Sévère Alexandre
Sévère Alexandre (Imperator Cæsar Marcus Aurelius Severus Alexander Pius Felix Augustus, Persicus Maximus (?)) est un empereur romain qui régna de 222 à 235. Il est le dernier de la dynastie des Sévère.
Pour les articles homonymes, voir Sévère (homonymie) et Alexandre.
Sévère Alexandre | |
Empereur romain | |
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Buste de l'empereur Sevère Alexandre | |
Règne | |
– / (13 ans et 7/8 jours) |
|
Période | Sévères |
Précédé par | Héliogabale |
Suivi de | Maximin Ier le Thrace |
Biographie | |
Nom de naissance | Gessius Bassianus Alexianus |
Naissance | Arca Cæsarea (Syrie) |
Décès | 18/ Moguntiacum (Germanie sup.) |
Père | Marcus Julius Gessius Marcianus |
Mère | Julia Mamæa |
Épouse | Orbiane (225 - 227) |
Ses débuts
Né en 208 à Arca (Tell Arqa) en Phénicie syrienne (aujourd'hui dans le Nord du Liban) et nommé Alexianus, il est élevé par sa grand-mère Julia Mæsa, belle-sœur de Septime Sévère, et par sa mère Julia Mamæa. Le jeune prince reçoit une éducation soignée.
Il est le fils de Gessius Marcianus (en). Il reçut tous ses titres après que son père fut assassiné sur l'ordre de l'empereur Macrin en 218. La première épouse de Sévère Alexandre, Memmia, sans doute d'origine africaine, aurait été exécutée. Sa seconde épouse, Orbiane, était une aristocrate romaine. Natif de Syrie romaine, comme son prédécesseur Héliogabale, il ne voulait pas qu’on le considère comme tel, mais avant tout comme romain. Il est nommé Alexandre car il est né dans un temple dédié à Alexandre le Grand[1].
Petit-neveu de l'empereur Septime Sévère, il succède à son cousin Héliogabale, qui le choisit comme César[2] en 221. Héliogabale tente ensuite de revenir sur sa décision mais Julia Mæsa provoque une révolte des prétoriens qui coûte la vie à Héliogabale[3].
L’assassinat d’Héliogabale fait d'office de Sévère Alexandre le nouvel empereur. Aussitôt, Sévère Alexandre est nommé Auguste par le Sénat. Il refuse cependant de prendre le titre de « Grand » et d’« Antonin ». Ce refus de titre et de nom donnés par le Sénat fit dire de lui qu’il était ferme et possédait une grande force de caractère ; c’est l'armée qui allait lui donner le nom de Sévère.
Il entama son règne à l'âge de 14 ans et allait mourir à moins de 27 ans. Il prend des mesures allant à l'encontre de celles de son prédécesseur, surtout dans le domaine religieux. Ainsi, il renvoie à Émèse la « pierre noire » du culte solaire[4], objet d'indignation pour certains Romains. Il épouse la fille de son cousin Varius Marcianus, Orbiane, déclarée Augusta et mal vue de Mamaea.
Un règne paradoxal : qualités personnelles et défiance à l'égard de l'armée
Deux principaux traits de caractère définissent le jeune empereur : il était très influencé par sa mère, l'impératrice Julia Mamaea, et il était peu doué dans le domaine militaire ; il avait même une aversion pour les combats et la violence en général.
Il avait une réputation de sagesse, passionné par les personnages illustres des temps anciens, tels Achille, Platon, Alexandre le Grand, Cicéron... Il avait dans ses appartements les portraits et les bustes de ces hommes illustres. Son règne est globalement qualifié de pacifique et de non sanglant. Il vivait et s’habillait avec simplicité, était pieux et ne se livrait pas à la luxure comme tant de ses prédécesseurs. Mamaea, sa mère, avait amassé une fortune ; mais lui avait un esprit d’économie sans pourtant être avare : aux banquets, il limitait le nombre des convives, et certains mets n’étaient servis qu’aux fêtes. L'empereur Sévère Alexandre était juste, indulgent, honorable, sa crainte des attentats l'avait rendu soupçonneux. Ses soupçons apaisés, il se montrait en général bienveillant avec tous. Réformateur, il tolérait les chrétiens et ne tolérait à leur égard aucune persécution (d’après certains écrits, cette attitude, qui tranche beaucoup avec celle de nombre de ses prédécesseurs et successeurs, venait de l'influence de sa mere, qui avait de très bonnes relations avec eux). À l’écoute du peuple, il tente de mettre de l’ordre dans l'administration de Rome après les désordres du règne de son cousin germain et prédécesseur Héliogabale. Sa mère, jalouse de son épouse, la fait exiler pour que son fils lui reste fidèle, soumis. Aucun soldat ne l’apprécie car il est trop soumis à sa mère.
Les sources antiques accablent Héliogabale et encensent le nouvel empereur, le parant de toutes les qualités. Seul Hérodien émet des réserves : selon lui, Sévère Alexandre était doux et aimable, mais se révélait faible et manquait d'autorité auprès de l'armée. Pourtant le jeune empereur, sous l'influence de sa mère et de sa grand-mère, Julia Maesa, redonne un rôle important au Sénat, dont seize membres vont former un « conseil de gouvernement[5] » (et de régence, tant qu'il fut mineur) autour de lui. Il préférait déléguer les questions militaires à des dignitaires qui avaient sa confiance. Il s'entoura de conseillers éminents, tels les juristes Ulpien qui devient préfet du prétoire (commandant de la garde impériale), ou Herennius et Modestinus. Il lance une importante politique urbanistique, avec la reconstruction des thermes de Néron, rebaptisés Thermæ Alexandrinæ, qui s'élèvent sur le Champ-de-Mars. La mort de sa grand-mère Julia Mæsa en 223 affaiblit politiquement l'empereur, car cette maîtresse femme avait une influence forte, y compris sur de nombreux généraux et officiers. Les militaires, justement, voient d'un assez mauvais œil le rétablissement d'un régime politique dominé par les fonctionnaires civils. Une révolte des prétoriens coûte ainsi la vie à Ulpien, tué sous les yeux mêmes de l'empereur horrifié, et l'ancien gouverneur de Pannonie, le célèbre historien Dion Cassius, préfère aussitôt prendre sa retraite en Bithynie, sa province natale.
L'empereur Sévère Alexandre fit lever un certain nombre de nouveaux impôts. Mais d’après diverses sources le peuple payait sous son règne trente fois moins d’impôts que du temps de son prédécesseur Héliogabale. Son règne est également caractérisé par des réformes économiques venant en aide aux plus pauvres.
Souverain, il fit battre monnaie en électrum (alliage naturel d'or et d'argent).
Il admirait en Alexandre le Grand le courage au combat et la volonté de conquête, dont son tempérament était dépourvu. Il se montrait extrêmement dur envers les militaires, à qui il fit toujours payer le prix fort dès qu'ils étaient coupables d'insubordination ou de vol, ce qu'il avait en horreur.
Un assassinat qui allait provoquer la longue période de l'Anarchie militaire
L'empereur affronte les Perses sassanides. Ceux-ci ont refait leur unité en 227 sous la conduite du roi Ardachîr Ier et pillent la Mésopotamie et la Cappadoce en 231. L'empereur, à la tête d'une armée considérable, entreprend contre les Perses une campagne qui ne sera qu'un demi-succès. Il est souvent aux prises avec des révoltes sporadiques de ses troupes qui craignent son irrésolution. De retour à Rome en 233, l'empereur donne des Jeux Persiques qui n'augmentent pas pour autant sa popularité. Il lui est souvent reproché l'influence de sa mère sur lui. En 234, il se rend à Mogontiacum (Mayence) pour repousser les Germains, en particulier les Alamans, mais hésite à combattre et préfère négocier la paix. Cette politique de non-violence est taxée de mollesse par les chefs de l'armée ; le , au lieu-dit vicus Britanniæ[6], ils assassinent dans sa tente l'empereur Sévère Alexandre[7], âgé de 26 ans, alors qu'il s'y était retiré seul pour se reposer. Ils assassinent de même, le même jour, l'impératrice Mamaea, sa mère, et proclament aussitôt empereur l'un des leurs, Maximin[8]. Les circonstances de sa mort varient quelque peu d’un auteur à l’autre ; il fut bien assassiné dans sa tente, soit par un soldat gaulois, soit par un ou plusieurs soldats romains, peut-être commandités par Maximin lui-même. Sévère Alexandre, durant un instant, demanda grâce, mais succomba en silence sous les coups meurtriers. Son assassinat allait ouvrir la longue période de l'Anarchie militaire, qui allait durer jusqu'au règne d'Aurélien et même de Dioclétien[9], soit exactement 50 ans.
La figure de Sévère Alexandre a été magnifiée par l'Histoire Auguste. Dans les faits, il fut un empereur trop jeune. Quoique doué de la meilleure volonté, il avait en aversion l'activité et les violences militaires de son temps. Diverses sources retranscrivent sa vie, et on y retrouve généralement deux tendances : celle qui le « divinise », et celle qui le considère comme un empereur faible. La tragédie personnelle de Sévère Alexandre est qu'il a été un empereur qui n'était pas fait pour régner en des temps où la violence était la première caractéristique du pouvoir et du maintien au pouvoir.
La dynastie des Sévères prend fin comme elle a commencé, par un coup d'État. L'armée, désormais consciente de toute sa force, va jouer un rôle prépondérant dans la période qui s'ouvre, celle dite de l'Anarchie militaire, où les empereurs vont se succéder à un rythme accéléré, toujours par l’intermédiaire de cette armée romaine qui décidera violemment du maintien ou non d’un empereur au pouvoir. De plus, l’empire sera de plus en plus menacé par les invasions barbares, par des épidémies dramatiques et par diverses crises économiques.
Noms successifs
- 208, naît Gessius Bassianus Alexianus
- 221, est fait César par Héliogabale : Imperatori Cæsaris Marci Aurelii Antonini Pii Felicis Augusti Filius Divi Antonini Magni Pii Nepos Divi Severis Pronepos Marcus Aurelius Alexander
- 222, accède à l'Empire : Imperator Cæsar Marcus Aurelius Severus Alexander Pius Felix Augustus
- 235, titulature à sa mort : Imperator Cæsar Marcus Aurelius Severus Alexander Pius Felix Augustus, Pontifex Maximus, Tribuniciæ Potestatis XIV, Imperator XIV, Consul III, Pater Patriæ
Arbre généalogique des Sévères
Septimius Macer | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Gaius Claudius Septimius Aper | Lucius Septimus Severus | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Publius Septimius Aper | Gaius Setpimius Aper | Fulvia Pia | Publius Septimius Geta | Polla | Julius Bassianus | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Publius Septimius Geta | Septimia Octavilla | Paccia Marciana (1) | Septime Sévère r. (193-211) | Julia Domna (2) | Julia Mæsa | Julius Avitus | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Fulvia Plautilla | Caracalla r. (197-217) | Geta r. (209-211) | Julia Soæmias | Sextus Varius Marcellus | Julia Mamæa | Gessius Marcianus (2) | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Julia Paula (1) | Julia Aquilia Severa (2 et 4) | Héliogabale r. (218-222) | Annia Faustina (3) | Orbiane | Sévère Alexandre r. (222-235) | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Notes
- Cf. Hérodien 5,7,3; Cassius Dion Hist. rom., livre 80 (79), ch. 17,3 ; Ælius Lampride, Hist. Aug., Vie d'Alexandre Sévère ; et les analyses plus récentes d'Auguste Jardé, Études critiques sur la vie et le règne de Sévère Alexandre, Paris, , p. 2 et suiv.; Angela Kühnen, Die imitatio Alexandri in der römischen Politik, Münster, , p. 186–188; Alfons Rösger et Wolfgang Will (dir.), Zu Alexander der Grosse Festschrift G. Wirth zum 60. Geburtstag am 9.12.86, vol. 2, Amsterdam, , « Severus Alexander und Alexander der Große », p. 885–906 et plus part. 885–892.
- Louis Mayeul-Chaudon, Dictionnaire historique, critique et bibliographique, vol. 28, Paris, Ménard et Desenne, , « Abrégé chronologique de l'histoire moderne », p. 279
- Les revirements des préfets du prétoire sont rapportés en détail dans la thèse de (en) Robert Lee Cleve, Severus Alexander and the Severan Women, Los Angeles, UCLA, , 730 p., p. 128–159.
- Robert Turcan, Héliogabale et le Sacre du soleil, Albin Michel, coll. « L'homme et l'événement », (ISBN 9782226341976)
- D'après Hérodien, Histoire des empereurs romains, livre 6,1,2. Cf. à ce propos (de) Karlheinz Dietz, Senatus contra principem, Munich, C.H.Beck, , 421 p., p. 300–305.
- Il pourrait s'agir de Bretzenheim ; cf. Auguste Jardé op. cit., p. 85 note 4 et p. 86 note 1.
- François Zosso et Christian Zingg, Les Empereurs romains, édition Errance, (ISBN 978-287-7-72390-9)
- Maurice Meuleau, Le Monde antique, vol. II, Paris, Bordas - Laffont, coll. « Bibliothèque des connaissances essentielles - Le monde et son histoire », (réimpr. 1976 Bordas : 1992, Hachette Education), 608 p. (ISBN 9782010169045).
- (en) Jay King, « The Barracks emperors », sur Jay's Roman History, Coins, and Technology (San José State University), (consulté le ).
Bibliographie
- Cécile Bertrand-Dagenbach, « Alexandre Sévère et l’Histoire Auguste », Collection Latomus, Revue d’études latines, volume 208, Bruxelles, 1990.
- Agnès Molinier-Arbo et Cécile Bertrand-Dagenbach, Histoire Auguste. 3/2, vie d’Alexandre Sévère, Collection des universités de France. Série latine ; 406, Les Belles Lettres, Paris, 2014.
- François-Xavier de Feller, Biographie universelle ou Dictionnaire Historique, nouvelle édition, éd. Outhenin-Chalandre Fils, tome 1, Paris, 1838, p. 109-110.
- Hérodien, traduction de Denis Roques, Histoire des empereurs romains de Marc-Aurèle à Gordien III, Les Belles Lettres, Collection la Roue à livres, Paris, 1990 (ISBN 2-251-33903-5).
- Paul Petit, Histoire générale de l’Empire romain, Seuil, 1974 (ISBN 2020026775).
- François Zosso et Christian Zingg, Les Empereurs romains, édition Errance, 1995 (ISBN 2877722260).
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