Stèle de Croas ar Peulven

La stèle de Croas ar Peulven[1] dite aussi borne milliaire de Quillidien[2] est une stèle protohistorique remployée, mais sans certitude, en borne itinéraire à l'époque romaine et située à Plouigneau, en France[3].

Stèle de Croas ar Peulven
Présentation
Destination initiale
Stèle protohistorique, puis borne milliaire ?
Construction
Âge du fer, remploie à l'époque romaine ?
Propriétaire
Commune
Patrimonialité
Localisation
Pays
Région
Département
Commune
Adresse
Croas ar Peulven
Coordonnées
48° 34′ 17″ N, 3° 40′ 51″ O
Localisation sur la carte de France
Localisation sur la carte du Finistère

Description

La pierre, cylindrique, grossièrement tronconique, est haute de 2,91 m, de diamètre d'au moins 0,5 m[4], et fait environ 2 900 kg. Elle serait taillée dans un granite du Ponthou.

Une incision rectangulaire est visible sur son flanc nord-ouest.

Bien que mentionnée à tort dans certains recueils de textes épigraphiques comme le CIL, la pierre est anépigraphe, sans inscription lisible attestant une fonction particulière.

Localisation

La stèle est située dans le département français du Finistère, sur la commune de Plouigneau.

Elle a été trouvée aux abords du hameau de Croas ar Peulven (anciennement nommé Kras ar Peulven, selon Pierre Merlat), à plus de cinq cents mètres au sud du lieu-dit Quillidien (ferme où elle est parfois localisée[5]), et à environ deux cents mètres au nord-ouest du lieu-dit Keranfors (où Louis Pape la localise[6], comme une autre stèle[7]).

Il semble que le fait que Croas ar Peulven ait été perçu comme sur le territoire (privé ou administratif) des deux derniers lieux-dits cités a causé une relative variation dans l'appellation de la stèle. La frontière avec la ferme Quillidien, conséquence de la construction de la voie rapide à quelques dizaines de mètres au nord de la pierre, voire le remembrement, y sont peut-être aussi pour quelque chose.

Longtemps couchée dans un fossé, partiellement engagée dans un talus sur le bord Est du chemin menant alors à Quillidien (coupé depuis par la nouvelle route nationale), elle est redressée en 1981 et scellée dans un grand socle rectangulaire au niveau du sol.

Louis Pape fait l'hypothèse que la pierre a été déplacée au cours des âges.

Historique

La pierre a été signalée pour la première fois dans les années 1950, par Pierre Merlat et Louis Pape, dans le cadre d'un recensement des bornes itinéraires romaines du territoire de la cité des Osismes.

La stèle protohistorique

En se basant sur sa forme et son façonnage, il semble admis par Michelle Le Brozec et Marie-Yvanne Daire (1998) que cette pierre a été dressée lors du second âge du fer (aux environs du Ve au Ier siècles av. J.-C.), d'où son appellation ancienne de « stèle gauloise » (la distinguant du mégalithisme néolithique, plus ancien, et des menhirs[8]).

En général peu documentés, surtout pour ceux n'ayant aucune décorations, ces monuments sont parfois associés au domaine funéraire. Ils n'ont pas la forme irrégulière des mégalithes et ont été l'objet d'un travail de sculpture, avec débitage, taille et parfois polissage de la surface. On remarque souvent que la partie inférieure, appelée embase, destinée à être sous terre, est brute de taille[9].

Une colonne itinéraire ?

Du fait de sa proximité avec deux ou trois routes antiques qui semblent attestées, on suppose couramment que la stèle ait pu être réutilisée à l'époque romaine comme borne milliaire.

Les voies romaines possibles

Ainsi en 1957, Pierre Merlat faisait l'hypothèse qu'elle puisse se trouver sur la voie romaine reliant Morlaix à Yffiniac (à l'est de Saint-Brieuc), puis à Corseul. Cette voie antique attestée par de nombreux vestiges archéologiques[10], suivrait le tracé de l'ancienne route nationale, aujourd'hui route départementale 712, longeant le nord du bourg de Plouigneau dans un axe légèrement Est-Sud-Est pour passer à 400 m au sud de la pierre[11].

Pour sa part, tout en restant prudent sur son appellation et sur sa fonction routière, la Carte archéologique de la Gaule envisage aussi de l'associer à une voie (très ?) secondaire, allant de Carhaix à la région du Plestin. On peut suivre cette voie au sud, en allant vers les lieux-dits Tachennic et Pen ar Park Hir[12], puis son tracé se confond avec la route départementale 37.

Dans le même sens, on signale aussi que des fragments de tegulae, des morceaux de briques longeant les voies romaines, ont été observés aux lieux-dits Prat Allan[13] (voie Morlaix-Corseul) et Langonaval[14] (voie Morlaix-Plestin) par Louis Le Guennec, au début du XXe siècle[15].

On notera toutefois que, parmi toutes ces voies, seule celle de Morlaix à Plestin-les-Grèves est reprise dans la Carte du réseau routier et des agglomérations principales et secondaires dans le Finistère du volume sur la Carte archéologique de la Gaule[16].

La base d'une croix ?

Certains notent que la pierre a peut-être été christianisée dans le passé et que, couchée à terre, elle aurait formé le socle d'une croix[17]. Effectivement, une incision rectangulaire pouvant en être la trace, est encore visible sur son flanc. Cette hypothèse n'est cependant pas reprise par la Carte archéologique de la Gaule.

Statut juridique et protection

La pierre a été inscrite au titre des monuments historiques, le , comme « borne milliaire[3] », puis redressée et posée sur un socle, en 1981, lors de l'établissement de la voie rapide[18].

Galerie photographique

Annexes

Notes

  1. Plusieurs graphies du hameau ont été relevées, comme Croaz ar Peulven, Kroaz ar Peulven ou anciennement Kras ar Peulven.
  2. Aucune des références bibliographiques consultées ne retiennent cette dernière appellation, à part la base Mérimée. Pour sa part, la commune semble avoir adopté le nom de Stèle de Kroas Ar Peulven.
  3. « Borne milliaire de Quillidien dite Croaz-ar-Peulven », notice no PA00090254, base Mérimée, ministère français de la Culture
  4. Louis Pape, dans La civitas des Osismes à l'époque gallo-romaine (1978), indique une base d'environ 2,40 m. Il s'agit sans doute d'une erreur.
  5. Particulièrement dans la base Mérimée, du ministère de la Culture.
  6. Cf. Pierre Merlat et Louis Pape, « Bornes milliaires osismiennes » (1956), p. 30-31 (à vérifier) ; repris dans Louis Pape, La civitas des Osismes à l'époque gallo-romaine (1978) (« Keranfors : à Croas ar Peulven »).
  7. Cf. Michelle Le Brozec et Marie-Yvanne Daire, Les stèles de l'âge du fer des Côtes-d'Armor et du Trégor finistérien (1998), p. 70, n° 4 : stèle de m de haut ; repris dans la Carte archéologique de la Gaule (2010), p. 326 : qui ajoute « couchée contre un talus, à l'entrée du chemin menant à la ferme de Quillidien » (cette localisation pourrait être erronée).
  8. Bien que certaines carte de l'IGN (au 1:32 000e et au 1:64 000e) indiquent à tort un Menhir à cet emplacement.
    Sur la terminologie des stèles, voir les observations de Pierre-Roland Giot dans « Informations scientifiques et notes brèves », dans Bulletin de la Société préhistorique de France, t. 55, n° 11-12, 1958, p. 707 (en ligne).
  9. Voir les propos de Dominique Frère à propos de la stèle de Rudesse.
  10. Voie considérée comme Grande rocade du Bas Empire par Louis Pape, dans La civitas des Osismes à l'époque gallo-romaine (1978), carte 17.
  11. On notera que le tracé de la voie romaine dite de Corseul n'est pas rectiligne entre Morlaix et Plouigneau, et est plutôt admis comme passant au sud de la route départementale 712. Cf. Carte archéologique de la Gaule (2010), p. 266.
  12. D'après la Carte archéologique de la Gaule (2010), des vestiges de la voie romaine sont visibles jusqu'aux environs du point suivant 48° 32′ 54″ N, 3° 41′ 05″ O, en partant de la pierre.
  13. Prat al Lan ou Prad Alan - aux environs du point suivant 48° 34′ 39″ N, 3° 47′ 03″ O, entre Plouigneau et Morlaix, sur la « voie romaine Morlaix-Saint-Brieuc »
  14. Langoneval ou Langonavel - aux environs du point suivant 48° 36′ 11″ N, 3° 44′ 38″ O, soit plus de km au nord-ouest de la pierre, sur une « voie romaine Morlaix-Coz Yaudet », via Plestin-les-Grèves. La Carte archéologique de la Gaule note sans certitude le tracé de cette voie, et ajoute son possible passage aux lieux-dits d'Ilien en Garlan (p. 204) et de Kermouster en Lanmeur (p. 243).
  15. Cf. Louis Pape, dans La civitas des Osismes à l'époque gallo-romaine (1978), p. A-148.
    Ces vestiges de tegulae ne sont pas correctement recensés dans la Carte archéologique de la Gaule (plusieurs erreurs ou omissions sont évidentes et incohérentes), peut-être est-ce dû au manque de précision ou de crédibilité des données de Louis Le Guennec.
  16. Cf. Carte archéologique de la Gaule (2010), p. 82, Fig 21.
  17. Cf. Yves-Pascal Castel, et al., Atlas des croix et calvaires du Finistère, Quimper, Société archéologique du Finistère, 1980, croix n° 2153 (OCLC 461854140) (en ligne).
  18. Cf. René Sanquer, « Chronique d'archéologie antique et médiévale » (1981), p. 67.

Bibliographie

 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Patrick Galliou, avec la collab. d'Eric Philippe, Le Finistère [Pré-inventaire archéologique], Paris, Académie des inscriptions et belles-lettres, 2010 (1re éd. 1989), p. 326 et fig. 314 (Carte archéologique de la Gaule, 29) (ISBN 978-2-87754-251-7) [= CAG 29-2, p. 326].
    Courte notice avec bibliographie, doublée d'une notice sur les voies romaines envisagées dans la localité.
  • Michelle Le Brozec et Marie-Yvanne Daire, et al., Les stèles de l'âge du fer des Côtes-d'Armor et du Trégor finistérien, Rennes, Institut culturel de Bretagne et Association des travaux du Laboratoire d'anthropologie-préhistoire, 1998, p. 70, no 2 (Patrimoine archéologique de Bretagne) (ISBN 2-86822-078-9).
    Notice de référence, à propos de la stèle de l'âge du fer.
  • Corpus Inscriptionum Latinarum [17]. Miliaria Imperii Romani. Pars secunda, Miliaria provinciarum Narbonensis Galliarum Germaniarum, éd. par Gerold Walser, Berlin, New York, Berlin-Brandenburgische Akademie der Wissenschaften, 1986, p. 153, inscr. 417 (ISBN 978-3-11-004592-5) (partiellement en ligne) [= CIL 17-02, 00417].
  • René Sanquer, « Chronique d'archéologie antique et médiévale (année 1981) », dans Bulletin de la Société archéologique du Finistère, 109, Quimper, Société archéologique du Finistère, 1981, p. 67 (ISSN 0249-6763).
    Redressement de la pierre.
  • Louis Pape, La civitas des Osismes à l'époque gallo-romaine [Thèse de doctorat : Lettres : Rennes 2 : 1976], Paris, Klincksieck, 1978, p. A-148 (Institut armoricain de recherches historiques de Rennes, 26) (OCLC 461698309).
    Courte notice sur la borne, dans le cadre d'une étude sur le contexte historique et archéologique de la cité romaine.
  • Pierre Merlat, « Informations : Circonscriptions des Antiquités historiques. Ve Circonscription », dans Gallia, 15-2, Paris, 1957, p. 190 (Plouigneau) (en ligne).
    Nouvelles données sur la borne, avec une bibliographie de la voie romaine Morlaix-Yffiniac (note 68).
  • Pierre Merlat et Louis Pape, « Bornes milliaires osismiennes », dans Mémoires de la Société d'histoire et d'archéologie de Bretagne, 36, Rennes, 1956, p. 30-31 et planche (en ligne).
    Notice de référence, à propos de la borne milliaire.
  • Louis Le Guennec, « Notes archéologiques sur l'arrondissement de Morlaix », conservées aux Archives départementales de Quimper, Série 34 J.
    Avec un recensement des fragments de tegulae dans la région.
Guide
  • Le Patrimoine des communes du Finistère, sous la dir. d'Anita Six, avec la collab. de Jérôme Le Bel, Charenton-le-Pont, Flohic éd., 1998, 2 vol. (Le patrimoine des communes de France, 29) (ISBN 2-8423-4039-6) (en ligne).
    Notice tout public.

Articles connexes

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