Robe universitaire en France

La robe universitaire, également appelée toge universitaire, est le vêtement officiel qui concerne les personnels enseignants et administratifs, membres de l'université. Sa forme diffère selon le grade universitaire ou la fonction académique de celui qui la porte.

Professeurs portant leurs toges lors d'une rentrée solennelle.
Professeurs et recteurs de l'Université Paris-Sorbonne lors de la remise des diplômes de doctorat en 2011.

Historique

En France, la robe universitaire fit l'objet d'une réglementation, qui évolua du XIIIe siècle au XVIIIe siècle, jusqu'à ce que Napoléon généralise le type le plus répandu, au lendemain d'une Révolution ayant fait table rase des traditions de l'Ancien Régime.

Ainsi, au milieu du XIVe siècle, la robe longue des docteurs prit une signification plus forte. Les vêtements longs furent abandonnés par la noblesse et la bourgeoisie[1]. La tenue courte portée alors fut jugée licencieuse et souleva les protestations du clergé, dont faisaient partie les professeurs. C’est, semble-t-il, à ce moment que les docteurs des universités choisirent de conserver leur ancienne robe[2].

Concernant le droit, par exemple, le costume des docteurs des facultés de Droit, comme celui des gens de justice, est ancien et traditionnel. On le disait déjà sous le règne de Louis XIV[3]. Benoît XII prescrit l'usage en France d'une robe pourpre avec hermine, sans doute pour rehausser le prestige du droit face à la théologie. Par bulle pontificale, en 1336, les docteurs en droit canonique de l'université de Paris, puis, en 1339, ceux de l'université de Montpellier, se virent reconnaître le droit de porter la chape rouge, le chaperon fourré d'hermine, toujours porté par les professeurs actuels, ancêtre de l'épitoge, et un bonnet rond, propre aux docteurs, qui avait la forme du camauro pontifical[4].

À compter de la seconde moitié du XIVe siècle, le droit au port de la robe rouge s'étendit aux docteurs en droit romain de ces deux facultés, puis aux autres facultés de droit. À la différence du costume des magistrats celui des docteurs en droit a donc une origine pontificale.

C’est au XVIIe siècle que le costume se stabilisa définitivement. En effet, le costume des docteurs prit sa forme définitive dans la moitié nord de la France et notamment à la Faculté de droit de Paris. Le chaperon fourré se transforma en une épitoge herminée[5]. Celle-ci ne comportait toutefois qu'un rang de fourrure. C'est seulement Napoléon qui a voulu distinguer les docteurs par trois rangs de fourrure[6]. L'usage du rabat s'imposa au XVIIIe siècle. En 1804, les différentes disciplines furent individualisées par des couleurs particulières aux disciplines du doctorat : rouge écarlate pour les juristes, rouge cramoisi pour les médecins, amarante pour les scientifiques, jonquille pour les littéraires, violet pour les théologiens, rouge saumon pour les pharmaciens.

En France, la robe universitaire était autrefois portée par tous les universitaires, qu'ils soient enseignants ou administrateurs. Dès son instauration, elle permettait d'auréoler d’apparat la fonction prestigieuse de membre de l’Université, et elle était aussi, et avant tout, un costume officiel « défini par la norme administrative et légalement protégé »[7].

Une toge en drap noir, semblable à celle des avocats, une toque sans galon et une épitoge de la couleur correspondant à leur faculté d'origine, ornée du nombre de rangs de fourrure correspondant au titre obtenu étaient également régulièrement portées par les professeurs de l'enseignement secondaire jusqu'au milieu des années 1960, et peut-être même après, lors de certaines cérémonies, notamment lors de la remise des prix. La tenue des proviseurs était pour sa part réglementée par le décret du .

Si au XXe siècle la robe était déjà moins portée qu'autrefois, depuis Mai 68 son port est largement tombé en désuétude, sauf dans quelques universités comme Toulouse, Paris-I, Paris-II, Montpellier-I ou encore à la Faculté de droit de Rennes. Depuis les années 2000, le port de la robe réapparaît progressivement pour les enseignants et administrateurs universitaires. Elle est portée à quelques occasions, comme les soutenances de thèses, les cérémonies de rentrée universitaire ou d'attribution de grades universitaires, de décorations ou de titres honorifiques. Les universités cherchent d'une part à créer une communauté des diplômés par des cérémonies avec la robe et, d'autre part, à se créer une identité propre après les nombreux regroupements des universités[8].

Éléments du costume

Le costume se compose essentiellement de :

Boutons de toges conformes aux textes.
Toge sur laquelle les palmes académiques ont été brodées.
Toge de recteur ou rectrice d'académie.
  • une robe : assez semblable à une soutane, elle a devant une longue rangée de boutons et derrière une traîne. Les boutons doivent être au nombre de 25, divisés en quatre quarts, plus un, et présentant un aspect filetés. La traîne n'est pas visible sur les costumes actuels mais attachée dans le côté intérieur de la robe par un bouton. La traîne n'est détachée que lors de cérémonies funèbres[citation nécessaire]) ;
  • une simarre : deux bandes verticales de tissu de part et d'autre des boutons, soit de la couleur spécifique, soit noir moiré ;
  • une épitoge (ou chausse), qui descend de la chape du costume ecclésiastique : il s'agit d'une bande de tissu de la couleur spécifique attachée par un bouton au niveau de l'épaule gauche, avec une extrémité large et triangulaire (à l'arrière) et une extrémité plus longue et étroite (à l'avant), chacune des extrémités portant un à trois rangs d'hermine selon le rang du porteur ;
  • une ceinture identique à celle des ecclésiastiques catholiques romains : longue et large, elle est finie par des franges (soit dorées, soit de la couleur spécifique), et comporte un large nœud ornemental et une longue extrémité pendant sur le devant du costume du côté gauche ;
  • un rabat de couleur blanche : c'est une sorte de jabot en baptiste ou en dentelle, porté en cravate, par-dessus lequel les hommes peuvent porter un nœud papillon blanc pour des occasions très formelles. Le rabat en dentelle est le signe distinctif des recteurs, inspecteurs d'académie et doyens ;
  • une toque : coiffe aux galons et aux ganses dépendant du rang du porteur, qui n'est jamais portée sur la tête mais tenue à la main, qui serait (en principe réservée aux seuls hommes[réf. nécessaire] ;
  • de gants blancs.

Le nombre de rangs d'hermine sur l'épitoge permet de connaître le diplôme détenu par le porteur de la robe :

La robe universitaire étant assimilée au smoking ou au queue-de-pie, les éléments du costume visibles mais ne faisant pas partie de la robe universitaire doivent correspondre à ces deux codes vestimentaires (pour les hommes : nœud papillon blanc, pantalon noir, chaussures noires vernies et chaussettes en soie noire).

Les décorations officielles peuvent être portées sur la toge. Avant 1866, les palmes académiques n'étant pas encore une médaille en métal suspendue à un ruban violet, elles étaient brodées directement sur la toge.

Au XIXe siècle

Les dernières descriptions officielles des robes universitaires datent du XIXe siècle. Le costume des titulaires et officiers de l'Université impériale a en effet été défini par décret du [9]. Les décrets du et du [10] complètent ces définitions.

Finalement, il existe plusieurs types de robes, qui correspondent à la fonction universitaire de son détenteur.

Couleurs spécifiques

La couleur de la robe, de l'épitoge et de la toque permet de connaître le domaine académique de celui qui la porte ou de la fonction qu'il exerce :

  • Violet : Recteur d'académie, inspecteur d'académie, théologie
  • Écarlate : Droit et Économie
  • Groseille (Cramoisi) : Médecine et Pharmacie
  • Amarante : Sciences
  • Jonquille : Philosophie et Lettres

Grand costume (robe de cérémonie)

Les doyens portent deux galons d'or à la toque au lieu d'un seul.

Petit costume (robe de cours)

Au XXIe siècle

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Encore aujourd'hui, le costume universitaire officiel est toujours réglementé par les décrets du XIXe siècle de l'autorité publique. Le port illégal de la robe universitaire peut donc être sanctionné par l'article 433-14 du Code pénal[11].

N'ayant jamais fait l'objet de modifications depuis le milieu du XIXe siècle, le costume universitaire n'a pas officiellement évolué, malgré les nombreuses transformations des universités, relatives notamment aux statuts et disciplines. Ainsi, avec le temps, de nouveaux usages, non réglementaires, sont apparus.

Certains de ces usages relèvent d'une adaptation des textes initiaux. Par exemple, les couleurs spécifiques du costume se sont étendues aux nouvelles sections disciplinaires :

  • Violet : Théologie
  • Écarlate : Droit, économie, gestion, sciences politiques
  • Groseille (Cramoisi) : Médecine, pharmacie, chirurgie
  • Amarante : Sciences exactes et expérimentales
  • Jonquille : Lettres et sciences humaines

Voici d'autres usages (non réglementaires) apparus postérieurement aux textes réglementaires du milieu du XIXe siècle :

  • Les docteurs honoris causa, institués en 1918 en France, portent la robe universitaire française durant la cérémonie de remise de leur grade honorifique.
  • Les présidents d'université, directeurs d'UFR, anciens doyens, académiciens et membres seniors de l'Institut universitaire de France portent le rabat en dentelle, à l'instar des recteurs et doyens.
Robe non-officielle de président d'université
  • Le poste de président d'université n'étant apparu qu'en 1969, il n'existe pas de costume officiel dédié pour cette fonction. Un costume spécifique de président d'université commence à se répandre, se basant sur les couleurs de la robe de recteur.
  • Des professionnels extérieurs peuvent être amenés à siéger en robe dans un jury de soutenance de doctorat, bien qu'ils ne soient pas personnels d'une université. Ces derniers devraient porter soit un costume de ville, soit une simarre noire et une épitoge correspondant à leur discipline et leur grade universitaires.
Remise d'épitoge à la suite d'une thèse. On notera que la président du jury décroche l'épitoge à deux rangs et accroche celle à trois rangs.
  • Par souci de solennité, des jurys permettent à des doctorants de porter durant leur soutenance une partie des attributs du costume universitaire et remettent, en fin de soutenance, une épitoge correspondant à sa discipline et à son nouveau grade. Ceci étant, n'étant généralement pas personnel enseignant de l'université, un doctorant n'a pas à porter la robe et l'épitoge correspondant à son grade (2 rangs d'hermine). Le cadeau de l'épitoge peut toutefois être fait symboliquement en fin de soutenance.

Spécificités

Même si les textes du XIXe siècle n'ont sans doute pas anticipé cette possibilité, il arrive qu'un professeur porte une robe d'une discipline donnée, avec une épitoge d'une autre discipline (« un directeur d'études de la section des Sciences […] docteur en pharmacie ou en médecine porterait la chausse (épitoge) de cet ordre de faculté sur la toge amarante de l'ordre des sciences »[7]) ou qu'un professeur porte plusieurs épitoges en même temps[12],[13].

Spécificité pour les docteurs en droit : s'ils embrassent la carrière d'avocat, ils peuvent porter l'épitoge noire à trois rangs d'hermine sur la robe d'avocat, qui ne possède pas de simarre. Certains confrères trouvent ce port inadapté.

Les robes universitaires des professeurs de l'École normale supérieure, en tout point identiques à celles des autres professeurs, ont des collets brodés aux palmes universitaires dorées (une branche de palme et une de laurier agrémentée de six fruits rouges)[citation nécessaire]. Par ailleurs, l'ENS ayant été décorée de la Légion d'Honneur et de la Croix de guerre, une cordelière rouge et une cordelière aux couleurs de la Croix de guerre distinguent l'habit universitaire des professeurs de l'ENS[citation nécessaire].

Attributs académiques étrangers

Les accessoires d'habits académiques étrangers reconnus en France (par décision d'équivalence de diplôme ou provenant d'un pays signataire du processus de Bologne) peuvent s'ajouter au costume français si ces accessoires ne remplacent pas un élément de costume français. Les épitoges violettes attribuées aux titulaires de baccalauréats, licences et doctorats canoniques en théologie catholique font partie de ces attributs étrangers du fait de l'adhésion du Vatican au processus de Bologne.

Notes et références

  1. Philippe Contamine, La vie quotidienne pendant la guerre de Cent ans. France et Angleterre XIVe siècle, Paris, Hachette, coll. « La vie quotidienne », (ISBN 2-01-002961-5), p. 203.
  2. Jean-Claude Bologne, Histoire de la pudeur, Paris, Olivier Orban, (ISBN 2-85565-326-6), p. 59
  3. Dauvillier 1974, p. 229.
  4. Dauvillier 1958, p. 5.
  5. François Boucher, Histoire du costume en Occident de l'Antiquité à nos jours, Paris, Flammarion, , p. 201.
  6. Dauvillier 1958, p. 11.
  7. Neveu 1996, p. 485.
  8. Séverin Graveleau, « A la fac, toges et toques sont de nouveau de sortie », Le Monde,
  9. Décret du 31 juillet 1809 concernant le costume des membres de l'Université.
  10. Décrets des 9 décembre 1850 et 16 janvier 1851 sur Google Livres.
  11. Article 433-14 du code pénal
  12. Par exemple l'académicien Bruno Neveu titulaire de deux doctorats.
  13. Cas des professeurs étrangers portant épitoge française sur un habit universitaire étranger.

Bibliographie

  • Jean Dauvillier, « Origine et histoire des costumes universitaires français », Annales de la Faculté de droit de Toulouse, t. 6.1, , p. 3-41 (ISSN 0986-1262).
  • Jean Dauvillier, « Histoire des costumes des gens de justice dans notre ancienne France », Recueil des Mémoires et Travaux publiés par la Société d'histoire du droit et des institutions des Anciens pays de droit écrit, no XI, , p. 229-240 (ISSN 0583-8282).
  • Georges Dilleman, « Le costume du corps professoral pharmaceutique », Revue d'histoire de la pharmacie, no 180, , p. 1-14 (ISSN 0035-2349, lire en ligne, consulté le ).
  • (en) William Norman Hargreaves Mawdsley, A history of academical dress in Europe until the end of the eighteenth century, Oxford, Clarendon press, .
  • Bruno Neveu, « Le costume universitaire français : règles et usage », La Revue administrative, no 293, , p. 485-496 (ISSN 0035-0672, lire en ligne, consulté le ).
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