Simon Kimbangu

Simon Kimbangu, né le 12 septembre 1887 à Nkamba dans l’actuel Kongo Central et mort le dans la ville d’Elisabethville, est considéré par ses fidèles comme un « envoyé spirituel » congolais . Il devient prédicateur dans les années 1920 et fonde en 1921 à Nkamba un mouvement religieux qui donnera naissance au kimbanguisme. Arrêté et jugé, il meurt après une longue détention d'une trentaine d'années. Son action a généré l'émergence dans le domaine religieux de cette église kimbanguiste, qui perdure, et a rendu visible également un mouvement de nature plus politique contre le pouvoir colonial, qui a pris ensuite d'autres formes.

Simon Kimbangu
Biographie
Naissance
Décès
Nationalité
Activité
Chef religieux
Conjoint
Enfants
Joseph Diangienda
Charles Kisolokele (en)
Salomon Dialungana Kiangani (d)
Autres informations
Religion

Biographie

Simon Kimbangu est né le à N'kamba[1],[2]. Il est baptisé par la Baptist Missionary Society en 1915 et est formé pour devenir catéchiste. En 1919, il part à Léopoldville dans l'espoir d'y trouver du travail et cherche sans succès de se faire embaucher par les Huileries du Congo belge[1]. Le , il se rend chez une femme dont il a entendu dire qu'elle était gravement malade et il l'aurait guérie par imposition des mains[1]. Au cours des semaines suivantes, il aurait guéri plusieurs personnes[2],[3].

Les nouvelles des guérisons se répandent[1],[4] et attirent beaucoup de monde à N'kamba, ce qui alarme les autorités coloniales, en l'occurrence Léon Morel (en), commissaire de district[5]. Le , à la tête d'une colonne de la Force publique, il se rend à N'kamba en vue d'appréhender Simon Kimbangu. La tentative échoue et Kimbangu parvient à s'enfuir[5]. Néanmoins, plusieurs dirigeants du mouvement sont arrêtés et emmenés à Thysville. Les soldats de Morel ayant tiré à balles réelles, on relève un mort et plusieurs blessés[1].

En , Kimbangu se rend spontanément aux autorités coloniales. Celles-ci le traduisent devant un conseil de guerre[6]. Ce procès s'appuie sur « un acte d'accusation faussé, une procédure arbitraire » selon le Centre de recherche et d'information socio-politiques[5]. Au bout de trois jours, il est condamné à mort[2],[5],[7],[6] à la suite d'un jugement qui cite les propos de Simon Kimbangu indiquant que «la colonisation allait finir et devait finir»[1],[7]. Le Roi Albert décide de commuer sa peine en détention à perpétuité[5],[3],[8]. Les autorités coloniales transfèrent Kimbangu à la prison d'Élisabethville au Katanga[1]. Il y reste enfermé jusqu'à sa mort le 12 octobre 1951[9],[10],[11].

Héritage

Après la condamnation de Kimbangu, les autorités coloniales tentent de briser son mouvement, notamment en reléguant ses principaux disciples dans d'autres régions du pays. Toutefois, malgré cette répression, le mouvement ne cesse de gagner en importance. Une des hypothèses , de sociologues comme Georges Balandier ou encore Susan Asch, est que ce type de mouvement traduit, avant l’émergence de mouvements pour l’indépendance, la volonté des populations colonisées de reprendre l’initiative. Ne pouvant le faire sur le plan politique, elles expriment cette volonté sur le plan religieux[12] et retournent le discours des missionnaires chrétiens contre le pouvoir colonial[13],[14],[15],[16].

En 2021, environ 10 % des croyants congolais se réclament de l'Église Kimbanguiste[17]. À l'époque contemporaine, cette Église s'institutionnalise[18]. Elle s'est établie dans plusieurs pays[19]. À la mort de Simon Kimbangu, c'est son fils Joseph Diangienda qui prend la tête de l'Église[9] jusqu'à sa mort survenue le , avant d'être remplacé par son frère Paul Salomon Dialungana Kiangani (1992-2001) puis par son petit-fils Simon Kimbangu Kiangani[20].

Notes et références

  1. David Van Reybrouck (trad. du néerlandais de Belgique), Congo. Une histoire, Arles, Éditions Actes Sud, coll. « Babel », , 859 p. (ISBN 978-2-330-02858-9), pp. 191-206.
  2. (en) « Simon Kimbangu. African religious leader », sur Encyclopedia Britannica.
  3. Jean-Pierre Stroobants, « Le fantôme de Kimbangu, symbole de la mauvaise conscience coloniale belge », Le Monde, (lire en ligne)
  4. Antoine Lion, « Kimbangu Simon (1889 env.-1951) », sur Encyclopedia Universalis
  5. « Le kimbanguisme », Courrier hebdomadaire du CRISP, no 47, , p. 1-21 (DOI 10.3917/cris.047.0001, lire en ligne)
  6. « RDC: la Haute Cour militaire réhabilite Simon Kimbangu », Radio Okapi, (lire en ligne)
  7. « Simon Kimbangu : le procès du procès », Radio France internationale, (lire en ligne)
  8. (en) Jonathan Derrick, Africa's 'Agitators': Militant Anti-Colonialism in Africa and the West, 1918-1939, , p. 79
  9. Eugène Mannoni, « Les pacifiques disciples à Simon Kimbangu expriment par leur ferveur religieuse leurs aspirations nationalistes », Le Monde, (lire en ligne)
  10. « Les descendants de Kimbangu veulent la révision du procès », La Libre Belgique, (lire en ligne)
  11. Véronique Kiesel, « Congo Les descendants du fondateur du kimbanguisme veulent la révision du procès : Justice, enfin, pour Kimbangu », Le Soir, (lire en ligne)
  12. Tshitenge Lubabu M. K., « Au cœur du messianisme », Jeune Afrique, (lire en ligne)
  13. Jean-Pierre Dozon, « Asch, Susan - L'Église du prophète Kimbangu. De ses origines à son rôle actuel au Zaïre (1921-1981) », Cahiers d'études africaines, vol. 24, no 93, , p. 105-107
  14. Susan Asch, L'Eglise du prophète Kimbangu: de ses origines à son rôle actuel au Zaïre, 1921-1981, Éditions Karthala,
  15. Henri Desroche et Paul Raymaekers, « Départ d'un prophète, arrivée d'une Église. Textes et recherches sur la mort de Simon Kimbangu et sur sa survivance », Archives de sciences sociales des religions, no 42, , p. 117-162 (DOI 10.3406/assr.1976.2101, lire en ligne)
  16. Georges Balandier, Sociologie actuelle de l'Afrique Noire. Dynamique des changements sociaux en Afrique centrale, Presses Universitaires de France,
  17. « RDC : pour ses 100 ans, l’Eglise kimbanguiste communie avec les pouvoirs en place », Le Monde, (lire en ligne)
  18. Jean-Claude Willame, « L’Église du prophète Kimbangu. De ses origines à son rôle actuel au Zaïre », Le Monde diplomatique, (lire en ligne)
  19. Aurélien Mokoko Gampiot, Kimbanguisme et identité noire, Éditions L'Harmattan,
  20. Ramon Sarró, Ruy Blanes et Fatima Viegas, « La guerre dans la paix. Ethnicité et angolanité dans l'Église kimbanguiste de Luanda », Politique africaine, no 110, , p. 84-101 (DOI 10.3917/polaf.110.0084, lire en ligne)

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • FWAKASUMBU Luwawanu, La prophétie magistrale de Kimbangu, Éditions Afrika Concept, 2019
  • Elikia M'Bokolo et Kivilu Sabakinu (éds), Simon Kimbangu, le prophète de la libération de l'homme noir, 2 vol., Paris, L'Harmattan, 2014.
  • Anne Mélice, Prophétisme, hétérodoxie et dissidence. L'imaginaire kimbanguiste en mouvement, Thèse de doctorat en Sciences politiques et sociales (Anthropologie), 3 vol., Université de Liège, 2011.
  • FWAKASUMBU Luwawanu, Kimbangu, le plus vieux et le plus jeune des ancêtres de l'humanité, éd. Bibliorama, Paris, 2009 (ISBN 978-2-917378-00-7) (BNF 42004318).
  • Joseph Dikunduakila Kuzeyidioko, Simon Kimbangu : Le prophète, notre contemporain, éd. Entraide kimbanguiste, Châtenay-Malabry, 2006 (ISBN 2952444218).
  • Jean-Luc Vellut, Simon Kimbangu. 1921, de la prédication à la déportation : sources, 3 vol., éd. Académie royale des sciences d'outre-mer, Bruxelles, 2005-2015.
  • Diangienda Kuntima, L'histoire du kimbanguisme, éd. Kimbanguistes, Kinshasa, 1984.
  • Suzanne Asch, L'Église du prophète Kimbangu, éd. Karthala, Paris, 1981 (ISBN 2865370690).
  • Martial Sinda, Simon Kimbangu, prophète et martyr zaïrois, coll. Grandes figures africaines, éd. Nouvelles éditions africaines, Dakar, 1977 (ISBN 2858090793).
  • Charles-André Gilis, Kimbangu : Fondateur d'Église, éd. Librairie encyclopédique, Bruxelles, 1960.
  • Jules Chomé, La Passion de Simon Kimbangu. 1921-1951, éd. Les Amis de Présence africaine, Bruxelles, 1959.
  • Paul Raymaekers, « Histoire de Simon Kimbangu, prophète, d'après les écrivains Nfinangani et Nzungu (1921) », Archives de Sciences Sociales des Religions, no 31, , p. 15-42 (lire en ligne).

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