Rabâb
Le terme rabâb ou rubāb, roubab, robâb, rebâb, rbab, rubob et rawap désigne deux grandes familles d'instruments à cordes originaires de Perse et dont la table d'harmonie est une peau. Le terme est attesté dès le Xe siècle chez le musicologue Farabi.
On distingue les vielles, instruments à cordes frottées d'une part, et les luths, instruments à cordes pincées, d'autre part. Tous ces instruments se sont répandus dans le monde musulman et ailleurs, du Maroc à l'Indonésie, mais curieusement, les deux familles semblent exclusives l'une de l'autre, sauf en Iran.
Vielles
La famille des vielles rabâb est rustique et ancienne. Il en existe de deux types :
- grand, à manche long et fin, sans frette, à trois ou quatre cordes, à pique, plutôt utilisé dans la musique classique sud-asiatique ou la musique folklorique moyen-orientale. Il s'apparente alors au kamânche.
- petit, à manche court et large, sans frette, monocorde ou bicorde, utilisé dans la musique folklorique et savante (la musique arabo-andalouse) nord-africaine. Il s'apparente alors à la lyra.
Rabâb arabe et turc
Lutherie :
L'instrument est tout petit et léger. Le corps n'est souvent qu'un simple bâton, qui traverse un résonateur en bois (carré ou convexe ou rond) ou en noix de coco, recouvert de peau, et qui repose sur une pique, comme un violoncelle.
Les 2, 3, ou 4 cordes sont en boyaux épais. L'archet est rustique aussi et toujours tendu par pression de la main pendant le jeu.
Jeu :
L'instrument est posé soit à terre, soit sur le genou du musicien qui est assis par terre. C'est l'instrument qui tourne sur lui-même qui met en contact les cordes avec l'archet tenu parfaitement perpendiculairement. Ce dernier est soutenu par en bas, paume visible.
Une corde (souvent actionnée par un doigt) sert de bourdon alors que les autres développent la mélodie avec l'archet.
Rebab malais et indonésien
On trouve le rebab dans le gamelan et également en accompagnement vocal dans la musique de l'ouest de Sumatra.
Dans le gamelan javanais ou balinais le rebab ornemente la mélodie principale. Il est composé de cordes, une corde en bois, traditionnellement faite à partir de noix de coco (pratique quasiment disparue aujourd'hui) et couvert d'une fine peau. Les deux cordes sont accordées à une quinte. L'archet fait de crin de cheval est tendu de manière lâche.
Dans la région de Sumatra Occidental, il existe trois types de rebab (rabab dans le dialecte Minang Kabau) :
- rabab darek (darat en indonésien, c'est-à-dire terre) 60-70 cm de haut, deux cordes accordées à la quinte, corps en bois. Se trouve dans le darek c'est-à-dire les terres intérieures de l'ouest de Sumatra
- rabab Pariaman (Pariaman est une ville de Sumatra), 40 cm de haut, trois cordes accordées à la quarte.
- rabab pasisia (pesisir en indonésien, c'est-à-dire la côte), 60 cm de haut, quatre cordes : les trois premières accordées à la quinte la dernière n'est pas accordée.
Il accompagne traditionnellement la voix lors de longue narration (kaba). Il fut ensuite adapté au style de musique populaire tels que le dangdut et plus tard le triping.
Rabâb maghrébin
Chez les chleuhs, l'instrument est appellé ribab, c'est l'instrument principal de la musique chleuh traditionnelle et moderne[1].
En Afrique du Nord-Ouest, dans les pays du Maghreb, un luth à manche court à deux cordes joué principalement par archet est appelé rabâb. Il est également appelé rabâb mauresque, rabâb andalou. Probablement à partir de la version contemporaine de cet instrument s'est développé le rebec à la fin du Moyen Âge.
Pendant le jeu, la tête de l'instrument est sur l'épaule gauche du musicien, la partie inférieure repose sur le genou droit, ou se tient verticalement entre les deux jambes du musicien. Les deux cordes de boyeau sont accordées au quinte.
Dans la musique arabo-andalouse marocaine, il était fréquent de voir le chef d'orchestre être un joueur de rebab, notamment chez les orchestres de Fès. Ainsi, Al Brihi puis Abdelkrim Rais furent tout d'eux d'éminents rebabistes, leur instrument leur permettant de guider leur musiciens. Le successeur de Rais, Briouel, rompt avec cette tradition en jouant du violon tout en étant chef de l'orchestre principal de Fès.
- Ribab chleuh
- Ribab amarg chleuh
Luths
La famille des luths rabâb est aussi rustique, mais sans doute moins ancienne et dérivée en partie de celle des vielles. Il en existe trois types distincts :
- à long manche et large caisse de résonance, répandu dans l'ancien empire moghol (de l'Iran à l'Inde).
- à manche court et double caisse de résonance, répandu en Afghanistan.
- à manche long et fin et petite caisse de résonance, répandu en Asie centrale.
Kabuli rabâb
Le rabâb est aussi un instrument à corde pincées originaire d'Iran, du Pakistan et surtout d'Afghanistan où il est considéré comme l'instrument national, étant particulièrement apprécié par les Pachtounes. Toutefois, en raison de la guerre, tous les musiciens et luthiers afghans se sont réfugiés au Pakistan, à Peshawar, notamment. Beaucoup d'instruments ont été détruits à ce moment-là ; n'y ont échappé que ceux qui avaient été enterrés[réf. nécessaire]. Il en existe aussi en Inde, au Cachemire, où on considère qu'il est l'ancêtre du sarod, qui n'en serait grosso modo, qu'une version agrandie et améliorée. Une autre variété se rencontre au Népal avec une touche métallique et une tête sculptée sur le chevillier ; au Tibet, un instrument apparenté se nomme dranyen.
Lutherie :
C'est un luth à manche court, taillé dans du bois massif de murier, coupé, évidé et collé. Une peau de chèvre collée fait office de table d'harmonie. Le manche est creux et recouvert de nacre et d'ivoire sur la touche. Il y a trois ou quatre frettes en boyau sur celle-ci. De minuscules ouïes sont pratiquées sur la peau et sur la touche. Un chevalet (sur pied) en os taillé avec des trous et des sillets, repose sur la peau.
Il comporte trois cordes mélodiques en boyaux, trois cordes mélodiques chikari et 11 ou 12 cordes sympathiques. Il arrive que les cordes soient toutes en métal.
Jeu : L'instrument est tenu horizontalement sur la cuisse droite, le manche vers la gauche. Le musicien est assis par terre. Les cordes sont pincées au moyen d'un petit plectre en noix de coco ou en corne (jâva). On ne joue pas d'accord.
On y joue tout autant des musiques folkloriques que la musique classique iranienne ou afghane. Il est utilisé tant au sein d'ensembles instrumentaux que pour des solos instrumentaux.
La communauté ismaélienne de la vallée de la Hunza accompagne ses poèmes religieux avec cet instrument.
C'est l'ancêtre du sarod de l'Inde du nord, mais il n'est jamais utilisé dans la musique indienne classique de cette région.
Mohammad Rahim Khushnawaz en est un interprète illustre.
Kashgari rawap
Il en existe des variantes en Ouzbékistan, au Tadjikistan et en Chine (Turkestan), qui ont tous la particularité d'être des luths à manche long.
Lutherie :
Le long et fin manche est taillé dans du bois de noyer ou des fruitiers. Des incrustations d'os le recouvrent. Parfois des peaux de serpent (sinon de chèvre) servent de table d'harmonie placées sur le petit corps hémisphérique (taillé en bois ou en lamellé-collé) de l'instrument. Il y a deux excroissances (en forme de cornes) à la base du manche qui semblent être un souvenir de l'emplacement d'un archet. Il y a de cinq à sept cordes métalliques, placées en chœurs de deux avec des bourdons rythmiques.
Jeu :
On en joue debout ou assis, le corps de l'instrument posé contre le haut de la poitrine, soutenu par l'avant-bras droit, et le manche reposant sur la main gauche, légère. Le plectre mezrap est tenu entre pouce et index droits. On y joue tout autant des pièces folkloriques que la musique savante du maqôm ouzbèk ou tadjik.
Notes et références
Voir aussi
Bibliographie
- (en) Stanley Sadie, The New Grove Dictionary of Musical Instruments, London, Macmillan, 1985.
- Jean During, Musiques d'Asie Centrale, Actes Sud, 1998.
Liens externes
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