Percheron (idiome)

Le percheron est un dialecte parlé dans le Perche qui fait partie de la langue d'oïl et plus particulièrement du français central.

Pour l’article homonyme, voir Percheron.

percheron
percheron
Pays France
Région Perche
Typologie SVO
Classification par famille

Caractéristiques

Pour Achille Genty, l'idiome percheron serait un reste de la première langue d'oïl (antérieure à celle du XIe siècle) rajeunie ou déformée par le normand. Cependant, les recherches plus récentes[1] montrent que le percheron, y compris celui parlé dans la partie normande du Perche, ne présente aucune des caractéristiques principales du normand mais, au contraire, ces différences le relient au groupe du français central.

Exemples
percheronnormand méridionalnormand septentrional
chat chat cat
manger manger maungî / mangier
cinq cinq chinq
arêtes érêtes érêtes
poésson (poisson) peîçon peîchon
  • Absence des traits consonantiques propres au nord de la ligne Joret.
  • Absence de palatalisation du /k/, commune ailleurs en Normandie
  • Traitement différent du /e/ long et du /i/ bref latin, ce qui aboutie partout en Normandie à /e/ (noté é ou ei) sauf à la limite du domaine picard, mais il aboutit à /we/ (comme en ancien français, noté oi) en percheron etc.

En outre, les termes d'origine norroise propres au normand en sont absents, tels :

  • normand garde, grade, gradil(l), gadelle, gradelle / percheron grwezeille (groseille)

Exemple

La Grenouille et le bœuf, libre adaptation par P. Genty (1770 - 1821) d'après La Fontaine, La Grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le Bœuf, Livre I, fable 3.

percheron français

Ein jouo, neun' jun' guernaoude
Ou pû grouss' com ein eu,
Vut neun beu
Si pôrri graes, si tan dodeu,
Qu'i n'ein fsion vramein ptit sa blaoude:
C'éta neune meingé du baon Duieu.

Aou coup (i féllion qu'o feût saoule),
Aou coup, lao vlao qu'o s'teruaillain,
Qu'o s'einflain, qu'o s'eintribouillain;
jémais n-aon ao rein veu d'pu droule.

-"J'sis grouss' com li", qu'o fsion,
"Pu grouss'.." - Pâ co, créeteure
Liée roponnut d-dein lao vaerdure
Neun' pu vieul' guernaoud' qui guichion
-"M'y vlao." - "Pâ co." - Lao fouttu béte
N-ein feit tan é tan ao sao téte
Qu'o finit pa s'rump tout' lao piau;
S'keruit lao pans', é chut dein l'iau.

Trebain qui vlion maignai lao pleume
Frain miéx, com mai, d'batti l'einclume.
J'n'ein s'on pa loun, ma çao n'fson rein:
Aou mains c'quo j'fom, aj eul fom bein.

Un jour, une jeune grenouille,
grosse au plus comme un œuf,
Vit un bœuf
Si "pourri" gras, tellement dodu,
Qu'il en faisait, ma parole, craquer sa culotte.
C'était un manger digne du bon Dieu.

Aussitôt (il fallait qu'elle fût ivre),
Aussitôt la voilà qui se travaille,
Qui s'enfle, qui se gonfle de vent;
Jamais on ne vit rien de plus singulier.

-"Je suis grosse comme lui", faisait elle,
-"plus grosse.." - "Pas encore ma fille",
lui répondit de dedans la verdure,
Une grenouille plus âgée qui souriait.
-"M'y voilà!" - "Pas encore." - La triple bête
en fit tant et tant à sa tête
Qu'elle finit par se rompre toute la peau;
Se creva la panse et tomba dans l'eau.

Certains qui veulent manier la plume
Feraient mieux, comme moi, de battre l'enclume.
Je n'en sais pas long, mais cela ne fait rien:
Au moins, ce que je fais, je le fais bien.

Bibliographie

  • Glossaire du vieux parler anetais, Bulletin de la Société « Les Amis d'Anet » no 4, 1935[2]
  • M.-J. Beaumert, Coup d'œil sur le patois percheron, BullOrne no 80 (1962) et no 81 (1963)[2]
  • Félix Chapisseau - le folklore de le Beauce et du Perche, Les littératures populaires de toutes les nations, tome 45 et 46, Paris, 1902[2].
  • Louis Duval, L'enquêt philologique de 1812...[2]
  • Achille Genty, Essai sur la parenté et la formation des langues, Paris, 1863
  • Helmut Langescheid, Das Dorf Souancé-au-Perche. Eine volkskundliche Darstellung., HamStud no 31, Hamburg, 1938[2]
  • René Lepelley, La Normandie dialectale, Presses universitaires de Caen, 1999
  • Paul Martelière, Glossaire du Vendômois., Orléans/Vendôme, 1893[2]
  • A. Peschot, Vocabulaire des mots du langage rustique usité dans le Perche et spécialement à Saint-Victor-de-Buthon, Bulletin du Perche no 8, 1909[2]
  • Anonyme, Suite au vocabulaire des mots du langage rustique usité dans le Perche, BullPerche no 8, 1909[2]
  • Prosper Vallerange, Le clergé, la bourgeoisie, le peuple, l'ancien régime et les idées nouvelles, Paris, 1861[2]

Notes et références

  1. René Lepelley, La Normandie dialectale, Presses universitaires de Caen 1999.
  2. Walther von Wartburg, Hans-Erich Keller, Robert Geuljans, Bibliographie des dictionnaires patois galloromans (1550-1967), Librairie Droz, 1969.

Voir aussi

Liens internes

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