Pari sportif
Le pari sportif est un jeu d'argent sur la prédiction d'un évènement lors d'une rencontre sportive. Il existe de nombreux types de paris, dont les plus simples consistent à parier sur la victoire d'une équipe ou d'un sportif. Chaque pari a une cote et c'est elle qui permet de connaître à l'avance, en fonction de la somme misée, le montant gagné si l'événement se produit.
En notation décimale, si on mise 10 € sur l'équipe A dont la cote est de 1,2 par exemple :
- Si A gagne, la somme récupérée (gain) est de 12 €, soit une plus-value de 2 € (+ 20 %) ;
- Si A ne gagne pas, la somme misée est perdue, soit 10 €.
Les paris sont proposés par des bookmakers qui sont des organismes autorisés à proposer aux joueurs de parier. En français et avec l'essor des jeux d'argent sur internet, le terme de bookmaker fait généralement référence au site de paris en ligne[1].
Les paris sportifs étaient interdits en France jusqu'au , la veille de l'ouverture de la Coupe du monde de football en Afrique du Sud. À compter de cette date, l'Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL) a été créée à la suite de la loi relative à l'ouverture à la concurrence des jeux d'argent et de hasard en ligne[2]. Elle a été remplacé par l’Autorité nationale des jeux (ANJ) en 2019. Son rôle de réguler le marché et distribue des agréments officiels aux opérateurs sur le territoire français[3],[4].
Histoire
Les paris sportifs se pratiquaient déjà en Grèce antique et au Moyen Âge pour les tournois. En France, le premier type de pari a été le pari mutuel en 1865, puis a été légalisé en 1887 sous le nom de Pari mutuel urbain[5].
Les paris sportifs dans le football datent des années 1920, de manière légale et illégale[6]. À cette époque, le parieur remplit un bulletin, appelé grille pour une dizaine de match d'une journée de championnat : pour chacun des rencontres, il note 1, 2 ou N en fonction du pronostic qu'il réalise, dans l'ordre respectif une victoire de l'équipe à domicile, une victoire de l'équipe adverse ou un match nul[6]. Ainsi, deux modèles économiques ont émergés en Europe. Le premier fait émerger de nombreux acteurs et crée un marché concurrentiel, comme ce fut le cas en Angleterre. L'autre modèle, plutôt social-démocrate, rend les entreprises illégales et crée un monopole d'État, comme ce fut le cas en Suède[6].
Cotes
La cote d'un pari est une retranscription de la probabilité que l'évènement se produise.
La cote permet de savoir quel serait le gain en cas de réalisation de l'évènement (victoire d'une équipe, nombre de buts marqués, etc.). Celle-ci est calculée et proposée par les bookmakers en fonction de leurs estimations des probabilités de survenance de l'évènement en se basant notamment sur des données statistiques, l'historique des rencontres et de manière générale toutes les informations disponibles pertinentes.
Elle tient également compte de la répartition (prévisionnelle ou réelle) des sommes misées par les parieurs. Les cotes proposées peuvent donc varier au cours du temps en fonction de ces critères.
Notation des cotes
La cote du pari peut être exprimée selon trois notations différentes : européenne, anglaise ou américaine. Le tableau ci-dessous donne un exemple simple des différentes notations de cotes pour une même rencontre entre deux équipes A et B avec les gains et plus-values possibles en cas de victoire.
Équipe A | Équipe B | |
---|---|---|
Cote européenne | 1,2 | 3 |
Cote anglaise | 1/5 | 2/1 |
Cote américaine | -500 | +200 |
Mise | 100 € | 100 € |
Gain | 120 € | 300 € |
Plus value | 20 € | 200 € |
Cote européenne
La cote européenne est utilisée comme son nom l'indique en Europe. En France par exemple, elle est proposée par défaut sur les sites de paris sportifs. C'est un indice décimal, qui indique le gain potentiel suivant la mise :
Pour un pari d'une mise de 100 euros sur la victoire de A, si elle se réalise, le parieur reçoit un gain correspondant à la mise multipliée par la cote, soit 100 * 1,2 = 120 euros. En tenant compte de la mise de 100 euros, le parieur a donc réalisé une plus-value de 120 - 100 = 20 euros.
Cote anglaise
La cote anglaise (très couramment utilisée au Royaume-Uni)permet de connaître rapidement la plus-value possible et non le gain :
Elle est notée sous forme d'une fraction (par exemple ) et non sous forme décimale. La plus-value réalisée par le joueur se calcule ainsi simplement en multipliant la mise par la cote. Par exemple pour une mise de 100 euros sur la victoire de A, la plus-value est de 20 euros (et le gain correspond à la mise plus la plus-value, soit 20 + 100 = 120 euros).
Cote américaine
La cote américaine peut s'exprimer de deux manières distinctes :
- soit elle indique quelle somme il faut miser pour avoir une plus-value de 100 euros. La cote est alors notée négativement. La cote de l'équipe A dans l'exemple est donc de -500, ce qui indique qu'il faut miser 500 euros pour avoir une plus-value de 100 euros. La plus-value se calcule par .
- soit elle indique quelle plus-value est réalisée en pariant 100 euros. La cote est alors notée positivement et la plus-value se calcule par
Traditionnellement, les cotes américaines sont exprimées négativement si la cote est inférieure à 100 (dans l'exemple donné, on notera plutôt -500 que +20 pour la cote américaine de l'équipe A).
Commission du bookmaker
Pour être bénéficiaire à long terme, un bookmaker prend une commission sur les paris qui se reflète dans les cotes proposées.
Dans le cas d'un pari mettant en jeu N équipes (dont une seule sera vainqueur) avec Ci la cote européenne de chaque équipe i, si on pose P la proportion d'argent redistribuée par le bookmaker, on a :
En reprenant l'exemple de cotes précédent avec l'équipe A à une cote européenne de 1,2 et l'équipe B à une cote de 3, on trouve P=85,7%. Le bookmaker prend donc une commission de 14,3%.
Probabilité estimée de survenance de l'évènement
Dans le cas d'un pari mettant en jeu N équipes (dont une seule sera vainqueur) avec Ci la cote européenne de chaque équipe i, il est possible de déterminer les probabilités de survenance de l'évènement "victoire de l'équipe i" par le calcul suivant :
où P est la proportion d'argent redistribuée par le bookmaker et Ci la cote européenne de l'équipe i.
Dans l'exemple proposé avec seulement deux équipes A et B, la probabilité de victoire de l'équipe A est de 71,4 % et celle de B est de 28,6%.
Législation
Législation en France
Les paris sportifs en France sont régulés par l'ANJ (Autorité nationale des jeux, anciennement l'ARJEL). Cet organisme étatique (AAI) permet notamment de réguler la venue de nouveaux opérateurs sur le marché grâce à l’attribution d’agrément pour rentrer sur ce marché.
L’ANJ a plusieurs missions de régulation, elle doit gérer la protection des joueurs, l’autorisation de rentrer sur le marché, lutter contre les sites illégaux, la fraude, le blanchiment d’argent et aussi contrôler la sincérité des opérations de jeux réalisées par les opérateurs.
Durant la saison 2006-2007, à la suite de l'affaire Bwin, la Ligue de football professionnel a interdit aux clubs de Ligue 1 et de Ligue 2 d'être sponsorisés par des sites de paris sportifs en ligne (principalement sponsor maillot et panneaux publicitaires). Une douzaine de clubs est concernée : Auxerre, Bordeaux, Le Mans, Lens, Lorient, Monaco, Nantes, Nice, Saint-Etienne, Toulouse, Montpellier et Metz.
Le , l'Autorité de Régulation des jeux en ligne (ARJEL) a délivré ses premiers agréments dont Bwin a fait partie, mettant ainsi fin aux possibilités de poursuites[7]. C'est en application de l'article 21 de la loi 2010-476 du que l'ARJEL régule le marché des paris sportifs. La loi indique que "la politique de l’État en matière de jeux d’argent et de hasard a pour objectif de limiter et d’encadrer l’offre et la consommation de jeux et d’en contrôler l’exploitation"[8].
L'ordonnance du [9] ratifiée par le président de la République cette même date et publiée au journal officiel le lendemain, fait de l’autorité nationale des jeux (ANJ) l’autorité principale de la régulation des jeux d’argent et de hasard en France.
En ce qui concerne les paris sportifs, elle a désormais pour mission d'agréer les nouveaux opérateurs du secteur. Cette fonction était auparavant celle de l'ARJEL, le nombre de bookmakers légaux en France à la fin de sa mission d'agrément était donc de 15.
Au-delà de la délivrance ou non des agréments, l'autorité nationale des jeux pourra également ordonner à un opérateur agréé le retrait de toute campagne marketing qu'elle jugera comme une incitation excessive à jouer.
Législation pour les acteurs
Si désormais les paris sportifs sont légaux pour le grand public, d’autres règles drastiques demeurent : tout acteur de compétition sportive et lié d’une façon ou d’une autre à des opérateurs de paris sportifs, se voit dans l’obligation de ne pas participer à des opérations en relations avec les paris sportifs. Ainsi, les clubs de sport professionnels affiliés à des fédérations sportives agrégées stipulent dans les contrats qu’ils font signer à leurs joueurs, l’interdiction de prendre part à des paris sportifs sous peine de poursuite judiciaire.
De nombreux évènements montrent que cette loi est utile et nécessaire, comme l’illustre l’affaire des paris truqués en handball en 2012, et l’implication de sept joueurs du MAHB et deux du PSG.
Taxation des paris en ligne
La taxation sur les paris sportifs se fait au moment de la prise de pari. Pour une mise de 100 €,
- l’État prélève 5,70 € pour lui-même au titre des articles 302 bis ZH[10] et 302 bis ZK[11] du Code général des impôts.
- Il prélève également 1,80 € au profit de la Sécurité sociale au titre des articles L137-21[12] et 23[13] du Code de la Sécurité sociale.
- Troisième prélèvement, celui au profit du Centre national pour le développement du sport, qui se monte également à 1,80 € au titre de l’article 1609 tricies[14] du Code général des impôts.
- Quatrième prélèvement, qui vient compléter le précédent, avec pour but de financer les infrastructures sportives. Il est d’un montant de 0,30 €. Il a été créé pour financer l’Euro 2016, et devait prendre fin en 2017. Mais les Jeux olympiques de 2024 ont permis en 2017 une prorogation de cette taxe jusqu’en 2024… (article 1609 novovicies[15]).
Au total, pour une mise de 100 €, les taxes prélevées à la source sont de :
5,70 + 1,80 + 1,80 + 0,30 = 9,60 € soit 9,6 % de la mise.
Sur les 100 € de mise, le bookmaker dispose en réalité de 90,4 € à répartir entre sa rémunération et les gagnants.
Législation au Québec
Le marché québécois, même plus globalement le marché canadien, est bien différent des marchés européens (notamment la France, la Belgique ou le Royaume-Uni). En 2011, le gouvernement canadien a ouvertement autorisé les acteurs étrangers à opérer sur son sol à condition qu'ils obtiennent la licence agréée de la province visée.
Certaines autorités comme l'ARJEL en France contrôlent quotidiennement les sites de paris en ligne à plusieurs niveaux (fraude, paiements, etc.) ce qui n'est pas le cas au Canada.
Le Code civil du Québec contient des règles sur le pari aux articles 2629[16] et 2630[17] C.c.Q. Ces dispositions prévoient que les contrats de jeu et de pari sont valables dans les cas expressément autorisés par la loi ; lorsqu'ils ne sont pas expressément autorisés, le gagnant ne peut exiger le paiement de la dette et le perdant ne peut répéter la somme payée. Mais en cas de fraude ou de supercherie, il y a lieu de récupérer l'argent obtenu frauduleusement.
Données économiques
Les paris sportifs sont les jeux d'argent les plus pratiqués en ligne. Ils représentent en 2009, 42 % ; tandis que les autres jeux d'argent représentent 38 % et le poker est à 22 %[18]. La répartition n'est pas identique en fonction du pays. Le Royaume-Uni le pratique à 26 % quand l'Asie à 77 %[19].
En France, les paris représentent 350 millions d'euros de mise[20]. Six mois après l'ouverture du marché à la concurrence, les paris sportifs y représentent 11 % du marché face au 79 % du poker. Durant cette période, les paris se sont répartis à 57 % pour le football, 25 % pour le tennis et les 18 % restant sur les autres types de sport[21]. En 2016, uniquement pour le championnat d'Europe de football, 156 millions d'euros sont dépensés uniquement pour les matchs du premier tour[6].
Critique et dérive
Le pari sportif, très éloigné des valeurs du sport, éthiques et morales, telles que promues par Pierre de Coubertin est l'une des source du dilemme éthique qui se pose aux instances de gouvernance de méga-évènements sportifs très médiatisés (jeux olympiques, coupes nationales, coupes du monde...) qui n'échappent pas à la marchandisation ni, fréquemment, au Sportswashing ou à d'autres dérives (corruption, dopage, tricheries...) encouragées à l'ampleur des sommes dépensées[22].
Entre 2008 et 2011, un réseau criminel asiatique sévissait en Europe sur les matchs de football grâce à la complicité de plusieurs acteurs, comme des dirigeants, des arbitres ou des joueurs, afin de remporter des paris sportifs. Celui-ci fut démanteler en 2013 par Europol, l'agence européenne de police criminelle[23].
Notes et références
- « Sport Trading Blog | Comment choisir son bookmaker ? Sur quel site de pari sportif parier ? », sur Sport Trading Blog, (consulté le )
- Loi no 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne, (lire en ligne).
- « Opérateurs agréés et liste sport | ANJ », sur anj.fr (consulté le )
- « Football Betting Bookmaker » lundi 28 février 2022
- Toulemonde 2011, p. 20.
- Breuil 2017, p. 108.
- « Paris en ligne : les jeux sont ouverts », sur Le Parisien,
- Benoît Bréville, « Les pigeons et les requins », sur Le Monde diplomatique, (consulté le )
- « Ordonnance du 2 octobre 2019 réformant la régulation des jeux d’argent | Vie publique.fr », sur www.vie-publique.fr (consulté le )
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000025516081&cidTexte=LEGITEXT000006069577
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006069577&idArticle=LEGIARTI000028447850
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000025516095&cidTexte=LEGITEXT000006073189
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000022209254&cidTexte=LEGITEXT000006073189
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000030702120&cidTexte=LEGITEXT000006069577&categorieLien=id&dateTexte=20150606
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006069577&idArticle=LEGIARTI000022207949
- Code civil du Québec, RLRQ c CCQ-1991, art 2629 <http://canlii.ca/t/6c3nl#art2629> consulté le 2020-01-19
- Code civil du Québec, RLRQ c CCQ-1991, art 2630 <http://canlii.ca/t/6c3nl#art2630> consulté le 2020-01-19
- Toulemonde 2011, p. 23.
- Toulemonde 2011, p. 24.
- Toulemonde 2011, p. 26.
- Toulemonde 2011, p. 27.
- Kathleen Rodenburg, Louise Hayes, Lianne Foti et Ann Pegoraro, « Responsible Leadership in Sport: An Ethical Dilemma », Societies, vol. 11, no 3, , p. 85 (ISSN 2075-4698, DOI 10.3390/soc11030085, lire en ligne, consulté le )
- Brueil 2017, p. 107.
Annexes
Bibliographie
- [Toulemonde 2011] Quentin Toulemonde, Les paris sportifs en ligne : comprendre, jouer, gagner, Amphora, , 384 p. (ISBN 978-285180-803-5).
- [Breuil 2017] Xavier Breuil, « Le marché des paris sportifs dans le football : le cas de la Belgique de 1922 à 1980 », Histoire, Économie et Société, vol. 36, no 2, , p. 107-126 (JSTOR 26448090).
Voir aussi
- Pari mutuel
- Jeu de pronostics en France
- PMU
- Prédiction statistique des résultats de football
- Betting Exchange
- Portail du sport