Province ultramarine

Les provinces ultramarines, ou provinces d'outre-mer, sont des divisions administratives du Portugal désignant ses colonies. Ce statut est utilisé de 1946 à 1976 dans un principe pluricontinental. L'Inde portugaise est la première à l'obtenir, avant qu'il ne soit généralisé à l'ensemble des colonies portugaises en 1951. Il perdure jusqu'au milieu des années 1970, où la plupart de celles-ci proclament leur indépendance ou sont annexées par des pays voisins.

Historique

Instauration du terme

Les premières apparitions du terme de « province ultramarine » datent du XIXe siècle. Durant le régime fasciste et dictatorial de l'Estado Novo, établi en 1933, il devient conforme à l'idée du pluricontinentalisme, qui considère le Portugal non pas comme un empire colonial mais comme un État-nation réparti sur différents continents et où les colonies n'existent pas[1],[2],[3]. Les enclaves portugaises en Inde (alors sous domination britannique) sont les premières à être officiellement désignées sous ce nom, à partir du [4]. Les autres colonies, situées en Afrique, en Asie et en Océanie, deviennent des provinces ultramarines le [5],[6],[7], à l'exception du Fort Saint-Jean-Baptiste-d'Ajuda, situé au sein de la colonie française du Dahomey (futur Bénin)[8].

Le changement est acté par une modification de la constitution, présentée par le président du Conseil des ministres António de Oliveira Salazar et acceptée par le Parlement[3]. Elle intègre un Acte colonial (en) révisé, où la terminologie relative aux colonies est corrigée, de façon à présenter le Portugal comme une « nation pluricontinentale » une et indivisible. Le pays abandonne ainsi la qualification d'« Empire colonial portugais ». Ces actions permettent de plaire à la communauté internationale et de contourner les critiques des Nations unies sur son colonialisme, tout en ne respectant pas le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes demandé par la Charte de San Francisco[3],[9]. En parallèle, le ministère des Colonies (pt) devient ministère de l'Outre-mer (pt)[10].

Perte des colonies

En 1954, les possessions en Asie Dadra et Nagar Haveli sont annexés par l'Inde (indépendante depuis sept ans) après le soulèvement d'indépendantistes locaux. L'Opération Vijay lancée par l'armée indienne en 1961 permet la conquête des derniers comptoirs portugais : l'île Anjidiv, Goa, Daman et Diu (qui comprend Simbor (en)). Cependant, le Portugal continue de revendiquer sa souveraineté sur ces territoires[4].

La classification perdure jusqu'à la fin de la dictature en 1974, survenue grâce à la révolution des Œillets et aux guerres d'indépendance du Mozambique et de l'Angola. Une décolonisation progressive est enclenchée par le pouvoir révolutionnaire et les annexions indiennes sont reconnues. Les différentes colonies africaines prennent leur autonomie puis leur indépendance[n 1] entre et sous les noms de république populaire d'Angola, république du Cap-Vert, république de Guinée-Bissau, république populaire du Mozambique et république démocratique de Sao Tomé-et-Principe[4],[11],[12],[13]. La république démocratique du Timor oriental proclame son indépendance en [14], mais l'Indonésie l'envahit et l'annexe le mois suivant[15]. Seul le comptoir de Macao reste sous domination portugaise, à contrecœur du Portugal qui voulait le léguer à la Chine, pays frontalier et premier possesseur du territoire[16]. Il devient un « territoire chinois sous administration portugaise » en , avant d'être finalement rétrocédé à la Chine en 1999[17],[18].

Provinces

Liste des provinces

Carte de l'Empire colonial portugais au début du XXe siècle.
Les provinces ultramarines portugaises en Afrique.
Carte de Daman, Dadra et Nagar Haveli (de haut en bas), datant d'avant 1910.
Carte des années 1920 centrée sur Diu. À l'Est, l'exclave Simbor (en) qui lui est rattachée.

Les provinces ultramarines sont au nombre de huit en 1951, et réparties sur trois continents. La province de l'Inde portugaise est divisée en plusieurs comptoirs, annexés à des périodes différentes.

Nom Localisation Début Fin Statuts futurs
Angola République populaire d'Angola
Cap-Vert (en) République du Cap-Vert (autonomie)
République du Cap-Vert
Guinée République de Guinée-Bissau
Inde (de facto, Dadra et Nagar Haveli) Voir tableau détaillé ( Inde)
(de facto, Anjidiv, Daman, Diu et Goa)
(de jure)
Macao Territoire chinois sous administration portugaise
Région administrative spéciale de Macao de la République populaire de Chine ( Chine)
Mozambique Administration locale
République populaire du Mozambique
Sao Tomé-et-Principe Province autonome de Sao Tomé-et-Principe
République démocratique de Sao Tomé-et-Principe
Timor République démocratique du Timor oriental (annexion par l' Indonésie en 1976, devient la province Timor oriental avant de retrouver son indépendance en 2002)

Possessions en Inde

Nom Localisation Début Fin Statuts futurs
Anjidiv (de facto)
(de jure)
Territoire de la commune de Canacona (en) ( Inde), située au sein de Goa, Daman et Diu puis de Goa
Dadra et Nagar Haveli (de facto)
(de jure)
1954 : Administration libre de Dadra et Nagar Haveli ( Inde)
1961 : Territoire de l'Union de Dadra et Nagar Haveli
2020 : Territoire de l'Union de Dadra et Nagar Haveli et Daman et Diu
Daman et Diu (de facto)
(de jure)
1961 : Territoire de l'Union de Goa, Daman et Diu ( Inde)
1987 : Territoire de l'Union Daman et Diu
2020 : Territoire de l'Union de Dadra et Nagar Haveli et Daman et Diu
Goa (de facto)
(de jure)
1961 : Territoire de l'Union de Goa, Daman et Diu ( Inde)
1987 : État de Goa

Notes et références

Notes

  1. La province du Mozambique bénéficie d'une administration locale dès le  ; son indépendance est actée le . La république du Cap-vert devient autonome le avant de proclamer son indépendance le . La province de Sao Tomé-et-Principe est déclarée autonome le jusqu'à son indépendance le .

Références

  1. (pt) « Pluricontinental », sur Dicionário.
  2. (en) Norrie Macqueen, « Portugal's First Domino: 'Pluricontinentalism' and Colonial War in Guiné-Bissau, 1963–1974 », Contemporary European History, Cambridge University Press, , p. 209-230 (lire en ligne).
  3. « Le lusotropicalisme dans le colonialisme portugais tardif », sur Africultures, (consulté le ).
  4. (en) Ben Cahoon, « India », sur World Statesmen.org (consulté le ).
  5. (en) Ben Cahoon, « São Tomé and Príncipe », sur World Statesmen.org (consulté le ).
  6. (pt) « Lei n.º2048 », Diário da República, (lire en ligne [PDF]).
  7. (en) G. J. Bender, Angola Under the Portuguese : The Myth and the Reality, Berkeley, University of California Press, (ISBN 0-520-03221-7).
  8. (en) Ben Cahoon, « Benin », sur World Statesmen.org (consulté le ).
  9. Cláudia Castelo, traduit par Camille Diard, « Le luso-tropicalisme, ou le colonialisme portugais sur le tard », sur Buala, (consulté le ).
  10. (pt) « Legislação », sur Archives du ministère de l'Outre-mer (consulté le ).
  11. (en) José Ramos-Horta, Funu : The Unfinished Saga of East Timor, Trenton, New Jersey, Red Sea Press, , 207 p. (ISBN 0-932415-14-8).
  12. (en) « 1974: Rebels seize control of Portugal », sur BBC, (consulté le ).
  13. (en) Ben Cahoon, « Mozambique », sur World Statesmen.org (consulté le ).
  14. (en) Ben Cahoon, « Timor-Leste (East Timor) », sur World Statesmen.org (consulté le ).
  15. (en) « Indonesia invades East Timor », sur History, (consulté le ).
  16. Stéphane Dupont, « La Chine récupère Macao », sur Les Échos, (consulté le ).
  17. (en) Ben Cahoon, « Former Foreign Colonies and Major Concessions in China », sur World Statesmen.org (consulté le ).
  18. (pt) de Coordenação da Cerimónia de Transferência « Lei Básica da Região Administrativa Especial de Macau da República Popular da China » (version du 21 septembre 2012 sur l'Internet Archive), sur Gabinete de Coordenação da Cerimónia de Transferência.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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