité de vie peut être assurée. Le vétérinaire peut prescrire de la prednisolone ou d’autres médicaments immunosuppresseurs, sauf en cas d’infections concomitantes. La forme humide est généralement d’évolution trop rapide pour envisager la moindre thérapie.

Quelques cas de rémissions par interféron oméga félin (en) ont été rapportés.

L’isolement n’est pas nécessaire car la forme mutée du coronavirus ne se trouve que dans les globules blancs et n’est pas exsudée.

Le Remdesivir (GS-441524) s'est révélé efficace lors d'un essai clinique où il a permis de guérir la grande majorité des chats malades[6],[7],[8]. Ce traitement n'est toutefois pas encore autorisé en Europe.

Notes et références

  1. (en) Fred W. Scott, « Evaluation of Risks and Benefits Associated with Vaccination against Coronavirus Infections in Cats », Adv Vet Med., (lire en ligne, consulté le ).
  2. (en) W. Huisman, « Vaccine-induced enhancement of viral infections », Vaccine, (lire en ligne, consulté le ).
  3. (en) Niels C. Pedersen, « An update on feline infectious peritonitis: Virology and immunopathogenesis », The Veterinary Journal, (lire en ligne, consulté le ).
  4. (en) Wen Shi Lee, « Antibody-dependent enhancement and SARS-CoV-2 vaccines and therapies », Nature Microbiology, (lire en ligne, consulté le ).
  5. Acquisition of macrophage tropism during the pathogenesis of feline infectious peritonitis is determined by mutations in the feline coronavirus spike protein
  6. Stéphane Korsia-Meffre, « Remdésivir : une molécule testée pour une maladie du chat, la fièvre Ebola, et maintenant l’infection à SARS-CoV-2 », sur Vidal, (consulté le ).
  7. « Péritonite infectieuse féline : un traitement antiviral humain prometteur contre la PIF chez le chat », sur Vétitude, (consulté le ).
  8. (en) Niels C Pedersen, Michel Perron, Michael Bannasch, Elizabeth Montgomery, Eisuke Murakami, Molly Liepnieks et Hongwei Liu, « Efficacy and safety of the nucleoside analog GS-441524 for treatment of cats with naturally occurring feline infectious peritonitis », Journal of Feline Medicine and Surgery, SAGE Publications, vol. 21, no 4, , p. 271-281 (ISSN 1098-612X et 1532-2750, OCLC 38826277, PMID 30755068, PMCID 6435921, DOI 10.1177/1098612X19825701)

Annexes

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