Samir (entreprise marocaine)

La Société anonyme marocaine de l'industrie du raffinage ou SAMIR est une entreprise marocaine spécialisée dans le raffinage des produits pétroliers, située dans la ville de Mohammédia.

Société Anonyme Marocaine de l'Industrie du Raffinage (SAMIR)

Création 1959
Dates clés  : Introduction en bourse
Forme juridique Société anonyme
Action MASI : SAM
Siège social Mohammédia
 Maroc
Direction Mohammed Al Amoudi (Président)
Directeurs Mohammed Al Amoudi
Actionnaires Corral Petroleum Holding (67,27 %)
Divers (26,95 %)
Groupe Holmarcom (5,78 %)
Activité Raffinage
Effectif 1200 (2008)
Site web samir.ma

Chiffre d'affaires 44,30 milliards de MAD (2016)
Résultat net -2,52 milliards de MAD (2016)

Elle est depuis 1961 la seule raffinerie du Maroc

Depuis sa privatisation controversée en 1997, elle est contrôlée par le groupe suédo-saoudien Corral Petroleum appartenant au milliardaire saoudien Mohammed al-Amoudi.

En , la Samir met fin à ses activités à cause de difficultés financières. Elle est déclarée en liquidation en juin 2016 [1],[2].

L’entreprise, qui emploie 867 salariés à l’époque, a cumulé des dettes pour 45 milliards de dirhams, notamment envers la douane [3]. C'est la plus spectaculaire faillite de l'histoire du Maroc indépendant [3].

Elle entraine un important feuilleton juridique et politique.

Histoire

Création et développements

En 1959, La SAMIR est créée par l'État marocain, représenté par le Bureau des études et des participations industrielles (BEPI) et l'Office italien des hydrocarbures (Ente Nazionale Idrocarburi (ENI) en joint-venture avec la compagnie AGIP.

La même année, commence la construction de la première unité de distillation de pétrole brut à Mohammedia d'une capacité de 1,25 million de tonnes par an[4].

La construction de la raffinerie est terminée en 1961.

La création de la SAMIR répond ainsi à une volonté politique d'émancipation de l'économie marocaine au lendemain de l'indépendance du pays. Ce projet a pu voir le jour notamment grâce à la volonté de l'industriel italien Enrico Mattei alors dirigeant de ENI, qui a offert un partenariat à 50/50, très différent des formes de concession normalement proposées par les grandes compagnies pétrolières européennes plus proches du 15/85[5].

La SAMIR est ainsi la seule raffinerie de pétrole au Maroc et une des principales raffineries d'Afrique.

La SAMIR a une capacité de raffinage de 10 millions de tonnes par an et une capacité de stockage supérieure à 2 millions de m2[6]. Par ailleurs, bien que la SAMIR soit présentée comme le premier employeur de la ville de Mohammédia, l'entreprise a dû faire face à de nombreuses critiques à cause de la pollution atmosphérique et maritime causée par la raffinerie. L'entreprise est donc à l'initiative de plusieurs projets faisant la promotion de la ville comme le festival des Fleurs dont le budget est de 3,5 millions de DH (en 2008) est financé en grande partie par la SAMIR et l’ONE[7] ou la réhabilitation du Parc de la ville de Mohammedia.

Une privatisation très controversée

En 1997, l'entreprise est privatisée par l’État marocain[8] sous le gouvernement de Abdellatif Filali.

C'est alors la plus importante privatisation menée au Maroc depuis 1993[8].

Le ministre des privatisations, Abderrahmane Saïdi, expert-comptable de formation, est un technocrate.

Il n'est membre d'aucun parti politique [9]. Saïdi va outrepasser la procédure prévue par la loi (Une Commission d’évaluation) et prendre la décision sans jamais engager le moindre débat au Parlement.

En juillet 2001, Abderrahmane Saïdi, le ministre qui a privatisé la Samir en 1997 est nommé Directeur général de la Samir. Abraham Serfaty, ingénieur et opposant politique historique, dénonce un acte illégal et exige l'ouverture d'une enquête.

La post-privatisation

Le , la SAMIR obtient un emprunt international d’environ 200 M$[10].

En 2014, alors que la SAMIR appartient à hauteur de 67,27 % par l'industriel saoudien d’origine éthiopienne Mohammed Al Amoudi à travers sa filiale marocaine, Corral Holding Maroc, elle annonce plus de 3,4 milliards de DH de pertes[11].

Une faillite spectaculaire

En , la SAMIR suspend une grande partie de ses activités et est dans une situation financière critique.

L’administration des douanes et impôts indirects initie une procédure de saisie pour recouvrer 13 milliards de dirhams d’impayés (plus d’un milliard d’euros) alors que le cours de Bourse, qui a déjà perdu 47 % de sa valeur depuis est suspendu. Au total, la SAMIR affiche un endettement d’environ 40 milliards de dirhams[12].

En , le tribunal de commerce de Casablanca, se basant sur l'article 620 du code du commerce marocain, annonce la liquidation judiciaire de la SAMIR. Il autorise toutefois la société à continuer ses activités pendant trois mois[13]. C'est la plus spectaculaire faillite de l'histoire du Maroc indépendant [3].

Le secteur bancaire marocain perd plusieurs milliards de dirhams et les principales banques du pays sont affectées.

Al Amoudi espère alors que le roi d’Arabie saoudite, Salmane ben Abdelaziz Al Saoud, alors en vacances d'été a Tanger, intervienne en sa faveur pour l'aider à éponger sa dette envers le gouvernement marocain (1,2 milliard d’euros)[14]. Le Roi lui ayant ordonné de rembourser ses dettes, en pleine tourmente, Mohammed Al Amoudi quitte le Royaume du Maroc sans avoir payé les salaires de ses 950 salariés[15].

Le , alors que l'unique raffinerie marocaine est à l’arrêt depuis , durant l’audience où le Tribunal doit décider de la liquidation définitive de la Samir ou de son redressement judiciaire[16], Mohamed El Amoudi promet d’apporter 680 millions de dollars de fonds propres pour éviter la liquidation judiciaire de la SAMIR[réf. nécessaire].

Le , en second ressort, les juges du tribunal de commerce de Casablanca annonce la liquidation judiciaire de la SAMIR, confirmant le verdict prononcé en [2].

Un feuilleton politique et judiciaire

En janvier 2017, le journaliste de Medias24 Abdelali El Hourri est interdit d’accès à l’audience de l’affaire la Samir qui s’est tenue le 30 janvier au tribunal de commerce de Casablanca[17]. Le principe de la publicité des débats est violée, ce qui soulève de graves questions sur le fonctionnement de la justice dans l'affaire [17].

Le premier syndic judiciaire, Mohamed El Krimi, a été remplacé en mai 2018, par Abdelkbir Safadi, à la suite de conflits avec les parties prenantes du dossier. Le 5 novembre 2018, la justice se prononce en faveur de l'extension de la liquidation aux patrimoines personnels de six des dirigeants de la Samir :

Nom Titre
Mohamed Houcine Al Amoudi PDG et actionnaire majoritaire
Jamal Mohamed Baamer Directeur Général
Bassam Felix Odeh Aburdene Administrateur
Jason T.Milazzo Administrateur
Lars Nelson Administrateur
George Salem Administrateur

Par ce verdict, la Cour va ainsi dans le sens du rapport des liquidateurs judiciaires, qui pointent des fautes de gestion. En septembre 2019, le groupe émirati Petroen Engineering DMCC s’est offert une large campagne médiatique au Maroc, médiatisant son offre de rachat de la Samir à grands coups de publicités dans les journaux.

Le juge commissaire Aberrafii Bouhamria, en charge de la liquidation de la raffinerie, aurait reçu en effet une offre de 2,4 milliards de dollars – un montant qui correspond à l’évaluation des actifs de la raffinerie par l’expert local mandaté par le tribunal, qui a estimé le tout à 21 milliards de dirhams (2,12 milliards de dollars). Aucune décision n'est cependant prise.

Depuis 2021, près de 6 propositions de lois ont été déposées au parlement pour nationaliser la Samir, une option que le gouvernement a écarté [18]. Pour le Ministre de l’Énergie Aziz Rabah : «la reprise de la Samir par l’État n’est pas considérée comme une solution, car le marché est devenu libre à la concurrence des intervenants et le dossier est entre les mains de la justice»[18].

Points de vue sur la crise

Selon Abdelilah Benkirane, la privatisation de la Samir a été une grave erreur [19]. «Ils n’auraient pas dû confier un secteur aussi vital comme le pétrole à un étranger» affirme l'ancien chef du gouvernement[19].

Le Président du Conseil de la Concurrence, Driss Gueraoui, estime que l’État devrait rouvrir la Samir .

Dans une longue interview parue en 2018, Mohamed Benmoussa, économiste en chef de la CGEM, s'interroge sur le rôle de Aziz Akhannouch, président du RNI et propriétaire du distributeur de produits pétroliers Afriquia, dans ce dossier « au vu de ses positions en affaires et en politique » [20]. Ses déclarations suscitent la fureur de la direction de Afriquia, qui réplique via le journal Aujourdhui le Maroc, propriété de Akwa[20].

Selon Driss Benhima, ancien directeur de l'ONEE :

  • "Si la Samir ne dispose pas d’une protection quelconque de son marché, alors je ne vois aucun inconvénient à ce qu’elle redémarre mais je ne crois pas que nous trouvions beaucoup de repreneurs si on ne leur donne pas un avantage de marché. (..) La capacité des réservoirs de stockage de la SAMIR est encore supérieure, malgré les investissements des cinq dernières années, à la totalité des stockages existants dans notre pays et il est utile de disposer de capacités importantes pour assurer la sécurité énergétique du pays, de permettre aux importateurs de mieux jouer sur la fluctuation des prix internationaux par des stocks de régularisation et enfin de créer des ressources importantes pour rembourser certaines dettes de l’entreprise et en particulier les dettes sociales[21]

Pour l'économiste Najib Akesbi :

  • "Si il est possible de récapituler les principaux épisodes de cet incroyable feuilleton de la privatisation de Samir, on dira qu’il a commencé, il y a un quart de siècle, par une cession qui n’a respecté ni la loi ni l’éthique encadrant une telle opération, puis il s’est poursuivi dans le reniement et le non-respect des engagements pris dans le cahier de charges, s’est ensuite enlisé dans la falsification des comptes, le surendettement et la distribution de bénéfices réels ou fictifs, pour finir dans les marécages d’une liquidation judiciaire équivoque et laissant le champ libre à de « nouveaux maîtres du marché » encore plus voraces. [22]"

Produits

Sites de production

La SAMIR exploite deux principaux sites au

Maroc :

Suède :

  • La SAMIR exploite également une raffinerie en Suède via un investissement du groupe saoudien Corral[23].

En outre, la SAMIR envisage l'ouverture de deux nouveaux sites de production à Casablanca et dans la région de Marrakech via sa filiale TSPP[24].

Voir aussi

Notes et références

  1. « Maroc : la Cour d'appel de Casa confirme la liquidation du raffineur Samir - JeuneAfrique.com », (consulté le )
  2. Agence Ecofin, « Le tribunal de commerce de Casablanca prononce la liquidation judiciaire de la Samir ! » (consulté le )
  3. « Samir : retour sur la plus grosse faillite de l’histoire du Maroc », sur Jeune Afrique,
  4. http://www.samir.ma/index.php?option=com_content&view=article&id=51&Itemid=141
  5. http://www.huffpostmaghreb.com/2015/08/11/la-samir-independance-histoire_n_7969886.html
  6. http://www.samir.ma/index.php?option=com_content&view=article&id=98&Itemid=226
  7. « La «cité des fleurs» en fête », L'Économiste, (lire en ligne, consulté le ).
  8. « Le Maroc vend ses raffineries à un homme d'affaires saoudien », sur Les Échos,
  9. Mouna Izddine, « Abderrahmane Sâaïdi, ancien ministre de la Privatisation, a enfin réalisé son rêve. Sa galerie Memoarts lui prend beaucoup de temps et d'énergie, mais ce n'est pas pour lui déplaire. Des chiffres et des arts », sur Maroc Hebdo,
  10. « La SAMIR réalise un emprunt international de 153 M€ », sur Econostrum / Toute l'actualité économique en Méditerranée (consulté le ).
  11. « Maroc : Cheikh Al Amoudi, capitaine du bateau Samir à la dérive », Le Monde.fr, (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
  12. Youssef Ait Akdim, « Maroc : Cheikh Al Amoudi, capitaine du bateau Samir à la dérive », Le Monde, (lire en ligne).
  13. « SAMIR: le tribunal prononce la liquidation judiciaire », sur Medias24 - Site d'information (consulté le )
  14. « Affaire Samir : comment le cheikh Al Amoudi a voulu faire chanter le Maroc - JeuneAfrique.com », (consulté le )
  15. « En pleine tourmente, le PDG de la Samir quitte précipitamment le Maroc » (consulté le )
  16. « Maroc : Al Amoudi promet 680 millions de dollars pour récupérer la raffinerie Samir et éviter la liquidation : ultime coup de bluff ? - L'actu des usines Maroc », sur www.usinenouvelle.com (consulté le )
  17. Mohammed Hamza Hachlaf, « Médias 24 interdit de couvrir l'audience de l'affaire la Samir », sur Telquel,
  18. Jihane Gattioui, « Samir : le gouvernement appelé à revoir sa position », sur Les Ecos
  19. « « La privatisation de la SAMIR était une grave erreur », affirme Benkirane », sur Yabiladi,
  20. Ghita Ismaili, « La SAMIR, sujet de discorde entre la CGEM et son économiste en chef »,
  21. Wadie El Mouden, « ENTRETIEN AVEC DRISS BENHIMA: «JE NE REGRETTE PAS LA SAMIR ET JE RESTE RÉTICENT À TOUTE NOUVELLE EXPÉRIENCE SIMILAIRE» », sur Le 360,
  22. « Privatisation de la Samir et libéralisation ... Pr. N. AKESBI », sur Revue Marocaine de Science Politique
  23. http://www.yabiladi.com/economie-samir-approvisionner-senegal-produits-petroliers,754.html
  24. http://www.samir.ma/index.php?option=com_content&task=view&id=121&Itemid=209

Liens externes

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