Suhmata

Suhmata (en arabe : سحماتا) était un village de Palestine mandataire, situé à 25 km au nord-est d’Acre. Il a été dépeuplé par la brigade Golani pendant la guerre israélo-arabe de 1948.

Suhmata
Suhmata en 1949
Nom local
(ar) سحماتا
Géographie
Pays
Sous-district
Superficie
17,06 km2
Altitude
600 m
Coordonnées
33° 00′ N, 35° 18′ E
Démographie
Population
1 130 hab. ()
Densité
66,3 hab./km2 ()
Fonctionnement
Statut
Localité disparue (d)
Histoire
Dissolution
Localisation sur la carte de la Palestine mandataire

Histoire ancienne et médiévale

Un réservoir d’eau souterrain et une grotte servant de cimetière datant apparemment de l’empire romain ont été trouvés sur le site[1],[2]. Une construction (rebâtie dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle par Dahir al-Umar), interprétée longtemps comme les restes d’un château de l’époque des croisades s’est avérée une église byzantine[3],[4]. Des fouilles, en 1932, ont révélé une inscription sur le sol en mosaïque de l'église datant de 555[5],[4],[6]. Suhmata avait probablement une population chrétienne au moins jusqu’à l’arrivée des sassanides en Palestine (614-627 avant notre ère)[7],[4].

Les croisés se référaient au village comme Samueth or Samahete[3]. En 1179, Baudoin IV confirma la vente par la vicomtesse Petronella d’Acre de maisons, de vignobles et de jardins dans Samueth, ainsi que de quelques maisons du Castellum Regis au comte Josselin III d'Édesse, l’oncle de Baudoin IV, pour la somme de 4 500 besants[8],[9]. Ronnie Ellenblum remarque cependant que l’existence d’un établissement franc à Suhmata à cette époque est peu probable[10].

Période ottomane

En 1875, à la fin de la domination ottomane sur la région, le géographe et explorateur français Victor Guérin visita « Soukhmata », notant que « ce village, divisé en deux quartiers distincts, occupe deux collines voisines l’une de l’autre et entre lesquelles s’étend un grand birkeh, en partie creusé dans le roc et en partie bâti. L’une de ces collines est couronnée par les restes d’une fortesse flanquée de tourelles et qui avait été construire avec de simples moellons ; elle renfermait plusieurs magasins souterrains, une mosquée et des salles diverses. La fondation en est attribuée à Dhaber el-A’mer. Aujourd’hui, elle est aux trois quarts démolie, et sur l’emplacement où elle s’élevait croissent des vignes et du tabac[11],[12] ». Il estime la population à 500 musulmans et deux familles chrétiennes.

En 1881, le Survey of Western Palestine du Fond d’exploration de la Palestine décrit Suhmata comme « un village, construit en pierre, contenant environ 400 musulmans, situé sur une crête et sur la pente d’une colline, entouré de figuiers, d’oliviers et de terres arabes ; il y plusieurs citernes et une source à proximité[13] ». Une école élémentaire pour garçons fut fondé dans le village en 1886[4]. Un recensement de 1887 environ indique quant à lui une population de 1500 habitants, dont 1400 musulmans et 100 chrétiens[14].

Palestine mandataire

Pendant la période du mandat britannique en Oalestine, une école d'agriculture fut établie à Suhmata. Il s'y trouvait aussi des écoles, une mosquée, une église, deux bassins d'irrigation alimentés par l'eau pluviale, qui restèrent opérationnels jusqu'en 1948[4].

Dans le recensement de 1922 mené par les autorités britanniques, Submata était doté d'une population de 632 : 589 musulmans (273 hommes et 316 femmes) et 43 chrétiens melkites (22 hommes et 21 femmes) [15]. La population s'était accrue lors du recensement suivant, en 1931, à 796 habitants, dont 752 musulmans et 44 chrétiens melkites, répartis dans 175 maisons[16].

Plus de 70% du village est rocheux et non cultivé, couvert de chênes et de poiriers sauvages. La partie agricole était plantée de blé, d'orge, de maïs, de tabac et de légumes. Le tabac de Suhmata était particulièrement réputé pour sa qualité[4].

Lorsqu'en 1945, des statistiques furent établies par les autorités britanniques, Suhmata avait une population de 1130 personnes : 1060 musulmans et 70 chrétiens[17]. La totalité des 17 056 dounams (soit 17,056 km2) de terres du village[18] sont attribuées aux musulmans dans ce recensement, sauf 7 484 dounams de terrains non cultivables publics et de voies de transports[17]. Aux céréales étaient alloués 3 290 dounams (soit 3,29 km2, tandis que 1 901 dounams (1,9 km2) étaient irrigués ou consacrés à des vergers[19] ; 135 dounams étaient occupés par des bâtiments et les maisons[20].

La guerre de 1948 et ses suites

Colons juifs à Suhmata, 1949

Pendant l'opération Hiram, le 30 octobre 1948, le 1er bataillon de la brigade Golani prit d'assaut le village ; les habitants s'enfuirent et le village fut laissé en ruine[21].

Un comité de dénomination établi par le Fonds national juif, qui opéra de 1948 à 1951 avant son incorporation dans un comité de dénomination gouvernemental du nouvel état israélien, renomma Suhmata « Hosen », qui signifie « Force ». Selon l'historien israélien Meron Benvenisti, le comité choisit ce nouveau nom symbolique après avoir déterminé qu'il n'existait pas de connexion établie entre le village de Suhmata et un établissement humain juif historique[22].

En 1992, l'historien palestinien Walid Khalidi, visitant le site, décrivit : « Le site est couvert de débris et de murs cassés des maisons en pierre écroulées, tous éparpillés parmi les oliviers qui poussent ici. Un château et un mur qui ont probablement été construits par les Croisés sont encore debout[23]. Le château est sur un endroit élevé sur le côté oriental du site, et le mur enclôt le quartier ouest. Les terres voisines sont en partie couvertes de forêts et en partie utilisées comme pâturages[24]. »

Les anciens habitant de Suhmata formèrent un comité de village en 1993, pour coordonner les actions des bénévoles. Le comité du village a conduit une enquête chiffrée sur la population déplacée de Suhmata et sa distribution en Israël[25]. Le village a aussi fait l'objet d'une pièce de théâtre, Sahmatah, par Hanna Eady et Ed Mast[26],[27].

Références

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de la page de Wikipédia en anglais intitulée « Suhmata » (voir la liste des auteurs).

  1. Lerer 2008.
  2. Lerer 2009.
  3. Pringle 1997, p. 118.
  4. Khalidi 1992, p. 29.
  5. Makhouly et Avi-Yonah 1933, p. 92.
  6. Dauphin 1998, p. 636.
  7. Makhul 1977, p. 134.
  8. Strehlke 1869, p. 11-12, No. 11.
  9. Röhricht 1893, p. 156, No. 587.
  10. Ellenblum 2003, p. 45, note #10.
  11. Guérin 1880, p. 74-75.
  12. Conder et Kitchener 1881.
  13. Conder et Kitchener 1881, SWP I, p.149.
  14. Schumacher 1888, p. 191.
  15. Barron 1923, Table XI, Sub-district of Acre, p.36 et Table XVI, p. 50.
  16. Mills 1932, p. 108.
  17. Statistiques de 1945, p. 5.
  18. Hadawi 1970, p. 41.
  19. Hadawi 1970, p. 81.
  20. Hadawi 1970, p. 131.
  21. Mansour 2004, p. 220.
  22. Benvenisti 2000, p. 34-35.
  23. Les constructions semblent maintenant dater de l'époque byzantine, voir Dauphin 1998.
  24. Khalidi 1992, p. 30.
  25. Masalha et Said 2005, p. 98.
  26. (en) Edward Mast, « Sahmatah » (version du 13 février 2006 sur l'Internet Archive), sur Americans for Middle East Understanding,
  27. (en) « Hanna Eady, Actor and Playwriter », sur IMEU (Institute for Middle East Understanding) (consulté le ).

Bibliographie

  • (en) Department of Statistics, Village Statistics, April, 1945, Government of Palestine, (lire en ligne).
  • (en) John Bernard Barron, Palestine : Report and General Abstracts of the Census of 1922, taken on the 23rd of Octobre, 1922, Jérusalem, Greek Convent Press, (lire en ligne), Table XI, Sub-district of Acre, p. 36.
  • (en) Meron Benveniśtî et Maxine Kaufman-Lacusta (trad.), Sacred landscape : the buried history of the Holy Land since 1948, Berkeley, University of California Press, , 376 p. (ISBN 978-0-520-23422-2, lire en ligne).
  • (en) Claude Reignier Conder et Horatio Herbert Kitchener, The Survey of Western Palestine : Memoirs of the Topography, Orography, Hydrography, and Archaeology, Londres, Committee of the Palestine Exploration Fund, (lire en ligne).
  • Claudine Dauphin, La Palestine byzantine, Peuplement et Populations, vol. III : Catalogue, Oxford, Archeopress, coll. « BAR International Series » (no 726), (ISBN 0-86054-905-4).
  • (en) Ronnie Ellenblum, Frankish Rural Settlement in the Latin Kingdom of Jerusalem, Cambridge University Press, , 344 p. (ISBN 978-0-521-52187-1, lire en ligne).
  • Victor Guérin, Description Géographique Historique et Archéologique de la Palestine, vol. 3: Galilee, pt. 1, Paris, Imprimerie Nationale, (lire en ligne).
  • (en) Sami Hadawi, Village Statistics of 1945 : A Classification of Land and Area ownership in Palestine, PLO Research Center, (lire en ligne).
  • (en) All that remains : the Palestinian villages occupied and depopulated by Israel in 1948, Washington, Institute for Palestine Studies, , 636 p. (ISBN 0-88728-224-5, lire en ligne).
  • (en) Yoav Lerer, « Zuri’el », sur Hadashot Arkheologiyot – Excavations and Surveys in Israel, .
  • (en) Yoav Lerer, « Suhmata, Survey Final Report », sur Hadashot Arkheologiyot – Excavations and Surveys in Israel, .
  • (en) Atallah Mansour, Narrow Gate Churches : The Christian Presence in the Holy Land Under Muslim and Jewish Rule, Hope Publishing House, , 327 p. (ISBN 978-1-932717-02-0, lire en ligne).
  • (en) Nur Masalha (ed.) et Edward W. Said, Catastrophe Remembered : Palestine, Israel and the Internal Refugees, Zed Books, , 300 p. (ISBN 978-1-84277-623-0, lire en ligne).
  • (en) Eric Mills, Census of Palestine 1931 : Population of Towns, Villages and Administrative Areas, Jérusalem, Greek Convent and Goldberg Presses, (lire en ligne).
  • (en) Benny Morris, The Birth of the Palestinian Refugee Problem Revisited, Cambridge University Press, , 640 p. (ISBN 978-0-521-00967-6, lire en ligne).
  • (en) Denys Pringle, Secular buildings in the Crusader Kingdom of Jerusalem : an archaeological Gazetter, Cambridge (GB), Cambridge University Press, , 159 p. (ISBN 0-521-46010-7).
  • (en) Edward Robinson et Eli Smith, Later Biblical Researches in Palestine and adjacent regions : A Journal of Travels in the year 1852, Londres, John Murray, (lire en ligne).
  • (la) Reinhold Röhricht, (RRH) Regesta Regni Hierosolymitani (MXCVII-MCCXCI), Innsbrück, Libraria Academica Wagneriana, (lire en ligne).
  • (en) Gottlieb Schumacher, « Population list of the Liwa of Akka », Quarterly statement - Palestine Exploration Fund, , p. 169-191 (lire en ligne).
  • (la) Ernst Strehlke (éd.), Tabulae Ordinis Theutonici ex tabularii regii Berolinensis codice potissimum, Berlin, Weidmanns, (lire en ligne).

Liens externes

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