Site archéologique de Mougon
Le site archéologique de Mougon est une agglomération secondaire antique, dont l'occupation se poursuit partiellement au Haut Moyen Âge, situé sur la commune française de Crouzilles en Indre-et-Loire.
Mougon | |||
Plan général simplifié du site. | |||
Localisation | |||
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Pays | France | ||
Commune | Crouzilles | ||
Département | Indre-et-Loire | ||
Région | Centre-Val de Loire | ||
Coordonnées | 47° 07′ 00″ nord, 0° 28′ 39″ est | ||
Altitude | 31 à 51 m | ||
Superficie | 30 ha | ||
Géolocalisation sur la carte : Indre-et-Loire
Géolocalisation sur la carte : France
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Histoire | |||
Époque | Ier au VIe siècle | ||
Sur une superficie évaluée à 30 ha, les fouilles et les prospections ont permis d'identifier plus de 40 fours de potiers fabriquant principalement des amphores et des cruches, de nombreux bâtiments dont l'affectation reste à déterminer, ainsi qu'une trame viaire composée de voies se croisant à angle droit ; cet ensemble semble être très actif aux Ier et IIe siècles. Pendant le Haut Moyen Âge, une grande nécropole occupe la partie occidentale du site.
Localisation
Le site archéologique est implanté à l'est du hameau de Mougon, ancienne commune rattachée à Crouzilles ; il s'étend sans doute également sous ce hameau[1]. Sur la rive droite de la Vienne, la plus grande partie de ses vestiges connus est inscrite dans un triangle limité par une ancienne voie ferrée au nord, le hameau de Mougon à l'ouest et la rivière au sud, mais la superficie totale de l'agglomération antique, à son plus fort développement, est évaluée à 30 ha[2]. À ce niveau, la Vienne décrit un méandre et son cours, se déplaçant peu à peu vers le nord depuis l'époque antique, emporte par affouillement la partie sud du site[3]. Après examen des berges de la rivière, il s'avère que cette destruction est beaucoup mois importante que ce qui a été dans un premier temps envisagé[4].
Historique
Des outils néolithiques, des céramiques protohistoriques suggèrent une occupation du site avant l'Antiquité sans qu'il soit possible de se prononcer sur l'importance de cette occupation et son caractère pérenne[2].
Une importante production de poteries, terres cuites architecturales, amphores vinaires, dolia, voit le jour vers le milieu du Ier siècle. Cette activité intense ne semble pas se prolonger au-delà de la fin du IIe ou du début du IIIe siècle[2].
Au IVe siècle, le site continue certainement à être partiellement occupé mais selon des modalités inconnues[2]. Grégoire de Tours signale la présence au Ve siècle d'une église à Mougon (Mediconnum)[5], dont il attribue la construction à l'évêque Perpet de Tours. Un cimetière du Haut Moyen Âge est localisé autour de l'église — les fouilles ont livré plusieurs sarcophages[6] — qui est reconstruite ultérieurement[7]. Les inhumations se poursuivent jusqu'en 1755, liées à un habitat encore à découvrir[6].
Découverte du site et études réalisées
C'est en 1850 que, lors d'une séance de la société archéologique de Touraine (SAT), la découverte d'une nécropole mérovingienne à Mougon est annoncée. Vingt et un ans plus tard, dans le même cadre, Casimir Chevalier fait état de la découverte d'ateliers de potiers sur le site[8]. La ligne de chemin de Chinon à Port-de-Piles, construite en 1880-1882, passe au niveau du site et ses travaux de construction mettent au jour des fours de potiers. Les dernières décennies du XIXe siècle sont pour de nombreux collectionneurs d'antiquités l'occasion de venir à Mougon y récolter des artéfacts pour leur usage propre ou pour enrichir les collections des sociétés savantes, mais aucune étude globale n'est entreprise[9].
En 1912 la première fouille structurée a lieu ; elle s'intéresse aux abords de l'église. Dans le même secteur mais également à l'intérieur de l'église, jusque dans les années 1970, d'autres opérations permettent de préciser l'importance de la nécropole du Haut Moyen Âge[10].
Henry Auvray publie en 1936, dans le bulletin de la SAT[11], une première étude sur l'historique du site de Mougon basée sur ses propres observations de terrain et celles de ses prédécesseurs, des fouilles sommaires dans l'église et la compilation des archives[12]. L'édition 1960 de la carte archéologique de la Gaule, rédigée pour l'Indre-et-Loire par Jacques Boussard, fait le point sur les découvertes et la bibliographie disponible pour Mougon[12].
En 1973 débute un vaste programme d'études interdisciplinaires à Mougon ; il combine photographie aérienne, prospection géophysique, ramassage de surface sur le terrain quadrillé. C'est à cette occasion qu'est découverte l'organisation orthogonale de la voirie et que le site de Mougon acquiert véritablement son statut d'une agglomération secondaire préférentiellement dévolue aux activités artisanales de poterie[13].
Un travail universitaire (2008) permet de mieux appréhender les modalités d'occupation de l'agglomération. Entre 2008 et 2019, plusieurs opérations de diagnostic ou d'archéologie préventive viennent enrichir les connaissances au sujet du site[14]. De 2014 à 2017, un programme collectif de recherches coordonné par l'INRAP a pour objectifs d'étudier l'intégration du site dans son environnement et de réaliser une étude détaillée des vestiges archéologiques conservés in situ[15].
Description
Trame viaire
Image externe | |
Photo aérienne sur le site de Citeres | |
Le site est traversé par une voie orientée de l'ouest-nord-ouest à l'est-sud-est qui suit la rive droite de la Vienne. Retrouvée à l'ouest de Mougon, il s'agit vraisemblablement de la voie antique de Chinon à Port-de-Piles. Plusieurs autres voies, perpendiculaires à celle-ci, dessinent une trame orthogonale régulière[16], même si au moins deux réseaux, d'orientation sensiblement différente, semblent se superposer. Cette disposition pourrait être due à des crues de la Vienne nécessitant une réorganisation de l'ensemble de la cadastration[17].
Ateliers de potiers
Quelques marques de potiers ont été trouvées : ISAV et TONCUS F(ecit)[18]. Même si un seul de ces fours est intégralement fouillé et plusieurs autres partiellement, les recherches et les prospections au sol et par voie aérienne identifient plus d'une quarantaine de fours de potiers à Mougon, occupant une grande partie du site. Ceux qui ont pu être examinés sont des fours verticaux pourvus d'une sole[19]. Dans ce type de four, les poteries à cuire sont disposées sur une sole de cuisson perforée et chauffée par-dessous. Une voûte en maçonnerie ou en argile recouvre le four ; elle est détruite après la chauffe pour permettre de récupérer les poteries cuites puis reconstruite pour la chauffe suivante, si l'état général du four ne justifie pas son abandon[20].
Habitat et autres constructions
Plusieurs puits sont identifiés sur le site, l'un se trouvant au XXIe siècle dans le lit de la Vienne[21].
Une complexe thermal, public ou privé, existe probablement en rive de Vienne mais sa localisation est incertaine[22].
La diffusion des productions des ateliers de Mougon (amphores et jarres notamment), nécessite vraisemblablement un aménagement de rives de la Vienne pour le transport par bateau[23].
Les structures repérées et ne correspondant pas à des activités artisanales sont rares ou mal identifiées. Elles se trouvent entre la principale zone des fours et le hameau moderne, ainsi qu'au nord de celui-ci. L'importance et la localisation du secteur d'habitations restent mal connus ; il pourrait se situer sous le hameau lui-même[19], des vestiges en étant sans doute mis au jour lors de fouilles dont les premiers résultats sont rendus publics en 2020[24].
Le village médiéval
L'église ruinée de Mougon, plusieurs fois fouillée au XXe siècle, ne peut encore être datée avec précision. Il peut s'agir d'un édifice carolingien plusieurs fois remanié jusqu'au XIXe siècle ou bien d'une construction sur les structures d'un premier bâtiment, peut-être l'église de Perpet[25].
La nécropole du Haut Moyen Âge qui semble être associée à ce lieu de culte précoce a livré de nombreux sarcophages en pierre dont certains sont réutilisés, mais aussi quelques inhumations en pleine terre. Les plus récentes études montrent que son emprise géographique est importante, tout autour de l'église[26].
Les églises médiévales étant souvent construites au milieu d'un espace densément bâti, il est permis de supposer que le village de Mougon, dès le Ve ou le VIe siècle, occupe un espace tout ou partiellement recouvert par l'agglomération moderne. Les données archéologiques ne permettent toutefois pas de conclure[27].
Les poteries de Mougon
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Les ateliers de Mougon produisent des récipients de transport (amphores de type Dressel 2/4 et Gauloise 4, dolia, cruches et jarres) mais aussi de la vaisselle domestique (pots, cruches, jattes)[28]. La fabrication d'amphores vinaires à Mougon prouve, de manière indirecte, la présence de vignes à proximité dès le Ier siècle, ces récipients encombrants n'étant jamais produits loin du lieu où ils sont utilisés[29].
La fabrication de statuettes[30], de sceaux, de pesons et de fusaïoles est également attestée, ces deux derniers éléments prouvant qu'une activité de tissage existe aussi à Mougon ou à proximité[28].
Au regard des plus récentes études, les productions des ateliers de Mougon semblent être diffusées principalement dans la moitié occidentale de la civitas Turonurum que recouvre sensiblement le département d'Indre-et-Loire, mais aussi jusqu'à Juliomagus (Angers) vers l'ouest et Tasciaca (Monthou-sur-Cher-Pouillé-Thésée) vers l'est[19].
Notes et références
- Ferdière 1999, p. 141.
- Moreau 2014, p. 1.
- Dubois 2003, p. 96.
- Salé 2015, p. 74.
- Moreau 2014, p. 1-2.
- Moreau 2014, p. 2.
- Notice no PA00097733, base Mérimée, ministère français de la Culture.
- Schweitz 2016, p. 6-7.
- Schweitz 2016, p. 8-10.
- Schweitz 2016, p. 7.
- Auvray 1936.
- Schweitz 2016, p. 10.
- Schweitz 2016, p. 11.
- Salé 2015, p. 29.
- « L’agglomération antique et médiévale de Mougon », sur le site de Citeres (UMR 7324) (consulté le ).
- Dubois 2003, p. 95.
- Provost 1988, p. 47.
- Provost 1988, p. 48.
- Boucher 2012, p. 64.
- Gérard Coulon, Les Gallo-Romains, Paris, Errance, coll. « Civilisations et cultures », , 219 p. (ISBN 978-2-8777-2331-2), p. 129.
- Salé 2015, p. 31.
- Moreau 2014, p. 5.
- Ferdière 1999, p. 142.
- « L'agglomération antique de Mougon à Crouzilles (Indre-et-Loire) », sur le site de l'INRAP (consulté le ).
- Salé 2015, p. 33.
- Philippe Salé, « Une fouille récente à « Mougon » », dans [Collectif], Les Gallo-Romains entre Loire et Vienne, Savigny-en-Véron, Écomusée du Véron, , 130 p. (ISBN 2-951-80162-9), p. 67.
- Salé 2015, p. 40.
- Boucher 2012, p. 65.
- Boucher 2012, p. 66.
- Auvray 1936, p. 309.
Pour en savoir plus
Bibliographie
- Henry Auvray, « Les établissements romains de Mougon », bulletin de la Société archéologique de Touraine, t. XXVI, , p. 301-315 (ISSN 1153-2521, lire en ligne).
- Thomas Boucher, « L'agglomération antique de Mougon à « Crouzilles » », dans [Collectif], Les Gallo-Romains entre Loire et Vienne, Savigny-en-Véron, Écomusée du Véron, , 130 p. (ISBN 2-951-80162-9), p. 61-66.
- Alain Ferdière, « Crouzilles », Revue archéologique du centre de la France, no 17 (supplément) « Agglomérations secondaires antiques en Région Centre. Volume 1 », , p. 139-144 (lire en ligne).
- Jacques Dubois, Archéologie aérienne - patrimoine de Touraine, Saint-Cyr-sur-Loire, Alan Sutton, , 190 p. (ISBN 2-8425-3935-4).
- Anne Moreau, « Crouzilles, « Mougon » : de l’agglomération antique au village médiéval », dans Élizabeth Zadora-Rio (dir.), Atlas Archéologique de Touraine : 53e supplément à la Revue archéologique du Centre de la France, Tours, FERACF, (lire en ligne [PDF]).
- Michel Provost, Carte archéologique de la Gaule - l'Indre-et Loire-37, Paris, Académie des inscriptions et belles-lettres, , 141 p. (ISBN 2 8775-4002-2), p. 46-48.
- Philippe Salé et al., L’agglomération antique et médiévale de « Mougon » à Crouzilles (Indre-et-Loire) : rapport d’activités du projet collectif de recherche, INRAP, , 132 p. (lire en ligne [PDF]).
- Daniel Schweitz et al., « L'atelier de potier de Mougon (Crouzilles, Indre-et-Loire) », Revue archéologique du Centre de la France, t. 25, no 1, , p. 37-77 (DOI 10.3406/racf.1986.2461).
- Daniel Schweitz, « De l'invention de l'atelier de potiers gallo-romains de Mougon à l'étude des origines de la viticulture en Touraine : l'implication de la Société archéologique de Touraine », bulletin de la Société archéologique de Touraine, t. LXII, , p. 5-18 (ISSN 1153-2521).
Liens externes
- (en) « Amphora Types According to Dressel », Profils-types des amphores Dressel, avec quelques dates, sur abc.se (consulté le ).
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