Pont suspendu de Tonnay-Charente

Le pont suspendu de Tonnay-Charente est un ouvrage d'art enjambant la Charente entre Tonnay-Charente et Saint-Hippolyte, près de la ville de Rochefort, en Charente-Maritime. Situé un peu en amont du port fluvial, il est construit en 1842, ce qui en fait un des plus vieux ponts suspendus d'Europe.

Pont suspendu de Tonnay-Charente
Géographie
Pays France
Région Nouvelle-Aquitaine
Département Charente-Maritime
Commune Tonnay-Charente
Coordonnées géographiques 45° 56′ 25″ N, 0° 53′ 10″ O
Fonction
Franchit Charente
Fonction ancien pont routier, désormais réservé aux piétons et aux deux-roues
Caractéristiques techniques
Type Pont suspendu
Construction
Construction 1842 ; tablier refait en 1884 et en 1934 restauration en 2009.
Architecte(s) Louis Dor en 1841-1842, Ferdinand Arnodin en 1884.
Historique
Protection  Classé MH (1988)
 Inscrit MH (1988)[1]
Géolocalisation sur la carte : France
Géolocalisation sur la carte : Nouvelle-Aquitaine
Géolocalisation sur la carte : Charente-Maritime

Historique

La construction du pont en 1842

Ce pont succède à un vieux pont médiéval franchissant la Charente, mentionné en 1242, mais plusieurs fois détruit et reconstruit[2].

L'idée de construire un pont avait été évoquée dès 1831 pour répondre aux besoins des Charentais, l'obligation d'utiliser le bac pour rejoindre l'autre rive du fleuve étant par trop contraignante. Pierre Debans obtint en 1839 une concession de 77 ans pour construire le pont suspendu de Tonnay-Charente, avec une subvention de 250 000 francs[3]. La première pierre fut posée le et, à cette occasion, 200 médailles commémoratives furent frappées dont l'une fut encastrée dans le premier bloc.

Réalisé sur les plans de Lazare Joseph Aimé Dor (1780 Marseille - 1846 La Rochelle), alors ingénieur en chef des travaux du génie civil du département, avec comme adjoint J. Masquelez, ce pont suspendu commencé en mai 1841 fut réalisé en onze mois et inauguré le .

La troisième pile du pont, sur la rive gauche du fleuve, et les arches ogivales en maçonnerie

Il présentait pour l'époque des caractéristiques plutôt spectaculaires et faisait figure de véritable prouesse technique tant les conditions du milieu naturel sont plutôt défavorables. En effet, celles-ci se signalent par les contraintes d'une vallée dissymétrique avec, sur la rive droite, un escarpement calcaire assez abrupt et, sur la rive gauche, une vaste zone plate entièrement marécageuse et inondable. Le défi technique fut de taille mais il put être relevé avec brio et "cet ouvrage représente un énorme progrès" pour l'époque[4].

D'une longueur totale de 623 mètres dont 90 mètres pour la plus longue travée, son tablier central mesure 204 mètres où le pont proprement dit est supporté par trois piles. Les deux premières piles sont fixées sur la rive droite, dont la première est encastrée dans le roc calcaire et la deuxième au bord même du fleuve, tandis que la troisième pile est édifiée sur la rive gauche à 80 mètres de la précédente.

Le pont se raccorde à une culée en maçonnerie d'une longueur totale de 416 mètres et le viaduc d'accès est entièrement construit sur la rive gauche, précisément sur la commune voisine de Saint-Hippolyte. Le viaduc est supporté par 51 arcades de style ogivale.

D'une hauteur impressionnante pour l'époque avec ses 23 mètres, il assure un tirant d'air de 22 m au-dessus de l'eau, son tablier qui franchit le fleuve a ainsi une portée qui "permet aux navires de passer en calant leurs perroquets"[2].

Cet ouvrage monumental assurait une liaison routière continue entre Rochefort, alors la plus grande ville de la Charente-Inférieure, et Saintes, et permit de désenclaver aussi La Rochelle, alors préfecture du département.

La reconstruction en 1884

Les arches métalliques du pont suspendu.

Après plusieurs décennies de service, le pont montrait des signes réguliers de faiblesse et commença à s'affaisser. Le tablier qui, à l'origine était en bois, finit par s'effondrer dans le fleuve au cours d'essais de contrôle de charge. Cet évènement spectaculaire eut lieu le , où du sable fut entassé sur le tablier et avant d'atteindre le seuil de test, ce dernier lâcha.

Ce n'est que le que le pont fut rouvert à la circulation après avoir été reconstruit par l'ingénieur Ferdinand Arnodin, qui le consolida par la pose d'une armature métallique destinée à supporter le plancher qui, lui, restait en bois[4]. C'est ce même ingénieur Arnodin qui sera sollicité pour la construction du pont transbordeur de Rochefort dont l'inauguration aura lieu en juillet 1900.

La seconde reconstruction en 1934

Les pylônes métalliques du pont suspendu datent de 1934.

Avec l'augmentation régulière du trafic automobile dans l'Entre-deux-Guerres et notamment celui des camions, le pont de Tonnay-Charente est de nouveau soumis à rude épreuve tant il est inadapté aux conditions du trafic moderne[4]. De plus, ne disposant que d'une largeur maximale de 23 mètres, il n'est accessible qu'en voie unique, ce qui limite son accès et occasionne lors de l'intensification du trafic des bouchons qui, cependant, à cette époque sont encore bien rares. En 1934, il est donc décidé de doubler les capacités de résistance du pont. Pour ce faire, son tablier est remplacé et est renforcé par la construction des pylônes et de câbles métalliques. Les travaux de consolidation métallique du pont ont été réalisés par la société Fives-Lille et ont été achevés en 1935.

Malgré ces travaux de consolidation, il s'avéra que le pont de Tonnay-Charente présentait une certaine fragilité et se trouva totalement inadapté une nouvelle fois au trafic routier moderne[5]. L'utilisation du pont de Tonnay-Charente pour le trafic automobile a cessé définitivement après la construction d'un pont moderne situé à 1 500 mètres en amont, sur les communes de Saint-Hippolyte, rive gauche, et de Cabariot, rive droite. Le pont de Saint-Clément (D 137) d'une longueur totale de 242 mètres, a été inauguré en 1964. Ce dernier se compose de deux culées, d'une pile à terre et de trois piles en rivière, représentant cinq travées indépendantes construites en béton précontraint de 41,60 mètres de longueur chacune. Son tirant d'air n'est que de 6,15 m mais suffisant par plus hautes eaux[5].

Le pont aujourd'hui

Les pavillons à péage vus depuis le pont.

Fermé à tout trafic depuis l'inauguration du pont de Saint-Clément et quelque peu délaissé en raison de sa fragilité, le pont suspendu a cependant été de nouveau partiellement ouvert vers 1975. Seule, la circulation des piétons, cyclistes et motocyclistes y était autorisée, à la satisfaction également des nombreux touristes et visiteurs venant chaque année toujours plus nombreux pour visiter la ville et profiter du panorama sur la vallée de la Charente.

Le , le pont et les deux anciens pavillons de péage situés à l'entrée Nord-Est du pont ont fait l'objet d'une inscription au titre des monuments historiques[1]. Le pont est ainsi l'unique édifice relevant du patrimoine urbain de la ville reconnu au titre des monuments historiques.

Jusqu'en , il était possible de traverser le pont à pied ou à deux roues mais, à partir de cette date, toute circulation fut interdite pour permettre d'établir de nouveau des travaux de restauration par la réfection du tablier, des câbles et de la maçonnerie.

En 2005, le pont servit de cadre au film Trois jours en juin, qui raconte la défense de la Loire par l'armée française durant la débâcle de juin 1940.

En , à la fin de ce chantier de rénovation, réalisé par la société Baudin-Châteauneuf, la reprise de la circulation piétonne et des deux roues a été de nouveau autorisée, sur une bande située au centre du tablier. Le a eu lieu l'inauguration officielle de la réouverture du pont[6]. Près de deux ans après cette réouverture, la détérioration du nouveau revêtement en panneaux de bois aggloméré a conduit le maire à prendre le un arrêté interdisant la circulation à partir du [7]. L'entreprise Baudin-Châteauneuf a alors repris les travaux sur le tablier pour remplacer les plaques d'aggloméré par un platelage en bois de robinier de 45 millimètres d'épaisseur et 2,50 m de large[8]. La structure supérieure du tablier quant à elle est dorénavant protégée par des bacs acier assemblés longitudinalement sur toute sa largeur, visibles sur la photo n°3.

Les rénovations de 2009 dont la durée de vie était estimée à une quarantaine d'années commencent à montrer leurs limites dès les premières années puisqu'en 2015, les services techniques de la ville estiment que 424 pièces de robinier posées au sol sont endommagées[9].

En 2021, la municipalité lance un nouveau chantier visant à reprendre le tablier, les parties métalliques et la totalité de la maçonnerie, pour un budget estimé en début de projet à 10 millions d'euros[10].

Postérité

Le pont est représenté sur le logo de la commune avant 2022 ainsi que sur le nouveau logo dévoilé en 2022[11].

Galerie de photos sur le pont suspendu

Notes et références

  1. Notice no PA00105287, base Mérimée, ministère français de la Culture
  2. Jean Combes (ouvrage collectif sous la direction de), La Charente-Maritime - Guide des départements, éditions du Terroir, 1985, p.218
  3. Marcel Prade, Ponts & viaducs au XIXe siècle : techniques nouvelles et grandes réalisations françaises, Brissaud, 1988, page 122.
  4. Gérard Blier, Histoire des transports en Charente-Maritime, éditions Le Croît-vif, 2003, p.119
  5. Gérard Blier, Histoire des transports en Charente-Maritime, éditions Le Croît-vif, 2003, p.155
  6. « Sur le pont suspendu, on y passe, on y passe… », Sud Ouest,
  7. « Le pont suspendu fermé pour travaux », Sud Ouest, (lire en ligne, consulté le )
  8. « On pourra bientôt passer le pont », Sud Ouest, (lire en ligne, consulté le )
  9. Julien Bonnet, « Litige autour des travaux du pont », sur SudOuest.fr (consulté le )
  10. Paul Nouzarede, « Tonnay-Charente : "On peut imaginer du saut à l'élastique au Pont suspendu" », sur www.demoisellefm.com, (consulté le )
  11. Christine Cornet, « Tonnay-Charente : le maire a présenté le nouveau logo de la commune », Sud Ouest, (lire en ligne )

Voir également

Bibliographie

  • Gérard Blier, Histoire des transports en Charente-Maritime : des voies romaines au TGV, Paris, Le Croît vif, , 252 p. (ISBN 2-907967-80-0)

Lien interne

Liens externes

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